[6,20] Καίτοι ταῦτα, καὶ εἰ μικρά τις ἡγεῖται, μεγάλ', ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι,
δείγματα τῆς ἐκείνου γνώμης καὶ κακοδαιμονίας ἐστὶ τοῖς εὖ φρονοῦσιν.
Ἀλλ', οἶμαι, νῦν μὲν ἐπισκοτεῖ τούτοις τὸ κατορθοῦν· αἱ γὰρ εὐπραξίαι
δειναὶ συγκρύψαι τὰ τοιαῦτ' ὀνείδη· εἰ δέ τι πταίσει, τότ' ἀκριβῶς αὐτοῦ
ταῦτ' ἐξετασθήσεται. Δοκεῖ δ' ἔμοιγ', ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, δείξειν οὐκ εἰς
μακράν, ἂν οἵ τε θεοὶ θέλωσι καὶ ὑμεῖς βούλησθε. (21) Ὥσπερ γὰρ ἐν τοῖς
σώμασιν, τέως μὲν ἂν ἐρρωμένος ᾖ τις, οὐδὲν ἐπαισθάνεται, ἐπὰν δ'
ἀρρώστημά τι συμβῇ, πάντα κινεῖται, κἂν ῥῆγμα κἂν στρέμμα κἂν ἄλλο τι τῶν
ὑπαρχόντων σαθρὸν ᾖ, οὕτω καὶ τῶν πόλεων καὶ τῶν τυράννων, ἕως μὲν ἂν ἔξω
πολεμῶσιν, ἀφανῆ τὰ κακὰ τοῖς πολλοῖς ἐστιν, ἐπειδὰν δ' ὅμορος πόλεμος
συμπλακῇ, πάντ' ἐποίησεν ἔκδηλα.
(22) Εἰ δέ τις ὑμῶν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, τὸν Φίλιππον εὐτυχοῦνθ' ὁρῶν ταύτῃ
φοβερὸν προσπολεμῆσαι νομίζει, σώφρονος μὲν ἀνθρώπου λογισμῷ χρῆται·
μεγάλη γὰρ ῥοπή, μᾶλλον δὲ τὸ ὅλον ἡ τύχη παρὰ πάντ' ἐστὶ τὰ τῶν ἀνθρώπων
πράγματα· οὐ μὴν ἀλλ' ἔγωγε, εἴ τις αἵρεσίν μοι δοίη, τὴν τῆς ἡμετέρας
πόλεως τύχην ἂν ἑλοίμην, ἐθελόντων ἃ προσήκει ποιεῖν ὑμῶν αὐτῶν καὶ κατὰ
μικρόν, ἢ τὴν ἐκείνου· πολὺ γὰρ πλείους ἀφορμὰς εἰς τὸ τὴν παρὰ τῶν θεῶν
εὔνοιαν ἔχειν ὁρῶ ὑμῖν ἐνούσας ἢ 'κείνῳ. (23) Ἀλλ', οἶμαι, καθήμεθ' οὐδὲν
ποιοῦντες· οὐκ ἔνι δ' αὐτὸν ἀργοῦντ' οὐδὲ τοῖς φίλοις ἐπιτάττειν ὑπὲρ
αὑτοῦ τι ποιεῖν, μή τί γε δὴ τοῖς θεοῖς. Οὐ δὴ θαυμαστόν ἐστιν, εἰ
στρατευόμενος καὶ πονῶν ἐκεῖνος αὐτὸς καὶ παρὼν ἐφ' ἅπασι καὶ μήτε καιρὸν
μήθ' ὥραν παραλείπων ἡμῶν μελλόντων καὶ ψηφιζομένων καὶ πυνθανομένων
περιγίγνεται. Οὐδὲ θαυμάζω τοῦτ' ἐγώ· τοὐναντίον γὰρ ἂν ἦν θαυμαστόν, εἰ
μηδὲν ποιοῦντες ἡμεῖς ὧν τοῖς πολεμοῦσι προσήκει τοῦ πάντα ποιοῦντος
περιῆμεν. (24) Ἀλλ' ἐκεῖνο θαυμάζω, εἰ Λακεδαιμονίοις μέν ποτ', ὦ ἄνδρες
Ἀθηναῖοι, ὑπὲρ τῶν Ἑλληνικῶν δικαίων ἀντήρατε, καὶ πόλλ' ἰδίᾳ πλεονεκτῆσαι
πολλάκις ὑμῖν ἐξὸν οὐκ ἠθελήσατε, ἀλλ' ἵν' οἱ ἄλλοι τύχωσι τῶν δικαίων, τὰ
ὑμέτερ' αὐτῶν ἀνηλίσκετ' εἰσφέροντες καὶ προυκινδυνεύετε στρατευόμενοι,
νυνὶ δ' ὀκνεῖτ' ἐξιέναι καὶ μέλλετ' εἰσφέρειν ὑπὲρ τῶν ὑμετέρων αὐτῶν
κτημάτων, καὶ τοὺς μὲν ἄλλους σεσώκατε πολλάκις πάντας καὶ καθ' ἕν' αὐτῶν
ἐν μέρει, τὰ δ' ὑμέτερ' αὐτῶν ἀπολωλεκότες κάθησθε. (25) Ταῦτα θαυμάζω,
κἄτι πρὸς τούτοις, εἰ μηδεὶς ὑμῶν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, δύναται λογίσασθαι
πόσον πολεμεῖτε χρόνον Φιλίππῳ, καὶ τί ποιούντων ὑμῶν ὁ χρόνος διελήλυθεν
οὗτος. Ἴστε γὰρ δήπου τοῦθ', ὅτι μελλόντων αὐτῶν, ἑτέρους τινὰς ἐλπιζόντων
πράξειν, αἰτιωμένων ἀλλήλους, κρινόντων, πάλιν ἐλπιζόντων, σχεδὸν ταὔθ'
ἅπερ νυνὶ ποιούντων, ἅπας ὁ χρόνος διελήλυθεν. (26) Εἶθ' οὕτως ἀγνωμόνως
ἔχετ', ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, ὥστε δι' ὧν ἐκ χρηστῶν φαῦλα τὰ πράγματα τῆς
πόλεως γέγονεν, διὰ τούτων ἐλπίζετε τῶν αὐτῶν πράξεων ἐκ φαύλων αὐτὰ
χρηστὰ γενήσεσθαι; Ἀλλ' οὔτ' εὔλογον οὔτ' ἔχον ἐστὶ φύσιν τοῦτό γε· πολὺ
γὰρ ῥᾷον ἔχοντας φυλάττειν ἢ κτήσασθαι πάντα πέφυκεν. Νῦν δ' ὅ τι μὲν
φυλάξομεν, οὐδέν ἐσθ' ὑπὸ τοῦ πολέμου λοιπὸν τῶν πρότερον, κτήσασθαι δὲ
δεῖ. Αὐτῶν οὖν ἡμῶν ἔργον τοῦτ' ἤδη.
(27) Φημὶ δὴ δεῖν εἰσφέρειν χρήματα, αὐτοὺς ἐξιέναι προθύμως, μηδέν'
αἰτιᾶσθαι πρὶν ἂν τῶν πραγμάτων κρατήσητε, τηνικαῦτα δ' ἀπ' αὐτῶν τῶν
ἔργων κρίναντας τοὺς μὲν ἀξίους ἐπαίνου τιμᾶν, τοὺς δ' ἀδικοῦντας
κολάζειν, τὰς προφάσεις δ' ἀφελεῖν καὶ τὰ καθ' ὑμᾶς ἐλλείμματα· οὐ γὰρ
ἔστι πικρῶς ἐξετάσαι τί πέπρακται τοῖς ἄλλοις, ἂν μὴ παρ' ὑμῶν αὐτῶν
πρῶτον ὑπάρξῃ τὰ δέοντα.
(28) Τίνος γὰρ εἵνεκ', ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, νομίζετε τοῦτον μὲν φεύγειν τὸν
πόλεμον πάντας ὅσους ἂν ἐκπέμψητε στρατηγούς, ἰδίους δ' εὑρίσκειν
πολέμους, εἰ δεῖ τι τῶν ὄντων καὶ περὶ τῶν στρατηγῶν εἰπεῖν; Ὅτι ἐνταῦθα
μέν ἐστι τἆθλ' ὑπὲρ ὧν ἐστιν ὁ πόλεμος ὑμέτερα (Ἀμφίπολίς γ' ἂν ληφθῇ,
παραχρῆμ' ὑμεῖς κομιεῖσθε), οἱ δὲ κίνδυνοι τῶν ἐφεστηκότων ἴδιοι, μισθὸς
δ' οὐκ ἔστιν· ἐκεῖ δὲ κίνδυνοι μὲν ἐλάττους, τὰ δὲ λήμματα τῶν ἐφεστηκότων
καὶ τῶν στρατιωτῶν, Λάμψακος, Σίγειον, τὰ πλοῖ' ἃ συλῶσιν. Ἐπ' οὖν τὸ
λυσιτελοῦν αὑτοῖς ἕκαστοι χωροῦσιν. (29) Ὑμεῖς δ', ὅταν μὲν εἰς τὰ
πράγματ' ἀποβλέψητε φαύλως ἔχοντα, τοὺς ἐφεστηκότας κρίνετε, ὅταν δὲ
δόντες λόγον τὰς ἀνάγκας ἀκούσητε ταύτας, ἀφίετε. Περίεστι τοίνυν ὑμῖν
ἀλλήλοις ἐρίζειν καὶ διεστάναι, τοῖς μὲν ταῦτα πεπεισμένοις, τοῖς δὲ
ταῦτα, τὰ κοινὰ δ' ἔχειν φαύλως. Πρότερον μὲν γάρ, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, κατὰ
συμμορίας εἰσεφέρετε, νυνὶ δὲ πολιτεύεσθε κατὰ συμμορίας. Ῥήτωρ ἡγεμὼν
ἑκατέρων, καὶ στρατηγὸς ὑπὸ τούτῳ καὶ οἱ βοησόμενοι, οἱ τριακόσιοι· οἱ δ'
ἄλλοι προσνενέμησθε οἱ μὲν ὡς τούτους, οἱ δ' ὡς ἐκείνους.
| [6,20] Ces objets paraîtront peut-être peu importants aux
yeux de quelques hommes frivoles ; mais au tribunal
des gens sensés, ils prouveront, ô Athéniens ! toute la
folie et toute la corruption de Philippe. Vous voyez
maintenant ses vices couverts de l'éclat de ses succès
(c'est le propre de la prospérité de jeter un voile sur tout
ce qu'on a intérêt de cacher) : mais au moindre revers
qu'il éprouvera, vous verrez paraître au grand jour
toutes ses infamies. Et ce moment n'est pas loin si les
dieux le veulent, et si vous ne vous y refusez pas. (21)
Comme dans le corps humain, tant que les forces et la
santé se soutiennent, les anciennes fractures et les maux
des parties affectées ne se font pas sentir ; mais à la
première maladie qui survient tous les vices assoupis
jusqu'alors se réveillent et s'annoncent par des douleurs
: de même dans les monarchies et dans les autres états,
tout paraît sain et calme tant que la guerre est éloignée,
mais au moment qu'elle approche des frontières, le
désordre se manifeste et tous les maux se découvrent.
(22) En voyant Philippe prospérer, on a raison, j'en
conviens, de le juger en ennemi redoutable ; car la
fortune a une grande influence dans les choses d'ici bas.
Cependant si j'avais à choisir de votre fortune et de la
sienne, et que je vous visse déterminés à faire
seulement une partie de ce que vous devez, je
n'hésiterais point, je prendrais la vôtre, assuré que le
secours du ciel vous est plus dû qu'à lui. (23) Mais
vous vous reposez sans rien faire, et sans songer que
l'indolent ne peut prétendre à l'affection et au secours
des hommes, encore moins à la faveur et à la protection
des dieux. Ne soyons donc pas surpris qu'un monarque,
marchant à la tête de ses troupes, partageant leurs
fatigues, se trouvant partout en personne, ne craignant
aucune saison, ne négligeant aucune occasion,
l'emporte sur nous qui temporisons, qui délibérons, qui
perdons, à demander ce qui se passe, le temps où nous
devrions agir. Quant â moi, je ne vois rien là qui
m'étonne; au contraire, je trouverais bien plus étonnant
que des hommes qui ne font rien de ce qu'ils devraient,
eussent l'avantage sur un prince qui se porte à tout avec
ardeur. (24) Ce qui m'étonne véritablement, ô
Athéniens c'est que, par le passé, n'écoutant que votre
courage et votre générosité, vous ayez, pour le seul bien
de la Grèce, déclaré la guerre à Lacédémone, que
vous ayez sacrifié des avantages certains, prodigué vos
finances, exposé vos personnes pour l'intérêt d'autrui, et
que présentement qu'il s'agit de vos intérêts propres,
vous répugniez à vous mettre en campagne, vous
refusiez de contribuer ; enfin, qu'après avoir sauvé tant
de fois la Grèce en général et chacun de ses peuples en
particulier, vous restiez tranquilles lorsqu'on vous
dépouille vous-mêmes : c'est là ce qui m'étonne. (25) Et
ce qui m'étonne encore, c'est qu'aucun de vous ne se
demande depuis combien de temps vous êtes en guerre
avec Philippe, et à quoi vous avez employé ce temps.
Vous l'avez employé à différer au lieu d'agir, à espérer
que d'autres agiraient pour vous, â vous faire
mutuellement des reproches, à vous citer en jugement
les uns les autres, à vous repaître de nouvelles
espérances, à faire à peu près ce que vous faites
aujourd'hui. (26) Et après cela vous croirez qu'une
conduite, qui, de bonnes qu'elles étaient, a rendu vos
affaires mauvaises, les rendra bonnes de mauvaises
qu'elles sont ! Un tel sentiment n'est pas raisonnable. La
nature a voulu qu'il fût plus facile de conserver que
d'acquérir : or la guerre qui vous a enlevé votre bien, ne
vous laisse que la ressource de le reprendre; et cet
ouvrage ne regarde que vous.
(27) Je dis donc que vous devez contribuer de vos
fortunes, servir vous-mêmes avec ardeur poursuivre
aucune accusation avant que vous ayez pris en main vos
affaires. Alors, jugeant chacun d'après ses oeuvres,
punissez qui sera en faute, récompensez qui le mérite ;
et pour ce qui vous regarde, ne fournissez aucun sujet,
pas même de prétexte, de se plaindre de vous : car pour
avoir droit d'être sévères envers les autres, il faut
n'avoir rien à se reprocher.
(28) D'où vient, je vous prie, Athéniens, que les
hommes mis à la tête de vos troupes abandonnent les
guerres dont vous les chargez, et s'en vont combattre
ailleurs ? c'est, puisqu'il faut vous le dire, c'est que dans
les guerres de la république, le prix de la victoire vous
est réservé tout entier; par exemple, si on prend
Amphipolis, c'est pour vous seuls que cette ville est
prise, les généraux n'ont pour eux que les dangers, sans
avoir même de quoi payer le soldat. Au lieu que dans
les expéditions étrangères, le péril est moins grand et le
butin se partage : témoin Lampsaque, Sigée et les
vaisseaux enlevés au profit des chefs et de leurs
troupes; or chacun, comme il est naturel, va du côté qui
lui présente les plus grands avantages. (29) Quant â
vous si, jetant les yeux sur vos affaires, vous voyez
qu'elles ont une mauvaise issue, vous vous plaignez de
ceux qui étaient chargés de les faire réussir; on les
accuse, ils se justifient, et sur l'exposé de leurs raisons
vous les renvoyez absous. Après quoi on se dispute, on
se divise, chacun prend parti, et tout va mal. Autrefois,
Athéniens, c'était par classe que l'on contribuait,
aujourd'hui c'est par classe que l'on délibère.
Chaque classe a son orateur, chaque orateur a son
général ; les trois cents se tiennent comme en réserve
pour appuyer un des deux partis; et vous, comme le
corps d'armée vous vous rangez sous divers chefs et
combattez pour les uns ou pour les autres.
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