[3,20] ὁρᾶτ´ οὖν, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι,
ταῦθ´ οὕτως, ὅπως καὶ τὰ πράγματ´ ἐνδέχεται καὶ
δυνήσεσθ´ ἐξιέναι καὶ μισθὸν ἕξετε. οὔ τοι σωφρόνων οὐδὲ
γενναίων ἐστὶν ἀνθρώπων, ἐλλείποντάς τι δι´ ἔνδειαν χρημάτων
τῶν τοῦ πολέμου εὐχερῶς τὰ τοιαῦτ´ ὀνείδη φέρειν,
οὐδ´ ἐπὶ μὲν Κορινθίους καὶ Μεγαρέας ἁρπάσαντας τὰ
ὅπλα πορεύεσθαι, Φίλιππον δ´ ἐᾶν πόλεις Ἑλληνίδας
ἀνδραποδίζεσθαι δι´ ἀπορίαν ἐφοδίων τοῖς στρατευομένοις.
Καὶ ταῦτ´ οὐχ ἵν´ ἀπέχθωμαί τισιν ὑμῶν, τὴν ἄλλως
προῄρημαι λέγειν· οὐ γὰρ οὕτως ἄφρων οὐδ´ ἀτυχής εἰμ´
ἐγὼ ὥστ´ ἀπεχθάνεσθαι βούλεσθαι μηδὲν ὠφελεῖν νομίζων·
ἀλλὰ δικαίου πολίτου κρίνω τὴν τῶν πραγμάτων σωτηρίαν
ἀντὶ τῆς ἐν τῷ λέγειν χάριτος αἱρεῖσθαι. καὶ γὰρ τοὺς ἐπὶ
τῶν προγόνων ἡμῶν λέγοντας ἀκούω, ὥσπερ ἴσως καὶ ὑμεῖς,
οὓς ἐπαινοῦσι μὲν οἱ παριόντες ἅπαντες, μιμοῦνται δ´ οὐ
πάνυ, τούτῳ τῷ ἔθει καὶ τῷ τρόπῳ τῆς πολιτείας χρῆσθαι,
τὸν Ἀριστείδην ἐκεῖνον, τὸν Νικίαν, τὸν ὁμώνυμον ἐμαυτῷ,
τὸν Περικλέα. ἐξ οὗ δ´ οἱ διερωτῶντες ὑμᾶς οὗτοι πεφήνασι
ῥήτορες ‘τί βούλεσθε; τί γράψω; τί ὑμῖν χαρίσωμαι;’
προπέποται τῆς παραυτίκα χάριτος τὰ τῆς πόλεως
πράγματα, καὶ τοιαυτὶ συμβαίνει, καὶ τὰ μὲν τούτων πάντα
καλῶς ἔχει, τὰ δ´ ὑμέτερ´ αἰσχρῶς. καίτοι σκέψασθ´, ὦ
ἄνδρες Ἀθηναῖοι, ἅ τις ἂν κεφάλαι´ εἰπεῖν ἔχοι τῶν τ´ ἐπὶ
τῶν προγόνων ἔργων καὶ τῶν ἐφ´ ὑμῶν. ἔσται δὲ βραχὺς
καὶ γνώριμος ὑμῖν ὁ λόγος· οὐ γὰρ ἀλλοτρίοις ὑμῖν χρωμένοις παραδείγμασιν, ἀλλ´ οἰκείοις, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι,
εὐδαίμοσιν ἔξεστι γενέσθαι. ἐκεῖνοι τοίνυν, οἷς οὐκ ἐχαρίζονθ´
οἱ λέγοντες οὐδ´ ἐφίλουν αὐτοὺς ὥσπερ ὑμᾶς οὗτοι νῦν,
πέντε μὲν καὶ τετταράκοντ´ ἔτη τῶν Ἑλλήνων ἦρξαν ἑκόντων,
πλείω δ´ ἢ μύρια τάλαντ´ εἰς τὴν ἀκρόπολιν ἀνήγαγον,
ὑπήκουε δ´ ὁ ταύτην τὴν χώραν ἔχων αὐτοῖς βασιλεύς, ὥσπερ
ἐστὶ προσῆκον βάρβαρον Ἕλλησι, πολλὰ δὲ καὶ καλὰ καὶ
πεζῇ καὶ ναυμαχοῦντες ἔστησαν τρόπαι´ αὐτοὶ στρατευόμενοι,
μόνοι δ´ ἀνθρώπων κρείττω τὴν ἐπὶ τοῖς ἔργοις δόξαν τῶν
φθονούντων κατέλιπον. ἐπὶ μὲν δὴ τῶν Ἑλληνικῶν ἦσαν
τοιοῦτοι· ἐν δὲ τοῖς κατὰ τὴν πόλιν αὐτὴν θεάσασθ´ ὁποῖοι,
ἔν τε τοῖς κοινοῖς κἀν τοῖς ἰδίοις. δημοσίᾳ μὲν τοίνυν
οἰκοδομήματα καὶ κάλλη τοιαῦτα καὶ τοσαῦτα κατεσκεύασαν
ἡμῖν ἱερῶν καὶ τῶν ἐν τούτοις ἀναθημάτων, ὥστε μηδενὶ
τῶν ἐπιγιγνομένων ὑπερβολὴν λελεῖφθαι· ἰδίᾳ δ´ οὕτω
σώφρονες ἦσαν καὶ σφόδρ´ ἐν τῷ τῆς πολιτείας ἤθει μένοντες, ὥστε
τὴν Ἀριστείδου καὶ τὴν Μιλτιάδου καὶ τῶν τότε λαμπρῶν
οἰκίαν εἴ τις ἄρ´ οἶδεν ὑμῶν ὁποία ποτ´ ἐστίν, ὁρᾷ τῆς τοῦ
γείτονος οὐδὲν σεμνοτέραν οὖσαν· οὐ γὰρ εἰς περιουσίαν
ἐπράττετ´ αὐτοῖς τὰ τῆς πόλεως, ἀλλὰ τὸ κοινὸν αὔξειν
ἕκαστος ᾤετο δεῖν. ἐκ δὲ τοῦ τὰ μὲν Ἑλληνικὰ πιστῶς, τὰ
δὲ πρὸς τοὺς θεοὺς εὐσεβῶς, τὰ δ´ ἐν αὑτοῖς ἴσως διοικεῖν
μεγάλην εἰκότως ἐκτήσαντ´ εὐδαιμονίαν. τότε μὲν δὴ τοῦτον
τὸν τρόπον εἶχε τὰ πράγματ´ ἐκείνοις, χρωμένοις οἷς
εἶπον προστάταις· νυνὶ δὲ πῶς ἡμῖν ὑπὸ τῶν χρηστῶν τούτων
τὰ πράγματ´ ἔχει; ἆρά γ´ ὁμοίως ἢ παραπλησίως; οἷς
—τὰ μὲν ἄλλα σιωπῶ, πόλλ´ ἂν ἔχων εἰπεῖν, ἀλλ´ ὅσης
ἅπαντες ὁρᾶτ´ ἐρημίας ἐπειλημμένοι, {καὶ} Λακεδαιμονίων
μὲν ἀπολωλότων, Θηβαίων δ´ ἀσχόλων ὄντων, τῶν δ´ ἄλλων
οὐδενὸς ὄντος ἀξιόχρεω περὶ τῶν πρωτείων ἡμῖν ἀντιτάξασθαι,
ἐξὸν δ´ ἡμῖν καὶ τὰ ἡμέτερ´ αὐτῶν ἀσφαλῶς ἔχειν
καὶ τὰ τῶν ἄλλων δίκαια βραβεύειν, ἀπεστερήμεθα μὲν
χώρας οἰκείας, πλείω δ´ ἢ χίλια καὶ πεντακόσια τάλαντ´
ἀνηλώκαμεν εἰς οὐδὲν δέον, οὓς δ´ ἐν τῷ πολέμῳ συμμάχους
ἐκτησάμεθα, εἰρήνης οὔσης ἀπολωλέκασιν οὗτοι, ἐχθρὸν δ´
ἐφ´ ἡμᾶς αὐτοὺς τηλικοῦτον ἠσκήκαμεν. ἢ φρασάτω τις
ἐμοὶ παρελθών, πόθεν ἄλλοθεν ἰσχυρὸς γέγονεν ἢ παρ´ ἡμῶν
αὐτῶν Φίλιππος. ἀλλ´, ὦ τᾶν, εἰ ταῦτα φαύλως, τά γ´ ἐν
αὐτῇ τῇ πόλει νῦν ἄμεινον ἔχει. καὶ τί ἂν εἰπεῖν τις ἔχοι;
τὰς ἐπάλξεις ἃς κονιῶμεν, καὶ τὰς ὁδοὺς ἃς ἐπισκευάζομεν,
καὶ κρήνας, καὶ λήρους; ἀποβλέψατε δὴ πρὸς τοὺς ταῦτα
πολιτευομένους, ὧν οἱ μὲν ἐκ πτωχῶν πλούσιοι γεγόνασιν,
οἱ δ´ ἐξ ἀδόξων ἔντιμοι, ἔνιοι δὲ τὰς ἰδίας οἰκίας τῶν δημοσίων οἰκοδομημάτων σεμνοτέρας εἰσὶ κατεσκευασμένοι, ὅσῳ
δὲ τὰ τῆς πόλεως ἐλάττω γέγονεν, τοσούτῳ τὰ τούτων ηὔξηται.
| [3,20] Considérez donc cette question,
Athéniens, dans sa réalité pratique, et vous pourrez assurer l'entrée en
campagne, et la solde. Des hommes sages et de sentiments généreux ne doivent
pas, faute d'argent, renoncer à la guerre, et encourir à la légère une telle
honte. Eh ! quoi, s'agit-il des Corinthiens ou des Mégariens, vous courez aux
armes, vous marchez contre eux ; et vous laisseriez Philippe réduire en
esclavage les habitants de cités grecques, parce que vous manqueriez de fonds
pour mettre en route vos soldats !
Si je me suis décidé à parler ainsi, ce n'est pas que je vise inconsidérément à
m'attirer la haine de quelques-uns d'entre vous ; je ne suis ni assez insensé,
ni assez infortuné pour vouloir me rendre odieux, si je ne croyais être utile ;
mais je juge que c'est le fait d'un citoyen honnête de faire passer le salut
public avant l'agrément du discours, et, au temps de nos ancêtres, d'après ce
que la tradition nous apprend, à vous comme à moi, tel était le langage
habituel, le système politique des orateurs que ceux d'aujourd'hui louent sans
les imiter, du noble Aristide, de Nicias, de mon homonyme, de Périclès ; mais
depuis qu'on voit nos orateurs vous demander : " Que désirez-vous ? Que
proposerai-je ? En quoi puis-je vous être agréable ? " ils sacrifient à la
faveur du moment les intérêts de la ville, et vous voyez ce qui arrive : profit
pour eux, honte pour vous !
Comparons, Athéniens, par leurs grandes lignes, la façon d'agir de nos aïeux, et
la nôtre. Je serai bref, et ne vous dirai rien que vous ne sachiez ; je ne fais
pas appel à des exemples étrangers ; c'est en suivant vos exemples nationaux que
vous pouvez retrouver le bonheur. Ces hommes, auxquels leurs orateurs ne
cherchaient pas à plaire, qu'ils ne chérissaient pas comme on vous chérit
maintenant, exercèrent pendant quarante-cinq ans une hégémonie acceptée par les
Grecs, ils amassèrent plus de dix mille talents dans l'Acropole ; le roi de
Macédoine leur était soumis comme un barbare doit l'être à des Grecs ; dans
les expéditions de terre et de mer, où ils servaient de leurs personnes, ils
dressèrent de nombreux et magnifiques trophées ; à eux seuls leurs actes ont
assuré une gloire qui a déjoué l'envie. Tels ils se sont montrés à la patrie
grecque ; mais, dans la ville même, voyez quelle a été leur conduite publique et
privée ! Au nom de l'État, que de temples ils ont construits, si beaux et ornés
à l'intérieur, de tels chefs-d'oeuvre que l'âge suivant ne les a pu surpasser.
Dans la vie privée, ils étaient à ce point modestes, et attachés aux habitudes
démocratiques, que, si l'un de vous s'arrête devant la maison qui abrita
Aristide, ou Miltiade, ou quelque autre grand citoyen de cette époque, il ne la
trouve pas moins simple que la maison voisine ; car ce n'était pas pour
s'enrichir qu'ils administraient les affaires ; chacun ne songeait qu'à
accroître la fortune publique. Loyaux envers les Grecs, pieux à l'égard des
dieux, n'admettant que des lois égales pour tous, ils ne pouvaient manquer
d'assurer à la ville la plus grande prospérité. Voilà ce qu'était Athènes sous
de tels chefs ; mais aujourd'hui, avec nos vertueux magistrats, en est-il de
même, ou à peu près ? J'en aurais long à dire ; mais je ne considère qu'un
point. Partout vous aviez le champ libre devant vous : la puissance de Sparte
était brisée, Thèbes, occupée ailleurs ; des autres cités, aucune n'était
capable de vous disputer le premier rang ; il nous était facile de conserver nos
possessions en toute sécurité, et de régler en arbitres les droits des autres
Grecs. Qu'est-il arrivé ? Nous avons été dépouillés de notre domaine propre ;
nous avons dépensé, sans nul profit, plus de quinze cents talents ; les alliés
que nous avions acquis pendant la guerre, nous les avons perdus en pleine paix ;
enfin nous avons armé contre nous-mêmes un redoutable ennemi. Qu'on me dise, en effet, si ce n'est pas par nous seuls que Philippe a grandi ? Mais, si tout va
mal au dehors, sans doute, à l'intérieur, nous faisons mieux. Que pourrait-on
citer ? Des créneaux recrépis, des routes réparées, des fontaines, pures
bagatelles ! Et voyez les hommes publics qui font exécuter ces travaux ; de
pauvres ils sont devenus riches, ou d'obscurs, honorés ; quelques-uns se sont
construit des demeures privées plus majestueuses que les édifices publics ; plus
la cité s'est abaissée, plus ils se sont élevés.
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