[4,4] Νὺξ ἐκείνη φροντίδων μεστὴ πάντας κατελάμβανε καὶ οὐδεὶς
ἐδύνατο καθεύδειν· Χαιρέας μὲν γὰρ ὠργίζετο, Πολύχαρμος δὲ
παρεμυθεῖτο, Μιθριδάτης δὲ ἔχαιρεν ἐλπίζων ὅτι καθάπερ ἐν τοῖς
ἀγῶσι τοῖς γυμνικοῖς ἔφεδρος μένων μεταξὺ Χαιρέου τε καὶ Διονυσίου
αὐτὸς ἀκονιτὶ τὸ ἆθλον Καλλιρόην ἀποίσεται. τῆς δ´ ὑστεραίας
προτεθείσης τῆς γνώμης ὁ μὲν Χαιρέας εὐθὺς ἠξίου βαδίζειν εἰς
Μίλητον καὶ Διονύσιον ἀπαιτεῖν τὴν γυναῖκα· μὴ γὰρ ἂν μηδὲ
Καλλιρόην ἐμμένειν ἰδοῦσαν αὐτόν· ὁ δὲ Μιθριδάτης "ἐμοῦ μὲν
ἕνεκα" φησὶν "ἄπιθι, βούλομαι γάρ σε μηδὲ μίαν ἡμέραν ἀπεζεῦχθαι
τῆς γυναικός· ὄφελον μηδὲ Σικελίας ἐξήλθετε, μηδὲ συνέβη τι
δεινὸν ἀμφοῖν· ἐπεὶ δὲ ἡ φιλόκαινος Τύχη δρᾶμα σκυθρωπὸν ὑμῖν
περιτέθεικε, βουλεύσασθαι δεῖ περὶ τῶν ἑξῆς φρονιμώτερον· νῦν
γὰρ σπεύδεις πάθει μᾶλλον ἢ λογισμῷ, μηδὲν τῶν μελλόντων
προορώμενος. μόνος καὶ ξένος εἰς πόλιν ἀπέρχῃ τὴν μεγίστην, καὶ
ἀνδρὸς πλουσίου καὶ πρωτεύοντος ἐν Ἰωνίᾳ θέλεις ἀποσπάσαι γυναῖκα
ἐξαιρέτως αὐτῷ συναφθεῖσαν; ποίᾳ δυνάμει πεποιθώς; μακρὰν
Ἑρμοκράτης σου καὶ Μιθριδάτης οἱ μόνοι σύμμαχοι, πενθῆσαι δυνάμενοί
σε μᾶλλον ἢ βοηθῆσαι. φοβοῦμαι καὶ τὴν τύχην τοῦ τόπου.
δεινὰ μὲν ἐκεῖ πέπονθας ἤδη· δόξει δέ σοι τὰ τότε φιλανθρωπότερα.
{τότε Μίλητος ἦν.} ἐδέθης μέν, ἀλλὰ ἔζησας· ἐπράθης, ἀλλὰ ἐμοί.
νῦν δέ, ἂν αἴσθηται Διονύσιός σε ἐπιβουλεύοντα τοῖς γάμοις αὐτοῦ,
τίς σε θεῶν δυνήσεται σῶσαι; παραδοθήσῃ γὰρ ἀντεραστῇ τυράννῳ,
καὶ τάχα μὲν οὐδὲ πιστευθήσῃ Χαιρέας εἶναι, κινδυνεύσεις δὲ μᾶλλον,
κἂν ἀληθῶς εἶναί σε νομίσῃ. σὺ μόνος ἀγνοεῖς τὴν φύσιν τοῦ
Ἔρωτος, ὅτι οὗτος ὁ θεὸς ἀπάταις χαίρει καὶ δόλοις; δοκεῖ δέ μοι
πρῶτον ἀποπειραθῆναί σε τῆς γυναικὸς διὰ γραμμάτων εἰ μέμνηταί
σου καὶ Διονύσιον θέλει καταλιπεῖν ἢ
κείνου βούλεται οἶκον ὀφέλλειν, ὅς κεν ὀπυίῃ.
ἐπιστολὴν γράψον αὐτῇ· λυπηθήτω, χαρήτω, ζητησάτω, καλεσάτω·
τῆς δὲ τῶν γραμμάτων διαπομπῆς ἐγὼ προνοήσομαι. βάδιζε καὶ γράφε."
Πείθεται Χαιρέας καὶ μόνος ἐπ´ ἐρημίας γενόμενος ἤθελε γράφειν,
ἀλλ´ οὐκ ἠδύνατο, δακρύων ἐπιρρεόντων καὶ τῆς χειρὸς αὐτοῦ τρεμούσης.
ἀποκλαύσας δὲ τὰς ἑαυτοῦ συμφορὰς μόλις ἤρξατο τοιαύτης ἐπιστολῆς·
"Καλλιρόῃ Χαιρέας· ζῶ, καὶ ζῶ διὰ Μιθριδάτην, τὸν ἐμὸν εὐεργέτην,
ἐλπίζω δὲ καὶ τὸν σόν· ἐπράθην γὰρ εἰς Καρίαν ὑπὸ βαρβάρων,
οἵτινες ἐνέπρησαν τριήρη τὴν καλήν, τὴν στρατηγικήν, τὴν
τοῦ σοῦ πατρός· ἐξέπεμψε δὲ ἐπ´ αὐτῆς ἡ πόλις πρεσβείαν ὑπὲρ σοῦ.
τοὺς μὲν οὖν ἄλλους πολίτας οὐκ οἶδ´ ὅ τι γεγόνασιν, ἐμὲ δὲ καὶ
Πολύχαρμον τὸν φίλον ἤδη μέλλοντας φονεύεσθαι σέσωκεν ἔλεος
δεσπότου. πάντα δὲ Μιθριδάτης εὐεργετήσας τοῦτό με λελύπηκεν
ἀντὶ πάντων, ὅτι μοι τὸν σὸν γάμον διηγήσατο· θάνατον μὲν γὰρ
ἄνθρωπος ὢν προσεδόκων, τὸν δὲ σὸν γάμον οὐκ ἤλπισα. ἀλλ´
ἱκετεύω, μετανόησον. κατασπένδω τούτων μου τῶν γραμμάτων
δάκρυα καὶ φιλήματα. ἐγὼ Χαιρέας εἰμὶ ὁ σὸς ἐκεῖνος ὃν εἶδες
παρθένος εἰς Ἀφροδίτης βαδίζουσα, δι´ ὃν ἠγρύπνησας. μνήσθητι
τοῦ θαλάμου καὶ τῆς νυκτὸς τῆς μυστικῆς, ἐν ᾗ πρῶτον σὺ μὲν
ἀνδρός, ἐγὼ δὲ γυναικὸς πεῖραν ἐλάβομεν. ἀλλὰ ἐζηλοτύπησα.
τοῦτο ἴδιόν ἐστι φιλοῦντος. δέδωκά σοι δίκας. ἐπράθην, ἐδούλευσα,
ἐδέθην. μή μοι μνησικακήσῃς τοῦ λακτίσματος τοῦ προπετοῦς· κἀγὼ
γὰρ ἐπὶ σταυρὸν ἀνέβην διὰ σέ, σοὶ μηδὲν ἐγκαλῶν. εἰ μὲν οὖν
ἔτι μνημονεύσειας, οὐδὲν ἔπαθον· εἰ δὲ ἄλλο τι φρονεῖς, θανάτου
μοι δώσεις ἀπόφασιν."
| [4,4] Cette nuit se révéla pleine de soucis pour tous, et
aucun d'eux ne put dormir; Chéréas était en colère,
Polycharme le consolait, Mithridate se réjouissait, espérant
que, comme dans les jeux athlétiques, occupant la
position de lutteur de réserve, il pourrait, sans lutte,
emporter le prix qui était Callirhoé.
Le lendemain, lorsque chacun dit son avis, Chéréas
proposait de se rendre immédiatement à Milet et de
réclamer sa femme à Dionysios; il pensait d'ailleurs que
Callirhoé ne consentirait pas à rester là-bas, dès qu'elle
l'aurait vu. Mais Mithridate répondit : « En ce qui me
concerne, tu peux t'en aller; car je ne veux pas te séparer
même un seul jour de ta femme; il aurait mieux valu
que vous ne quittiez jamais la Sicile et qu'il ne vous soit
arrivé aucun malheur; mais puisque la Fortune, qui
se plaît aux nouveautés, vous a plongés dans un sombre
drame, il faut réfléchir mûrement à ce qui va suivre;
maintenant, tu es entraîné plus par ta passion que par la
raison, et tu ne te représentes à l'avance rien de ce qui se
passera. Tu vas arriver, seul, étranger, dans une très
grande ville, tu vas réclamer à un homme riche, le
premier personnage de l'Ionie, une femme qu'il a épousée
solennellement, et sur quoi t'appuieras-tu ? Loin de toi
sont Hermocrate et Mithridate, tes seuls alliés, qui peuvent
plutôt pleurer sur toi que te venir en aide. Je redoute aussi
que cet endroit ne te soit néfaste. Tu as en effet connu
là-bas de terribles malheurs : mais ce que tu subiras alors
te les fera trouver bien doux. Tu as été fait prisonnier,
certes, mais tu as survécu; tu as été vendu, oui, mais à
moi. Mais maintenant, si Dionysios s'aperçoit que tu
t'attaques à son mariage, quel dieu pourra te sauver ?
Tu seras livré à un rival au pouvoir absolu, et peut-être
même ne croira-t-il pas que tu es Chéréas; d'ailleurs, tu
n'en seras que plus en danger s'il pense que c'est vraiment toi.
Es-tu donc le seul qui ignore la nature de
l'amour, et le plaisir que prend ce dieu aux tromperies et
aux ruses ? Je suis d'avis de commencer par sonder la
femme par lettre, pour savoir si elle se souvient de toi
et désire abandonner Dionysios ou
"Agrandir la maison de celui qu'elle épousera".
Écris-lui une lettre; qu'elle éprouve du chagrin, de la joie,
qu'elle te cherche, qu'elle t'appelle. Quant au moyen de
faire parvenir cette lettre, j'y veillerai moi-même. Va donc écrire. »
Chéréas obéit et, demeuré seul, il voulait écrire, mais
ne le pouvait pas, car ses larmes coulaient et sa main
tremblait. Après avoir longuement pleuré sur ses
malheurs, finalement, il commença la lettre que voici :
« A Callirhoé, Chéréas,
Je vis, et je vis grâce à Mithridate, mon bienfaiteur, et, je
l'espère, aussi le tien. J'ai été vendu en Carie par des barbares,
les mêmes qui ont incendié la belle trière, la trière
capitane, celle de ton père; la cité y avait embarqué une
ambassade pour te réclamer. De nos autres concitoyens, je ne
sais ce qui est advenu; pour moi et mon ami Polycharme, nous
avons dû notre salut, au moment où l'on était sur le point de
nous mettre à mort, à la pitié du maître. Mais Mithridate,
après tant de bienfaits, a compensé ceux-ci par le grand chagrin
qu'il m'a causé en m'apprenant ton mariage; à la mort, je
m'attendais, puisque je suis un homme, mais que tu te
maries, jamais je ne l'aurais pensé. Mais, je t'en supplie,
change d'avis. Je mets partout sur cette lettre des larmes et
des baisers. C'est moi, Chéréas, ton ami, celui que tu as vu,
alors que, vierge encore, tu allais au temple d'Aphrodite, et
pour l'amour de qui tu perdis le sommeil. Souviens-toi de
notre chambre et de cette nuit sacrée pendant laquelle pour la
première fois nous avons connu, toi un homme et moi une
femme. Mais j'ai été jaloux ? C'est là le propre de qui aime.
Et j'en ai été puni. J'ai été vendu, j'ai été esclave, j'ai été
enchaîné. Ne me tiens pas rigueur de ce coup de pied inconsidéré;
moi, de mon côté, je suis monté sur la croix, à cause
de toi, et je ne t'en ai fait aucun reproche. Si tu te souviens
encore de moi, tous mes malheurs ne sont rien; mais si tu es
d'un autre sentiment, tu prononceras contre moi sentence de mort. »
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