[5,1313b] ἀλλὰ πάντα φυλάττειν ὅθεν εἴωθε γίγνεσθαι δύο, φρόνημά τε καὶ πίστις,
καὶ μήτε σχολὰς μήτε ἄλλους συλλόγους ἐπιτρέπειν γίγνεσθαι σχολαστικούς, καὶ
πάντα ποιεῖν ἐξ ὧν ὅτι μάλιστα ἀγνῶτες ἀλλήλοις ἔσονται πάντες (ἡ γὰρ γνῶσις
πίστιν ποιεῖ μᾶλλον πρὸς ἀλλήλους)·
§ 3. καὶ τὸ τοὺς ἐπιδημοῦντας αἰεὶ φανεροὺς εἶναι καὶ διατρίβειν περὶ
θύρας (οὕτω γὰρ ἂν ἥκιστα λανθάνοιεν τί πράττουσι, καὶ φρονεῖν ἂν
ἐθίζοιντο μικρὸν αἰεὶ δουλεύοντες)· καὶ τἆλλα ὅσα τοιαῦτα Περσικὰ καὶ
βάρβαρα τυραννικά ἐστιν (πάντα γὰρ ταὐτὸν δύναται)· καὶ τὸ μὴ λανθάνειν
πειρᾶσθαι ὅσα τυγχάνει τις λέγων ἢ πράττων τῶν ἀρχομένων, ἀλλ' εἶναι
κατασκόπους, οἷον περὶ Συρακούσας αἱ ποταγωγίδες καλούμεναι, καὶ οὓς
ὠτακουστὰς ἐξέπεμπεν Ἱέρων, ὅπου τις εἴη συνουσία καὶ σύλλογος
(παρρησιάζονταί τε γὰρ ἧττον, φοβούμενοι τοὺς τοιούτους, κἂν
παρρησιάζωνται, λανθάνουσιν ἧττον)·
§ 4. καὶ τὸ διαβάλλειν ἀλλήλοις καὶ συγκρούειν καὶ φίλους φίλοις καὶ τὸν
δῆμον τοῖς γνωρίμοις καὶ τοὺς πλουσίους ἑαυτοῖς. Καὶ τὸ πένητας ποιεῖν
τοὺς ἀρχομένους τυραννικόν, ὅπως μήτε φυλακὴ τρέφηται καὶ πρὸς τῷ καθ'
ἡμέραν ὄντες ἄσχολοι ὦσιν ἐπιβουλεύειν. Παράδειγμα δὲ τούτου αἵ τε
πυραμίδες αἱ περὶ Αἴγυπτον καὶ τὰ ἀναθήματα τῶν Κυψελιδῶν καὶ τοῦ Ὀλυμπίου
ἡ οἰκοδόμησις ὑπὸ τῶν Πεισιστρατιδῶν, καὶ τῶν περὶ Σάμον ἔργα Πολυκράτεια
(πάντα γὰρ ταῦτα δύναται ταὐτόν, ἀσχολίαν καὶ πενίαν τῶν ἀρχομένων)·
§ 5. καὶ ἡ εἰσφορὰ τῶν τελῶν, οἷον ἐν Συρακούσαις (ἐν πέντε γὰρ ἔτεσιν ἐπὶ
Διονυσίου τὴν οὐσίαν ἅπασαν εἰσενηνοχέναι συνέβαινεν). Ἔστι δὲ καὶ
πολεμοποιὸς ὁ τύραννος, ὅπως δὴ ἄσχολοί τε ὦσι καὶ ἡγεμόνος ἐν χρείᾳ
διατελῶσιν ὄντες. Καὶ ἡ μὲν βασιλεία σῴζεται διὰ τῶν φίλων, τυραννικὸν δὲ
τὸ μάλιστ' ἀπιστεῖν τοῖς φίλοις, ὡς βουλομένων μὲν πάντων δυναμένων δὲ
μάλιστα τούτων.
§ 6. Καὶ τὰ περὶ τὴν δημοκρατίαν δὲ γιγνόμενα τὴν τελευταίαν τυραννικὰ
πάντα, γυναικοκρατία τε περὶ τὰς οἰκίας, ἵν' ἐξαγγέλλωσι κατὰ τῶν ἀνδρῶν,
καὶ δούλων ἄνεσις διὰ τὴν αὐτὴν αἰτίαν· οὔτε γὰρ ἐπιβουλεύουσιν οἱ δοῦλοι
καὶ αἱ γυναῖκες τοῖς τυράννοις, εὐημεροῦντάς τε ἀναγκαῖον εὔνους εἶναι καὶ
ταῖς τυραννίσι καὶ ταῖς δημοκρατίαις· καὶ γὰρ ὁ δῆμος εἶναι βούλεται
μόναρχος. Διὸ καὶ ὁ κόλαξ παρ' ἀμφοτέροις ἔντιμος, παρὰ μὲν τοῖς δήμοις ὁ
δημαγωγός (ἔστι γὰρ ὁ δημαγωγὸς τοῦ δήμου κόλαξ), παρὰ δὲ τοῖς τυράννοις
οἱ ταπεινῶς ὁμιλοῦντες, ὅπερ ἐστὶν ἔργον κολακείας.
| [5,1313b] c'est-à-dire, prévenir tout ce qui donne ordinairement courage et
confiance en soi ; empêcher les loisirs et toutes les réunions où l'on
pourrait trouver des amusements communs; tout faire pour que les sujets
restent inconnus les uns aux autres, parce que les relations amènent une
mutuelle confiance;
§ 3. de plus, bien connaître les moindres déplacements des citoyens, et
les forcer en quelque façon à ne jamais franchir les portes de la cité,
pour toujours être au courant de ce qu'ils font, et les accoutumer par ce
continuel esclavage à la bassesse et à la timidité d'âme : tels sont les
moyens mis en usage chez les Perses et chez les barbares, moyens
tyranniques qui tendent tous au même but. En voici d'autres : savoir tout
ce qui se dit, tout ce qui se fait parmi les sujets; avoir des espions
pareils à ces femmes appelées à Syracuse les délatrices ; envoyer, comme
Hiéron, des gens pour tout écouter dans les sociétés, dans les réunions,
parce qu'on est moins franc quand on redoute l'espionnage, et que si l'on
parle, tout se sait ;
§ 4. semer la discorde et la calomnie parmi les citoyens; mettre aux
prises les amis entre eux; irriter le peuple contre les hautes classes,
qu'on désunit entre elles. Un autre principe de la tyrannie est
d'appauvrir les sujets, pour que, d'une part, sa garde ne lui coûte rien à
entretenir, et que, de l'autre, occupés à gagner leur vie de chaque jour,
les sujets ne trouvent pas le temps de conspirer. C'est dans cette vue
qu'ont été élevés les pyramides d'Égypte, les monuments sacrés des
Cypsélides, le temple de Jupiter Olympien par les Pisistratides, et les
grands ouvrages de Polycrate à Samos, travaux qui n'ont qu'un seul et même
objet, l'occupation constante et l'appauvrissement du peuple.
§ 5. On peut voir un moyen analogue dans un système d'impôts établis comme
ils l'étaient à Syracuse : en cinq ans, Denys absorbait par l'impôt la
valeur de toutes les propriétés. Le tyran fait aussi la guerre pour
occuper l'activité de ses sujets, et leur imposer le besoin perpétuel d'un
chef militaire. Si la royauté se conserve en s'appuyant sur des
dévouements, la tyrannie ne se maintient que par une perpétuelle défiance
de ses amis, parce qu'elle sait bien que, si tous les sujets veulent
renverser le tyran, ses amis surtout sont en position de le faire.
§ 6. Les vices que présente la démocratie extrême se retrouvent dans la
tyrannie : licence accordée aux femmes dans l'intérieur des familles pour
qu'elles trahissent leur maris ; licence aux esclaves, pour qu'ils
dénoncent aussi leurs maîtres; car le tyran n'a rien à redouter des
esclaves et des femmes ; et les esclaves, pourvu qu'on les laisse vivre à
leur gré, sont très partisans de la tyrannie et de la démagogie. Le peuple
aussi parfois fait le monarque; et voilà pourquoi le flatteur est en haute
estime auprès de la foule comme auprès du tyran. Près du peuple, on trouve
le démagogue, qui est pour lui un véritable flatteur; près du despote, on
trouve ses vils courtisans, qui ne font qu'ouvre de flatterie perpétuelle.
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