[5,1311a] § 6. Βούλεται δ' ὁ βασιλεὺς εἶναι φύλαξ, 1311a ὅπως οἱ μὲν κεκτημένοι
τὰς οὐσίας μηθὲν ἄδικον πάσχωσιν, ὁ δὲ δῆμος μὴ ὑβρίζηται μηθέν· ἡ δὲ
τυραννίς, ὥσπερ εἴρηται πολλάκις, πρὸς οὐδὲν ἀποβλέπει κοινόν, εἰ μὴ τῆς
ἰδίας ὠφελείας χάριν. Ἔστι δὲ σκοπὸς τυραννικὸς μὲν τὸ ἡδύ, βασιλικὸς δὲ
τὸ καλόν. Διὸ καὶ τῶν πλεονεκτημάτων τὰ μὲν χρήματα τυραννικὰ, τὰ δ' εἰς
τιμὴν βασιλικὰ μᾶλλον· καὶ φυλακὴ βασιλικὴ μὲν πολιτική, τυραννικὴ δὲ διὰ
ξένων.
§ 7. Ὅτι δ' ἡ τυραννὶς ἔχει κακὰ καὶ τὰ τῆς δημοκρατίας καὶ τὰ τῆς
ὀλιγαρχίας, φανερόν· ἐκ μὲν ὀλιγαρχίας τὸ τὸ τέλος εἶναι πλοῦτον νοὕτω γὰρ
καὶ διαμένειν ἀναγκαῖον μόνως τήν τε φυλακὴν καὶ τὴν τρυφήνν, καὶ τὸ τῷ
πλήθει μηδὲν πιστεύειν νδιὸ καὶ τὴν παραίρεσιν ποιοῦνται τῶν ὅπλωνν, καὶ
τὸ κακοῦν τὸν ὄχλον καὶ τὸ ἐκ τοῦ ἄστεως ἀπελαύνειν καὶ διοικίζειν
ἀμφοτέρων κοινόν, καὶ τῆς ὀλιγαρχίας καὶ τῆς τυραννίδος· ἐκ δημοκρατίας δὲ
τὸ πολεμεῖν τοῖς γνωρίμοις καὶ διαφθείρειν λάθρᾳ καὶ φανερῶς καὶ
φυγαδεύειν ὡς ἀντιτέχνους καὶ πρὸς τὴν ἀρχὴν ἐμποδίους. Ἐκ γὰρ τούτων
συμβαίνει γίγνεσθαι καὶ τὰς ἐπιβουλάς, τῶν μὲν ἄρχειν αὐτῶν βουλομένων,
τῶν δὲ μὴ δουλεύειν. Ὅθεν καὶ τὸ Περιάνδρου πρὸς Θρασύβουλον συμβούλευμά
ἐστιν, ἡ τῶν ὑπερεχόντων σταχύων κόλουσις, ὡς δέον αἰεὶ τοὺς ὑπερέχοντας
τῶν πολιτῶν ἀναιρεῖν.
§ 8. Καθάπερ οὖν σχεδὸν ἐλέχθη, τὰς αὐτὰς ἀρχὰς δεῖ νομίζειν περί τε τὰς
πολιτείας εἶναι τῶν μεταβολῶν καὶ περὶ τὰς μοναρχίας· διά τε γὰρ ἀδικίαν
καὶ διὰ φόβον καὶ διὰ καταφρόνησιν ἐπιτίθενται πολλοὶ τῶν ἀρχομένων ταῖς
μοναρχίαις, τῆς δὲ ἀδικίας μάλιστα δι' ὕβριν, ἐνίοτε δὲ καὶ διὰ τὴν τῶν
ἰδίων στέρησιν. Ἔστι δὲ καὶ τὰ τέλη ταὐτά, καθάπερ κἀκεῖ, καὶ περὶ τὰς
τυραννίδας καὶ τὰς βασιλείας· μέγεθος γὰρ ὑπάρχει πλούτου καὶ τιμῆς τοῖς
μονάρχοις, ὧν ἐφίενται πάντες.
§ 9. Τῶν δ' ἐπιθέσεων αἱ μὲν ἐπὶ τὸ σῶμα γίγνονται τῶν ἀρχόντων, αἱ δ' ἐπὶ
τὴν ἀρχήν. Αἱ μὲν οὖν δι' ὕβριν ἐπὶ τὸ σῶμα. Τῆς δ' ὕβρεως οὔσης
πολυμεροῦς, ἕκαστον αὐτῶν αἴτιον γίγνεται τῆς ὀργῆς· τῶν δ' ὀργιζομένων
σχεδὸν οἱ πλεῖστοι τιμωρίας χάριν ἐπιτίθενται, ἀλλ' οὐχ ὑπεροχῆς. Οἷον ἡ
μὲν τῶν Πεισιστρατιδῶν διὰ τὸ προπηλακίσαι μὲν τὴν Ἁρμοδίου ἀδελφὴν
ἐπηρεάσαι δ' Ἁρμόδιον (ὁ μὲν γὰρ Ἁρμόδιος διὰ τὴν ἀδελφήν, ὁ δὲ
Ἀριστογείτων διὰ τὸν Ἁρμόδιον), ἐπεβούλευσαν δὲ καὶ Περιάνδρῳ τῷ ἐν
Ἀμβρακίᾳ τυράννῳ
| [5,1311a] § 6. Le roi a pour mission spéciale de veiller à ce que ceux qui
possèdent n'éprouvent aucun tort dans leur fortune, et le peuple aucun outrage
dans son honneur. Le tyran, au contraire, comme je l'ai dit plus d'une fois,
n'a jamais en vue, dans les affaires communes, que son intérêt personnel.
Le but du tyran, c'est la jouissance; celui du roi, c'est la vertu. Aussi,
en fait d'ambition, le tyran songe-t-il surtout à l'argent; le roi,
surtout à l'honneur. La garde d'un roi se compose de citoyens ; celle d'un
tyran, d'étrangers.
§ 7. Il est du reste bien facile de voir que la tyrannie a tous les
inconvénients de la démocratie et de l'oligarchie. Comme celle-ci, elle ne
pense qu'à la richesse, qui nécessairement peut seule lui garantir et la
fidélité des satellites, et la jouissance du luxe. La tyrannie se défie
aussi des masses, et leur enlève le droit de posséder des armes. Nuire au
peuple, éloigner les citoyens de la cité, les disperser, sont des
manoeuvres communes à l'oligarchie et à la tyrannie. A la démocratie, la
tyrannie emprunte ce système de guerre continuelle contre les citoyens
puissants, cette lutte secrète et publique qui les détruit, ces
bannissements qui les frappent sous prétexte qu'ils sont factieux et
ennemis de l'autorité; car elle n'ignore pas que c'est des rangs des
hautes classes que sortiront contre elle les conspirations, que les uns
ourdissent dans l'intention de se saisir du pouvoir à leur profit, et les
autres, pour se soustraire à l'esclavage qui les opprime. Voilà ce que
signifiait le conseil de Périandre à Thrasybule ; et ce nivellement des
épis qui dépassaient les autres, voulait dire qu'il fallait toujours se
défaire des citoyens éminents.
§ 8. Tout ce que je viens de dire montre assez que les causes de
révolution doivent être les mêmes à peu près dans les monarchies que dans
les républiques. L'injustice, la peur, le mépris, ont presque toujours
déterminé les conspirations des sujets contre les monarques. L'injustice
les a cependant causées moins souvent encore que l'insulte, et parfois
aussi les spoliations individuelles. Le but que se proposent les
conspirations dans les républiques est aussi le même dans les États soumis
à un tyran ou à un roi ; elles ont toujours lieu parce que le monarque est
comblé d'honneurs et de richesses, que lui envient tous les autres.
§ 9. Les conspirations s'attaquent, tantôt à la personne de ceux qui ont
le pouvoir, tantôt au pouvoir lui-même. Le sentiment d'une insulte pousse
surtout aux premières; et comme l'insulte peut être de bien des genres, le
ressentiment qu'elle provoque peut avoir autant de caractères différents.
Dans la plupart des cas, la colère en conspirant ne songe qu'à la
vengeance; et elle n'est point ambitieuse. Témoin le sort des
Pisistratides : ils avaient déshonoré la soeur d'Harmodius; Harmodius
conspira pour venger sa soeur; Aristogiton, pour soutenir Harmodius. La
conspiration tramée contre Périandre, tyran d'Ambracie, n'eut pas d'autre
motif qu'une plaisanterie du tyran,
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