[8,8] CHAPITRE VIII.
§ 1. Ἑκ τε δὴ τούτων πιστεύσειεν ἄν τις εἶναί τι πρῶτον ἀκίνητον, καὶ πάλιν ἐπιβλέψας ἐπὶ τὰς ἀρχάς {τῶν κινούντων}.
§ 2. Τὸ μὲν δὴ εἶναι ἄττα τῶν ὄντων ἃ ὁτὲ μὲν κινεῖται ὁτὲ δὲ ἠρεμεῖ φανερόν. Καὶ διὰ τούτου γέγονε δῆλον ὅτι οὔτε πάντα κινεῖται οὔτε πάντα ἠρεμεῖ οὔτε τὰ μὲν ἀεὶ ἠρεμεῖ τὰ δὲ ἀεὶ κινεῖται· τὰ γὰρ ἐπαμφοτερίζοντα καὶ δύναμιν ἔχοντα τοῦ κινεῖσθαι καὶ ἠρεμεῖν δείκνυσιν περὶ αὐτῶν.
§ 3. Ἐπεὶ δὲ τὰ μὲν τοιαῦτα δῆλα πᾶσι, βουλόμεθα δὲ δεῖξαι καὶ τοῖν δυοῖν ἑκατέρου τὴν φύσιν, ὅτι ἔστιν τὰ μὲν ἀεὶ ἀκίνητα τὰ δὲ ἀεὶ κινούμενα, προϊόντες δ' ἐπὶ τοῦτο καὶ θέντες ἅπαν τὸ κινούμενον ὑπό τινος κινεῖσθαι, καὶ τοῦτ' εἶναι ἢ ἀκίνητον ἢ κινούμενον, καὶ κινούμενον ἢ ὑφ' αὑτοῦ ἢ ὑπ' ἄλλου ἀεί, προήλθομεν ἐπὶ τὸ λαβεῖν ὅτι τῶν κινουμένων ἐστὶν ἀρχὴ κινουμένων μὲν ὃ αὐτὸ ἑαυτὸ κινεῖ, πάντων δὲ τὸ ἀκίνητον,
§ 4. ὁρῶμεν δὲ καὶ φανερῶς ὄντα τοιαῦτα ἃ κινεῖ αὐτὰ ἑαυτά, οἷον τὸ τῶν ἐμψύχων καὶ τὸ τῶν ζῴων γένος, ταῦτα δὲ καὶ δόξαν παρεῖχε μή ποτε ἐνδέχεται κίνησιν ἐγγίγνεσθαι μὴ οὖσαν ὅλως, διὰ τὸ ἐν τούτοις ὁρᾶν ἡμᾶς τοῦτο συμβαῖνον (ἀκίνητα γάρ ποτε ὄντα κινεῖται πάλιν, ὡς δοκεῖ),
§ 5. τοῦτο δὴ δεῖ λαβεῖν, ὅτι μίαν κίνησιν αὑτὰ κινεῖ, καὶ ὅτι ταύτην οὐ κυρίως· οὐ γὰρ ἐξ αὐτοῦ τὸ αἴτιον, ἀλλ' ἔνεισιν ἄλλαι κινήσεις φυσικαὶ τοῖς ζῴοις, ἃς οὐ κινοῦνται δι' αὑτῶν, οἷον αὔξησις φθίσις ἀναπνοή, ἃς κινεῖται τῶν ζῴων ἕκαστον ἠρεμοῦν καὶ οὐ κινούμενον τὴν ὑφ' αὑτοῦ κίνησιν. Τούτου δ' αἴτιον τὸ περιέχον καὶ πολλὰ τῶν εἰσιόντων, οἷον ἐνίων ἡ τροφή· πεττομένης μὲν γὰρ καθεύδουσιν, διακρινομένης δ' ἐγείρονται καὶ κινοῦσιν ἑαυτούς, τῆς πρώτης ἀρχῆς ἔξωθεν οὔσης, διὸ οὐκ ἀεὶ κινοῦνται συνεχῶς ὑφ' αὑτῶν· ἄλλο γὰρ τὸ κινοῦν, αὐτὸ κινούμενον καὶ μεταβάλλον πρὸς ἕκαστον τῶν κινούντων ἑαυτά.
§ 6. Ἐν πᾶσι δὲ τούτοις κινεῖται τὸ κινοῦν πρῶτον καὶ τὸ αἴτιον τοῦ αὐτὸ ἑαυτὸ κινεῖν ὑφ' αὑτοῦ, κατὰ συμβεβηκὸς μέντοι· μεταβάλλει γὰρ τὸν τόπον τὸ σῶμα, ὥστε καὶ τὸ ἐν τῷ σώματι ὂν καὶ τῇ μοχλείᾳ κινοῦν ἑαυτό.
§ 7. Ἐξ ὧν ἔστιν πιστεῦσαι ὅτι εἴ τί ἐστι τῶν ἀκινήτων μὲν κινούντων δὲ καὶ αὑτὰ κατὰ συμβεβηκός, ἀδύνατον συνεχῆ κίνησιν κινεῖν. Ὥστ' εἴπερ ἀνάγκη συνεχῶς εἶναι κίνησιν, εἶναί τι δεῖ τὸ πρῶτον κινοῦν ἀκίνητον καὶ κατὰ συμβεβηκός, εἰ μέλλει, καθάπερ εἴπομεν, ἔσεσθαι ἐν τοῖς οὖσιν ἄπαυστός τις καὶ ἀθάνατος κίνησις, καὶ μενεῖν τὸ ὂν αὐτὸ ἐν αὑτῷ καὶ ἐν τῷ αὐτῷ· τῆς γὰρ ἀρχῆς μενούσης ἀνάγκη καὶ τὸ πᾶν μένειν συνεχὲς ὂν πρὸς τὴν ἀρχήν.
§ 8. Οὐκ ἔστιν δὲ τὸ αὐτὸ τὸ κινεῖσθαι κατὰ συμβεβηκὸς ὑφ' αὑτοῦ καὶ ὑφ' ἑτέρου· τὸ μὲν γὰρ ὑφ' ἑτέρου ὑπάρχει καὶ τῶν ἐν τῷ οὐρανῷ ἐνίαις ἀρχαῖς, ὅσα πλείους φέρεται φοράς, θάτερον δὲ τοῖς φθαρτοῖς μόνον.
| [8,8] CHAPITRE VIII.
§ 1. Les considérations qui précèdent suffiraient pour démontrer
l'existence d'un primitif immobile ; mais l'on peut s'en convaincre encore
en regardant aux principes suivant lesquels agissent les moteurs.
§ 2. Il est d'observation évidente que, parmi les choses, il en est
quelques-unes qui sont tantôt en mouvement et tantôt en repos.
L'observation démontre également que toutes les choses ne sont pas en
mouvement sans exception, ni que toutes ne sont pas en repos, pas plus
qu'elles ne sont ni toujours en repos ni toujours en mouvement ; car c'est
là ce que prouvent bien les choses qui participent à l'un et à l'autre, et qui
ont la faculté tantôt de se mouvoir et tantôt de rester dans l'inertie.
§ 3. Bien que ce soient là des faits incontestables pour tout le monde,
nous nous proposons néanmoins d'expliquer la nature de ces deux
sortes de phénomènes, et de prouver que parmi les choses les unes
sont éternellement immobiles, et que les autres sont éternellement mues.
En procédant à cette démonstration, et en posant les principes suivants
à savoir : que tout mobile est mu par quelque chose, que ce quelque
chose est ou immobile, ou mu à son tour, et s'il est mu, qu'il est toujours
mu ou par lui-même spontanément ou mu par une autre cause, nous en
sommes arrivés à établir qu'il y a un principe pour tout ce qui est mu ;
que pour les mobiles, ce principe est le moteur qui se meut lui-même; et
que pour toutes les choses de l'univers, c'est l'immobile.
§ 4. D'abord nous voyons avec pleine évidence qu'il existe certaines
choses qui se meuvent elles-mêmes; et tels sont par exemple les êtres
vivants et les animaux. C'est même cette propriété de certains êtres qui a
donné à penser que le mouvement pourrait bien naître, sans du tout
exister préalablement, parce qu'on voyait qu'il en était ainsi dans ces
êtres, qui étant par fois immobiles se meuvent ensuite, du moins à ce
qu'il semble,
§ 5. Il faut bien remarquer aussi que ces êtres ne se donnent à eux-
mêmes qu'une seule espèce de mouvement, et qu'encore ils ne se la
donnent pas positivement, puisque la cause n'en vient pas de l'animal
même. De plus, il y a dans ces êtres d'autres mouvements qu'ils ne
peuvent pas se donner, bien que ces mouvements soient fort naturels,
l'accroissement, la destruction, la respiration, tous mouvements que
possède chaque animal, même en étant en repos et sans recevoir le
mouvement spécial qu'il a la faculté de pouvoir se donner à lui-même. La
cause de ces mouvements différents, c'est le milieu où vit l'animal, et
l'ingestion des éléments divers qui entrent en lui. C'est par exemple, pour
certains phénomènes, la nourriture que prennent les animaux. Quand ils
la digèrent, ils dorment; et quand elle est distribuée dans le corps, ils
s'éveillent, et ils se mettent en mouvement, la cause première de ce
mouvement leur étant étrangère. Voilà comment les animaux ne se
meuvent pas continuellement eux-mêmes; car dans les êtres qui se
meuvent eux-mêmes, le moteur doit être différent d'eux, bien qu'il puisse
lui-même être mu et qu'il puisse changer.
§ 6. Dans tous ces cas, le moteur primitif, c'est-à-dire ce qui est à soi-
même la cause du mouvement, se meut bien spontanément, mais c'est
cependant d'une façon accidentelle. Le corps en effet change de place ;
et c'est de cette manière que change aussi de lieu ce qui est dans le
corps, et se meut lui-même par une action analogue à celle du levier.
§ 7. De ces faits, on peut tirer la conséquence, que si une chose est
comprise parmi les immobiles qui sont moteurs, tout en étant eux-mêmes
mus indirectement, elle ne peut jamais produire un mouvement qui soit
continuel. Or, puisque nécessairement il faut que le mouvement soit
continu, il doit y avoir aussi un certain moteur primitif qui soit immobile et
qui ne meuve pas seulement par accident, s'il est bien vrai, ainsi que
nous l'avons dit, qu'il doit y avoir dans les choses un mouvement
indéfectible et immortel, et que l'être demeure ce qu'il est en lui-même et
dans le même lieu ; car le point de départ, le principe restant ce qu'il est,
il faut nécessairement que tout demeure aussi de même, rattaché d'une
manière continue au principe.
§ 8. Il ne faut pas d'ailleurs confondre le mouvement accidentel que l'être
se donne à lui-même et celui qu'il reçoit d'une autre cause; car le
mouvement qui vient d'une cause étrangère peut se rencontrer aussi
dans certains principes de choses qui sont dans le Ciel et peuvent avoir
plusieurs espèces de translations, tandis que l'autre mouvement
appartient exclusivement aux êtres périssables.
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