[8,7] CHAPITRE VII.
§ 1. Ἐπεὶ δὲ δεῖ κίνησιν ἀεὶ εἶναι καὶ μὴ διαλείπειν, ἀνάγκη εἶναί τι ἀΐδιον ὃ πρῶτον κινεῖ, εἴτε ἓν εἴτε πλείω· καὶ τὸ πρῶτον κινοῦν ἀκίνητον.
§ 2. Ἕκαστον μὲν οὖν ἀΐδιον εἶναι τῶν ἀκινήτων μὲν κινούντων δὲ οὐδὲν πρὸς τὸν νῦν λόγον· ὅτι δ' ἀναγκαῖον εἶναί τι τὸ ἀκίνητον μὲν αὐτὸ πάσης ἐκτὸς μεταβολῆς, καὶ ἁπλῶς καὶ κατὰ συμβεβηκός, κινητικὸν δ' ἑτέρου, δῆλον ὧδε σκοποῦσιν.
§ 3. Ἔστω δή, εἴ τις βούλεται, ἐπί τινων ἐνδεχόμενον ὥστε εἶναί ποτε καὶ μὴ εἶναι ἄνευ γενέσεως καὶ φθορᾶς (τάχα γὰρ ἀναγκαῖον, εἴ τι ἀμερὲς ὁτὲ μὲν ἔστιν ὁτὲ δὲ μὴ ἔστιν, ἄνευ τοῦ μεταβάλλειν ὁτὲ μὲν εἶναι ὁτὲ δὲ μὴ εἶναι πᾶν τὸ τοιοῦτον). Καὶ τῶν ἀρχῶν τῶν ἀκινήτων μὲν κινητικῶν δ' ἐνίας ὁτὲ μὲν εἶναι ὁτὲ δὲ μὴ εἶναι, ἐνδεχέσθω καὶ τοῦτο. Ἀλλ' οὔ τί γε πάσας δυνατόν·
§ 4. Δῆλον γὰρ ὡς αἴτιον τοῖς αὐτὰ ἑαυτὰ κινοῦσίν ἐστί τι τοῦ ὁτὲ μὲν εἶναι ὁτὲ δὲ μή. Τὸ μὲν γὰρ αὐτὸ ἑαυτὸ κινοῦν ἅπαν ἔχειν ἀνάγκη μέγεθος, εἰ μηδὲν κινεῖται ἀμερές, τὸ δὲ κινοῦν οὐδεμία ἀνάγκη ἐκ τῶν εἰρημένων. Τοῦ δὴ τὰ μὲν γίγνεσθαι τὰ δὲ φθείρεσθαι, καὶ τοῦτ' εἶναι συνεχῶς, οὐδὲν αἴτιον τῶν ἀκινήτων μὲν μὴ ἀεὶ δ' ὄντων, οὐδ' αὖ τωνδὶ μὲν ταδί {κινούντων}, τούτων δ' ἕτερα. Τοῦ γὰρ ἀεὶ καὶ συνεχοῦς οὔτε ἕκαστον αὐτῶν οὔτε πάντα αἴτια· τὸ μὲν γὰρ οὕτως ἔχειν ἀΐδιον καὶ ἐξ ἀνάγκης, τὰ δὲ πάντα ἄπειρα, καὶ οὐχ ἅμα πάντα ὄντα. Δῆλον τοίνυν ὅτι, εἰ καὶ μυριάκις ἔνια {ἀρχαὶ} τῶν ἀκινήτων μὲν κινούντων δέ, καὶ πολλὰ τῶν αὐτὰ ἑαυτὰ κινούντων, φθείρεται, τὰ δ' ἐπιγίγνεται, καὶ τόδε μὲν ἀκίνητον ὂν τόδε κινεῖ, ἕτερον δὲ τοδί, ἀλλ' οὐδὲν ἧττον ἔστιν τι ὃ περιέχει, καὶ τοῦτο παρ' ἕκαστον, ὅ ἐστιν αἴτιον τοῦ τὰ μὲν εἶναι τὰ δὲ μὴ καὶ τῆς συνεχοῦς μεταβολῆς· καὶ τοῦτο μὲν τούτοις, ταῦτα δὲ τοῖς ἄλλοις αἴτια κινήσεως.
§ 5. Εἴπερ οὖν ἀΐδιος ἡ κίνησις, ἀΐδιον καὶ τὸ κινοῦν ἔσται πρῶτον, εἰ ἕν· εἰ δὲ πλείω, πλείω τὰ ἀΐδια. Ἓν δὲ μᾶλλον ἢ πολλά, καὶ πεπερασμένα ἢ ἄπειρα, δεῖ νομίζειν.
§ 6. Τῶν αὐτῶν γὰρ συμβαινόντων αἰεὶ τὰ πεπερασμένα μᾶλλον ληπτέον· ἐν γὰρ τοῖς φύσει δεῖ τὸ πεπερασμένον καὶ τὸ βέλτιον, ἂν ἐνδέχηται, ὑπάρχειν μᾶλλον. Ἱκανὸν δὲ καὶ ἕν, ὃ πρῶτον τῶν ἀκινήτων ἀΐδιον ὂν ἔσται ἀρχὴ τοῖς ἄλλοις κινήσεως.
§ 7. Φανερὸν δὲ καὶ ἐκ τοῦδε ὅτι ἀνάγκη εἶναί τι ἓν καὶ ἀΐδιον τὸ πρῶτον κινοῦν. Δέδεικται γὰρ ὅτι ἀνάγκη ἀεὶ κίνησιν εἶναι. Εἰ δὲ ἀεί, ἀνάγκη συνεχῆ εἶναι· καὶ γὰρ τὸ ἀεὶ συνεχές, τὸ δ' ἐφεξῆς οὐ συνεχές. Ἀλλὰ μὴν εἴ γε συνεχής, μία. Μία δ' ἡ ὑφ' ἑνός τε τοῦ κινοῦντος καὶ ἑνὸς τοῦ κινουμένου· εἰ γὰρ ἄλλο καὶ ἄλλο κινήσει, οὐ συνεχὴς ἡ ὅλη κίνησις, ἀλλ' ἐφεξῆς.
| [8,7] CHAPITRE VII.
§ 1. Puisqu'il faut que le mouvement soit perpétuel et que jamais il ne
cesse, il faut nécessairement aussi qu'il y ait quelque chose d'éternel qui
meuve primitivement, soit unique, soit multiple; et que ce soit là le
premier moteur immobile.
§ 2. D'ailleurs que toutes les choses qui sont immobiles, mais qui ne
produisent point le mouvement, soient éternelles, peu importe pour la
théorie que nous exposons maintenant. Mais voici les arguments qui
prouveront qu'il faut de toute nécessité qu'il existe quelque chose
d'immobile, à l'abri de toute espèce de changement, soit absolue soit
accidentelle, et qui ait la faculté de communiquer le mouvement à un
autre et en dehors de lui.
§ 3. Il y a des choses, si l'on veut, qui peuvent indifféremment tantôt être
et tantôt n'être pas, sans qu'il y ait ni naissance ni destruction ; car on
voit sans peine que, si une chose sans parties tantôt est et tantôt n'est
pas, il faut nécessairement que ce soit sans subir le moindre
changement qu'une chose de ce genre doive tantôt être et tantôt n'être
pas. On voit aussi que parmi les principes qui sont immobiles, quoique
capables de mouvoir, il se peut qu'il y en ait quelques-uns qui tantôt
soient et tantôt ne soient pas; supposition qu'on peut faire pour
quelques-uns, mais qu'on ne peut faire pour tous.
§ 4. En effet, il est clair que pour les choses qui se meuvent elles-
mêmes, il doit y avoir une cause qui fait que tantôt elles sont et que
tantôt elles ne sont pas. Tout ce qui se meut soi-même doit
nécessairement avoir une certaine grandeur, puisque une chose sans
parties ne peut jamais être mue. Mais d'après ce que nous avons dit, il
n'est pas du tout nécessaire que le moteur ait des parties. Si certaines
choses se produisent et si d'autres périssent, et, cela perpétuellement,
on ne peut pas chercher la cause de ce phénomène continuel dans des
choses qui sont bien sans doute immobiles, mais qui ne sont pas
cependant éternelles. On ne peut pas non plus la chercher davantage,
dans des choses qui meuvent celles-là éternellement, mais qui sont
mues à leur tour par d'autres. C'est qu'en effet les choses de ce genre, ni
séparément ni toutes ensemble, ne peuvent jamais être causes de
l'éternel et du continu. Qu'il en soit ainsi, c'est là un fait éternel et
nécessaire, Mais toutes ces choses sont infinies en nombre, et elles
n'existent pas toutes à la fois. Donc évidemment, en supposant aussi
nombreux qu'on voudra les principes des choses qui sont immobiles,
mais qui en meuvent d'autres; en supposant que beaucoup de ces
choses qui se meuvent elles-mêmes périssent et renaissent, et que le
moteur immobile meuve telle chose, qui à son tour en meut une autre, il
n'en existe pas moins quelque chose qui enveloppe et comprend tout
cela, qui est en outre de chacune de ces choses, qui est la cause de
cette alternative d'existence et de destruction, de ce changement
continuel, et qui communique le mouvement à certaines choses qui elles-
mêmes le transmettent à d'autres.
§ 5. Puis donc que le mouvement est éternel, il faut aussi que le moteur
primitif soit éternel comme lui, en supposant que ce moteur soit unique ;
et s'il y en a plusieurs, il faut qu'ils soient également éternels.
§ 6. Or, on doit penser que l'unité du moteur vaut mieux que sa pluralité;
et on doit les supposer finis plutôt qu'infinis, si l'on en admet plusieurs ;
car toutes conditions restant égales, il vaut toujours mieux les supposer
finis, puisque dans les choses de la nature, le fini et le meilleur, quand ils
sont possibles, sont plus ordinairement que le contraire. Mais il suffit
même d'un seul principe, primitif et éternel parmi les immobiles, pour
produire le mouvement et en être la cause dans tout le reste des choses.
§ 7. Ce qui prouve encore clairement qu'il faut de toute nécessité que le
premier moteur soit quelque chose d'un et d'éternel, c'est que, d'après ce
qui a été démontré plus haut, il faut nécessairement que le mouvement
soit éternel lui-même. Or, si le mouvement est éternel, il faut non moins
nécessairement qu'il soit continu; car ce qui est éternellement est
continu, tandis que le successif n'est pas continu. D'autre part si le
mouvement est continu, il est un ; et j'entends par Un le mouvement où il
n'y a qu'un seul moteur et qu'un seul mobile; car si le moteur meut une
chose, puis une autre, dès lors le mouvement entier n'est plus continu ;
mais il est successif.
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