[4,18] CHAPITRE XVIII.
ὅτι μὲν τοίνυν ὁ χρόνος ἀριθμός ἐστιν κινήσεως κατὰ τὸ πρότερον καὶ ὕστερον,
καὶ συνεχής (συνεχοῦς γάρ), φανερόν.
Ἐλάχιστος δὲ ἀριθμὸς ὁ μὲν ἁπλῶς ἐστὶν ἡ δυάς· τὶς δὲ ἀριθμὸς ἔστι μὲν ὡς
ἔστιν, ἔστι δ' ὡς οὐκ ἔστιν, οἷον γραμμῆς ἐλάχιστος πλήθει μέν ἐστιν αἱ
δύο ἢ ἡ μία, μεγέθει δ' οὐκ ἔστιν ἐλάχιστος· ἀεὶ γὰρ διαιρεῖται πᾶσα
γραμμή. ὥστε ὁμοίως καὶ χρόνος· ἐλάχιστος γὰρ κατὰ μὲν ἀριθμόν ἐστιν ὁ εἷς
ἢ οἱ δύο, κατὰ μέγεθος δ' οὐκ ἔστιν.
φανερὸν δὲ καὶ ὅτι ταχὺς μὲν καὶ βραδὺς οὐ λέγεται, πολὺς δὲ καὶ ὀλίγος
καὶ μακρὸς καὶ βραχύς. ᾗ μὲν γὰρ συνεχής, μακρὸς καὶ βραχύς, ᾗ δὲ ἀριθμός,
πολὺς καὶ ὀλίγος. ταχὺς δὲ καὶ βραδὺς οὐκ ἔστιν· οὐδὲ γὰρ ἀριθμὸς ᾗ
ἀριθμοῦμεν ταχὺς καὶ βραδὺς οὐδείς.
καὶ ὁ αὐτὸς δὲ πανταχοῦ ἅμα· πρότερον δὲ καὶ ὕστερον οὐχ ὁ αὐτός, ὅτι καὶ
ἡ μεταβολὴ ἡ μὲν παροῦσα μία, ἡ δὲ γεγενημένη καὶ ἡ μέλλουσα ἑτέρα, ὁ δὲ
χρόνος ἀριθμός ἐστιν οὐχ ᾧ ἀριθμοῦμεν ἀλλ' ὁ ἀριθμούμενος, οὗτος δὲ
συμβαίνει πρότερον καὶ ὕστερον ἀεὶ ἕτερος· τὰ γὰρ νῦν ἕτερα. ἔστι δὲ ὁ
ἀριθμὸς εἷς μὲν καὶ ὁ αὐτὸς ὁ τῶν ἑκατὸν ἵππων καὶ ὁ τῶν ἑκατὸν ἀνθρώπων,
ὧν δ' ἀριθμός, ἕτερα, οἱ ἵπποι τῶν ἀνθρώπων. ἔτι ὡς ἐνδέχεται κίνησιν
εἶναι τὴν αὐτὴν καὶ μίαν πάλιν καὶ πάλιν, οὕτω καὶ χρόνον, οἷον ἐνιαυτὸν ἢ
ἔαρ ἢ μετόπωρον.
οὐ μόνον δὲ τὴν κίνησιν τῷ χρόνῳ μετροῦμεν, ἀλλὰ καὶ τῇ κινήσει τὸν χρόνον
διὰ τὸ ὁρίζεσθαι ὑπ' ἀλλήλων· ὁ μὲν γὰρ χρόνος ὁρίζει τὴν κίνησιν ἀριθμὸς
ὢν αὐτῆς, ἡ δὲ κίνησις τὸν χρόνον. καὶ λέγομεν πολὺν καὶ ὀλίγον χρόνον τῇ
κινήσει μετροῦντες, καθάπερ καὶ τῷ ἀριθμητῷ τὸν ἀριθμόν, οἷον τῷ ἑνὶ ἵππῳ
τὸν τῶν ἵππων ἀριθμόν. τῷ μὲν γὰρ ἀριθμῷ τὸ τῶν ἵππων πλῆθος γνωρίζομεν,
πάλιν δὲ τῷ ἑνὶ ἵππῳ τὸν τῶν ἵππων ἀριθμὸν αὐτόν. ὁμοίως δὲ καὶ ἐπὶ τοῦ
χρόνου καὶ τῆς κινήσεως· τῷ μὲν γὰρ χρόνῳ τὴν κίνησιν, τῇ δὲ κινήσει τὸν
χρόνον μετροῦμεν. καὶ τοῦτ' εὐλόγως συμβέβηκεν· ἀκολουθεῖ γὰρ τῷ μὲν
μεγέθει ἡ κίνησις, τῇ δὲ κινήσει ὁ χρόνος, τῷ καὶ ποσὰ καὶ συνεχῆ καὶ
διαιρετὰ εἶναι· διὰ μὲν γὰρ τὸ τὸ μέγεθος εἶναι τοιοῦτον ἡ κίνησις ταῦτα
πέπονθεν, διὰ δὲ τὴν κίνησιν ὁ χρόνος. καὶ μετροῦμεν καὶ τὸ μέγεθος τῇ.
κινήσει καὶ τὴν κίνησιν τῷ μεγέθει· πολλὴν γὰρ εἶναί φαμεν τὴν ὁδόν, ἂν ἡ
πορεία πολλή, καὶ ταύτην πολλήν, ἂν ἡ ὁδὸς {ᾖ} πολλή· καὶ τὸν χρόνον, ἂν ἡ
κίνησις, καὶ τὴν κίνησιν, ἂν ὁ χρόνος.
| [4,18] CHAPITRE XVIII.
§ 1. On vient de voir que le temps est le nombre du
mouvement par rapport à l'antériorité et à la postériorité,
et qu'il est continu, parce qu'il est le nombre d'un continu.
§ 2. Le plus petit nombre possible, à prendre le mot de
nombre d'une manière absolue, c'est deux ; mais pour un
nombre particulier et concret, si en un sens ce moindre
nombre est possible, en un autre sens il ne l'est pas; et,
par exemple, si pour la ligne, le plus petit nombre en
quantité numérique, c'est deux lignes et même une seule
ligne; en grandeur, il n'y a pas de plus petit nombre
possible pour la ligne, puisque toute ligne est indéfiniment
divisible. Par suite, le temps est tout à fait comme elle; car
au point de vue du nombre, le plus petit temps c'est un ou
deux temps ; mais sous le rapport de la grandeur, il n'y a
pas de plus petit temps possible.
§ 3. On comprend bien d'ailleurs pourquoi on ne peut pas
dire du temps qu'il est lent ou rapide, et qu'on dit
seulement qu'il y a beaucoup de temps ou peu de temps, et
que le temps est long ou court. En tant que continu, le
temps est long et court; en tant que nombre, il y a
beaucoup de temps et peu de temps. Mais il n'est pas
rapide au lent, parce que le nombre qui nous sert à
nombrer n'est jamais ni lent ni rapide.
§ 4. C'est le même temps qui coexiste partout à la fois;
mais en tant qu'il y a antériorité et postériorité, le temps
n'est plus le même, parce que le changement aussi, quand
il est actuel et présent, est un, et que le changement passé
et le changement futur sont autres. Le temps est bien un
nombre; mais ce n'est pas celui qui nous sert à compter,
c'est celui qui est compté lui-même. Or, ce temps-là est
toujours différent sous le rapport de l'antérieur et du
postérieur, parce que les instants sont toujours autres,
tandis que le nombre est toujours un et le même, soit qu'il
s'applique ici à cent chevaux et là à cent hommes; il n'y a
de différence qu'entre les choses dénombrées, c'est-à-dire
que ce sont seulement les chevaux et les hommes qui diffèrent.
§ 5. D'ailleurs, de même que, par un retour constamment
pareil, le mouvement peut être constamment un et
identique, de même aussi le temps peut être identique et
un périodiquement : par exemple, une année, un
printemps, un automne.
§ 6. Et non seulement nous mesurons le mouvement par le
temps; mais nous pouvons encore mesurer le temps par le
mouvement, parce qu'ils se limitent et se déterminent
mutuellement l'un par l'autre. Le temps détermine le
mouvement, puisqu'il en est le nombre; et réciproquement,
le mouvement détermine aussi le temps. Quand nous
disons qu'il y a peu ou beaucoup de temps d'écoulé, nous le
mesurons par le mouvement, de même qu'on mesure le
nombre par la chose qui est l'objet de ce nombre; et, par
exemple, c'est par un seul cheval qu'on mesure le nombre
des chevaux. Ainsi nous connaissons quelle est la quantité
totale des chevaux par le nombre; et, réciproquement, c'est
en considérant un cheval seul que le nombre même des
chevaux se trouve connu. Le rapport est tout à fait pareil
entre le temps et le mouvement, puisque nous calculons de
même le mouvement par le temps, et le temps par le
mouvement.
§ 7. C'est d'ailleurs avec toute raison ; car le mouvement
implique la grandeur, et le temps implique le mouvement,
parce que ce sont là également et des quantités, et des
continus, et des divisibles. C'est parce que la grandeur a
telles propriétés que le temps a tels attributs; et le temps
ne se manifeste que grâce an mouvement. Aussi nous
mesurons indifféremment la grandeur par le mouvement et
le mouvement par la grandeur; nous disons que la route
est longue si le voyage a été long; et réciproquement, que
le voyage est long si la route a été longue. De même aussi,
nous disons qu'il y a beaucoup de temps, s'il y a beaucoup
de mouvement ; et réciproquement, beaucoup de
mouvement, s'il y a beaucoup de temps.
|