[3,8] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Η'.
§ 1. Ὅτι δ' εἰ μὴ ἔστιν ἄπειρον ἁπλῶς, πολλὰ ἀδύνατα συμβαίνει, δῆλον. Τοῦ
τε γὰρ χρόνου ἔσται τις ἀρχὴ καὶ τελευτή, καὶ τὰ μεγέθη οὐ διαιρετὰ εἰς
μεγέθη, καὶ ἀριθμὸς οὐκ ἔσται ἄπειρος.
§ 2. Ὅταν δὲ διωρισμένων οὕτως μηδετέρως φαίνηται ἐνδέχεσθαι, διαιτητοῦ
δεῖ, καὶ δῆλον ὅτι πὼς μὲν ἔστιν πὼς δ' οὔ.
§ 3. Λέγεται δὴ τὸ εἶναι τὸ μὲν δυνάμει τὸ δὲ ἐντελεχείᾳ,
§ 4. καὶ τὸ ἄπειρον ἔστι μὲν προσθέσει ἔστι δὲ καὶ διαιρέσει.
§ 5. Τὸ δὲ μέγεθος ὅτι μὲν κατ' ἐνέργειαν οὐκ ἔστιν ἄπειρον, εἴρηται,
διαιρέσει δ' ἐστίν· οὐ γὰρ χαλεπὸν ἀνελεῖν τὰς ἀτόμους γραμμάς· λείπεται
οὖν δυνάμει εἶναι τὸ ἄπειρον.
§ 6. Οὐ δεῖ δὲ τὸ δυνάμει ὂν λαμβάνειν, ὥσπερ εἰ δυνατὸν τοῦτ' ἀνδριάντα
εἶναι, ὡς καὶ ἔσται τοῦτ' ἀνδριάς, οὕτω καὶ ἄπειρον ὃ ἔσται ἐνεργείᾳ· ἀλλ'
ἐπεὶ πολλαχῶς τὸ εἶναι, ὥσπερ ἡ ἡμέρα ἔστι καὶ ὁ ἀγὼν τῷ ἀεὶ ἄλλο καὶ ἄλλο
γίγνεσθαι, οὕτω καὶ τὸ ἄπειρον (καὶ γὰρ ἐπὶ τούτων ἔστι καὶ δυνάμει καὶ
ἐνεργείᾳ· Ὀλύμπια γὰρ ἔστι καὶ τῷ δύνασθαι τὸν ἀγῶνα γίγνεσθαι καὶ τῷ
γίγνεσθαι)·
§ 7. ἄλλως δ' ἔν τε τῷ χρόνῳ δῆλον {τὸ ἄπειρον} καὶ ἐπὶ τῶν ἀνθρώπων, καὶ
ἐπὶ τῆς διαιρέσεως τῶν μεγεθῶν.
§ 8. Ὅλως μὲν γὰρ οὕτως ἔστιν τὸ ἄπειρον, τῷ ἀεὶ ἄλλο καὶ ἄλλο
λαμβάνεσθαι, καὶ τὸ λαμβανόμενον μὲν ἀεὶ εἶναι πεπερασμένον, ἀλλ' ἀεί γε
ἕτερον καὶ ἕτερον· {ἔτι τὸ εἶναι πλεοναχῶς λέγεται, ὥστε τὸ ἄπειρον οὐ δεῖ
λαμβάνειν ὡς τόδε τι, οἷον ἄνθρωπον ἢ οἰκίαν, ἀλλ' ὡς ἡ ἡμέρα λέγεται καὶ
ὁ ἀγών, οἷς τὸ εἶναι οὐχ ὡς οὐσία τις γέγονεν, ἀλλ' ἀεὶ ἐν γενέσει ἢ
φθορᾷ, πεπερασμένον, ἀλλ' ἀεί γε ἕτερον καὶ ἕτερον·}
§ 9. Ἀλλ' ἐν τοῖς μεγέθεσιν ὑπομένοντος τοῦ ληφθέντος {τοῦτο συμβαίνει},
ἐπὶ δὲ τοῦ χρόνου καὶ τῶν ἀνθρώπων φθειρομένων οὕτως ὥστε μὴ ἐπιλείπειν.
§ 10. Τὸ δὲ κατὰ πρόσθεσιν τὸ αὐτό ἐστί πως καὶ τὸ κατὰ διαίρεσιν· ἐν γὰρ
τῷ πεπερασμένῳ κατὰ πρόσθεσιν γίγνεται ἀντεστραμμένως· ᾗ γὰρ διαιρούμενον
ὁρᾶται εἰς ἄπειρον, ταύτῃ προστιθέμενον φανεῖται πρὸς τὸ ὡρισμένον. Ἐν γὰρ
τῷ πεπερασμένῳ μεγέθει ἂν λαβών τις ὡρισμένον προσλαμβάνῃ τῷ αὐτῷ λόγῳ, μὴ
τὸ αὐτό τι τοῦ ὅλου μέγεθος περιλαμβάνων, οὐ διέξεισι τὸ πεπερασμένον· ἐὰν
δ' οὕτως αὔξῃ τὸν λόγον ὥστε ἀεί τι τὸ αὐτὸ περιλαμβάνειν μέγεθος,
διέξεισι, διὰ τὸ πᾶν πεπερασμένον ἀναιρεῖσθαι ὁτῳοῦν ὡρισμένῳ.
§ 11. Ἄλλως μὲν οὖν οὐκ ἔστιν, οὕτως δ' ἔστι τὸ ἄπειρον, δυνάμει τε καὶ
ἐπὶ καθαιρέσει (καὶ ἐντελεχείᾳ δὲ ἔστιν, ὡς τὴν ἡμέραν εἶναι λέγομεν καὶ
τὸν ἀγῶνα)· καὶ δυνάμει οὕτως ὡς ἡ ὕλη, καὶ οὐ καθ' αὑτό, ὡς τὸ
πεπερασμένον. Καὶ κατὰ πρόσθεσιν δὴ οὕτως ἄπειρον δυνάμει ἔστιν, ὃ ταὐτὸ
λέγομεν τρόπον τινὰ εἶναι τῷ κατὰ διαίρεσιν· ἀεὶ μὲν γάρ τι ἔξω ἔσται
λαμβάνειν, οὐ μέντοι ὑπερβαλεῖ παντὸς μεγέθους, ὥσπερ ἐπὶ τὴν διαίρεσιν
ὑπερβάλλει παντὸς ὡρισμένου καὶ ἀεὶ ἔσται ἔλαττον.
§ 12. Ὥστε δὲ παντὸς ὑπερβάλλειν κατὰ τὴν πρόσθεσιν, οὐδὲ δυνάμει οἷόν τε
εἶναι, εἴπερ μὴ ἔστι κατὰ συμβεβηκὸς ἐντελεχείᾳ ἄπειρον, ὥσπερ φασὶν οἱ
φυσιολόγοι τὸ ἔξω σῶμα τοῦ κόσμου, οὗ ἡ οὐσία ἢ ἀὴρ ἢ ἄλλο τι τοιοῦτον,
ἄπειρον εἶναι. Ἀλλ' εἰ μὴ οἷόν τε εἶναι ἄπειρον ἐντελεχείᾳ σῶμα αἰσθητὸν
οὕτω, φανερὸν ὅτι οὐδὲ δυνάμει ἂν εἴη κατὰ πρόσθεσιν, ἀλλ' ἢ ὥσπερ εἴρηται
ἀντεστραμμένως τῇ διαιρέσει,
§ 13. ἐπεὶ καὶ Πλάτων διὰ τοῦτο δύο τὰ ἄπειρα ἐποίησεν, ὅτι καὶ ἐπὶ τὴν
αὔξην δοκεῖ ὑπερβάλλειν καὶ εἰς ἄπειρον ἰέναι καὶ ἐπὶ τὴν καθαίρεσιν.
§ 14. Ποιήσας μέντοι δύο οὐ χρῆται· οὔτε γὰρ ἐν τοῖς ἀριθμοῖς τὸ ἐπὶ τὴν
καθαίρεσιν ἄπειρον ὑπάρχει (ἡ γὰρ μονὰς ἐλάχιστον), οὔτε <τὸ> ἐπὶ τὴν
αὔξην (μέχρι γὰρ δεκάδος ποιεῖ τὸν ἀριθμόν).
| [3,8] CHAPITRE VIII.
§ 1. D'un autre côté, si l'on nie absolument l'existence de l'infini, on
ne se crée pas moins d'impossibilités; car il faudrait alors que le temps
eût un commencement et une fin; il faudrait que les grandeurs ne fussent
pas divisibles en grandeurs et que le nombre ne fût pas infini.
§ 2. Mais comme après les considérations qui viennent d'être
présentées, il semble également impossible que l'infini soit et ne soit pas,
il faut évidemment en conclure qu'en un sens l'infini existe et qu'en un
sens il n'existe point.
§ 3. Être peut signifier tantôt être en puissance, et tantôt être actuellement.
§ 4. Et l'infini peut se former également soit par addition soit par retranchement.
§ 5. Nous avons déjà démontré que la grandeur en acte ne peut être
infinie; mais elle peut l'être sous le rapport de la divisibilité; car il est aisé
de réfuter la théorie des lignes insécables. Reste donc que l'infini existe
en puissance.
§ 6. Mais quand on dit en puissance, on ne doit pas prendre cette
expression dans le sens où l'on dit, par exemple, que, si telle matière
peut devenir une statue, cette matière sera effectivement une statue; et
l'on ne doit pas croire qu'il y a de même un infini qui puisse exister
actuellement. Mais comme le mot d'Être a plusieurs acceptions, il faut
comprendre que l'infini peut être de la même manière qu'est le jour ou
qu'est la période des jeux Olympiques, parce que sans cesse il devient
autre et toujours autre. Car pour ces dates solennelles des Jeux, on peut
distinguer aussi la puissance et l'acte puisque l'on compte les
Olympiades à la fois par les jeux qui peuvent avoir lieu et par ceux qui
ont lieu en effet actuellement.
§ 7. Mais, évidemment, l'infini est tout autrement dans le temps, et
dans la succession, par exemple, des générations humaines, qu'il n'est
dans la divisibilité des grandeurs.
§ 8. D'une manière générale, l'infini existe en tant qu'il peut toujours
être pris quelque chose d'autre et de toujours autre, et que la quantité
qu'on prend, bien que toujours finie, n'en est pas moins toujours
différente et toujours différente. L'infini n'est donc pas à considérer
comme quelque chose de spécial et de précis, un homme, par exemple,
une maison; mais il faut comprendre l'existence de l'infini comme on dit
que sont le jour ou l'Olympiade, auxquels l'être n'appartient pas comme
étant telle on telle substance, mais qui sont toujours à devenir et à périr,
limité et fini sans doute, mais étant toujours autre et toujours autre.
§ 9. Mais il y a cette différence, en ce qui concerne les grandeurs,
que le phénomène a lieu, la quantité qu'on a prise subsistant et
demeurant, tandis que pour les générations successives des hommes et
pour le temps, ils s'éteignent et périssent de façon qu'il n'y ait jamais
d'interruption ni de lacune.
§ 10. Quant à l'infini par addition, il en est à peu près de même que
pour l'infini par division. Car soit une quantité finie ; l'infini par addition s'y
produit à l'inverse. En tant qu'on voit cette quantité finie divisée à l'infini, il
paraîtra qu'on ajoute indéfiniment à la quantité déterminée. En effet si,
dans une grandeur finie, on prend une partie qui reste toujours
déterminée, et que l'on continue de prendre dans la même proportion,
sans prendre une grandeur constamment égale de la grandeur entière,
on n'épuise pas le fini. Mais on l'épuisera, si l'on accroît la proportion de
telle sorte qu'on prenne toujours la même quantité, parce que toute
quantité finie doit finir par s'épuiser, si on lui ôte toujours une quantité
finie quelle qu'elle soit.
§ 11. L'infini n'existe pas, si on le considère, autrement que je ne le
fais ici ; mais il est de la façon que je viens de dire. La notion qu'il faut
s'en faire, c'est qu'il est en puissance, par divisibilité ou retranchement ;
et il n'est en acte que comme y est le jour, comme y est l'Olympiade. Il
est en puissance comme la matière : et il n'est jamais en soi comme le
fini. Pour ce qui regarde l'addition, l'infini y est en puissance de la même
façon à peu près où nous entendons qu'il y est aussi dans la division,
attendu qu'il serait toujours possible d'en prendre quelque quantité
nouvelle en dehors de ce qu'on a déjà.
§ 12. Cependant, l’infini par addition ne dépassera point la grandeur
finie tout entière, de même que dans la division il dépasse toujours la
quantité finie en étant plus petit qu'elle. Par conséquent, surpasser toute
la grandeur finie par addition successive n'est pas même possible en
puissance, puisque l'infini en acte n'existe pas et cumule attribut et
accident, dans le sens où les physiciens regardent comme infini le corps
qu'ils imaginent en dehors du monde, et dont la substance est l'air ou tel
autre élément analogue. Mais s'il ne se peut pas qu'un corps sensible de
ce genre soit infini en acte, il est évident que l'infini ne peut pas
davantage être en puissance par addition, si ce n'est à l'inverse de la
division, ainsi qu'on vient de le dire.
§ 13. Si donc Platon a également reconnu deux infinis, c'est que
l'infini semble tout aussi bien se produire par l'addition, qui se développe
sans cesse, que par le retranchement, qui peut de même être infini.
§ 14. Il est vrai qu'après avoir admis ces deux infinis, Platon n'en fait
aucun usage; car, selon lui, dans les nombres il n'y a pas d'infini par
retranchement, puisque l'unité est à ses yeux ce qu'il y a de plus petit; et
il n'y en a pas davantage par accroissement, puisqu'il ne compte plus le
nombre au-delà de la décade.
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