[2,6] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Ϛ'.
§ 1. Ἔστι μὲν οὖν ἄμφω αἴτια, καθάπερ εἴρηται, κατὰ συμβεβηκός – καὶ ἡ
τύχη καὶ τὸ αὐτόματον – ἐν τοῖς ἐνδεχομένοις γίγνεσθαι μὴ ἁπλῶς μηδ' ὡς
ἐπὶ τὸ πολύ, καὶ τούτων ὅσ' ἂν γένοιτο ἕνεκά του.
§ 2. Διαφέρει δ' ὅτι τὸ αὐτόματον ἐπὶ πλεῖόν ἐστι· τὸ μὲν γὰρ ἀπὸ τύχης
πᾶν ἀπὸ ταὐτομάτου, τοῦτο δ' οὐ πᾶν ἀπὸ τύχης.
§ 3. Ἡ μὲν γὰρ τύχη καὶ τὸ ἀπὸ τύχης ἐστὶν ὅσοις καὶ τὸ εὐτυχῆσαι ἂν
ὑπάρξειεν καὶ ὅλως πρᾶξις. Διὸ καὶ ἀνάγκη περὶ τὰ πρακτὰ εἶναι τὴν τύχην
(σημεῖον δ' ὅτι δοκεῖ ἤτοι ταὐτὸν εἶναι τῇ εὐδαιμονίᾳ ἡ εὐτυχία ἢ ἐγγύς, ἡ
δ' εὐδαιμονία πρᾶξίς τις· εὐπραξία γάρ), ὥσθ' ὁπόσοις μὴ ἐνδέχεται πρᾶξαι,
οὐδὲ τὸ ἀπὸ τύχης τι ποιῆσαι.
§ 4. Καὶ διὰ τοῦτο οὔτε ἄψυχον οὐδὲν οὔτε θηρίον οὔτε παιδίον οὐδὲν ποιεῖ
ἀπὸ τύχης, ὅτι οὐκ ἔχει προαίρεσιν· οὐδ' εὐτυχία οὐδ' ἀτυχία ὑπάρχει
τούτοις, εἰ μὴ καθ' ὁμοιότητα, ὥσπερ ἔφη Πρώταρχος εὐτυχεῖς εἶναι τοὺς
λίθους ἐξ ὧν οἱ βωμοί, ὅτι τιμῶνται, οἱ δὲ ὁμόζυγες αὐτῶν καταπατοῦνται.
§ 5. Τὸ δὲ πάσχειν ἀπὸ τύχης ὑπάρξει πως καὶ τούτοις, ὅταν ὁ πράττων τι
περὶ αὐτὰ πράξῃ ἀπὸ τύχης, ἄλλως δὲ οὐκ ἔστιν.
§ 6. Τὸ δ' αὐτόματον καὶ τοῖς ἄλλοις ζῴοις καὶ πολλοῖς τῶν ἀψύχων, οἷον ὁ
ἵππος αὐτόματος, φαμέν, ἦλθεν, ὅτι ἐσώθη μὲν ἐλθών, οὐ τοῦ σωθῆναι δὲ
ἕνεκα ἦλθε· καὶ ὁ τρίπους αὐτόματος κατέπεσεν· ἔστη μὲν γὰρ τοῦ καθῆσθαι
ἕνεκα, ἀλλ' οὐ τοῦ καθῆσθαι ἕνεκα κατέπεσεν.
§ 7. Ὥστε φανερὸν ὅτι ἐν τοῖς ἁπλῶς ἕνεκά του γιγνομένοις, ὅταν μὴ τοῦ
συμβάντος ἕνεκα γένηται ὧν ἔξω τὸ αἴτιον, τότε ἀπὸ τοῦ αὐτομάτου λέγομεν·
ἀπὸ τύχης δέ, τούτων ὅσα ἀπὸ τοῦ αὐτομάτου γίγνεται τῶν προαιρετῶν τοῖς
ἔχουσι προαίρεσιν.
§ 8. Σημεῖον δὲ τὸ μάτην, ὅτι λέγεται ὅταν μὴ γένηται τὸ ἕνεκα ἄλλου
ἐκείνου ἕνεκα, οἷον εἰ τὸ βαδίσαι λαπάξεως ἕνεκά ἐστιν, εἰ δὲ μὴ ἐγένετο
βαδίσαντι, μάτην φαμὲν βαδίσαι καὶ ἡ βάδισις ματαία, ὡς τοῦτο ὂν τὸ μάτην,
τὸ πεφυκὸς ἄλλου ἕνεκα, ὅταν μὴ περαίνῃ ἐκεῖνο οὗ ἕνεκα ἦν καὶ ἐπεφύκει,
ἐπεὶ εἴ τις λούσασθαι φαίη μάτην ὅτι οὐκ ἐξέλιπεν ὁ ἥλιος, γελοῖος ἂν εἴη·
οὐ γὰρ ἦν τοῦτο ἐκείνου ἕνεκα. Οὕτω δὴ τὸ αὐτόματον καὶ κατὰ τὸ ὄνομα ὅταν
αὐτὸ μάτην γένηται· κατέπεσεν γὰρ οὐ τοῦ πατάξαι ἕνεκεν ὁ λίθος· ἀπὸ τοῦ
αὐτομάτου ἄρα κατέπεσεν ὁ λίθος, ὅτι πέσοι ἂν ὑπὸ τινὸς καὶ τοῦ πατάξαι
ἕνεκα.
§ 9. Μάλιστα δ' ἐστὶ χωριζόμενον τοῦ ἀπὸ τύχης ἐν τοῖς φύσει γιγνομένοις·
ὅταν γὰρ γένηταί τι παρὰ φύσιν, τότε οὐκ ἀπὸ τύχης ἀλλὰ μᾶλλον ἀπὸ
ταὐτομάτου γεγονέναι φαμέν. Ἔστι δὲ καὶ τοῦτο ἕτερον· τοῦ μὲν γὰρ ἔξω τὸ
αἴτιον, τοῦ δ' ἐντός.
§ 10. Τί μὲν οὖν ἐστιν τὸ αὐτόματον καὶ τί ἡ τύχη, εἴρηται, καὶ τί
διαφέρουσιν ἀλλήλων.
§ 11. Τῶν δὲ τρόπων τῆς αἰτίας ἐν τοῖς ὅθεν ἡ ἀρχὴ τῆς κινήσεως ἑκάτερον
αὐτῶν· ἢ γὰρ τῶν φύσει τι ἢ τῶν ἀπὸ διανοίας αἰτίων ἀεί ἐστιν· ἀλλὰ τούτων
τὸ πλῆθος ἀόριστον.
§ 12. Ἐπεὶ δ' ἐστὶ τὸ αὐτόματον καὶ ἡ τύχη αἴτια ὧν ἂν ἢ νοῦς γένοιτο
αἴτιος ἢ φύσις, ὅταν κατὰ συμβεβηκὸς αἴτιόν τι γένηται τούτων αὐτῶν, οὐδὲν
δὲ κατὰ συμβεβηκός ἐστι πρότερον τῶν καθ' αὑτό, δῆλον ὅτι οὐδὲ τὸ κατὰ
συμβεβηκὸς αἴτιον πρότερον τοῦ καθ' αὑτό. Ὕστερον ἄρα τὸ αὐτόματον καὶ ἡ
τύχη καὶ νοῦ καὶ φύσεως· ὥστ' εἰ ὅτι μάλιστα τοῦ οὐρανοῦ αἴτιον τὸ
αὐτόματον, ἀνάγκη πρότερον νοῦν αἴτιον καὶ φύσιν εἶναι καὶ ἄλλων πολλῶν
καὶ τοῦδε τοῦ παντός.
| [2,6] CHAPITRE VI.
§ 1. Ainsi que je l'ai dit plus haut, le hasard et le spontané, c'est-à-dire
ce qui se produit de soi-même, sont tous deux des causes indirectes
et accidentelles, dans les choses qui ne peuvent être ni absolument
toujours, ni dans la majorité des cas, et parmi ces choses, dans celles
qu'on peut regarder comme se produisant en vue d'une certaine fin.
§ 2. La différence entre le hasard et le spontané, c'est que le
spontané, ou ce qui arrive de soi-même, est plus compréhensif que le
hasard, attendu que tout hasard est du spontané, tandis que tout
spontané n'est pas du hasard.
§ 3. En effet, le hasard et tout ce qui est de hasard n'est jamais
rapporté qu'aux êtres qui peuvent avoir aussi un hasard heureux, du
bonheur, et d'une manière générale, une activité. C'est là ce qui fait
encore que nécessairement le hasard ou la fortune ne peut concerner
que les choses où l'activité est possible ; et ce qui le prouve, c'est que la
prospérité se confond avec le bonheur, ou du moins s'en rapproche
beaucoup ; et que le bonheur est en effet une activité d'un certain genre,
puisque c'est une activité qui réussit et fait bien. J'en conclus que les
êtres auxquels il n'est pas permis d'agir, ne peuvent rien faire non plus
qui soit attribuable au hasard.
§ 4. C'est pour cela que ni l'être inanimé, ni la brute, ni même
l'enfant, ne font rien qu'on puisse qualifier de hasard, parce qu'ils n'ont
pas de préférence libre et réfléchie dans leurs actes. Quand donc on
parle pour ces êtres de bonheur et de malheur, ce n'est que par une
simple assimilation, tout comme Protarque prétendait que les pierres qui
entrent dans la construction des autels, sont heureuses parce qu'on les
adore, tandis que d'autres pierres de la même nature qu'elles sont
foulées aux pieds.
§ 5. Mais il se peut que les êtres que nous venons de nommer
souffrent par hasard de certaine façon, quand on fait quelqu'acte qui les
concerne et qu'on le fait par hasard ; mais autrement ce n'est pas possible.
§ 6. Quant au spontané, qui se produit de lui seul, on le trouve à la
fois dans des animaux autres que l'homme, et même dans la plupart des
êtres inanimés. Par exemple, un cheval s'est mis de lui-même en marche
spontanément, ce mouvement lui a bien sauvé la vie ; mais il ne l'avait
pas fait en vue de son salut. Autre exemple ; le trépied est tombé
fortuitement et de lui-même ; dans sa chute, il s'est placé de manière
qu'on pût s'asseoir dessus ; mais le trépied n'est pas tombé pour offrir un
siège à quelqu'un.
§ 7. Il est donc évident que, dans les choses qui arrivent en général
en vue de quelque fin, quand une chose dont la cause est extérieure
arrive sans que ce soit pour l'effet même qui se produit, on dit que cette
chose se produit spontanément et d'elle-même. On dirait au contraire
que c'est du hasard, si c'était de ces choses qui se produisent
fortuitement dans les actes libres des êtres qui sont donnés de libre arbitre.
§ 8. La preuve, c'est qu'on dit qu'une chose est faite en vain, quand
le résultat en vue duquel ou agissait ne se produit pas, mais que se
produit seulement la chose faite en vue de ce résultat. Par exemple, on
se promène pour se relâcher le ventre ; mais si le relâchement du ventre
ne suit pas la promenade, on dit que l'on s'est promené en vain et que la
promenade a été vaine. C'est ainsi que l'on dit qu'une chose a été faite
en vain, quand, faite naturellement pour une autre, elle n'accomplit pas
l'objet qu'elle avait pour fin, et pour lequel la nature l'avait faite. Ce serait
un non sens ridicule de dire qu'on s'est baigné en vain, parce qu'il n'a
point eu d'éclipse de soleil ; puisqu'en effet le bain n'a pas été pris en vue
de l'éclipse de soleil qui a manqué. Ainsi, comme l'indique l'étymologie
même du mot en grec, on dit d'une chose qu'elle est spontanée, et est
arrivée de soi-même, quand cette chose même a été vaine ; et, par
exemple, la pierre est tombée sans que ce fût pour donner un coup à
quelqu'un ; elle est donc, en ce cas, tombée spontanément et
fortuitement, puisqu'elle pourrait aussi tomber par la volonté formelle de
quelqu'un qui aurait l'intention de porter un coup à une autre personne.
§ 9. C'est surtout dans les choses qui se produisent par le fait seul de
la nature, qu'on peut distinguer et séparer le hasard du spontané. Quand
un phénomène a lieu contre les lois naturelles, nous disons qu'il est
spontané bien plutôt que nous ne disons que c'est un hasard ; car il y a
cette différence que la cause est intérieure pour l'un, et toute externe
pour l'autre.
§ 10. On doit voir par ce qui vient d'être dit ce qu'on entend par le hasard
et le spontané ; on doit voir, en outre, les différences de l'un et de l'autre.
§ 11. Quant à leur mode d'action comme causes, tous deux doivent
être également classés parmi les causes d'où vient le principe du
mouvement ; car ils sont causes de choses qui sont dans la nature ou
qui viennent de l'Intelligence ; mais le nombre des phénomènes est
indéterminé.
§ 12. D'autre part, comme le hasard et le spontané sont causes de
choses que l'Intelligence ou la nature pourrait produire, à savoir toutes
les fois que l'Intelligence et la nature produisent quelque chose
accidentellement ; et comme ce qui est accidentel ne peut être antérieur
aux choses en soi, il est clair que jamais non plus la cause accidentelle
n'est antérieure à la cause essentielle. Donc, le hasard et le spontané ne
viennent qu'après l'Intelligence et la nature, du telle sorte que si le
spontané était à toute force la cause du ciel, il n'en faudrait pas moins
nécessairement que l'Intelligence et la nature fussent les causes
antérieures de bien d'autres choses, et les causes de tout cet univers.
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