[10,1175] (1175a)
(1) ἔσται ἐν τῇ ἐνεργείᾳ ἡ ἡδονή· ὁμοίων γὰρ ὄντων καὶ πρὸς ἄλληλα τὸν αὐτὸν τρόπον ἐχόντων τοῦ τε παθητικοῦ καὶ τοῦ ποιητικοῦ ταὐτὸ πέφυκε γίνεσθαι. Πῶς οὖν οὐδεὶς συνεχῶς ἥδεται; ἢ κάμνει; πάντα γὰρ τὰ ἀνθρώπεια ἀδυνατεῖ (5)
συνεχῶς ἐνεργεῖν. Οὐ γίνεται οὖν οὐδ' ἡδονή· ἕπεται γὰρ τῇ ἐνεργείᾳ. Ἔνια
δὲ τέρπει καινὰ ὄντα, ὕστερον δὲ οὐχ ὁμοίως διὰ ταὐτό· τὸ μὲν γὰρ πρῶτον
παρακέκληται ἡ διάνοια καὶ διατεταμένως περὶ αὐτὰ ἐνεργεῖ, ὥσπερ κατὰ τὴν
ὄψιν οἱ ἐμβλέποντες, μετέπειτα δ' οὐ τοιαύτη ἡ ἐνέργεια ἀλλὰ (10)
παρημελημένη· διὸ καὶ ἡ ἡδονὴ ἀμαυροῦται. Ὀρέγεσθαι δὲ τῆς ἡδονῆς οἰηθείη
τις ἂν ἅπαντας, ὅτι καὶ τοῦ ζῆν ἅπαντες ἐφίενται· ἡ δὲ ζωὴ ἐνέργειά τις
ἐστί, καὶ ἕκαστος περὶ ταῦτα καὶ τούτοις ἐνεργεῖ ἃ καὶ μάλιστ' ἀγαπᾷ, οἷον
ὁ μὲν μουσικὸς τῇ ἀκοῇ περὶ τὰ μέλη, ὁ δὲ φιλομαθὴς τῇ διανοίᾳ περὶ τὰ
(15) θεωρήματα, οὕτω δὲ καὶ τῶν λοιπῶν ἕκαστος· ἡ δ' ἡδονὴ τελειοῖ τὰς
ἐνεργείας, καὶ τὸ ζῆν δή, οὗ ὀρέγονται. Εὐλόγως οὖν καὶ τῆς ἡδονῆς
ἐφίενται· τελειοῖ γὰρ ἑκάστῳ τὸ ζῆν, αἱρετὸν ὄν. Πότερον δὲ διὰ τὴν ἡδονὴν
τὸ ζῆν αἱρούμεθα ἢ διὰ τὸ ζῆν τὴν ἡδονήν, ἀφείσθω ἐν τῷ παρόντι.
Συνεζεῦχθαι μὲν γὰρ ταῦτα (20) φαίνεται καὶ χωρισμὸν οὐ δέχεσθαι· ἄνευ τε
γὰρ ἐνεργείας οὐ γίνεται ἡδονή, πᾶσάν τε ἐνέργειαν τελειοῖ ἡ ἡδονή.
V. Ὅθεν δοκοῦσι καὶ τῷ εἴδει διαφέρειν. Τὰ γὰρ ἕτερα τῷ εἴδει ὑφ' ἑτέρων
οἰόμεθα τελειοῦσθαι (οὕτω γὰρ φαίνεται καὶ τὰ φυσικὰ καὶ τὰ ὑπὸ τέχνης,
οἷον ζῷα καὶ δένδρα καὶ γραφὴ καὶ ἄγαλμα (25) καὶ οἰκία καὶ σκεῦος)·
ὁμοίως δὲ καὶ τὰς ἐνεργείας τὰς διαφερούσας τῷ εἴδει ὑπὸ διαφερόντων εἴδει
τελειοῦσθαι. Διαφέρουσι δ' αἱ τῆς διανοίας τῶν κατὰ τὰς αἰσθήσεις καὶ
αὐταὶ ἀλλήλων κατ' εἶδος· καὶ αἱ τελειοῦσαι δὴ ἡδοναί. Φανείη δ' ἂν τοῦτο
καὶ ἐκ τοῦ συνῳκειῶσθαι τῶν ἡδονῶν ἑκάστην (30) τῇ ἐνεργείᾳ ἣν τελειοῖ.
Συναύξει γὰρ τὴν ἐνέργειαν ἡ οἰκεία ἡδονή. Μᾶλλον γὰρ ἕκαστα κρίνουσι καὶ
ἐξακριβοῦσιν οἱ μεθ' ἡδονῆς ἐνεργοῦντες, οἷον γεωμετρικοὶ γίνονται οἱ
χαίροντες τῷ γεωμετρεῖν, καὶ κατανοοῦσιν ἕκαστα μᾶλλον, ὁμοίως δὲ καὶ οἱ
φιλόμουσοι καὶ φιλοικοδόμοι καὶ τῶν ἄλλων (35) ἕκαστοι ἐπιδιδόασιν εἰς τὸ
οἰκεῖον ἔργον χαίροντες αὐτῷ· συναύξουσι δὲ αἱ ἡδοναί, τὰ δὲ συναύξοντα
οἰκεῖα· (1175b) (1) τοῖς ἑτέροις δὲ τῷ εἴδει καὶ τὰ οἰκεῖα ἕτερα τῷ εἴδει.
Ἔτι δὲ μᾶλλον τοῦτ' ἂν φανείη ἐκ τοῦ τὰς ἀφ' ἑτέρων ἡδονὰς ἐμποδίους ταῖς
ἐνεργείαις εἶναι. Οἱ γὰρ φίλαυλοι ἀδυνατοῦσι τοῖς λόγοις προσέχειν, ἐὰν
κατακούσωσιν αὐλοῦντος, μᾶλλον χαίροντες (5) αὐλητικῇ τῆς παρούσης
ἐνεργείας· ἡ κατὰ τὴν αὐλητικὴν οὖν ἡδονὴ τὴν περὶ τὸν λόγον ἐνέργειαν
φθείρει. Ὁμοίως δὲ τοῦτο καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων συμβαίνει, ὅταν ἅμα περὶ δύο
ἐνεργῇ· ἡ γὰρ ἡδίων τὴν ἑτέραν ἐκκρούει, κἂν πολὺ διαφέρῃ κατὰ τὴν ἡδονήν,
μᾶλλον, ὥστε μηδ' ἐνεργεῖν κατὰ (10) τὴν ἑτέραν. Διὸ χαίροντες ὁτῳοῦν
σφόδρα οὐ πάνυ δρῶμεν ἕτερον, καὶ ἄλλα ποιοῦμεν ἄλλοις ἠρέμα ἀρεσκόμενοι,
οἷον καὶ ἐν τοῖς θεάτροις οἱ τραγηματίζοντες, ὅταν φαῦλοι οἱ ἀγωνιζόμενοι
ὦσι, τότε μάλιστ' αὐτὸ δρῶσιν. Ἐπεὶ δ' ἡ μὲν οἰκεία ἡδονὴ ἐξακριβοῖ τὰς
ἐνεργείας καὶ χρονιωτέρας καὶ (15) βελτίους ποιεῖ, αἱ δ' ἀλλότριαι
λυμαίνονται, δῆλον ὡς πολὺ διεστᾶσιν. Σχεδὸν γὰρ αἱ ἀλλότριαι ἡδοναὶ
ποιοῦσιν ὅπερ αἱ οἰκεῖαι λῦπαι· φθείρουσι γὰρ τὰς ἐνεργείας αἱ οἰκεῖαι
λῦπαι, οἷον εἴ τῳ τὸ γράφειν ἀηδὲς καὶ ἐπίλυπον ἢ τὸ λογίζεσθαι· ὃ μὲν γὰρ
οὐ γράφει, ὃ δ' οὐ λογίζεται, λυπηρᾶς οὔσης τῆς (20) ἐνεργείας. Συμβαίνει
δὴ περὶ τῆς ἐνεργείας τοὐναντίον ἀπὸ τῶν οἰκείων ἡδονῶν τε καὶ λυπῶν·
οἰκεῖαι δ' εἰσὶν αἱ ἐπὶ τῇ ἐνεργείᾳ καθ' αὑτὴν γινόμεναι. Αἱ δ' ἀλλότριαι
ἡδοναὶ εἴρηται ὅτι παραπλήσιόν τι τῇ λύπῃ ποιοῦσιν· φθείρουσι γάρ, πλὴν
οὐχ ὁμοίως. Διαφερουσῶν δὲ τῶν ἐνεργειῶν ἐπιεικείᾳ (25) καὶ φαυλότητι, καὶ
τῶν μὲν αἱρετῶν οὐσῶν τῶν δὲ φευκτῶν τῶν δ' οὐδετέρων, ὁμοίως ἔχουσι καὶ
αἱ ἡδοναί· καθ' ἑκάστην γὰρ ἐνέργειαν οἰκεία ἡδονὴ ἔστιν. Ἡ μὲν οὖν τῇ
σπουδαίᾳ οἰκεία ἐπιεικής, ἡ δὲ τῇ φαύλῃ μοχθηρά· καὶ γὰρ αἱ ἐπιθυμίαι τῶν
μὲν καλῶν ἐπαινεταί, τῶν δ' αἰσχρῶν ψεκταί. (30) Οἰκειότεραι δὲ ταῖς
ἐνεργείαις αἱ ἐν αὐταῖς ἡδοναὶ τῶν ὀρέξεων· αἳ μὲν γὰρ διωρισμέναι εἰσὶ
καὶ τοῖς χρόνοις καὶ τῇ φύσει, αἳ δὲ σύνεγγυς ταῖς ἐνεργείαις, καὶ
ἀδιόριστοι οὕτως ὥστ' ἔχειν ἀμφισβήτησιν εἰ ταὐτόν ἐστιν ἡ ἐνέργεια τῇ
ἡδονῇ. Οὐ μὴν ἔοικέ γε ἡ ἡδονὴ διάνοια εἶναι οὐδ' αἴσθησις (ἄτοπον (35)
γάρ), ἀλλὰ διὰ τὸ μὴ χωρίζεσθαι φαίνεταί τισι ταὐτόν. Ὥσπερ οὖν αἱ
ἐνέργειαι ἕτεραι, καὶ αἱ ἡδοναί.
| [10,1175] (1175a) seront ce qu'ils doivent être,
l'activité sera une source de plaisirs. Car l'être destiné à recevoir
l'impression, et l'objet destiné à la produire, étant semblables, et
disposés de la même manière, à l'égard l'un de l'autre, il en doit
naturellement résulter le même effet.
Comment donc n'y a-t-il personne qui jouisse d'un plaisir constant? C'est
que l'homme est faible, et que tout ce qui tient à l'humanité ne saurait
être dans un état d'activité continuelle. Il n'y a donc point de plaisir
(continuel) : car le plaisir suit l'action; certains objets nous plaisent,
quand ils sont nouveaux; mais ensuite ils ne nous plaisent plus autant,
par la même cause. En effet, d'abord l'esprit s'y arrête, et y applique
avec ardeur toute son activité, comme on applique sa vue quand on regarde
avec attention; bientôt il n'y a plus une aussi grande énergie d'action
mais on se relâche, et le plaisir a aussi moins de vivacité.
On pourrait croire que tous les hommes désirent le plaisir, parce que tous
aiment la vie; car elle est un genre particulier d'activité, et chacun en
montre davantage pour les choses qu'il aime, et par l'espèce particulière
de facultés qui peuvent s'y appliquer, comme le musicien, par l'ouïe, pour
les chants et la mélodie; l'homme avide d'instruction, par l'esprit, pour
les contemplations ou les propositions générales, et ainsi du reste pour
chaque genre. Mais le plaisir qu'ils trouvent à exercer leurs facultés en
perfectionne les actes; et c'est lui, par conséquent, qui rend plus
parfaite la vie dont nous venons de voir que tous les hommes sont avides.
C'est donc avec raison qu'ils sont aussi avides du plaisir; car c'est lui
qui rend plus parfaite, pour chaque individu, cette vie que la nature lui
rend si désirable. Mais est-ce le plaisir qui fait aimer la vie, ou la vie
qui fait aimer le plaisir? Nous n'examinerons point cette question, quant
à présent; car ces deux choses semblent unies par un lien indissoluble,
puisqu'il n'y a point de plaisir sans action, et que c'est le plaisir qui
donne à tous nos actes leur degré de perfection.
V. C'est pour cela qu'il semble y avoir différentes sortes de plaisirs,
parce que nous croyons que les actes d'espèces diverses ne peuvent être
exécutés que par des moyens différents, ainsi qu'on le voit dans les
objets de la nature et dans ceux de l'art, comme animaux, arbres,
tableaux, statues, palais, vases ou meubles. De même, il semble que les
diverses espèces d'actions ne peuvent s'exécuter avec perfection que par
des facultés d'espèce différente. Or, les actes de l'intelligence
diffèrent de ceux des sens, et (dans chaque genre) ils diffèrent d'espèce,
les uns à l'égard des autres, et, par conséquent aussi, les plaisirs qui
les rendent parfaits. C'est ce qu'on peut voir par l'union intime qui
existe entre les divers plaisirs et chacun des actes à la perfection
desquels ils contribuent, puisque le plaisir qui se joint à un acte lui
donne un nouveau degré d'énergie. Car on juge mieux des choses, et on les
exécute avec plus de précision et de succès, quand on y trouve du plaisir.
Ainsi, ceux qui trouvent du plaisir à l'étude de la géométrie, deviennent
plus habiles géomètres ; ils saisissent et comprennent mieux les détails
(d'une démonstration). Il en est de même de ceux qui aiment la poésie,
l'architecture, ou tout autre genre de travaux et d'occupations; chacun
d'eux fait des progrès, ou obtient des succès, dans le genre auquel il
s'applique, parce qu'il y trouve du plaisir. Ce plaisir s'accroît donc en
même temps (que le talent qu'il perfectionne): or, les choses qui ont un
progrès commun, ont entre elles une union naturelle; (1175b) et si les
unes diffèrent d'espèce, les autres en différeront également.
Ceci paraîtra plus évident encore par la difficulté qu'on trouve à
exécuter les actes d'une espèce, quand on est vivement touché des plaisirs
d'une espèce différente. Car ceux qui aiment à entendre jouer de la flûte,
ne peuvent être attentifs à la conversation, pendant que quelqu'un joue de
cet instrument, prenant plus de plaisir à ce dernier genre d'action qu'à
celle qu'ils font actuellement. Le plaisir que leur donne l'art du joueur
de flûte dégrade donc et corrompt, pour ainsi dire, en eux l'action de la
conversation. La même chose a lieu, dans d'autres circonstances, lorsqu'on
s'occupe de deux choses à la fois : car celle qui plaît davantage détourne
notre attention de l'autre, et cela d'autant plus que le plaisir que nous
donne la première est plus grand; de sorte que nous sommes tout-à-fait
inertes, s'il le faut ainsi dire, par rapport à l'autre. Voilà pourquoi,
quand une chose nous cause un plaisir très vif, nous ne pouvons nous
décider à en faire une autre ; et quand nous ne sommes que médiocrement
intéressés par certains objets, nous faisons volontiers autre chose, comme
il arrive à ceux qui ont coutume de manger des friandises dans le théâtre;
car ils prennent, pour cela, le moment où la scène est occupée par de
mauvais acteurs.
Puis donc que le plaisir propre à certains actes leur donne de la
précision, les rend plus parfaits et plus habituels, tandis que les
plaisirs qui y sont étrangers, les rendent, au contraire, plus imparfaits,
il est évident qu'ils diffèrent beaucoup les uns des autres. Car les
plaisirs étrangers à la nature des actes, font presque le même effet que
des peines qui seraient propres à ces mêmes actes, et dont l'effet est
également de les détériorer ou de les dégrader. Par exemple, si un homme
trouve de la peine à écrire, et un autre à suivre un calcul, ou un
raisonnement, ou si cette occupation leur est désagréable, l'un ne voudra
pas écrire, ni l'autre calculer ou raisonner, parce que ces actions leur
sont pénibles. Les plaisirs et les peines propres à une nature d'actions
ont donc, pour ces actions, des résultats tout-à-fait opposés. Or,
j'appelle propres, les plaisirs ou les peines qui résultent immédiatement
et nécessairement des actes eux-mêmes: mais les plaisirs étrangers à la
nature des actes, produisent, comme je viens de le dire, à peu près le
même effet que la peine; car ils détériorent ces actes, mais non pas de la
même manière (que la peine proprement dite).
Mais, puisque les actions différent, selon qu'elles sont bonnes ou
mauvaises, et puisqu'il faut préférer les unes et fuir les autres, tandis
qu'il y en a qui sont indifférentes, il en doit être de même des plaisirs,
car il y a un plaisir propre à chaque action; et, par conséquent, celui
qui est propre à une action vertueuse, est un plaisir vertueux, et celui
qui est propre à une mauvaise action, est vicieux. En effet, le désir de
ce qui est honnête est toujours louable, tandis qu'on mérite le blâme,
quand on désire ce qui est honteux et vil. Au reste, les plaisirs qui se
joignent aux actes leur appartiennent plus proprement que les désirs. Car
ceux-ci sont déterminés par le temps et par leur nature, au lieu que les
autres accompagnent les actes, et sont tellement impossibles à distinguer
ou à définir, qu'on ne saurait dire si l'acte et le plaisir ne sont pas
une seule et même chose.
Toutefois il ne paraît pas que le plaisir soit une pensée ni une
sensation; car cela serait absurde : mais, comme il est inséparable de
l'une et de l'autre, quelques personnes croient qu'il est la même chose.
Cependant, les plaisirs sont différents comme les actes.
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