HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Aristote, Métaphysique, livre XI

Chapitre 8

  Chapitre 8

[11,8] CHAPITRE VIII. (15) Ἐπεὶ δὲ τὸ ἁπλῶς ὂν κατὰ πλείους λέγεται τρόπους, ὧν εἷς ἐστὶν κατὰ συμβεβηκὸς εἶναι λεγόμενος, σκεπτέον πρῶτον περὶ τοῦ οὕτως ὄντος. Ὅτι μὲν οὖν οὐδεμία τῶν παραδεδομένων ἐπιστημῶν πραγματεύεται περὶ τὸ συμβεβηκός, δῆλον νοὔτε γὰρ οἰκοδομικὴ σκοπεῖ τὸ συμβησόμενον τοῖς τῇ (20) οἰκίᾳ χρησομένοις, οἷον εἰ λυπηρῶς τοὐναντίον οἰκήσουσιν, οὔθ' ὑφαντικὴ οὔτε σκυτοτομικὴ οὔτε ὀψοποική, τὸ δὲ καθ' αὑτὴν ἴδιον ἑκάστη τούτων σκοπεῖ τῶν ἐπιστημῶν μόνον, τοῦτο δ' ἐστὶ τὸ οἰκεῖον τέλος· οὐδὲ μουσικὸν καὶ γραμματικόν, οὐδὲ τὸν ὄντα μουσικὸν ὅτι γενόμενος γραμματικὸς ἅμα ἔσται τὰ (25) ἀμφότερα, πρότερον οὐκ ὤν, δὲ μὴ ἀεὶ ὂν ἔστιν, ἐγένετο τοῦτο, ὥσθ' ἅμα μουσικὸς ἐγένετο καὶ γραμματικός, τοῦτο δὲ οὐδεμία ζητεῖ τῶν ὁμολογουμένως οὐσῶν ἐπιστημῶν πλὴν σοφιστική· περὶ τὸ συμβεβηκὸς γὰρ αὕτη μόνη πραγματεύεται, διὸ Πλάτων οὐ κακῶς εἴρηκε φήσας τὸν σοφιστὴν (30) περὶ τὸ μὴ ὂν διατρίβειν· ὅτι δ' οὐδ' ἐνδεχόμενόν ἐστιν εἶναι τοῦ συμβεβηκότος ἐπιστήμην, φανερὸν ἔσται πειραθεῖσιν ἰδεῖν τί ποτ' ἐστὶ τὸ συμβεβηκός. Πᾶν δή φαμεν εἶναι τὸ μὲν ἀεὶ καὶ ἐξ ἀνάγκης (ἀνάγκης δ' οὐ τῆς κατὰ τὸ βίαιον λεγομένης ἀλλ' χρώμεθα ἐν τοῖς κατὰ τὰς ἀποδείξεις), (35) τὸ δ' ὡς ἐπὶ τὸ πολύ, τὸ δ' οὔθ' ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ οὔτ' ἀεὶ καὶ ἐξ ἀνάγκης ἀλλ' ὅπως ἔτυχεν· οἷον ἐπὶ κυνὶ γένοιτ' ἂν ψῦχος, ἀλλὰ τοῦτ' οὔτ' ὡς ἀεὶ καὶ ἐξ ἀνάγκης οὔθ' ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ γίγνεται, συμβαίη δέ ποτ' ἄν. (1065a) (1) Ἔστι δὴ τὸ συμβεβηκὸς γίγνεται μέν, οὐκ ἀεὶ δ' οὐδ' ἐξ ἀνάγκης οὐδ' ὡς ἐπὶ τὸ πολύ. Τί μὲν οὖν ἐστὶ τὸ συμβεβηκός, εἴρηται, διότι δ' οὐκ ἔστιν ἐπιστήμη τοῦ τοιούτου, δῆλον· ἐπιστήμη μὲν γὰρ πᾶσα τοῦ (5) ἀεὶ ὄντος ὡς ἐπὶ τὸ πολύ, τὸ δὲ συμβεβηκὸς ἐν οὐδετέρῳ τούτων ἐστίν. Ὅτι δὲ τοῦ κατὰ συμβεβηκὸς ὄντος οὐκ εἰσὶν αἰτίαι καὶ ἀρχαὶ τοιαῦται οἷαίπερ τοῦ καθ' αὑτὸ ὄντος, δῆλον· ἔσται γὰρ ἅπαντ' ἐξ ἀνάγκης. Εἰ γὰρ τόδε μὲν ἔστι τοῦδε ὄντος τόδε δὲ τοῦδε, τοῦτο δὲ μὴ ὅπως ἔτυχεν ἀλλ' ἐξ (10) ἀνάγκης, ἐξ ἀνάγκης ἔσται καὶ οὗ τοῦτ' ἦν αἴτιον ἕως τοῦ τελευταίου λεγομένου αἰτιατοῦ (τοῦτο δ' ἦν κατὰ συμβεβηκός), ὥστ' ἐξ ἀνάγκης ἅπαντ' ἔσται, καὶ τὸ ὁποτέρως ἔτυχε καὶ τὸ ἐνδέχεσθαι καὶ γενέσθαι καὶ μὴ παντελῶς ἐκ τῶν γιγνομένων ἀναιρεῖται. Κἂν μὴ ὂν δὲ ἀλλὰ γιγνόμενον τὸ (15) αἴτιον ὑποτεθῇ, ταὐτὰ συμβήσεται· πᾶν γὰρ ἐξ ἀνάγκης γενήσεται. γὰρ αὔριον ἔκλειψις γενήσεται ἂν τόδε γένηται, τοῦτο δ' ἐὰν ἕτερόν τι, καὶ τοῦτ' ἂν ἄλλο· καὶ τοῦτον δὴ τὸν τρόπον ἀπὸ πεπερασμένου χρόνου τοῦ ἀπὸ τοῦ νῦν μέχρι αὔριον ἀφαιρουμένου χρόνου ἥξει ποτὲ εἰς τὸ ὑπάρχον, ὥστ' ἐπεὶ (20) τοῦτ' ἔστιν, ἅπαντ' ἐξ ἀνάγκης τὰ μετὰ τοῦτο γενήσεται, ὥστε πάντα ἐξ ἀνάγκης γίγνεσθαι. Τὸ δ' ὡς ἀληθὲς ὂν καὶ κατὰ συμβεβηκὸς τὸ μέν ἐστιν ἐν συμπλοκῇ διανοίας καὶ πάθος ἐν ταύτῃ (διὸ περὶ μὲν τὸ οὕτως ὂν οὐ ζητοῦνται αἱ ἀρχαί, περὶ δὲ τὸ ἔξω ὂν καὶ χωριστόντὸ δ' οὐκ (25) ἀναγκαῖον ἀλλ' ἀόριστον, λέγω δὲ τὸ κατὰ συμβεβηκός· τοῦ τοιούτου δ' ἄτακτα καὶ ἄπειρα τὰ αἴτια. Τὸ δὲ ἕνεκά του ἐν τοῖς φύσει γιγνομένοις ἀπὸ διανοίας ἐστίν, τύχη δέ ἐστιν ὅταν τι τούτων γένηται κατὰ συμβεβηκός· ὥσπερ γὰρ καὶ ὄν ἐστι τὸ μὲν καθ' αὑτὸ τὸ δὲ κατὰ συμβεβηκός, οὕτω (30) καὶ αἴτιον. τύχη δ' αἰτία κατὰ συμβεβηκὸς ἐν τοῖς κατὰ προαίρεσιν τῶν ἕνεκά του γιγνομένοις, διὸ περὶ ταὐτὰ τύχη καὶ διάνοια· προαίρεσις γὰρ οὐ χωρὶς διανοίας. Τὰ δ' αἴτια ἀόριστα ἀφ' ὧν ἂν γένοιτο τὰ ἀπὸ τύχης, διὸ ἄδηλος ἀνθρωπίνῳ λογισμῷ καὶ αἴτιον κατὰ συμβεβηκός, ἁπλῶς (35) δ' οὐδενός. Ἀγαθὴ δὲ τύχη καὶ κακὴ ὅταν ἀγαθὸν φαῦλον ἀποβῇ· εὐτυχία δὲ καὶ δυστυχία περὶ μέγεθος τούτων. (1065b) (1) Ἐπεὶ δ' οὐθὲν κατὰ συμβεβηκὸς πρότερον τῶν καθ' αὑτό, οὐδ' ἄρ' αἴτια· εἰ ἄρα τύχη τὸ αὐτόματον αἴτιον τοῦ οὐρανοῦ, πρότερον νοῦς αἴτιος καὶ φύσις. [11,8] CHAPITRE VIII. L'être en général s'entend de plusieurs manières, et d'abord comme être accidentel : parlons donc de l'être accidentel. Il est de toute évidence qu'aucune des sciences que nous avons énumérées ne traite de l'accident. L'art de bâtir ne s'occupe nullement de ce qui peut arriver à ceux qui se serviront de la maison, de savoir, par exemple, si l'habitation de la maison leur sera désagréable ou leur fera plaisir. De même pour l'art du tisserand, pour celui du cordonnier, de même pour l'art culinaire. Chacune de ces sciences s'occupe uniquement de l'objet qui lui est propre, c'est-à-dire de son but propre ; aucune ne considère un être en tant que musicien, en tant que grammairien. Des raisonnements comme celui-ci : Un homme est musicien, il devient grammairien ; 179 donc il doit être à la fois l'un et l'autre. Mais il n'était pas l'un et l'autre auparavant. Or, ce qui n'existe pas de tous temps est devenu ; donc cet homme est devenu musicien et grammairien simultanément. De pareils raisonnements, dis-je, ne sont jamais ce que cherche une science reconnue par tous comme telle ; il n'y a que la Sophistique qui en fasse son objet. Elle seule, la Sophistique, traite de l'accident. Aussi le mot de Platon n'est-il pas sans justesse : La Sophistique, a-t-il dit, roule sur le non-être. On verra clairement que toute science de l'accident est impossible, si l'on examine avec attention la nature même de l'accident. Parmi les êtres, il en est qui existent toujours et nécessairement, non pas de cette nécessité qui n'est que l'effet de la violence, mais de celle-là qui est le fondement des démonstrations ; d'autres choses ne sont qu'ordinairement; d'autres enfin n'existent ni ordinairement, ni toujours et de toute nécessité, mais seulement suivant les circonstances. Qu'il fasse froid pendant la canicule, par exemple, c'est ce qui n'arrive ni toujours, ni nécessairement, ni dans le plus grand nombre des cas, c'est ce qui peut quelquefois arriver. L'accident est donc ce qui n'arrive ni toujours, ni de toute nécessité, ni dans le plus grand nombre des cas. (1065a) Voilà, selon nous, ce que c'est que l'accident. Quant à l'impossibilité d'une science de l'accident, elle est par là même évidente. En effet, toute science s'occupe ou de ce qui est éternellement, ou de ce qui est ordinairement. Or, l'accident n'est ni éternellement ni ordinairement. Il est évident d'ailleurs que les causes et les principes 180 de l'être accidentel ne sont pas du même genre que les causes et les principes de l'être en soi. Sans cela tout serait nécessaire. En effet, si, telle chose existant, telle autre chose existe, et que celle-là existe aussi telle autre existant, et qu'il en soit ainsi non pas selon les circonstances mais nécessairement, l'effet produit nécessairement doit être lui-même nécessaire; et l'on arrive ainsi jusqu'au dernier effet. Or, ce dernier effet, c'est l'accident. Tout serait donc alors nécessaire ; et c'est là la suppression absolue de l'action des circonstances sur les êtres qui deviennent, et de leur possibilité de devenir et de ne devenir pas : conséquence à laquelle on arrive encore, même en supposant que la cause n'est pas, mais devient. Car alors tout deviendra nécessairement. Il y aura demain une éclipse, si telle chose a lieu, et telle chose aura lieu à condition qu'une autre aura lieu elle-même, laquelle deviendra à une autre condition encore. Et si, d'un temps limité, si de ce temps qui sépare demain de l'instant actuel, on retranche sans cesse du temps, comme nous venons de faire, on finira par arriver à ce qui est présentement. Par conséquent, l'existence de ce qui est présentement entraînera nécessairement la production de tout ce qui devra suivre ; par conséquent, tout devient nécessairement. Pour l'être qui signifie le vrai et non plus l'accident, il consiste uniquement dans ce que la pensée affirme ou nie du sujet ; il est une modification de la pensée même ; aussi ne cherche-t-on pas les principes de cet être, mais ceux de l'être extérieur et indépendant. Quant à l'autre être, je veux dire l'être accidentel, c'est ce qui n'est pas nécessaire, c'est l'indéterminé. 181 Or, il n'y a aucun ordre dans les causes de l'être accidentel, et d'ailleurs elles sont en nombre infini : tandis que la cause finale est le fondement de tout ce ce qui se produit dans la nature, ou provient de la pensée. Le hasard, c'est toute production accidentelle soit de la nature, soit de la pensée. Le même rapport qu'il y a entre l'être en soi et l'être accidentel, existe aussi entre les causes de ces êtres. Le hasard est la cause accidentelle de ce qui se fait par intention et dans un certain but. Le hasard et la pensée se rapportent donc au même objet, n'y ayant pas de choix sans pensée. Mais les causes qui produisent les effets attribués au hasard sont indéterminées; d'où il suit que le hasard est impénétrable à la raison humaine, qu'il n'est qu'une cause accidentelle, ou pour mieux dire, qu'il n'est cause de rien. Un heureux, un fâcheux hasard, c'est l'arrivée d'un bien ou d'un mal; de grands biens ou de grands maux, voilà la prospérité et l'adversité. (1065b) De même que nul être accidentel n'est antérieur à un être en soi, de même il y a postériorité pour les causes de l'être accidentel. Admît-on que le ciel a pour cause le hasard ou un concours fortuit, il y aurait encore une cause antérieure, c'est l'intelligence et la nature.


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Dernière mise à jour : 3/12/2009