[7,14] XIV.
Φανερὸν δ' ἐξ αὐτῶν τούτων τὸ συμβαῖνον καὶ τοῖς (25) τὰς ἰδέας
λέγουσιν οὐσίας τε χωριστὰς εἶναι καὶ ἅμα τὸ εἶδος ἐκ τοῦ γένους ποιοῦσι
καὶ τῶν διαφορῶν. Εἰ γὰρ ἔστι τὰ εἴδη, καὶ τὸ ζῷον ἐν τῷ ἀνθρώπῳ καὶ
ἵππῳ, ἤτοι ἓν καὶ ταὐτὸν τῷ ἀριθμῷ ἐστὶν ἢ ἕτερον· τῷ μὲν γὰρ λόγῳ
δῆλον ὅτι ἕν· τὸν γὰρ αὐτὸν διέξεισι λόγον ὁ λέγων (30) ἐν ἑκατέρῳ. Εἰ οὖν
ἐστί τις ἄνθρωπος αὐτὸς καθ' αὑτὸν τόδε τι καὶ κεχωρισμένον, ἀνάγκη καὶ
ἐξ ὧν, οἷον τὸ ζῷον καὶ τὸ δίπουν, τόδε τι σημαίνειν καὶ εἶναι χωριστὰ καὶ
οὐσίας· ὥστε καὶ τὸ ζῷον. Εἰ μὲν οὖν τὸ αὐτὸ καὶ ἓν τὸ ἐν τῷ ἵππῳ καὶ τῷ
ἀνθρώπῳ, ὥσπερ σὺ σαυτῷ, πῶς τὸ ἓν ἐν τοῖς οὖσι χωρὶς ἓν ἔσται,
(1039b)(1) καὶ διὰ τί οὐ καὶ χωρὶς αὑτοῦ ἔσται τὸ ζῷον τοῦτο;
Ἔπειτα εἰ μὲν μεθέξει τοῦ δίποδος καὶ τοῦ πολύποδος, ἀδύνατόν τι
συμβαίνει, τἀναντία γὰρ ἅμα ὑπάρξει αὐτῷ ἑνὶ καὶ τῷδέ τινι ὄντι·
εἰ δὲ μή, τίς ὁ τρόπος (5) ὅταν εἴπῃ τις τὸ ζῷον εἶναι δίπουν ἢ πεζόν;
Ἀλλ' ἴσως σύγκειται καὶ ἅπτεται ἢ μέμικται· ἀλλὰ πάντα ἄτοπα. Ἀλλ' ἕτερον
ἐν ἑκάστῳ· οὐκοῦν ἄπειρα ὡς ἔπος εἰπεῖν ἔσται ὧν ἡ οὐσία ζῷον· οὐ γὰρ
κατὰ συμβεβηκὸς ἐκ ζῴου ἅνθρωπος. Ἔτι πολλὰ ἔσται αὐτὸ τὸ ζῷον·
οὐσία τε γὰρ τὸ (10) ἐν ἑκάστῳ ζῷον (οὐ γὰρ κατ' ἄλλο λέγεται· εἰ δὲ μή, ἐξ
ἐκείνου ἔσται ὁ ἄνθρωπος καὶ γένος αὐτοῦ ἐκεῖνο), καὶ ἔτι ἰδέαι ἅπαντα ἐξ
ὧν ὁ ἄνθρωπος· οὐκοῦν οὐκ ἄλλου μὲν ἰδέα ἔσται ἄλλου δ' οὐσία
(ἀδύνατον γάρ)· αὐτὸ ἄρα ζῷον ἓν ἕκαστον ἔσται τῶν ἐν τοῖς ζῴοις. Ἔτι ἐκ
τίνος τοῦτο, καὶ (15) πῶς ἐξ αὐτοῦ ζῴου; Ἢ πῶς οἷόν τε εἶναι τὸ ζῷον, ᾧ
οὐσία τοῦτο αὐτό, παρ' αὐτὸ τὸ ζῷον; Ἔτι δ' ἐπὶ τῶν αἰσθητῶν ταῦτά τε
συμβαίνει καὶ τούτων ἀτοπώτερα. Εἰ δὴ ἀδύνατον οὕτως ἔχειν, δῆλον ὅτι
οὐκ ἔστιν εἴδη αὐτῶν οὕτως ὥς τινές φασιν.
| [7,14] XIV.
On voit assez les conséquences de ce qui précède, pour le système
de ceux qui admettent les idées comme substances, et comme ayant une
existence indépendante, et qui, en même temps, constituent l'idée avec le
genre et les différences. Si dans l'homme, si dans le cheval il y a les idées
et l'animal, ou l'animal et les idées sont une seule et même chose,
numériquement, ou bien ils différent. Or, il est évident qu'il y a unité de
notion : pour définir l'un et l'autre terme il faudrait énumérer les mêmes
caractères. Si donc il y a un homme en soi ayant une existence
déterminée et indépendante, nécessairement alors, ce qui le constitue,
l'animal et le bipède ont, eux aussi, une existence déterminée, sont
indépendants, sont des substances; et par conséquent l'animal en soi. Or,
supposons que l'animal en soi réside dans le cheval au même titre que tu
es dans toi-même, comment sera- t-il un dans des êtres qui existent
séparément; et pourquoi, dans ce cas, l'animal dont nous parlons ne sera-t-il
pas séparé de lui-même ?
Ce n'est pas tout : si l'animal en soi participe de l'animal qui n'a que
deux pieds et de celui qui en a un plus grand nombre, il en résulte une
impossibilité. Le même être, un être un et déterminé, réunirait à la fois les
contraires.
Mais s'il n'y a pas participation, à quel titre dira- t-on que l'animal est
un bipède, qu'il est un être qui marche? Y aurait-il par hasard
composition, contact, ou mélange ? mais toutes ces suppositions sont
absurdes. L'animal serait-il différent dans chaque individu ? il y aurait
donc alors une infinité d'êtres, si je puis dire, qui auraient l'animal pour
substance; car l'homme n'est pas un accident de l'animal. Ajoutez que
l'animal en soi serait multiple. D'un côté, en effet, l'animal dans chaque
individu est substance; il n'est point l'attribut d'un autre être, sinon ce
serait cet être qui constituerait l'homme, et qui en serait le genre. D'un
autre côté enfin toutes les choses qui constituent l'homme sont des idées.
L'animal ne sera donc pas l'idée d'une chose, la substance d'une autre
; il y a impossibilité : l'animal en soi serait chacune des choses que
renferment les animaux. Et d'ailleurs quel animal en soi constituerait les
animaux, et comment serait-ce le même animal en soi ? Comment est-il
possible que l'animal dont la substance est l'animal en soi existe en
dehors de l'animal en soi? Les mêmes conséquences reparaissent au
sujet des êtres sensibles, et de plus absurdes encore. Si donc il y a
impossibilité de maintenir la supposition, il est évident qu'il n'y a pas
d'idée des objets sensibles, dans le sens où l'entendent quelques
philosophes.
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