[6] (1) Τὸν μὲν οὖν ἄλλον
χρόνον ἔκρυπτεν Αἴθρα τὴν ἀληθινὴν τοῦ Θησέως γένεσιν· ἦν δὲ λόγος ὑπὸ τοῦ
Πιτθέως διαδοθεὶς ὡς ἐκ Ποσειδῶνος τεκνωθείη. Ποσειδῶνα γὰρ Τροιζήνιοι
σέβονται διαφερόντως, καὶ θεὸς οὗτός ἐστιν αὐτοῖς πολιοῦχος, ᾧ καὶ καρπῶν
ἀπάρχονται, καὶ τρίαιναν ἐπίσημον ἔχουσι τοῦ νομίσματος. (2) ἐπεὶ δὲ μειράκιον
ὢν ἅμα τῇ τοῦ σώματος ῥώμῃ διέφαινεν ἀλκὴν καὶ φρόνημα μετὰ νοῦ καὶ
συνέσεως βέβαιον, οὕτως αὐτὸν ἡ Αἴθρα πρὸς τὴν πέτραν προσαγαγοῦσα, καὶ
φράσασα περὶ τῆς γενέσεως τἀληθές, ἐκέλευσεν ὑφελεῖν τὰ πατρῷα σύμβολα
καὶ πλεῖν εἰς Ἀθήνας. (3) ὁ δὲ τὴν μὲν πέτραν ὑπέδυ καὶ ῥᾳδίως ἀνέωσε, πλεῖν δ´
ἀπέγνω, καίπερ οὔσης ἀσφαλείας καὶ δεομένων τοῦ τε πάππου καὶ τῆς μητρός.
χαλεπὸν γὰρ ἦν πεζῇ πορεύεσθαι τὴν εἰς Ἀθήνας ὁδόν, οὐδὲν μέρος καθαρὸν
οὐδ´ ἀκίνδυνον ὑπὸ λῃστῶν καὶ κακούργων ἔχουσαν. (4) ὁ γὰρ δὴ χρόνος ἐκεῖνος
ἤνεγκεν ἀνθρώπους χειρῶν μὲν ἔργοις καὶ ποδῶν τάχεσι καὶ σωμάτων ῥώμαις
ὡς ἔοικεν ὑπερφυεῖς καὶ ἀκαμάτους, πρὸς οὐδὲν δὲ τῇ φύσει χρωμένους ἐπιεικὲς
οὐδ´ ὠφέλιμον, ἀλλ´ ὕβρει τε χαίροντας ὑπερηφάνῳ καὶ ἀπολαύοντας τῆς
δυνάμεως ὠμότητι καὶ πικρίᾳ καὶ τῷ κρατεῖν βιάζεσθαι καὶ διαφθείρειν τὸ
παραπῖπτον, αἰδῶ δὲ καὶ δικαιοσύνην καὶ τὸ ἴσον καὶ τὸ φιλάνθρωπον, ὡς
ἀτολμίᾳ τοῦ ἀδικεῖν καὶ φόβῳ τοῦ ἀδικεῖσθαι τοὺς πολλοὺς ἐπαινοῦντας, οὐδὲν
οἰομένους προσήκειν τοῖς πλέον ἔχειν δυναμένοις. (5) τούτων Ἡρακλῆς τοὺς μὲν
ἐξέκοπτε καὶ ἀνῄρει περιιών, οἱ δὲ λανθάνοντες ἐκείνου παριόντος ἔπτησσον καὶ
ἀνεδύοντο καὶ παρημελοῦντο ταπεινὰ πράττοντες. (6) ἐπεὶ δ´ Ἡρακλῆς
ἐχρήσατο συμφορᾷ, καὶ κτείνας Ἴφιτον εἰς Λυδίαν ἀπῆρε, καὶ συχνὸν ἐκεῖ
χρόνον ἐδούλευε παρ´ Ὀμφάλῃ, δίκην τοῦ φόνου ταύτην ἐπιθεὶς αὑτῷ, τότε τὰ
μὲν Λυδῶν πράγματα πολλὴν ἔσχεν εἰρήνην καὶ ἄδειαν, ἐν δὲ τοῖς περὶ τὴν
Ἑλλάδα τόποις αὖθις ἐξήνθησαν αἱ κακίαι καὶ ἀνερράγησαν, οὐδενὸς
πιεζοῦντος οὐδὲ κατείργοντος. (7) ἦν οὖν ὀλέθριος ἡ πορεία τοῖς Ἀθήναζε πεζῇ
βαδίζουσιν ἐκ Πελοποννήσου, καὶ τῶν λῃστῶν καὶ κακούργων ἕκαστον
ἐξηγούμενος ὁ Πιτθεύς, ὁποῖος εἴη καὶ ὁποῖα δρῴη περὶ τοὺς ξένους, ἔπειθε τὸν
Θησέα κομίζεσθαι διὰ θαλάττης. (8) τὸν δὲ πάλαι μὲν ὡς ἔοικε λεληθότως
διέκαιεν ἡ δόξα τῆς Ἡρακλέους ἀρετῆς, καὶ πλεῖστον ἐκείνου λόγον εἶχε, καὶ
προθυμότατος ἀκροατὴς ἐγίνετο τῶν διηγουμένων ἐκεῖνον οἷος εἴη, μάλιστα δὲ
τῶν αὐτὸν ἑωρακότων καὶ πράττοντι καὶ λέγοντι προστετυχηκότων· (9) τότε δὲ
παντάπασιν ἦν φανερὸς πεπονθὼς ὅπερ ὕστερον χρόνοις πολλοῖς Θεμιστοκλῆς
ἔπαθε καὶ εἶπεν, ὡς καθεύδειν αὐτὸν οὐκ ἐῴη τὸ Μιλτιάδου τρόπαιον· οὕτως
ἐκείνῳ τοῦ Ἡρακλέους θαυμάζοντι τὴν ἀρετὴν καὶ νύκτωρ ὄνειρος ἦσαν αἱ
πράξεις, καὶ μεθ´ ἡμέραν ἐξῆγεν αὐτὸν ὁ ζῆλος καὶ ἀνηρέθιζε, ταὐτὰ πράττειν
διανοούμενον.
| [6] (1) Éthra cachait toujours avec soin la véritable origine de Thésée, et Pitthée faisait courir
le bruit qu'il était fils de Poséidon. Les Trézéniens honorent singulièrement ce dieu, qu'ils
regardent comme le protecteur de leur ville; ils lui consacrent les prémices de leurs fruits, et
ont fait de son trident la marque de leur monnaie. (2) Mais lorsque Thésée, parvenu à
l'adolescence, eut montré qu'à la force du corps, au courage et à la grandeur d'âme, il joignait
la sagesse et la prudence, Éthra, le menant au lieu où était la pierre, lui découvre le secret de
sa naissance, lui ordonne de tirer les signes que son père y avait déposés, et de se rendre par
mer auprès de lui à Athènes. (3) Thésée leva facilement la pierre; mais, malgré les instances
de sa mère et de son aïeul, il refusa de s'embarquer, quoique la route par mer fût la plus sûre.
Il était dangereux d'aller par terre à Athènes; les chemins étaient infestés par des voleurs et
des brigands. (4) Ce siècle produisait des hommes infatigables dans les travaux, supérieurs à
tous les autres par leur activité, leur vitesse et leur force; mais au lieu d'employer ces qualités
naturelles à des fins honnêtes et utiles, ils ne se plaisaient que dans les outrages et les
violences; ils n'ambitionnaient d'autres fruits de cette supériorité que d'assouvir leur cruauté,
que de tout soumettre, de forcer et de détruire tout ce qui tombait entre leurs mains. Persuadés
que la plupart des hommes ne louent la pudeur, l'égalité, la justice et l'humanité, que parce
qu'ils n'ont pas la hardiesse de commettre des injustices ou qu'ils craignent d'en éprouver, ils
croyaient que toutes ces vertus n'étaient pas faites pour ceux qui avaient la force en main. (5)
Héraclès, dans ses courses, avait exterminé une partie de ces brigands; les autres, saisis
d'épouvante à son approche, s'enfuyaient devant lui et n'osaient paraître pendant qu'il était
près d'eux. Ce héros, les voyant abattus, négligea de les poursuivre. (6) Lorsqu'il eut eu le
malheur de tuer Iphitos, il se retira en Lydie, où il fut longtemps esclave d'Omphale; servitude
qu'il s'était imposée lui-même en punition de ce meurtre. Tant qu'elle dura, la Lydie fut dans
une pleine sûreté et jouit de la paix la plus profonde; mais dans les contrées de la Grèce on vit
les brigandages renaître, et les scélérats se répandre de tous côtés; personne ne pouvait plus
les réprimer ni s'opposer à leurs violences. (7) Les chemins de terre du Péloponnèse à Athènes
étaient donc très dangereux; et Pitthée, pour persuader Thésée de faire le voyage par mer, lui
nommait chacun de ces brigands, et lui racontait les traitements cruels qu'ils faisaient souffrir
aux étrangers.
(8) Mais depuis longtemps la gloire et la vertu d'Héraclès avaient secrètement enflammé le
coeur de Thésée; plein d'estime pour ce héros, il écoutait avec le plus vif intérêt ceux qui lui
en parlaient, qui le lui dépeignaient, surtout ceux qui l'avaient vu et entendu, qui avaient été
les témoins de ses exploits. (9) On voyait alors sensiblement en lui ces vives impressions que
Thémistocle éprouva plusieurs siècles après, et qui lui faisaient dire que les trophées de
Miltiade l'empêchaient de dormir. De même Thésée, admirant le courage d'Héraclès, rêvait la
nuit aux exploits de ce héros; pendant le jour, il se sentait piqué d'une noble émulation, et
brûlait du désir de les imiter.
|