[75] Ταῦτα εἰπεῖν τὴν Κορνηλίαν λέγουσι,
τὸν δὲ Πομπήϊον ἀποκρίνασθαι· "Μίαν ἄρα,
Κορνηλία, τύχην ᾔδεις τὴν ἀμείνονα, ἣ καὶ σὲ
ἴσως ἐξηπάτησεν, ὅτι μοι χρόνον πλείονα τοῦ
συνήθους παρέμεινεν. ἀλλὰ καὶ ταῦτα δεῖ φέρειν
γενομένους ἀνθρώπους, καὶ τῆς τύχης ἔτι
πειρατέον. οὐ γὰρ ἀνέλπιστον ἐκ τούτων ἀναλαβεῖν
ἐκεῖνα τὸν ἐξ ἐκείνων ἐν τούτοις γενόμενον."
Ἡ μὲν οὖν γυνὴ μετεπέμπετο χρήματα καὶ
θεράποντας ἐκ πόλεως· τῶν δὲ Μιτυληναίων
τὸν Πομπήϊον ἀσπασαμένων καὶ παρακαλούντων
εἰσελθεῖν εἰς τὴν πόλιν, οὐκ ἠθέλησεν, ἀλλὰ
κἀκείνους ἐκέλευσε τῷ κρατοῦντι πείθεσθαι καὶ
θαρρεῖν· εὐγνώμονα γὰρ εἶναι Καίσαρα καὶ
χρηστόν. αὐτὸς δὲ πρὸς Κράτιππον τραπόμενος
τὸν φιλόσοφον (κατέβη γὰρ ἐκ τῆς πόλεως
ὀψόμενος αὐτόν), ἐμέμψατο καὶ συνδιηπόρησε
βραχέα περὶ τῆς προνοίας, ὑποκατακλινομένου τοῦ
Κρατίππου καὶ παράγοντος αὐτὸν ἐπὶ τὰς ἀμείνονας
ἐλπίδας, ὅπως μὴ λυπηρὸς μηδὲ ἄκαιρος
ἀντιλέγων εἴη. ἐπεὶ τὸ μὲν ἐρέσθαι τὸν Πομπήϊον
ἦν ὑπὲρ τῆς προνοίας, τὸν δ´ ἀποφαίνεσθαι
ὅτι τοῖς πράγμασιν ἤδη μοναρχίας ἔδει διὰ τὴν
κακοπολιτείαν· ἐρέσθαι δέ· "Πῶς, ὦ Πομπήϊε,
καὶ τίνι τεκμηρίῳ πεισθῶμεν ὅτι βέλτιον ἂν σὺ
τῇ τύχῃ Καίσαρος ἐχρήσω κρατήσας;" ἀλλὰ
ταῦτα μὲν ἐατέον ὥσπερ ἔχει, τὰ τῶν θεῶν.
| [75] LXXV. Haec eam locutam Pompeium sic respondisse memorant :
«Prosperam nimirum, o Cornelia, fortunam tantum
noueras, quae te, uti sentio, decepit, me diutius quam moris
eius est complexa. Sed tamen et haec ferenda nobis sunt,
quippe hominibus, et periclitanda porro fortuna. Neque
enim desperandum est posse nos ex hoc casu ad pristinum
statum redire, quum ex eo huc redacti simus». Exinde
Cornelia opes et famulos ex urbe acciuit, Mityleneos autem
Pompeium salutatum egressos et ut in urbem intraret orantes,
hoc recusato monuit, uti bono animo essent et uictori
parerent Caesari, bono et clementi uiro. Ipso ad Cratippum
philosophum, qui Pompeii uidendi causa ex urbe descenderat,
conuersus, reprehendit, ac de prouidentia diuina
pauca quaedam cum eo disputauit, Cratippo, ne contradicendo
molestus aut intempestiuus esset, subterfugiente
certamen, et ad meliores spes suscipiendas deducente.
Etenim Cratippus quum nomine prouidentie Pompeium interrogare
potuisset, tum ostendere, uitiosum reipublicae
statum monarchiam iam exposcere, et quaerere praeterea,
quo tandem argumento constiterit, Pompeium melius usurum
fuisse fortuna, si uicisset, quarn Caesarem. Verum
haec quae in deorum sunt posita arbitrio, relinquenda sunt.
| [75] LXXV. Telles furent, dit-on, les paroles de Cornélie
à son mari : «Cornélie, lui répondit Pompée, tu n'avais connu
encore que les faveurs de la fortune : et c'est sans doute leur
durée au delà du terme ordinaire qui fait aujourd'hui ton erreur.
Mais, puisque nous sommes nés mortels, il faut savoir
supporter les disgrâces et tenter encore la fortune : ne
désespérons pas de revenir de mon état présent à ma
grandeur passé, comme de ma grandeur je suis tombé
dans l'état où tu me vois."
Cornélie fit venir de Mitylène ses domestiques et ses effets
les plus précieux; les Mityléniens vinrent saluer Pompée,
et le prièrent d'entrer dans leur ville; mais il le refusa, et leur
dit de se soumettre au vainqueur avec confiance :
"Car, ajouta-t-il, César est bon et clément.»
Se tournant ensuite vers le philosophe Cratippe, qui
était descendu de Mitylène pour le voir, il se plaignit
de la Providence divine, et témoigna quelques
doutes sur son existence. Cratippe, en paraissant
entrer dans ses raisons, tâchait de le ramener à
de meilleures espérances ; il craignait sans doute
de se rendre importun en le contredisant mal à
propos. Car, aux doutes que Pompée élevait sur la
Providence, Cratippe pouvait répondre en lui
montrant que dans le désordre où la république
était tombée, elle avait besoin d'un gouvernement
monarchique. II aurait pu lui dire encore :
«Comment et à quelle marque pourrions-nous
croire, Pompée, que si la victoire s'était déclarée en votre faveur,
vous auriez usé mieux que César de votre fortune?»
Mais laissons là ces questions, comme toutes celles
qui regardent les dieux.
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