[30] Ἀπαγγελθέντος δὲ εἰς Ῥώμην πέρας
ἔχειν τὸν πειρατικὸν πόλεμον καὶ σχολὴν ἄγοντα
τὸν Πομπήϊον ἐπέρχεσθαι τὰς πόλεις, γράφει
νόμον εἷς τῶν δημάρχων Μάλλιος, ὅσης Λεύκολλος
ἄρχει χώρας καὶ δυνάμεως, Πομπήϊον
παραλαβόντα πᾶσαν, προσλαβόντα δὲ καὶ Βιθυνίαν,
ἣν ἔχει Γλαβρίων, πολεμεῖν Μιθριδάτῃ καὶ
Τιγράνῃ τοῖς βασιλεῦσιν, ἔχοντα καὶ τὴν ναυτικὴν
δύναμιν καὶ τὸ κράτος τῆς θαλάσσης ἐφ´
οἷς ἔλαβεν ἐξ ἀρχῆς. τοῦτο δ´ ἦν ἐφ´ ἑνὶ
συλλήβδην γενέσθαι τὴν Ῥωμαίων ἡγεμονίαν·
ὧν γὰρ ἐδόκει μόνων ἐπαρχιῶν μὴ ἐφικνεῖσθαι
τῷ προτέρῳ νόμῳ, Φρυγίας, Λυκαονίας, Γαλατίας,
Καππαδοκίας, Κιλικίας, τῆς ἄνω Κολχίδος, Ἀρμενίας,
αὗται προσετίθεντο μετὰ στρατοπέδων
καὶ δυνάμεων αἷς Λεύκολλος κατεπολέμησε
Μιθριδάτην καὶ Τιγράνην. ἀλλὰ Λευκόλλου
μὲν ἀποστερουμένου τὴν δόξαν ὧν κατειργάσατο
καὶ θριάμβου μᾶλλον ἢ πολέμου διαδοχὴν λαμβάνοντος,
ἥττων λόγος ἦν τοῖς ἀριστοκρατικοῖς,
καίπερ οἰομένοις ἄδικα καὶ ἀχάριστα πάσχειν
τὸν ἄνδρα, τὴν δὲ δύναμιν τοῦ Πομπηΐου βαρέως
φέροντες ὡς τυραννίδα καθισταμένην, ἰδίᾳ παρεκάλουν
καὶ παρεθάρρυνον αὑτοὺς ἐπιλαβέσθαι
τοῦ νόμου καὶ μὴ προέσθαι τὴν ἐλευθερίαν.
ἐνστάντος δὲ τοῦ καιροῦ, τὸν δῆμον φοβηθέντες
ἐξέλιπον καὶ κατεσιώπησαν οἱ λοιποί, Κάτλος
δὲ τοῦ νόμου πολλὰ κατηγορήσας καὶ τοῦ δημάρχου,
μηδένα δὲ πείθων, ἐκέλευε τὴν βουλὴν
ἀπὸ τοῦ βήματος κεκραγὼς πολλάκις ὄρος ζητεῖν,
ὥσπερ οἱ πρόγονοι, καὶ κρημνόν, ὅπου καταφυγοῦσα
διασώσει τὴν ἐλευθερίαν. ἐκυρώθη δ´
οὖν ὁ νόμος, ὡς λέγουσι, πάσαις ταῖς φυλαῖς, καὶ
κύριος ἀποδέδεικτο μὴ παρὼν ὁ Πομπήϊος ἁπάντων
σχεδὸν ὧν ὁ Σύλλας ὅπλοις καὶ πολέμῳ τῆς
πόλεως κρατήσας. αὐτὸς δὲ δεξάμενος τὰ γράμματα
καὶ πυθόμενος τὰ δεδογμένα, τῶν φίλων
παρόντων καὶ συνηδομένων, τὰς ὀφρῦς λέγεται
συναγαγεῖν καὶ τὸν μηρὸν πατάξαι καὶ εἰπεῖν
ὡς ἂν βαρυνόμενος ἤδη καὶ δυσχεραίνων τὸ ἄρχειν·
"Φεῦ τῶν ἀνηνύτων ἄθλων, ὡς ἄρα κρεῖττον
ἦν ἕνα τῶν ἀδόξων γενέσθαι, εἰ μηδέποτε παύσομαι
στρατευόμενος μηδὲ τὸν φθόνον τοῦτον
ἐκδὺς ἐν ἀγρῷ διαιτήσομαι μετὰ τῆς γυναικός."
ἐφ´ οἷς λεγομένοις οὐδ´ οἱ πάνυ συνήθεις ἔφερον
αὐτοῦ τὴν εἰρωνείαν, γινώσκοντες ὅτι τῆς ἐμφύτου
φιλοτιμίας καὶ φιλαρχίας ὑπέκκαυμα τὴν πρὸς
Λεύκολλον ἔχων διαφορὰν μειζόνως ἔχαιρεν.
| [30] XXX. Posteaquam Romae renuntiatum est bellum Piraticum
esse confectum, Pompeiumque otio fruentem per
urbes circumire, Manilius unus de tribunis plebis legem
promulgat, ut Pompeius accepta omni Luculli prouincia
omnibusque copiis, praeterea etiam Bithynia, quam tum
Glabrio tenebat, retento etiam nauali iisdem quibus ante
conditionibus imperio, contra Mithridatem et Tigranem
bellum gerat. Id nihil erat, nisi uniuersum Romanum
imperium unius potestati tradere. Quae enim prouinciae
priori lege ei concessae non uidebantur, Phrygia, Lycaonia,
Galatia, Cappadocia, Cilicia superior, Colchis, et Armenia,
haec tum ei addicebantur, una cum iis quibus Mithridatem
et Tigranem debellauerat Lucullus copiis.
Verumtamen Luculli minorem habebant optimates rationem,
quanquam inique cum eo atque ingrate agi arbitrabantur,
cui rerum gestarum gloria eriperetur, ac triumphi
uerius quam belli successor daretur. Potentiam Pompeii
grauiter ferebant constituique ea tyrannidem sentiebant;
ideo priuatim sese cohortabantur ad impediendam legem
defendendamque libertatem. Sed ubi tempus perferendae
legis appetiit, reliqui metu populi causam destituerunt,
Catulus uero quum multis legem reprehendisset atque
tribunum plebis, neque quenquam mouisset, alta uoce de
rostris aliquoties senatum montem quaerere, sicut maiores,
ac rupem iussit, quo confugientes libertatem tuerentur.
Perlata est lex omnium, ut fertur, tribuum suffragiis, absentique
Pompeio omnis fere ea potestas decreta, quam
bello armisque capta urbe Sylla obtinuerat. Atqui
ipse litteris acceptis decretoque cognito amicis praesentibus
atque gratulantibus, supercilium contraxisse dicitur et
femur feriisse, ac ueluti exosus iam imperia exclamasse :
Hui, infinita certamina ! quam praestiterat unum ex obscuris
fuisse, si nullus bella gerendi finis erit, neque inuidiam
imperiorum exuere, et in agro cum uxore degere unquam
licebit. Hanc eius simulationem ne familiarissimi quidem
probauerunt, scientes eo magis ipsum gaudere, quod ad
ingeneratam eius ambitionem discordia cum Lucullo tanquam
fomes accessisset.
| [30] XXX. Quand on apprit à Rome que la guerre
des pirates était terminée, et que Pompée profitait
de son loisir pour visiter les villes de son gouvernement,
un tribun du peuple, nommé Manlius,
proposa un décret qui, donnant à Pompée
le commandement de toutes les provinces et de
toutes les troupes que Lucullus avait sous ses ordres,
y joignait la Bythinie, occupée par Glabrion,
le chargeait d'aller faire la guerre aux rois Mithridate
et Tigrane, l'autorisait à conserver toutes,
les forces maritimes, et à commander avec la
même puissance qu'on lui avait conférée pour la
guerre précédente. C'était soumettre a un seul
homme tout l'empire romain; car les provinces
que le premier décret ne lui donnait pas à gouverner,
telles que la Phrygie, la Lycaonie, la Galatie,
la Cappadoce, la Cilicie, la Haute-Colchide
et l'Arménie, lui étaient attribuées par le second,
avec toutes les forces, toutes les armées que Lucullus
avait employées à vaincre Mithridate et Tigrane.
Le tort que ce décret faisait à Lucullus,
en le privant de la gloire de ses exploits, en lui
donnant un successeur aux honneurs du triomphe
plutôt qu'aux travaux de la guerre, affligea les
nobles, qui ne pouvaient se cacher l'injustice et
l'ingratitude dont on payait ses services; mais ce
n'était pas ce qui les touchait le plus : rien ne
leur paraissait plus intolérable que de voir élever
Pompée à un degré de puissance qu'ils regardaient
comme une tyrannie véritable et déjà tout établie.
Ils s'encourageaient donc les uns les autres à faire
rejeter cette loi, et à ne pas trahir la cause de la
liberté. Mais quand le jour fut venu, la crainte
qu'ils eurent du peuple leur ôta le courage, et
ils gardèrent tous le silence, à l'exception de Catulus,
qui, après avoir longtemps combattu la
loi, voyant qu'il ne gagnait personne du peuple,
adressa la parole aux sénateurs, et leur cria plusieurs
fois, du haut de la tribune, de chercher,
comme leurs ancêtres, une montagne ou une
roche, où ils pussent se retirer et se conserver
libres. Mais tout fut inutile; la loi passa au
suffrage unanime des tribus; et Pompée, absent,
fut déclaré maître absolu de presque tout ce que
Sylla avait usurpé par les armes en faisant la
guerre à sa patrie. Quand il reçut les lettres qui
lui apprenaient ce que le peuple venait de décréter
pour lui, et que ceux de ses amis qui étaient
présents l'en félicitèrent, il fronça les sourcils, se
frappa la cuisse, et s'écria, comme affligé et surchargé
même de ce nouveau commandement :
"Ah! mes travaux ne finiront donc pas! Quel
bonheur pour moi si je n'avais été qu'un particulier inconnu!
Passerai-je sans cesse d'un commandement à un autre!
Ne pourrai-je jamais me dérober à l'envie, et mener à la campagne,
avec ma femme, une vie douce et paisible!»
Cette dissimulation déplut à ses meilleurs amis, qui savaient très
bien que son ambition naturelle et sa passion pour le
commandement, enflammées encore par ses différends avec
Lucullus, lui rendaient très agréable ce nouvel emploi.
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