[24] Καὶ μέγιστον μὲν ἴσχυσεν ἐν τῇ πόλει τότε, πολλοῖς
δ´ ἐπίφθονον ἑαυτὸν ἐποίησεν ἀπ´ οὐδενὸς ἔργου πονηροῦ,
τῷ δ´ ἐπαινεῖν ἀεὶ καὶ μεγαλύνειν αὐτὸς ἑαυτὸν ὑπὸ πολλῶν
δυσχεραινόμενος. οὔτε γὰρ βουλὴν οὔτε δῆμον οὔτε
δικαστήριον ἦν συνελθεῖν, ἐν ᾧ μὴ Κατιλίναν ἔδει θρυλούμενον
ἀκοῦσαι καὶ Λέντλον, ἀλλὰ καὶ τὰ βιβλία τελευτῶν
κατέπλησε καὶ τὰ συγγράμματα τῶν ἐγκωμίων, καὶ τὸν
λόγον, ἥδιστον ὄντα καὶ χάριν ἔχοντα πλείστην, ἐπαχθῆ
καὶ φορτικὸν ἐποίησε τοῖς ἀκροωμένοις, ὥσπερ τινὸς ἀεὶ
κηρὸς αὐτῷ τῆς ἀηδίας ταύτης προσούσης. ὅμως δέ, καίπερ
οὕτως ἀκράτῳ φιλοτιμίᾳ συνών, ἀπήλλακτο τοῦ φθονεῖν
ἑτέροις, ἀφθονώτατος ὢν ἐν τῷ τοὺς πρὸ αὑτοῦ καὶ τοὺς
καθ´ αὑτὸν ἄνδρας ἐγκωμιάζειν, ὡς ἐκ τῶν συγγραμμάτων
λαβεῖν ἔστι. πολλὰ δ´ αὐτοῦ καὶ ἀπομνημονεύουσιν,
οἷον περὶ Ἀριστοτέλους, ὅτε χρυσοῦ ποταμὸς εἴη ῥέοντος,
καὶ περὶ τῶν Πλάτωνος διαλόγων, ὡς
τοῦ Διός, εἰ λόγῳ χρῆσθαι πέφυκεν, οὕτω διαλεγομένου.
τὸν δὲ Θεόφραστον εἰώθει τρυφὴν
ἰδίαν ἀποκαλεῖν. περὶ δὲ τῶν Δημοσθένους λόγων ἐρωτηθείς,
τίνα δοκοίη κάλλιστον εἶναι, τὸν μέγιστον εἶπε. καίτοι
τινὲς τῶν προσποιουμένων δημοσθενίζειν ἐπιφύονται
φωνῇ τοῦ Κικέρωνος, ἣν πρός τινα τῶν ἑταίρων ἔθηκεν ἐν
ἐπιστολῇ γράψας, ἐνιαχοῦ τῶν λόγων ὑπονυστάζειν τὸν
Δημοσθένην? τῶν δὲ μεγάλων καὶ θαυμαστῶν ἐπαίνων,
οἷς πολλαχοῦ χρῆται περὶ τοῦ ἀνδρός, καὶ ὅτι περὶ οὓς
μάλιστα τῶν ἰδίων ἐσπούδασε λόγους, τοὺς κατ´ Ἀντωνίου,
Φιλιππικοὺς ἐπέγραψεν, ἀμνημονοῦσι. τῶν δὲ κατ´
αὐτὸν ἐνδόξων ἀπὸ λόγου καὶ φιλοσοφίας οὐκ ἔστιν οὐδεὶς
ὃν οὐκ ἐποίησεν ἐνδοξότερον, ἤ τι λέγων ἢ γράφων εὐμενῶς
περὶ ἑκάστου. Κρατίππῳ δὲ τῷ περιπατητικῷ διεπράξατο
μὲν Ῥωμαίῳ γενέσθαι παρὰ Καίσαρος ἄρχοντος
ἤδη, διεπράξατο δὲ <καὶ> τὴν ἐξ Ἀρείου πάγου βουλὴν
ψηφίσασθαι καὶ δεηθῆναι μένειν αὐτὸν ἐν Ἀθήναις
καὶ διαλέγεσθαι τοῖς νέοις, ὡς κοσμοῦντα τὴν πόλιν. ἐπιστολαὶ
δὲ περὶ τούτων Κικέρωνος εἰσὶ πρὸς Ἡρώδην, ἕτεραι
δὲ πρὸς τὸν υἱόν, ἐγκελευομένου συμφιλοσοφεῖν Κρατίππῳ.
Γοργίαν δὲ τὸν ῥητορικὸν αἰτιώμενος πρὸς ἡδονὰς
προάγειν καὶ πότους τὸ μειράκιον, ἀπελαύνει τῆς συνουσίας
αὐτοῦ, καὶ σχεδὸν αὕτη γε τῶν Ἑλληνικῶν μία καὶ δευτέρα
πρὸς Πέλοπα τὸν Βυζάντιον ἐν ὀργῇ τινι γέγραπται, τὸν
μὲν Γοργίαν αὐτοῦ προσηκόντως ἐπικόπτοντος, εἴπερ ἦν
φαῦλος καὶ ἀκόλαστος ὥσπερ ἐδόκει, πρὸς δὲ τὸν Πέλοπα
μικρολογουμένου καὶ μεμψιμοιροῦντος, ὥσπερ ἀμελήσαντα
τιμάς τινας αὐτῷ καὶ ψηφίσματα παρὰ Βυζαντίων γενέσθαι.
| [24] XXIV. Quum autem plurimum eo tempore in republica
ualeret, multis se ipsum inuisum reddidit, nullo quidem
malo facinore, sed quod se ipsum identidem laudaret atque
iactaret, eo multos offendens. Nam neque senatus neque
populus conuenire, neque iudices poterant, quin Catilinae et
Lentuli inculcaretur mentio. Denique libros etiam suos et
scripta laudibus suis repleuit, orationemque suam suauissimam
alioquin et gratiosissimam auditoribus odiosam atque
molestam effecit importunitate haec ueluti peste quadam assiduo
infectam. Enimuero quanquam ita immodica tenebatur
arrogantia, fuit tamen ab inuidia uacuus, et, quemadmodum
e scriptis eius apparet, quum priores, tum aequales
liberalissime laudauit. Multa quoque eiusmodi feruntur dicta
eius. Aristotelem aureum eloquentiae flumen dixit, de dialogis
Platonis affirmauit, Iouem, si locuturus fuisset, eo sermone
usurum. Theophrastum delicias suas appellare solebat. De
orationibus Demosthenis interrogatus quam earum pulcherrimam
putaret : Longissimam, respondit. Et tamen inueniuntur
qui quum se Demostheni fauere prae se ferant, dictum
quoddam Ciceronis inuadunt, quod is in epistola quadam
ad amicum scripserit, Demosthenem alicubi in orationibus
suis dormitare; obliti interim magnarum et admirabilium
laudationum, quibus eum passim euehit, et quod is imitatione
Demosthenis orationes suas in Antonium, in quas plurimum
studii contulerat, Philippicas inscripserit. Qui
eodem tempore doctrinae et sapientiae nomine illustres fuerunt,
horum nemo est, cuius non Cicero uel loquens de eo
uel scribens amice, gloriam auxerit. A Caesare iam rerum
potito ius ciuitatis Cratippo Peripatetico impetrauit ; effecit
etiam ut Areopagitae decreto facto a Cratippo postularent
ut, tanquam ornamentum urbis, Athenis maneret, ibique
iuuentutem philosophicis studiis informaret. Sunt et
epistolae Ciceronis ad Herodem, et ad filium aliae, quibus
eum in studio philosophiae Cratippum sequi iubet. Gorgiam
autem rhetorem incusans, quod filium ad uoluptates et
compotationes illexisset, a consuetudine eius prohibet.
Haec una fere Graecarum Ciceronis epistolarum, et alia
ad Pelopem Byzantium, obiurgatoriae sunt. Ac Gorgiam
quidem haud immerito corripuit, si quidem ita prauus,
ut uidebatur, et Iuxuriosus fuit. Cum Pelope autem minus
liberaliter et morose expostulat, neglectum eius culpa querens,
ne sibi a Byzantiis honores quidam publice decernerentur.
| [24] XXIV. Il jouit alors de la plus grande autorité dans Rome; mais il excita l'envie publique,
non par aucune mauvaise action, mais par l'habitude de se vanter lui-même, et de relever
ce qu'il avait fait dans son consulat par des louanges dont tout le monde était blessé. Il n'allait
jamais au sénat, aux assemblées du peuple et aux tribunaux, qu'il n'eût sans cesse à la bouche
les noms de Catilina et de Lentulus. Il en vint jusqu'à remplir de ses propres louanges tous
les ouvrages qu'il composait; et par là son style, si plein de douceur et de grâce, devenait
insupportable à ses auditeurs. Cette affectation importune était comme une maladie fatale
attachée à sa personne. Mais cette ambition démesurée ne le rendit pas envieux des autres :
étranger à tout sentiment de jalousie, il comblait de louanges et les grands hommes qui
l'avaient précédé, et ses contemporains, comme on le voit par ses écrits, et par plusieurs
bons mots qu'on rapporte de lui. Il disait, par exemple, d'Aristote, que c'est un fleuve qui
roule de l'or à grands flots; et des Dialogues de Platon, que si Jupiter parlait, il prendrait
le style de ce philosophe. Il avait coutume d'appeler Théophraste "ses délices". On
lui demandait un jour quelle oraison de Démosthène il trouvait la plus belle. «La plus longue,»
répondit-il. Cependant quelques partisans de Démosthène lui reprochent d'avoir dit,
dans une de ses lettres à ses amis, que cet orateur sommeille quelquefois dans ses discours.
Mais ces censeurs ne se souviennent pas apparemment des éloges admirables qu'il donne à
Démosthène en plusieurs endroits de ses ouvrages; ils oublient que les oraisons qu'il a
travaillées avec le plus de soin, celles qu'il a faites contre Antoine, il les a appelées
Philippiques, du nom de celles de Démosthène contre Philippe.
De tous les orateurs et de tous les philosophes célèbres de son temps, il n'en est pas un
seul dont il n'ait augmenté la réputation dans ses discours ou dans ses écrits. Il appuya de
tout son crédit auprès de César, déjà dictateur, Cratippe, le philosophe péripatéticien,
pour lui faire avoir le droit de bourgeoisie à Rome. Il lui fit obtenir aussi de l'aréopage
un décret par lequel ce sénat le priait de rester à Athènes, pour y être un des ornements
de la ville, et instruire les jeunes gens dans la philosophie. On a encore des lettres de
Cicéron à Hérode et d'autres écrites à son fils, pour l'exhorter à prendre les leçons de
Cratippe. Il reproche au rhéteur Gorgias d'inspirer à son fils le goût des plaisirs et de
la table, et il le prie de n'avoir plus aucun rapport avec lui. De toutes les lettres grecques
de Cicéron, celle à Gorgias, et une autre à Pélops de Byzance, sont les seules qui
soient écrites de ce ton d'aigreur; mais il avait raison de se plaindre de ce rhéteur, s'il
était réellement aussi vicieux et aussi corrompu qu'il passait pour l'être ; au lieu qu'il y a
bien de la petitesse dans les reproches qu'il fait à Pélops sur sa négligente à lui procurer
de la part des Byzantins des honneurs et des décrets qu'il désirait.
|