[2,46] Ἑσπέρας δὲ ἤδη προσήχθημεν νήσῳ οὐ μεγάλῃ? κατῳκεῖτο δὲ
ὑπὸ γυναικῶν, ὡς ἐνομίζομεν, Ἑλλάδα φωνὴν προϊεμένων? προσῄεσαν
γὰρ καὶ ἐδεξιοῦντο καὶ ἠσπάζοντο, πάνυ ἑταιρικῶς
κεκοσμημέναι καὶ καλαὶ πᾶσαι καὶ νεάνιδες, ποδήρεις τοὺς χιτῶνας
ἐπισυρόμεναι. ἡ μὲν οὖν νῆσος ἐκαλεῖτο Κοβαλοῦσα, ἡ δὲ
πόλις αὐτὴ Ὑδαμαργία. λαχοῦσαι δ´ οὖν ἡμᾶς αἱ γυναῖκες ἑκάστη
πρὸς ἑαυτὴν ἀπῆγεν καὶ ξένον ἐποιεῖτο. ἐγὼ δὲ μικρὸν ἀποστὰς—
οὐ γὰρ χρηστὰ ἐμαντευόμην—ἀκριβέστερόν τε περιβλέπων ὁρῶ
πολλῶν ἀνθρώπων ὀστᾶ καὶ κρανία κείμενα. καὶ τὸ μὲν βοὴν
ἱστάναι καὶ τοὺς ἑταίρους συγκαλεῖν καὶ ἐς τὰ ὅπλα χωρεῖν οὐκ
ἐδοκίμαζον. προχειρισάμενος δὲ τὴν μαλάχην πολλὰ ηὐχόμην
αὐτῇ διαφυγεῖν ἐκ τῶν παρόντων κακῶν? μετ´ ὀλίγον δὲ τῆς ξένης
διακονουμένης εἶδον τὰ σκέλη οὐ γυναικός, ἀλλ´ ὄνου ὁπλάς? καὶ
δὴ σπασάμενος τὸ ξίφος συλλαμβάνω τε αὐτὴν καὶ δήσας περὶ
τῶν ὅλων ἀνέκρινον. ἡ δέ, ἄκουσα μέν, εἶπεν δὲ ὅμως, αὐτὰς
μὲν εἶναι θαλαττίους γυναῖκας Ὀνοσκελέας προσαγορευομένας,
τροφὴν δὲ ποιεῖσθαι τοὺς ἐπιδημοῦντας ξένους. ἐπειδὰν γάρ, ἔφη,
μεθύσωμεν αὐτούς, συνευνηθεῖσαι κοιμωμένοις ἐπιχειροῦμεν.
ἀκούσας δὲ ταῦτα ἐκείνην μὲν αὐτοῦ κατέλιπον δεδεμένην, αὐτὸς
δὲ ἀνελθὼν ἐπὶ τὸ τέγος ἐβόων τε καὶ τοὺς ἑταίρους συνεκάλουν.
ἐπεὶ δὲ συνῆλθον, τὰ πάντα ἐμήνυον αὐτοῖς καὶ τά γε ὀστᾶ
ἐδείκνυον καὶ ἦγον ἔσω πρὸς τὴν δεδεμένην? ἡ δὲ αὐτίκα ὕδωρ
ἐγένετο καὶ ἀφανὴς ἦν. ὅμως δὲ τὸ ξίφος εἰς τὸ ὕδωρ καθῆκα
πειρώμενος? τὸ δὲ αἷμα ἐγένετο.
| [2,46] Le soir, nous arrivons à une île peu considérable, toute peuplée de femmes,
du moins paraissant telles, et parlant la langue grecque ; elles approchent de
nous, nous tendent la main et nous embrassent ; elles étaient parées comme des
courtisane, toutes jeunes et jolies, vêtues de tuniques qui descendaient
jusqu'aux talons. L'île s'appelle Cabaluse, et la ville Hydamardie. Chacune
de ces femmes, ayant pris l'un de nous, le conduisit chez elle et lui donna
l'hospitalité. Pour ma part, j'hésitai, ne pressentant rien de bon ; et un
regard attentif me fit voir les ossements et les crânes d'un grand nombre
d'hommes. J'allais crier, appeler à l'aide mes compagnons et courir aux armes,
mais je préférai n'en rien faire. Seulement je saisis ma racine de mauve, et je
la. supplie de me dérober aux dangers dont je suis menacé. Un instant après,
tandis que mon hôtesse s'occupait à me servir, je vois que ses jambes ne sont
pas celles d'une femme, mais qu'elle a le pied d'un âne. Je tire mon épée, je
saisis mon hôtesse, je la lie et lui fais tout avouer. Elle résiste, mais elle
finit. par me dire qu'elles sont des femmes marines, nommées Onoscèles, et
qu'elles dévorent les étrangers qui abordent chez elles. "Nous les enivrons,
ajoute-t-elle, nous les faisons coucher avec nous, et nous les égorgeons pendant
leur sommeil." A ces mots, je laisse là cette femme tout enchaînée, je monte sur
le toit, et je crie de toutes mes forces pour appeler mes compagnons. Quand ils
sont tous arrivés, je leur dis ce qu'il en est, je leur montre les ossements et
je les conduis auprès de ma prisonnière ; mais elle se change en eau et
disparaît. De mon côté, je plonge mon épée dans cette eau, à tout hasard, et il
en sort du sang.
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