[6,16] "Οἴμοι, Κλειτοφῶν" (τοῦτο γὰρ ἔλεγε πολλάκις), "οὐκ οἶδας
ποῦ γέγονα καὶ ποῦ καθεῖργμαι, οὐδὲ γὰρ ἐγὼ τίς σὲ κατέχει τύχη,
ἀλλὰ τὴν αὐτὴν ἄγνοιαν δυστυχοῦμεν. ἆρα μή σε κατέλαβε
Θέρσανδρος ἐπὶ τῆς οἰκίας· ἆρα μὴ καὶ σύ τι πέπονθας ὑβριστικόν·
πολλάκις ἠθέλησα πυθέσθαι παρὰ τοῦ Σωσθένους, ἀλλ´ οὐκ εἶχον
ὅπως πύθωμαι. εἰ μὲν ὡς περὶ ἀνδρὸς ἐμαυτῆς, ἐφοβούμην μή τί
σοι κινήσω κακόν, παροξύνασα Θέρσανδρον ἐπὶ σέ. εἰ δὲ ὡς περὶ
ξένου τινός, ὑπόνοια καὶ τοῦτο ἦν· τί γὰρ μέλει γυναικὶ περὶ τῶν
οὐχ ἑαυτῆς· ποσάκις ἐμαυτὴν ἐβιασάμην, ἀλλ´ οὐκ ἔπειθον τὴν
γλῶσσαν εἰπεῖν· ἀλλὰ ταῦτα μόνον ἔλεγον· ‘Ἄνερ Κλειτοφῶν,
Λευκίππης μόνης ἄνερ, πιστὲ καὶ βέβαιε, ὃν οὐδὲ συγκαθεύδουσα
πέπεικεν ἄλλη γυνή, κἂν ἡ ἄστοργος ἐγὼ πεπίστευκα·
μετὰ τοσοῦτον ἰδοῦσά σε χρόνον ἐν τοῖς ἀγροῖς οὐ κατεφίλησα.’ νῦν οὖν
ἂν Θέρσανδρος ἔλθῃ πυνθανόμενος, τί πρὸς αὐτὸν εἴπω· ἆρα
ἀποκαλύψασα τοῦ δράματος τὴν ὑπόκρισιν διηγήσομαι τὴν ἀλήθειαν·
‘μή με νομίσῃς ἀνδράποδον εἶναι, Θέρσανδρε.
στρατηγοῦ θυγάτηρ εἰμὶ Βυζαντίων, πρώτου Τυρίων γυνή· οὔκ εἰμι Θετταλή·
οὐ καλοῦμαι Λάκαινα. ὕβρις αὕτη ἐστὶ πειρατική· λελῄστευμαι καὶ
τοὔνομα. ἀνήρ μοι Κλειτοφῶν, πατρὶς Βυζάντιον, Σώστρατος πατήρ,
μήτηρ Πάνθεια.’ ἀλλ´ οὐδὲ πιστεύσειας ἐμοὶ λεγούσῃ. φοβοῦμαι δὲ
καὶ ἐὰν πιστεύσῃς περὶ Κλειτοφῶντος, μὴ τὸ ἄκαιρόν μου τῆς ἐλευθερίας
τὸν φίλτατον ἀπολέσῃ. φέρε πάλιν ἐνδύσωμαί μου τὸ δρᾶμα·
φέρε περίθωμαι τὴν Λάκαιναν."
| [6,16] « Hélas, Clitophon, répétait-elle sans cesse, tu
ne sais où je suis et où l'on me retient prisonnière; et
moi non plus je ne sais pas quel est ton sort; nous souffrons
tous les deux de la même ignorance. Thersandre
ne t'a-t-il pas surpris dans sa maison ? N'as-tu pas, toi
aussi, eu à souffrir la violence ? Souvent j'ai voulu le
demander à Sosthénès, mais je ne savais comment
poser la question. Si je disais qu'il s'agissait de mon
mari, j'avais peur de te faire courir quelque danger, en
irritant Thersandre contre toi; si je te présentais comme
un étranger quelconque, cela même était suspect :
est-ce qu'une femme s'intéresse à quelqu'un d'autre qu'à
ceux qui sont de ses parents ? Que de fois j'ai tenté de me
contraindre, mais je n'ai pu persuader à ma langue de
parler. Je ne pouvais dire que ceci : « Clitophon, mon
mari, mari de la seule Leucippé, mari fidèle et sûr, qui
n'a jamais cédé à aucune femme, même qui dormait
près de lui, même si j'ai cru, sans coeur, que tu m'étais
infidèle! Et, lorsque je t'ai vu, après si longtemps, à la
propriété, je ne t'ai pas embrassé! » Et si, maintenant,
Thersandre vient m'interroger, que lui dirai-je ? Lèverai-je
le masque, lui découvrirai-je la vérité ? Ne crois
pas, Thersandre, que je sois une esclave. Je suis la fille
d'un haut magistrat de Byzance, la femme d'un des
premiers parmi les Tyriens; je ne suis pas thessalienne;
je ne m'appelle pas Lacaena. C'est là une insulte des
pirates; on m'a pris jusqu'à mon nom! Mon mari est
Clitophon, ma patrie est Byzance, Sostratos est mon père,
et ma mère Panthée. Mais tu ne saurais ajouter foi à mes
paroles. Et d'ailleurs, si tu me crois, j'aurai peur pour
Clitophon, je craindrai que la révélation inopportune de
ma naissance libre ne cause la ruine de celui que j'aime.
Allons, que je reprenne le masque; que, de nouveau, je
joue le rôle de Lacaena! »
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