[3,1] Ὅτι δὲ τοὺς ὀρεγομένους τῶν καλῶν ἐπιμελεῖς ὧν ὀρέγοιντο
ποιῶν ὠφέλει, νῦν τοῦτο διηγήσομαι. ἀκούσας γάρ
ποτε Διονυσόδωρον εἰς τὴν πόλιν ἥκειν ἐπαγγελλόμενον
στρατηγεῖν διδάξειν, ἔλεξε πρός τινα τῶν συνόντων, ὃν
ᾐσθάνετο βουλόμενον τῆς τιμῆς ταύτης ἐν τῇ πόλει τυχεῖν·
Αἰσχρὸν μέντοι, ὦ νεανία, τὸν βουλόμενον ἐν τῇ πόλει
στρατηγεῖν, ἐξὸν τοῦτο μαθεῖν, ἀμελῆσαι αὐτοῦ· καὶ δικαίως
ἂν οὗτος ὑπὸ τῆς πόλεως ζημιοῖτο πολὺ μᾶλλον ἢ εἴ τις
ἀνδριάντας ἐργολαβοίη μὴ μεμαθηκὼς ἀνδριαντοποιεῖν. ὅλης
γὰρ τῆς πόλεως ἐν τοῖς πολεμικοῖς κινδύνοις ἐπιτρεπομένης
τῷ στρατηγῷ, μεγάλα τά τε ἀγαθὰ κατορθοῦντος αὐτοῦ καὶ
τὰ κακὰ διαμαρτάνοντος εἰκὸς γίγνεσθαι. πῶς οὖν οὐκ ἂν
δικαίως ὁ τοῦ μὲν μανθάνειν τοῦτο ἀμελῶν, τοῦ δὲ αἱρεθῆναι
ἐπιμελόμενος ζημιοῖτο; τοιαῦτα μὲν δὴ λέγων ἔπεισεν αὐτὸν
ἐλθόντα μανθάνειν. ἐπεὶ δὲ μεμαθηκὼς ἧκε, προσέπαιζεν
αὐτῷ λέγων· Οὐ δοκεῖ ὑμῖν, ὦ ἄνδρες, ὥσπερ Ὅμηρος τὸν
Ἀγαμέμνονα γεραρὸν ἔφη εἶναι, οὕτω καὶ ὅδε στρατηγεῖν
μαθὼν γεραρώτερος φαίνεσθαι; καὶ γάρ, ὥσπερ ὁ κιθαρίζειν
μαθών, καὶ ἐὰν μὴ κιθαρίζῃ, κιθαριστής ἐστι, καὶ ὁ μαθὼν
ἰᾶσθαι, κἂν μὴ ἰατρεύῃ, ὅμως ἰατρός ἐστιν, οὕτω καὶ ὅδε
ἀπὸ τοῦδε τοῦ χρόνου διατελεῖ στρατηγὸς ὤν, κἂν μηδεὶς
αὐτὸν ἕληται. ὁ δὲ μὴ ἐπιστάμενος οὔτε στρατηγὸς οὔτε
ἰατρός ἐστιν, οὐδ´ ἐὰν ὑπὸ πάντων ἀνθρώπων αἱρεθῇ. ἀτάρ,
ἔφη, ἵνα καί, ἐὰν ἡμῶν τις ἢ ταξιαρχῇ ἢ λοχαγῇ σοι,
ἐπιστημονέστεροι τῶν πολεμικῶν ὦμεν, λέξον ἡμῖν πόθεν
ἤρξατό σε διδάσκειν τὴν στρατηγίαν. καὶ ὅς, Ἐκ τοῦ
αὐτοῦ, ἔφη, εἰς ὅπερ καὶ ἐτελεύτα· τὰ γὰρ τακτικὰ ἐμέ γε
καὶ ἄλλ´ οὐδὲν ἐδίδαξεν. Ἀλλὰ μήν, ἔφη ὁ Σωκράτης,
τοῦτό γε πολλοστὸν μέρος ἐστὶ στρατηγίας. καὶ γὰρ
παρασκευαστικὸν τῶν εἰς τὸν πόλεμον τὸν στρατηγὸν εἶναι
χρή, καὶ ποριστικὸν τῶν ἐπιτηδείων τοῖς στρατιώταις, καὶ
μηχανικὸν καὶ ἐργαστικὸν καὶ ἐπιμελῆ καὶ καρτερικὸν καὶ
ἀγχίνουν, καὶ φιλόφρονά τε καὶ ὠμόν, καὶ ἁπλοῦν τε καὶ
ἐπίβουλον, καὶ φυλακτικόν τε καὶ κλέπτην, καὶ προετικὸν
καὶ ἅρπαγα καὶ φιλόδωρον καὶ πλεονέκτην καὶ ἀσφαλῆ καὶ
ἐπιθετικόν, καὶ ἄλλα πολλὰ καὶ φύσει καὶ ἐπιστήμῃ δεῖ τὸν
εὖ στρατηγήσοντα ἔχειν. καλὸν δὲ καὶ τὸ τακτικὸν εἶναι·
πολὺ γὰρ διαφέρει στράτευμα τεταγμένον ἀτάκτου, ὥσπερ
λίθοι τε καὶ πλίνθοι καὶ ξύλα καὶ κέραμος ἀτάκτως μὲν
ἐρριμμένα οὐδὲν χρήσιμά ἐστιν, ἐπειδὰν δὲ ταχθῇ κάτω μὲν
καὶ ἐπιπολῆς τὰ μήτε σηπόμενα μήτε τηκόμενα, οἵ τε λίθοι
καὶ ὁ κέραμος, ἐν μέσῳ δὲ αἵ τε πλίνθοι καὶ τὰ ξύλα,
ὥσπερ ἐν οἰκοδομίᾳ συντίθεται, τότε γίγνεται πολλοῦ ἄξιον
κτῆμα, οἰκία. Ἀλλὰ πάνυ, ἔφη ὁ νεανίσκος, ὅμοιον, ὦ
Σώκρατες, εἴρηκας. καὶ γὰρ ἐν τῷ πολέμῳ τοὺς ἀρίστους δεῖ
πρώτους τάττειν καὶ τελευταίους, ἐν μέσῳ δὲ τοὺς χειρίστους,
ἵνα ὑπὸ μὲν τῶν ἄγωνται, ὑπὸ δὲ τῶν ὠθῶνται. Εἰ μὲν
τοίνυν, ἔφη, καὶ διαγιγνώσκειν σε τοὺς ἀγαθοὺς καὶ τοὺς
κακοὺς ἐδίδαξεν· εἰ δὲ μή, τί σοι ὄφελος ὧν ἔμαθες; οὐδὲ
γὰρ εἴ σε ἀργύριον ἐκέλευσε πρῶτον μὲν καὶ τελευταῖον τὸ
κάλλιστον τάττειν, ἐν μέσῳ δὲ τὸ χείριστον, μὴ διδάξας
διαγιγνώσκειν τό τε καλὸν καὶ τὸ κίβδηλον, οὐδὲν ἄν σοι
ὄφελος ἦν. Ἀλλὰ μὰ Δί´, ἔφη, οὐκ ἐδίδαξεν· ὥστε αὐτοὺς
ἂν ἡμᾶς δέοι τούς τε ἀγαθοὺς καὶ τοὺς κακοὺς κρίνειν. Τί
οὖν οὐ σκοποῦμεν, ἔφη, πῶς ἂν αὐτῶν μὴ διαμαρτάνοιμεν;
Βούλομαι, ἔφη ὁ νεανίσκος. Οὐκοῦν, ἔφη, εἰ μὲν ἀργύριον
δέοι ἁρπάζειν, τοὺς φιλαργυρωτάτους πρώτους καθιστάντες
ὀρθῶς ἂν τάττοιμεν; Ἔμοιγε δοκεῖ. Τί δὲ τοὺς κινδυνεύειν
μέλλοντας; ἆρα τοὺς φιλοτιμοτάτους προτακτέον;
Οὗτοι γοῦν εἰσιν, ἔφη, οἱ ἕνεκα ἐπαίνου κινδυνεύειν ἐθέλοντες.
οὐ τοίνυν οὗτοί γε ἄδηλοι, ἀλλ´ ἐπιφανεῖς πανταχοῦ
ὄντες εὐαίρετοι ἂν εἶεν. Ἀτάρ, ἔφη, πότερά σε τάττειν
μόνον ἐδίδαξεν, ἢ καὶ ὅπῃ καὶ ὅπως χρηστέον ἑκάστῳ τῶν
ταγμάτων; Οὐ πάνυ, ἔφη. Καὶ μὴν πολλά γ´ ἐστὶ πρὸς
ἃ οὔτε τάττειν οὔτε ἄγειν ὡσαύτως προσήκει. Ἀλλὰ μὰ
Δί´, ἔφη, οὐ διεσαφήνιζε ταῦτα. Νὴ Δί´, ἔφη, πάλιν
τοίνυν ἐλθὼν ἐπανερώτα· ἂν γὰρ ἐπίστηται καὶ μὴ ἀναιδὴς
ᾖ, αἰσχυνεῖται ἀργύριον εἰληφὼς ἐνδεᾶ σε ἀποπέμψασθαι.
| [3,1] CHAPITRE PREMIER.
Comment ceux qui aspiraient aux dignités trouvaient en Socrate
un guide utile vers le but auquel ils tendaient, c'est ce
que je vais maintenant raconter. Ayant appris un jour qu'un
nommé Dionysodore, arrivé à Athènes, s'annonçait comme
professeur de stratégie, Socrate dit à l'un de ses disciples, qu'il
savait jaloux d'obtenir les fonctions de général dans sa patrie :
« Il serait honteux, n'est-ce pas? jeune homme, pour quelqu'un
qui veut devenir stratége dans son pays, lorsqu'il se présente
une occasion d'apprendre cet art, de la laisser échapper, et ce
serait mériter d'être puni plus sévèrement encore qu'un homme
qui entreprend de faire des statues sans avoir appris la statuaire.
En effet, dans les dangers de la guerre, la cité tout
entière s'abandonne au stratége; il suit que de ses succès résultent
de grands avantages, et de ses revers de grands maux.
Comment donc ne serait-il pas juste de punir un homme qui,
après avoir négligé d'apprendre à être général, mettrait tout
en oeuvre pour être élu ? Après ces conseils, Socrate engagea
le jeune homme à aller étudier.
Quand il fut revenu de prendre ses leçons, Socrate lui dit en
se jouant : « Ne trouvez-vous pas, citoyens, que de même
qu'Homère donne à Agamemnon le titre de respectable, ainsi
ce jeune homme, après ses leçons de stratégie, paraît plus
respectable encore? Car si celui qui a appris à jouer du luth,
est un joueur de luth, lors même qu'il n'en joue pas; si celui
qui a appris la médecine, est cependant médecin, lors même
qu'il n'exerce pas, de la même manière, à partir de ce moment,
ce jeune homme ne cesse pas d'être un stratége, lors même
que personne ne le choisirait; tandis que celui qui ne sait pas
n'est ni stratége, ni médecin, fût-il choisi par tous les hommes.
Mais, continua-t-il, afin que si quelqu'un de nous devenait jamais
taxiarque ou lochage sous tes ordres, nous fussions plus
versés dans les choses de la guerre, dis-nous par où Dionysodore
a commencé à t'enseigner la stratégie. » Alors le jeune
homme : « Il a commencé, dit-il, par où il a également fini; il
m'a enseigné la tactique et rien de plus. — Ce n'est pourtant
là, reprit Socrate, qu'une bien petite partie de l'art du général ;
il faut encore qu'il sache se procurer tout le matériel de
la guerre et fournir de tout le soldat ; qu'il soit fécond en expédients,
entreprenant, soigneux, patient, entendu, indulgent
et sévère, franc et rusé, cauteleux et agissant à la dérobée,
prodigue et rapace, libéral et cupide, réservé et résolu; enfin
il faut avoir, pour être un bon stratége, toutes les autres qualités
que donnent la nature et la science. Il est beau de connaître
aussi l'art de ranger des troupes ; car il y a une grande
différence entre une armée bien rangée et des troupes en désordre :
de même des pierres, des briques, des poutres, des
tuiles jetées sans ordre, ne servent de rien; mais si l'on dispose
dans les fondements et sur les combles les matériaux qui
ne peuvent ni se pourrir ni s'altérer, comme les pierres et les
tuiles, si on ajuste au milieu les briques et les poutres, comme
dans une bâtisse, il en résulte une propriété qui a une grande
valeur, une maison. — Ce que tu viens de dire, Socrate,
répondit-il, est la même chose absolument que ce qui se pratique
à la guerre : là, en effet, on doit placer aux premiers et aux
derniers rangs les meilleurs soldats, et mettre au milieu les
troupes moins bonnes, pour qu'elles soient entraînées et poussées
par les autres. — C'est bien, reprit Socrate si l'on t'a
appris à discerner les bons et les mauvais soldats ; autrement,
à quoi te serviront tes leçons? Car si ton maître t'avait dit
d'arranger de l'argent en mettant dessus et dessous les meilleures
pièces, et au milieu les moins bonnes, sans t'avoir appris
à distinguer la vraie monnaie de la fausse, cela ne te servirait
de rien. — Mais, par Jupiter, il ne me l'a pas appris, en sorte
que c'est à nous à distinguer les bons soldats des mauvais. —
Eh bien, qui nous empêche d'examiner comment nous ne
pourrons pas nous tromper? — J'y consens, dit le jeune
homme. — Si donc il s'agissait d'enlever de l'argent, ne ferions-nous
pas bien de placer en tête les soldats qui ont le plus
d'amour pour le gain? — C'est mon avis. — Et s'il s'agit de
courir des dangers, ne mettrons-nous pas au premier rang
ceux qui ont le plus d'amour pour la gloire? — Sans doute,
car ils ne demandent qu'à s'exposer pour l'honneur : ceux-là
ne sont donc pas difficiles à découvrir : toujours en vue, on les
a partout sous la main. — Mais ne t'a-t-il appris qu'à mettre
une armée en bataille, ou bien t'a-t-il enseigné où et comment
il faut user des diverses manières de la ranger? — Pas du
tout. — Cependant il y a mille circonstances où il ne faut ni
ranger ses troupes ni les conduire de la même manière. — Par
Jupiter, il ne m'a rien fait connaître de tout cela. — Eh bien!
par Jupiter, retourne auprès de lui et interroge-le : car s'il
sait son métier et qu'il ne soit pas un impudent, il rougira
d'avoir reçu de l'argent et de t'avoir renvoyé sans t'instruire.
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