[7,5] Ὑπερβάλλουσι δὲ πρὸς τοὺς ὑπὲρ Βυζαντίου Θρᾷκας εἰς
τὸ Δέλτα καλούμενον· αὕτη δ´ ἦν οὐκέτι ἀρχὴ Μαισάδου,
ἀλλὰ Τήρους τοῦ Ὀδρύσου {ἀρχαίου τινός}. καὶ ὁ Ἡρακλείδης
ἐνταῦθα ἔχων τὴν τιμὴν τῆς λείας παρῆν. καὶ
Σεύθης ἐξαγαγὼν ζεύγη ἡμιονικὰ τρία (οὐ γὰρ ἦν πλείω),
τὰ δ´ ἄλλα βοεικά, καλέσας Ξενοφῶντα ἐκέλευε λαβεῖν, τὰ
δ´ ἄλλα διανεῖμαι τοῖς στρατηγοῖς καὶ λοχαγοῖς. Ξενοφῶν
δὲ εἶπεν· Ἐμοὶ τοίνυν ἀρκεῖ καὶ αὖθις λαβεῖν· τούτοις δὲ
τοῖς στρατηγοῖς δωροῦ οἳ σὺν ἐμοὶ ἠκολούθησαν καὶ λοχαγοῖς.
καὶ τῶν ζευγῶν λαμβάνει ἓν μὲν Τιμασίων ὁ Δαρδανεύς,
ἓν δὲ Κλεάνωρ ὁ Ὀρχομένιος, ἓν δὲ Φρυνίσκος ὁ
Ἀχαιός· τὰ δὲ βοεικὰ ζεύγη τοῖς λοχαγοῖς κατεμερίσθη.
τὸν δὲ μισθὸν ἀποδίδωσιν ἐξεληλυθότος ἤδη τοῦ μηνὸς εἴκοσι
μόνον ἡμερῶν· ὁ γὰρ Ἡρακλείδης ἔλεγεν ὅτι οὐ πλέον
ἐμπολήσαι. ὁ οὖν Ξενοφῶν ἀχθεσθεὶς εἶπεν ἐπομόσας·
Δοκεῖς μοι, ὦ Ἡρακλείδη, οὐχ ὡς δεῖ κήδεσθαι Σεύθου· εἰ
γὰρ ἐκήδου, ἧκες ἂν φέρων πλήρη τὸν μισθὸν καὶ προσδανεισάμενος,
εἰ μὴ ἄλλως ἐδύνω, καὶ ἀποδόμενος τὰ σαυτοῦ ἱμάτια.
Ἐντεῦθεν ὁ Ἡρακλείδης ἠχθέσθη τε καὶ ἔδεισε μὴ ἐκ
τῆς Σεύθου φιλίας ἐκβληθείη, καὶ ὅ τι ἐδύνατο ἀπὸ ταύτης
τῆς ἡμέρας Ξενοφῶντα διέβαλλε πρὸς Σεύθην. οἱ μὲν δὴ
στρατιῶται Ξενοφῶντι ἐνεκάλουν ὅτι οὐκ εἶχον τὸν μισθόν·
Σεύθης δὲ ἤχθετο αὐτῷ ὅτι ἐντόνως τοῖς στρατιώταις ἀπῄτει
τὸν μισθόν. καὶ τέως μὲν αἰεὶ ἐμέμνητο ὡς, ἐπειδὰν ἐπὶ
θάλατταν ἀπέλθῃ, παραδώσει αὐτῷ Βισάνθην καὶ Γάνον καὶ
Νέον τεῖχος· ἀπὸ δὲ τούτου τοῦ χρόνου οὐδενὸς ἔτι τούτων
ἐμέμνητο. ὁ γὰρ Ἡρακλείδης καὶ τοῦτο διεβεβλήκει ὡς
οὐκ ἀσφαλὲς εἴη τείχη παραδιδόναι ἀνδρὶ δύναμιν ἔχοντι.
Ἐκ τούτου ὁ μὲν Ξενοφῶν ἐβουλεύετο τί χρὴ ποιεῖν περὶ
τοῦ ἔτι ἄνω στρατεύεσθαι· ὁ δ´ Ἡρακλείδης εἰσαγαγὼν
τοὺς ἄλλους στρατηγοὺς πρὸς Σεύθην λέγειν τε ἐκέλευεν
αὐτοὺς ὅτι οὐδὲν ἂν ἧττον σφεῖς ἀγάγοιεν τὴν στρατιὰν ἢ
Ξενοφῶν, τόν τε μισθὸν ὑπισχνεῖτο αὐτοῖς ἐντὸς ὀλίγων
ἡμερῶν ἔκπλεων παρέσεσθαι δυοῖν μηνοῖν, καὶ συστρατεύεσθαι
ἐκέλευε. καὶ ὁ Τιμασίων εἶπεν· Ἐγὼ μὲν τοίνυν
οὐδ´ ἂν πέντε μηνῶν μισθὸς μέλλῃ εἶναι στρατευσαίμην ἂν
ἄνευ Ξενοφῶντος. καὶ ὁ Φρυνίσκος καὶ ὁ Κλεάνωρ συνωμολόγουν
τῷ Τιμασίωνι. ἐντεῦθεν ὁ Σεύθης ἐλοιδόρει
τὸν Ἡρακλείδην ὅτι οὐ παρεκάλει καὶ Ξενοφῶντα. ἐκ δὲ
τούτου παρακαλοῦσιν αὐτὸν μόνον. ὁ δὲ γνοὺς τοῦ Ἡρακλείδου
τὴν πανουργίαν ὅτι βούλοιτο αὐτὸν διαβάλλειν πρὸς
τοὺς ἄλλους στρατηγούς, παρέρχεται λαβὼν τούς τε στρατηγοὺς
πάντας καὶ τοὺς λοχαγούς. καὶ ἐπεὶ πάντες ἐπείσθησαν,
συνεστρατεύοντο καὶ ἀφικνοῦνται ἐν δεξιᾷ ἔχοντες τὸν
Πόντον διὰ τῶν Μελινοφάγων καλουμένων Θρᾳκῶν εἰς
τὸν Σαλμυδησσόν. ἔνθα τῶν εἰς τὸν Πόντον πλεουσῶν
νεῶν πολλαὶ ὀκέλλουσι καὶ ἐκπίπτουσι· τέναγος γάρ ἐστιν
ἐπὶ πάμπολυ τῆς θαλάττης. καὶ Θρᾷκες οἱ κατὰ ταῦτα
οἰκοῦντες στήλας ὁρισάμενοι τὰ καθ´ αὑτοὺς ἐκπίπτοντα
ἕκαστοι λῄζονται· τέως δὲ ἔλεγον πρὶν ὁρίσασθαι ἁρπάζοντας
πολλοὺς ὑπ´ ἀλλήλων ἀποθνῄσκειν. ἐνταῦθα ηὑρίσκοντο
πολλαὶ μὲν κλῖναι, πολλὰ δὲ κιβώτια, πολλαὶ δὲ βίβλοι
γεγραμμέναι, καὶ τἆλλα πολλὰ ὅσα ἐν ξυλίνοις τεύχεσι
ναύκληροι ἄγουσιν. ἐντεῦθεν ταῦτα καταστρεψάμενοι ἀπῇσαν
πάλιν. ἔνθα δὴ Σεύθης εἶχε στράτευμα ἤδη πλέον τοῦ Ἑλληνικοῦ·
ἔκ τε γὰρ Ὀδρυσῶν πολὺ ἔτι πλείους κατεβεβήκεσαν
καὶ οἱ αἰεὶ πειθόμενοι συνεστρατεύοντο. κατηυλίσθησαν δ´
ἐν τῷ πεδίῳ ὑπὲρ Σηλυμβρίας ὅσον τριάκοντα σταδίους
ἀπέχοντες τῆς θαλάττης. καὶ μισθὸς μὲν οὐδείς πω ἐφαίνετο·
πρὸς δὲ τὸν Ξενοφῶντα οἵ τε στρατιῶται παγχαλέπως
εἶχον ὅ τε Σεύθης οὐκέτι οἰκείως διέκειτο, ἀλλ´ ὁπότε συγγενέσθαι
αὐτῷ βουλόμενος ἔλθοι, πολλαὶ ἤδη ἀσχολίαι ἐφαίνοντο.
| [7,5] On traversa les montagnes et on marcha contre les Thraces qui
habitent au-dessus de Byzance, vers le lieu appelé Delta. Ce pays ne faisait
plus partie de l'empire qu'avait possédé Mésade, mais il avait anciennement
appartenu à Térès Odryssien. Héraclide s'y trouva avec l'argent provenant de la
vente du butin. Seuthès fit amener trois attelages de mulets (c'était les seuls
qu'il eût) et plusieurs attelages de boeufs. Il appela Xénophon et lui dit de
prendre pour lui ceux qu'il voudrait, et de distribuer les autres aux chefs de
lochos et aux généraux. Celui-ci répondit : « Je n'ai besoin de rien pour le
présent ; vous me récompenserez par la suite ; offrez ces dons aux généraux et
aux autres chefs qui vous ont suivi comme moi. » Timasion Dardanien, Cléanor
d'Orchomène, et Phrynisque Achéen, eurent chacun un attelage de mulets. On
partagea entre les chefs de lochos les attelages de boeufs. Quoiqu'il fût échu
un mois de solde, Seuthès n'en fit payer que vingt jours. Héraclide prétendait
qu'il n'avait pu tirer plus d'argent des effets vendus. Xénophon, irrité, lui
dit : « Vous me paraissez, Héraclide, ne pas prendre comme vous le devriez les
intérêts de Seuthès. Si vous les eussiez pris ; vous auriez rapporté de quoi
payer la solde entière. Il fallait emprunter, si vous ne pouviez faire
autrement, et vendre jusqu'à vos habits. » Héraclide se fâcha de ce discours, et
craignit qu'on ne lui fît perdre l'amitié de Seuthès. De ce jour, il calomnia
Xénophon autant qu'il le put près de ce prince. Les soldats reprochaient à ce
général qu'une partie de la paie leur restait due, et Seuthès s'offensait de ce
que Xénophon exigeait avec fermeté qu'on payât les troupes. Ce Thrace lui
répétait sans cesse auparavant que dès qu'on arriverait près de la mer, il le
mettrait en possession de Bisanthe, de Gante et du nouveau château. De ce
moment, il ne lui parla plus d'aucune de ces promesses. C'était encore un tort
qu'Héraclide avait fait à Xénophon, d'insinuer à Seuthès qu'il était dangereux
de confier des places à un homme qui avait une armée à sa disposition. Cependant
Xénophon hésitait, et faisait des réflexions sur le projet de porter la guerre
encore plus avant dans la Thrace supérieure. Héraclide conduisit les autres
généraux à Seuthès et voulut les engager à dire qu'ils n'auraient pas moins de
crédit que Xénophon pour se faire suivre par l'armée ; il leur promit qu'on
paierait sous peu de jours la solde entière de deux mois, et les exhorta à
accompagner Seuthès dans son expédition. Timasion lui répondit : « Quand vous
m'offririez cinq mois de ma solde, je ne marcherais pas sans Xénophon.»
Phrynisque et Cléanor tinrent le même discours. Seuthès gronda alors Héraclide
de n'avoir pas appelé Xénophon. On l'invita ensuite à venir seul ; mais comme il
connaissait la fourberie d’Héraclide, et sentait que ce Grec voulait le mettre
mal avec les autres généraux, il les amena tous avec lui, et se fit suivre
aussi par les chefs de lochos. Quand Seuthès eut gagné tous ces chefs ; on
marcha avec lui. L'armée ayant le Pont-Euxin à sa droite, traversa tout le pays
des Thraces appelés Mélinophages, et arriva a la côte de Salmydesse : là,
beaucoup des bâtiments qui entrent dans le Pont-Euxin touchent et s'engravent ;
car il y a des bas-fonds dans la plus grande partie de cette mer. Les Thraces
qui habitent sur ces parages ont posé des colonnes qui leur servent de bornes,
et chacun pille ce qui échoue sur la partie de la côte qui lui appartient. On
dit qu'avant qu'ils eussent fixé ces limites, il y en avait grand nombre
d'égorgés ; parce qu'ils s'entre-tuaient pour s'arracher le butin. On trouve sur
cette côte beaucoup de lits, de cassettes, de livres et d'autres meubles que les
gens de mer ont à bord dans des caisses de bois. Après avoir soumis cette
contrée, on revint sur ses pas. Seuthès avait alors une armée plus nombreuse que
celle des Grecs ; car il avait recruté beaucoup plus d'Odryssiens encore
qu'auparavant ; ils étaient descendus de leurs montagnes pour le joindre, et
tous les peuples qu'il soumettait prenaient aussitôt parti dans ses troupes. On
campait dans une plaine au-dessus de Selymbrie, à la distance de cinquante
stades environ de la mer, et il n'était pas mention de solde. Les soldats
étaient furieux contre Xénophon, et Seuthès ne le traitait plus avec la même
amitié. Toutes les fois que ce général venait le trouver et voulait conférer
avec lui, il se trouvait des prétextes pour différer de lui donner audience.
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