[2,6] Καὶ ὕλην μὲν τρόπῳ τινὶ ὑποτίθεται, καὶ κόσμου ποίησιν, λέγων·
Ἤτοι μὲν πρώτιστα χάος γένετ', αὐτὰρ ἔπειτα
γαῖ' εὐρύστερνος, πάντων ἕδος ἀσφαλὲς αἰεὶ
ἀθανάτων, οἳ ἔχουσι κάρη νιφόεντος Ὀλύμπου,
Τάρταρά τ' ἠερόεντα, μυχὸν χθονὸς εὐρυοδείης,
ἠδ' Ἔρος, ὃς κάλλιστος ἐν ἀθανάτοισι θεοῖσι,
λυσιμελής, πάντων τε θεῶν πάντων τ' ἀνθρώπων
δάμναται ἐν στήθεσσι νόον καὶ ἐπίφρονα βουλήν.
Ἐκ Χάεος δ' Ἔρεβός τε μέλαινά τε Νὺξ ἐγένοντο.
Γαῖα δέ τοι πρῶτον μὲν ἐγείνατο ἶσον ἑωυτῇ
Οὐρανὸν ἀστερόενθ', ἵνα μιν περὶ πάντα καλύπτῃ,
ὄφρ' εἴη μακάρεσσι θεοῖς ἕδος ἀσφαλὲς αἰεί·
γείνατο δ' οὔρεα μακρά, θεᾶν χαρίεντας ἐναύλους
Νυμφέων, αἳ ναίουσιν ἀν' οὔρεα βησσήεντα·
ἠδὲ καὶ ἀτρύγετον πέλαγος τέκεν οἴδματι θῦον,
πόντον, ἄτερ φιλότητος ἐφιμέρου· αὐτὰρ ἔπειτα
Οὐρανῷ εὐνηθεῖσα τέκ' Ὠκεανὸν βαθυδίνην.
καὶ ταῦτα εἰπὼν οὐδὲ οὕτως ἐδήλωσεν ὑπὸ τίνος ἐγένοντο.
Εἰ γὰρ ἐν πρώτοις ἦν χάος, καὶ ὕλη τις προϋπέκειτο ἀγένητος οὖσα, τίς ἄρα ἦν ὁ ταύτην μετασκευάζων καὶ μεταρρυθμίζων καὶ μεταμορφῶν; πότερον αὐτὴ ἑαυτὴν ἡ ὕλη μετεσχημάτιζεν καὶ ἐκόσμει; ὁ γὰρ Ζεὺς μετὰ χρόνον πολὺν γεγένηται, οὐ μόνον τῆς ὕλης ἀλλὰ καὶ τοῦ κόσμου καὶ πλήθους ἀνθρώπων· ἔτι μὴν καὶ ὁ πατὴρ αὐτοῦ Κρόνος. Ἢ μᾶλλον ἦν κύριόν τι τὸ ποιῆσαν αὐτήν, λέγω δὲ θεός, ὁ καὶ κατακοσμήσας αὐτήν;
Ἔτι μὴν κατὰ πάντα τρόπον φλυαρῶν εὑρίσκεται καὶ ἐναντία ἑαυτῷ λέγων. Εἰπὼν γὰρ γῆν καὶ οὐρανὸν καὶ θάλασσαν ἐξ αὐτῶν τοὺς θεοὺς βούλεται γεγονέναι, καὶ ἐκ τούτων ἀνθρώπους δεινοτάτους τινὰς συγγενεῖς θεῶν καταγγέλλει, Τιτάνων γένος καὶ Κυκλώπων καὶ Γιγάντων πληθύν, τῶν τε κατὰ Αἴγυπτον δαιμόνων, ἢ ματαίων ἀνθρώπων, ὡς μέμνηται Ἀπολλωνίδης, ὁ καὶ Ὁράπιος ἐπικληθείς, ἐν βίβλῳ τῇ ἐπιγραφομένῃ <Σεμενουθὶ> καὶ ταῖς λοιπαῖς κατ' αὐτὸν ἱστορίαις περί τε τῆς θρησκείας τῆς Αἰγυπτιακῆς καὶ τῶν βασιλέων αὐτῶν.
| [2,6] Le même poète, parlant de la matière et de la création du monde, s'exprime en ces termes :
"Au commencement exista le chaos, puis la terre, dont le large sein est l'asile le plus sûr des immortels qui occupent les sommets de l'Olympe, ou le ténébreux Tartare dans les entrailles de la terre. L'amour existait aussi, lui qui est le plus beau d'entre les immortels, qui charme les soucis et qui triomphe de la sagesse des hommes et des dieux. Du chaos naquirent l'Érèbe et la nuit obscure ; puis de la nuit sortirent l'air et le jour, qu'elle enfanta de son union avec Érèbe. La terre, de son côté ; produisit d'abord la voûte des cieux, parsemée d'étoiles, de manière à en être enveloppée tout entière et à devenir le séjour fortuné des dieux. Elle engendra ensuite les hautes montagnes et les grottes si agréables aux nymphes qui habitent les rochers. Enfin l'eau stérile enfanta, non dans son amour, mais dans sa fureur, le Pont-Euxin ; et puis ensuite s'étant unie avec le ciel, elle engendra l'océan."
Ce poète, en nous faisant l'énumération de tous ces êtres créés est encore à nous dire quel était leur auteur.
Car, si le chaos était au commencement, il y avait donc une matière incréée et préexistante. Mais qui l'a disposée, qui lui a donné sa forme et ses proportions ? Est-ce la matière qui s'est donné à elle-même sa forme et sa beauté ? Car Jupiter est bien postérieur, non-seulement à la matière, mais encore au monde et à une foule d'hommes ; et il en est de même de Saturne, son père.
Ou bien a-t-il existé une cause première, je veux dire un Dieu qui l'a créée et qui l'a embellie ? Que dirai-je, il semble se jouer de toute raison et se combattre lui-même ; car après avoir parlé de la terre, du ciel et de la mer, il prétend que les dieux sont issus de ces éléments, et que des dieux eux-mêmes sont sortis ces hommes affreux qui font partie de leur famille ; je veux dire les titans, les cyclopes, les géants, les dieux des Égyptiens ou plutôt des hommes insensés ; c'est de ces monstres que parle Apollonide, surnommé Horapius, dans son livre intitulé Semenouthi et dans les autres histoires qu'il a écrites sur la religion et les rois de l'Égypte.
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