[23] Σκύθας δὲ τούτους Ἡρόδοτός τέ φησι καὶ ἡμεῖς
ὁρῶμεν κατεχομένους ἅπαντας ὑπὸ νόσου θηλείας. οὗτοι
γάρ εἰσιν, ἀφ´ ὧν οἱ πανταχοῦ δοῦλοι, οἱ μηδέποτε γῆς
ἐγκρατεῖς, δι´ οὓς ἡ Σκυθῶν ἐρημία πεπαροιμίασται, φεύγοντες
ἀεὶ τὴν οἰκείαν· οὓς ἐξ ἠθέων τῶν σφετέρων, φασὶν
οἱ τὰ παλαιὰ παραδόντες, Κιμμέριοί τε ἀνέστησαν πρότερον,
καὶ αὖθις ἕτεροι, καὶ αἱ γυναῖκές ποτε, καὶ οἱ
πατέρες ὑμῶν, καὶ ὁ Μακεδών, ὑφ´ ὧν τῶν μὲν εἰς
τοὺς εἴσω, τῶν δὲ εἰς τοὺς ἔξω προὐχώρησαν· καὶ
οὐ παύονταί γε, ἕως ἂν ὦσι τοῖς καταντικρὺ παρὰ τῶν
ἐλαυνόντων ἀντιδιδόμενοι, ἀλλ´ ὅταν ἐμπέσωσιν ἄφνω τοῖς
οὐ προσδεχομένοις, ἐπὶ χρόνον ταράττουσιν, ὥσπερ Ἀσσυρίους
πάλαι καὶ Μήδους καὶ Παλαιστίνους. καὶ τὸ νῦν δὴ
τοῦτο, παρ´ ἡμᾶς οὐ πολεμησείοντες ἦλθον, ἀλλ´ ἱκετεύσοντες,
ἐπειδὴ πάλιν ἀνίσταντο· μαλακωτέροις δὲ ἐντυχόντες,
οὐ τοῖς ὅπλοις Ῥωμαίων, ἀλλὰ τοῖς ἤθεσιν, ὥσπερ
ἴσως ἔδει πρὸς ἱκέτας, γένος ἀμαθὲς τὸ εἰκὸς ἀπεδίδου, καὶ
ἐθρασύνετο, καὶ ἠγνωμόνει τὴν εὐεργεσίαν, ὑπὲρ οὗ πατρὶ
τῷ σῷ δίκας ἐπ´ αὐτοὺς ὡπλισμένῳ διδόντες, αὖθις ἦσαν
οἰκτροὶ καὶ ἱκέται σὺν γυναιξὶν ἐκάθιζον· ὁ δὲ τῷ πολέμῳ
νικῶν ἐλέῳ παρὰ πλεῖστον ἡττᾶτο, καὶ ἀνίστη τῆς ἱκετείας,
καὶ συμμάχους ἐποίει, καὶ πολιτείας ἠξίου, καὶ μετεδίδου
γερῶν, καὶ γῆς τι ἐδάσατο τοῖς παλαμναίοις Ῥωμαϊκῆς,
ἀνὴρ τῷ μεγαλόφρονι καὶ γενναίῳ τῆς φύσεως ἐπὶ τὸ
πρᾶον χρησάμενος. ἀλλ´ ἀρετῆς γε τὸ βάρβαρον οὐ ξυνίησιν.
ἀρξάμενοι γὰρ ἐκεῖθεν τὸ μέχρι τοῦδε καταγελῶσιν ἡμῶν,
εἰδότες ὧν τε ἦσαν ἄξιοι παρ´ ἡμῶν καὶ ὧν ἠξιώθησαν·
τό τε κλέος τοῦτο γείτοσιν αὐτῶν ἤδη τὴν ἐφ´ ἡμᾶς
ὡδοποίησεν. καί τινες ἐκφοιτῶσιν ἱπποτοξόται ξένοι παρὰ
τοὺς ῥᾳδίους ἀνθρώπους φιλοφροσύνην αἰτοῦντες παράδειγμα
ἐκείνους τοὺς χείρους ποιούμενοι· καὶ προβαίνειν
ἔοικε τὸ κακὸν εἰς τὴν καλουμένην ὑπὸ τῶν πολλῶν
πειθανάγκην. φιλοσοφίᾳ γὰρ οὐ διενεκτέον ὑπὲρ τῶν ὀνομάτων,
ὑπηρεσίαν τῇ διανοίᾳ ζητούσῃ, κἂν χαμόθεν αὐτὴν
εἰς τὰ πράγματα συμπορίζηται τρανήν τε καὶ ἐφαρμόζουσαν.
| [23] 23. Les Scythes, au contraire, sont ces peuplades dont Hérodote nous raconte et
dont nous-mêmes nous voyons la lâcheté. C’est chez eux que de tous côtés on va se
fournir d’esclaves errants et sans patrie, ils changent constamment de contrée; de là
cette expression passée en proverbe, la solitude des Scythes. Comme l’histoire nous
le rapporte, les Cimmériens d’abord, puis d’autres peuples, ensuite des femmes, plus
tard nos ancêtres, et enfin les Macédoniens, les ont tour à tour mis en fuite ; renvoyés
d’un côté, ils allaient de l’autre, pour être chassés de nouveau: nomades qui ne
s’arrêtent que quand l’ennemi qui les poursuit les a poussés sur un autre ennemi.
Jadis leurs irruptions subites effrayèrent quelquefois certains peuples, comme les
Assyriens, les Mèdes, les Palestins. Mais dans leurs récentes émigrations, quand ils
sont venus vers nous, c’est en suppliants, et non en ennemis. Ils trouvaient dans les
Romains des hommes qu’il était facile, non pas de vaincre, mais d’émouvoir, et qui
devaient se laisser toucher par leurs prières : alors, comme on pouvait s’y attendre,
cette nature sauvage commença à s’enhardir et à se montrer ingrate. Aussi ton père
s’arma contre eux; punis bientôt, ils vinrent se jeter à ses genoux, priant et gémissant
ainsi que leurs femmes. Ton père avait vaincu dans les combats ; il céda à la
compassion: il les fit relever; il leur accorda, avec son alliance, une place dans l’Etat, il
leur ouvrit l’accès aux honneurs; des terres furent assignées à ces mortels ennemis de
l’Empire par un prince que son courage même et sa magnanimité rendaient trop facile.
Mais des barbares ne comprennent rien à la vertu: depuis ce temps-là
jusqu’aujourd’hui ils n’ont cessé de rire de nous, en songeant au châtiment qu’ils
méritaient et à la récompense qu’ils ont reçue. Le bruit de leur fortune a engagé leurs
voisins à suivre leurs traces; et voici qu’abandonnant leurs contrées, des hordes de
cavaliers armés d’arcs viennent nous demander, à nous qui sommes d’humeur trop
faible, que nous les recevions en amis: et leur prétention se justifie par l’accueil que
nous avons fait à la dernière des nations. Nous sommes forcés de leur faire, quoiqu’à
contre cœur, bonne mine : l’expression est vulgaire; mais le philosophe, pour se faire
comprendre, n’est pas difficile sur le choix des mots; il use même de locutions triviales,
pourvu qu’elles rendent clairement sa pensée.
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