[1] Ἀκούων σου πρώην ὑπὲρ φιλοσοφίας ἀγανακτοῦντος,
εἰ μηδὲν ἔσται πέρας ἀνθρώποις τῆς εἰς αὐτὴν
ἀσεβείας, καὶ ἅμα ὅτι χαλεπῇ χρῷτο τύχῃ καὶ λίαν ἀγνώμονι,
ἣν οἱ μὲν προσποιούμενοι διὰ συχνῆς τερατείας εὐδοκιμοῦσι
παρά τε δυνάσταις καὶ ἐν τοῖς πλήθεσιν, οἱ δὲ
ἀληθεύοντες ἀπιστοῦνται καὶ ἐν Καρὸς μοίρᾳ τιμῶνται,
τῆς μὲν ὁρμῆς ἠγάμην· ἀπὸ γὰρ πάνυ γενναίας προῆκτο
φύσεως· οὐ μὴν ἀγανακτεῖν τινα οἴομαι δεῖν, ὅταν τὸ
κατὰ λόγον συμβαίνῃ. εὔλογον δὲ δήπου τυγχάνειν ἕκαστον,
ὧν τυχεῖν ἐσπούδακε, καὶ περὶ ἃ πεπραγμάτευται,
καὶ ἀποτυγχάνειν αὖ πάλιν ἐκείνων, ὧν οὔτε ὠρέχθη
ποτὲ οὔτε ἐπεμελήθη ὅπως ἂν αὐτῷ παραγένοιτο. εἰ τοίνυν
ὁ μὲν ἐφρόντισε τοῦ γενέσθαι σοφός, ὁ δὲ μόνον τοῦ
δόξαι, ἑκάτερος τὸ προσῆκον ἔχουσιν, ὁ μὲν ὤν, ὁ δὲ
εἶναι δοκῶν. ἢ δεινά γ´ ἂν πάθοιεν καὶ δικαιότερον ἀγανακτοῖεν
οἱ διὰ τῆς οὐκ οὔσης ἀλλὰ φαινομένης φιλοσοφίας
δόξαν θηρώμενοι, εἰ τοῖς μὲν ἑκάτερον ὑπάρξει θατέρου
φροντίσασιν, σφίσι δὲ μηδέτερον. καίτοι τὸ ῥᾷστον οὐ
δι´ ἐλάττονος ἐπιμελείας ἐπιτετηδευκόσιν, ἀπατῆσαι τοὺς
οὐκ εἰδότας περὶ ὧν ἀπατῶνται. οὗτοι μὲν οὖν ἔστων
λαμπροί, κἀν τοῖς θεάτροις στεφανούσθων, εἰ βούλονται·
τῆς γὰρ ἀληθείας παραχωρήσαντες, ὀνόματος ἠμφισβήτησαν.
ἡμῖν δὲ ὀλιγωρουμένοις· ἐπειδὴ σύ με βούλει τοῖς
ἐκ τοῦ σπανίου γένους συναριθμεῖν, καὶ οὐχ ἥκιστα δι´ ἐμὲ
τὴν φιλοσοφίας τύχην ἐδυσχέρανας· ἡμῖν οὖν ἀμελουμένοις
ὑπὸ τῶν ἀνθρώπων ἀγαπητέον τὴν τάξιν, εἰς ἣν ὑφ´ ἑαυτῶν
ἐτάχθημεν· καὶ οὐ ζηλωτέον οὐδὲ μακαριστέον τοὺς ἡμιπαιδεύτους
τούτους, ὅταν ὑπὸ τῶν παντελῶς ἀπαιδεύτων
μετέωροι φέρωνται. οὔτε γὰρ ὁρᾷν ψυχῆς ἐκκεκαθαρμένης
κάλλος οἱ μὴ καθαροὶ δυνατοί· καὶ τὸ κηρύττειν ἑαυτὸν
καὶ πάντα ποιεῖν ὑπὲρ ἐπιδείξεως, οὐ σοφίας, ἀλλὰ σοφιστείας
ἐστίν. διὸ τῆς παρὰ τῶν ἀγελαίων ἀμοιροῦντας
αἰδοῦς καλῶς ἔχει λέγειν
οὔτι με ταύτης
χρεὼ τιμῆς· φρονέω δὲ τετιμῆσθαι Διὸς αἴσῃ,
ἀγαπᾶν τε καὶ ἀσμενίζειν, ἐντυχεῖν ἀνδρὶ φρόνησιν ἅμα
καὶ δύναμιν κεκτημένῳ. οὕτω γὰρ οὔτ´ ἀναξίοις ἂν συγγινοίμεθα,
οὔτ´ ἂν ἄτιμοι παντάπασιν νομιζοίμεθα.
| [1] Je vous ai entendu naguère exprimer votre indignation du triste état où se
trouve la philosophie: « On ne la traite pas, disiez-vous, avec le respect auquel elle a
droit; son sort est vraiment à plaindre. N’est-il pas étrange en effet de voir des gens,
qui ne sont philosophes qu’en apparence, se faire bien voir, par leurs jongleries, des
grands et de la foule, tandis que ceux qui méritent véritablement ce nom n’excitent que
la défiance et n’obtiennent aucune considération? » Votre courroux me charmait; il
partait d’une âme généreuse. Faut-il cependant s’indigner d’une chose bien naturelle?
Il est tout simple que chacun atteigne ce qu’il recherche avec ardeur, et voie s’éloigner
de lui ce qui n’est l’objet ni de ses désirs ni de sa poursuite.
Celui-ci s’efforce de devenir sage, celui-là de le paraître; et tous les deux ont ce
qu’ils veulent, du moment où l’un possède la sagesse, où l’autre a l’air de la posséder.
Ne pourraient-ils pas justement se plaindre et s’irriter, ceux qui ne visent qu’à se faire
une réputation par l’étalage d’une fausse science, s’ils voyaient les vrais philosophes
gagner, sans la chercher, la faveur publique, alors qu’eux-mêmes n’arriveraient à rien,
tout en se donnant beaucoup de peine pour éblouir des ignorants faciles à tromper?
Soit; qu’ils acquièrent de la célébrité, s’ils y tiennent, qu’ils se fassent couronner dans
les théâtres : étrangers à la vérité, ils ne se piquent pas d’être philosophes; ils en
ambitionnent seulement le nom.
Nous autres (car vous avez bien voulu me compter dans le petit nombre des
esprits sérieux, et c’est surtout à cause de moi que vous déploriez le sort de la
philosophie), nous autres, si le vulgaire n’a pour nous que de l’oubli et du dédain,
sachons nous contenter de la place que nous-même nous avons choisie; n’envions
pas le prétendu bonheur de ces demi-savants, quand nous voyons exalter leur mérite
par ceux qui ne savent absolument rien. La beauté d’une âme complètement purifiée
n’est visible qu’à ceux qui sont purs. S’instituer son propre héraut, tout sacrifier à la
montre, c’est le fait, non de la sagesse, mais de la sophistique. Si l’on n’obtient pas les
hommages de la foule, eh bien! il est beau de pouvoir dire:
"--- Cet honneur qui m’est cher !
Je l’attends, non de vous, mais du seul Jupiter".
Nous devons nous féliciter, nous tenir pour satisfaits, si nous avons l’heureuse
chance de rencontrer un personnage puissant et éclairé qui nous estime; car alors,
sans quêter les suffrages des incapables, nous avons, nous aussi, notre part de
considération.
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