HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Strabon, Geographica, livre XIV-2

Chapitre 28

  Chapitre 28

[14b,28] Τοῦ ποιητοῦ δ´ εἰρηκότος οὑτωσίΜάσθλης αὖΚαρῶν ἡγήσατο βαρβαροφώνων,“ οὐκ ἔχει λόγον πῶς τοσαῦτα εἰδὼς ἔθνη βάρβαρα μόνους εἴρηκε βαρβαροφώνους τοὺς Κᾶρας, βαρβάρους δ´ οὐδένας· οὔτ´ οὖν Θουκυδίδης ὀρθῶς· οὐδὲ γὰρ λέγεσθαί φησι βαρβάρους διὰ τὸ μηδὲ Ἕλληνάς πω ἀντίπαλον εἰς ἓν ὄνομα ἀποκεκρίσθαι· τό τε γὰρ μηδὲ Ἕλληνάς πω ψεῦδος αὐτὸς ποιητὴς ἀπελέγχειἀνδρός, τοῦ κλέος εὐρὺκαθ´ Ἑλλάδα καὶ μέσον Ἄργος.“ καὶ πάλινεἴτ´ ἐθέλεις τραφθῆναι ἀν´ Ἑλλάδα καὶ μέσον Ἄργος.“ μὴ λεγομένων τε βαρβάρων πῶς ἔμελλεν εὖ λεχθήσεσθαι τὸ βαρβαροφώνων; οὔτε δὴ οὗτος εὖ οὔτ´ Ἀπολλόδωρος γραμματικός, ὅτι τῷ κοινῷ ὀνόματι ἰδίως καὶ λοιδόρως ἐχρῶντο οἱ Ἕλληνες κατὰ τῶν Καρῶν, καὶ μάλιστα οἱ Ἴωνες μισοῦντες αὐτοὺς διὰ τὴν ἔχθραν καὶ τὰς συνεχεῖς στρατείας· ἐχρῆν γὰρ οὕτως βαρβάρους ὀνομάζειν. ἡμεῖς δὲ ζητοῦμεν διὰ τί βαρβαροφώνους καλεῖ, βαρβάρους δ´ οὐδ´ ἅπαξ. „ὅτιφησίτὸ πληθυντικὸν εἰς τὸ μέτρον οὐκ ἐμπίπτει, διὰ τοῦτ´ οὐκ εἴρηκε βαρβάρους.“ ἀλλ´ αὕτη μὲν πτῶσις οὐκ ἐμπίπτει, δ´ ὀρθὴ οὐ διαφέρει τῆς ΔάρδανοιΤρῶες καὶΛύκιοι καὶ Δάρδανοι.“ τοιοῦτον δὲ καὶ τόοἷοι Τρώιοι ἵπποι.“ οὐδέ γε ὅτι τραχυτάτη γλῶττα τῶν Καρῶν· οὐ γάρ ἐστιν ἀλλὰ καὶ πλεῖστα Ἑλληνικὰ ὀνόματα ἔχει καταμεμιγμένα, ὥς φησι Φίλιππος τὰ Καρικὰ γράψας. οἶμαι δὲ τὸ βάρβαρον κατ´ ἀρχὰς ἐκπεφωνῆσθαι οὕτως κατ´ ὀνοματοποιίαν ἐπὶ τῶν δυσεκφόρως καὶ σκληρῶς καὶ τραχέως λαλούντων, ὡς τὸ βατταρίζειν καὶ τραυλίζειν καὶ ψελλίζειν. εὐφυέστατοι γάρ ἐσμεν τὰς φωνὰς ταῖς ὁμοίαις φωναῖς κατονομάζειν διὰ τὸ ὁμογενές· δὴ καὶ πλεονάζουσιν ἐνταῦθα αἱ ὀνοματοποιίαι, οἷον τὸ κελαρύζειν καὶ κλαγγὴ δὲ καὶ ψόφος καὶ βοὴ καὶ κρότος, ὧν τὰ πλεῖστα ἤδη καὶ κυρίως ἐκφέρεται· πάντων δὴ τῶν παχυστομούντων οὕτως βαρβάρων λεγομένων, ἐφάνη τὰ τῶν ἀλλοεθνῶν στόματα τοιαῦτα, λέγω δὲ τὰ τῶν μὴ Ἑλλήνων. ἐκείνους οὖν ἰδίως ἐκάλεσαν βαρβάρους, ἐν ἀρχαῖς μὲν κατὰ τὸ λοίδορον, ὡς ἂν παχυστόμους τραχυστόμους, εἶτα κατεχρησάμεθα ὡς ἐθνικῷ κοινῷ ὀνόματι ἀντιδιαιροῦντες πρὸς τοὺς Ἕλληνας. καὶ γὰρ δὴ τῇ πολλῇ συνηθείᾳ καὶ ἐπιπλοκῇ τῶν βαρβάρων οὐκέτι ἐφαίνετο κατὰ παχυστομίαν καὶ ἀφυΐαν τινὰ τῶν φωνητηρίων ὀργάνων τοῦτο συμβαῖνον, ἀλλὰ κατὰ τὰς τῶν διαλέκτων ἰδιότητας. ἄλλη δέ τις ἐν τῇ ἡμετέρᾳ διαλέκτῳ ἀνεφάνη κακοστομία καὶ οἷον βαρβαροστομία, εἴ τις ἑλληνίζων μὴ κατορθοίη, ἀλλ´ οὕτω λέγοι τὰ ὀνόματα ὡς οἱ βάρβαροι οἱ εἰσαγόμενοι εἰς τὸν ἑλληνισμὸν οὐκ ἰσχύοντες ἀρτιστομεῖν, ὡς οὐδ´ ἡμεῖς ἐν ταῖς ἐκείνων διαλέκτοις. τοῦτο δὲ μάλιστα συνέβη τοῖς Καρσί· τῶν γὰρ ἄλλων οὔτ´ ἐπιπλεκομένων πω σφόδρα τοῖς Ἕλλησιν, οὔτ´ ἐπιχειρούντων ἑλληνικῶς ζῆν μανθάνειν τὴν ἡμετέραν διάλεκτον, πλὴν εἴ τινες σπάνιοι καὶ κατὰ τύχην ἐπεμίχθησαν καὶ κατ´ ἄνδρα ὀλίγοις τῶν Ἑλλήνων τισίν· οὗτοι δὲ καθ´ ὅλην ἐπλανήθησαν τὴν Ἑλλάδα μισθοῦ στρατεύοντες. ἤδη οὖν τὸ βαρβαρόφωνον ἐπ´ ἐκείνων πυκνὸν ἦν ἀπὸ τῆς εἰς τὴν Ἑλλάδα αὐτῶν στρατείας· καὶ μετὰ ταῦτα ἐπεπόλασε πολὺ μᾶλλον, ἀφ´ οὗ τάς τε νήσους μετὰ τῶν Ἑλλήνων ᾤκησαν, κἀκεῖθεν εἰς τὴν Ἀσίαν ἐκπεσόντες οὐδ´ ἐνταῦθα χωρὶς Ἑλλήνων οἰκεῖν ἠδύναντο, ἐπιδιαβάντων τῶν Ἰώνων καὶ τῶν Δωριέων. ἀπὸ δὲ τῆς αὐτῆς αἰτίας καὶ τὸ βαρβαρίζειν λέγεται· καὶ γὰρ τοῦτο ἐπὶ τῶν κακῶς ἑλληνιζόντων εἰώθαμεν λέγειν, οὐκ ἐπὶ τῶν καριστὶ λαλούντων. οὕτως οὖν καὶ τὸ βαρβαροφωνεῖν καὶ τοὺς βαρβαροφώνους δεκτέον τοὺς κακῶς ἑλληνίζοντας· ἀπὸ δὲ τοῦ καρίζειν καὶ τὸ βαρβαρίζειν μετήνεγκαν εἰς τὰς περὶ ἑλληνισμοῦ τέχνας καὶ τὸ σολοικίζειν, εἴτ´ ἀπὸ Σόλων εἴτ´ ἄλλως τοῦ ὀνόματος τούτου πεπλασμένου. [14b,28] Reste la difficulté contenue dans ce passage d'Homère (Il. II, 867) : «Masthlès venait ensuite à la tête des Cariens barbarophones», car on ne voit pas qu'on ait bien compris jusqu'ici pourquoi le Poète, qui connaissait tant de nations barbares, a donné aux seuls Cariens cette épithète de barbarophones et n'a appliqué à aucun peuple {pas plus aux Cariens qu'aux autres} la dénomination même de barbares. L'explication de Thucydide (I, 3), notamment, n'est rien moins que satisfaisante, et, quand il prétend qu'Homère ne s'est pas servi de cette dénomination de barbares, faute d'avoir pu lui opposer le nom d'hellènes, qui, en tant que dénomination générale et collective, n'existait pas encore, il se trompe manifestement, et ses derniers mots «n'existait pas encore» sont réfutés par le Poète lui-même : témoin ce passage de l'Odyssée (I, 344) : «Lui, dont la gloire s'est répandue par toute la Hellade et a pénétré jusqu'au coeur d'Argos» ; témoin celui-ci aussi : «Mais, si tu veux séjourner en pleine Hellade, et au coeur même d'Argos» (Od. XV, 80). Supposons d'ailleurs que ce nom de barbares ne fût pas encore usité, comment admettre qu'Homère ait employé un mot, tel que barbarophones, que personne n'eût pu comprendre ? L'explication de Thucydide n'est donc pas heureuse. Disons tout de suite que celle du grammairien Apollodore ne l'est pas davantage : elle consiste à prétendre que d'une dénomination générale les Hellènes, et surtout les Ioniens à cause de leur haine pour un peuple rival avec qui ils étaient perpétuellement en guerre, avaient fait une qualification particulière et injurieuse à l'adresse des Cariens. Mais, à ce compte, c'est barbares et non barbarophones que le Poète aurait dû dire. Quant à la question spéciale qui nous occupe, «pourquoi Homère a employé le mot barbarophones et pas une fois le nom de barbares», voici comme y répond Apollodore : «Le pluriel de ce mot, dit-il, ne pouvait entrer dans son vers, et c'est pour cela qu'Homère nulle part n'a employé le mot g-barbarous. - Oui, certes, à ce cas-là, le mot ne pouvait trouver place dans le vers d'Homère, mais le cas direct g-barbaroi ne diffère en rien de Dardanoi, mot qu'Homère a bel et bien employé (Il. XI, 286) : g-Trôes g-kai g-Lukioi g-kai g-Dardanoi, il ne diffère pas non plus de g-Trôioi, et Homère a dit (Il. V, 222) : g-Oioi g-Trôioi g-hippoi. On ne saurait enfin accepter davantage cette autre explication, que la langue carienne était la plus dure des langues ; car, loin de mériter ce reproche, ladite langue est mélangée de mots grecs dans une proportion très considérable, ainsi que le marque Philippe dans son traité des Antiquités cariques. Ce que je crois, moi, c'est que le mot barbare, dans le principe, a été formé par onomatopée, à l'instar des mots g-battarizein, g-traulizein, g-psellizein, pour exprimer toute prononciation embarrassée, dure, rauque. Par une disposition très heureuse de notre nature, les imitations que nous faisons des différents sons de la voix humaine deviennent, grâce à leur ressemblance saisissante, les noms mêmes de ces sons ou inflexions imitées ; on peut même dire que c'est dans cet ordre d'idées que les onomatopées chez nous se sont le plus multipliées, exemples : g-kelaruzein, g-klaggê, g-psophos, g-boê, g-krotos, {simples imitations des sons de la voix à l'origine,} devenues à présent pour la plupart des dénominations précises et des termes parfaitement définis. Or, une fois l'habitude prise de qualifier ainsi de barbares tous les gens à prononciation lourde et empâtée, les idiomes étrangers, j'entends ceux des peuples non grecs, ayant paru autant de prononciations vicieuses, on appliqua à ceux qui les parlaient cette même qualification de barbares, d'abord comme un sobriquet injurieux équivalant aux épithètes de pachystomes et de trachystomes, puis abusivement comme un véritable ethnique pouvant dans sa généralité être opposé au nom d'Hellènes. On avait reconnu, en effet, à mesure que les barbares s'étaient mêlés davantage aux Grecs et avaient noué avec eux des relations plus intimes, que les sons étranges qu'on entendait sortir de leur bouche ne tenaient pas à un embarras de la langue ou à quelque autre vice des organes de la voix, mais bien à la nature particulière de leur idiome. Autre chose, maintenant, est le parler vicieux et l'espèce de barbarostomie qui, dès longtemps, s'est fait jour dans notre propre langue : il arrive souvent qu'une personne sachant le grec parle incorrectement et défigure les mots ni plus ni moins que les barbares que l'on veut initier à la connaissance du grec et qui ne parviennent pas à se faire comprendre, pas plus, du reste, que nous n'y parvenons nous-mêmes, quand nous voulons parler les langues étrangères. On a pu vérifier le fait, surtout chez les Cariens ; car à une époque où les autres peuples n'avaient encore noué aucune relation avec les Grecs, et où, à l'exception de rares individus que le hasard avait mis en rapport avec quelques Grecs isolés, personne chez eux ne manifestait la moindre velléité d'adopter le genre de vie des Grecs ou d'apprendre notre langue, les Cariens couraient déjà toute la Grèce à la suite des armées dans lesquelles ils servaient comme mercenaires : naturellement leurs expéditions guerrières en Grèce donnèrent occasion de leur appliquer fréquemment ce nom de barbarophones ; mais l'application s'en étendit encore bien davantage plus tard, puisqu'il leur fallut vivre dans les îles côte à côte avec les Grecs et qu'en Asie même, où ils s'étaient réfugiés après avoir été expulsés des îles, ils ne purent se soustraire à ce contact, n'y ayant précédé que de peu les migrations ionienne et dorienne. Le mot g-barbarizein n'a pas non plus d'autre origine, et nous l'appliquons d'ordinaire à ceux qui écorchent le grec, non à ceux qui parlent carien. Il nous faut donc prendre aussi g-barbarophônein et g-barbarophônous dans le même sens, c'est-à-dire les entendre de gens parlant mal le grec. Ajoutons que le mot g-karizein est évidemment ce qui a donné l'idée d'introduire dans nos grammaires grecques les expressions g-barbarizein et g-soloikizein, que l'on fasse venir ce dernier mot du nom de la ville de Soli ou qu'on lui attribue toute autre étymologie.


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Dernière mise à jour : 19/03/2009