[7,3,6] Τοιαῦτα μὲν οὖν {οὐ} κακῶς ἄν τις διαποροίη περὶ τῶν κειμένων παρὰ τῷ
ποιητῇ, περί τε Μυσῶν καὶ ἀγαυῶν Ἱππημολγῶν· ἃ δ' Ἀπολλόδωρος ἐν τῷ
δευτέρῳ Περὶ νεῶν προοιμιαζόμενος εἴρηκεν, ἥκιστα λέγοιτ' ἄν. Ἐπαινεῖ γὰρ
Ἐρατοσθένους ἀπόφασιν, ὅτι φησὶν ἐκεῖνος καὶ Ὅμηρον καὶ τοὺς ἄλλους τοὺς
παλαιούς, τὰ μὲν Ἑλληνικὰ εἰδέναι, τῶν δὲ πόρρω πολλὴν ἔχειν ἀπειρίαν,
ἀπείρους μὲν μακρῶν ὁδῶν ὄντας, ἀπείρους δὲ τοῦ ναυτίλλεσθαι. Συνηγορῶν
δὲ τούτοις Ὅμηρόν φησι τὴν μὲν Αὐλίδα καλεῖν πετρήεσσαν, ὥσπερ καὶ ἔστι,
πολύκνημον δὲ τὸν Ἐτεωνόν, πολυτρήρωνα δὲ τὴν Θίσβην, ποιήεντα δὲ τὸν
Ἁλίαρτον· τὰ δ' ἄπωθεν οὔτ' αὐτὸν εἰδέναι οὔτε τοὺς ἄλλους. Ποταμῶν γοῦν
περὶ τετταράκοντα ῥεόντων εἰς τὸν Πόντον, μηδὲ τῶν ἐνδοξοτάτων μηδενὸς
μεμνῆσθαι, οἷον Ἴστρου, Τανάιδος, Βορυσθένους, Ὑπάνιος, Φάσιδος,
Θερμώδοντος, Ἅλυος· ἔτι δὲ Σκυθῶν μὲν μὴ μεμνῆσθαι, πλάττειν δὲ ἀγαυούς
τινας Ἱππημολγοὺς καὶ Γαλακτοφάγους Ἀβίους τε. Παφλαγόνας τε τοὺς ἐν τῇ
μεσογαίᾳ ἱστορηκέναι παρὰ τῶν πεζῇ τοῖς τόποις πλησιασάντων, τὴν
παραλίαν δὲ ἀγνοεῖν· καὶ εἰκότως γε. Ἄπλουν γὰρ εἶναι τότε τὴν θάλατταν
ταύτην καὶ καλεῖσθαι Ἄξενον διὰ τὸ δυσχείμερον καὶ τὴν ἀγριότητα τῶν
περιοικούντων ἐθνῶν, καὶ μάλιστα τῶν Σκυθικῶν, ξενοθυτούντων καὶ
σαρκοφαγούντων καὶ τοῖς κρανίοις ἐκπώμασι χρωμένων· ὕστερον δ' Εὔξεινον
κεκλῆσθαι τῶν Ἰώνων ἐν τῇ παραλίᾳ πόλεις κτισάντων· ὁμοίως δ' ἀγνοεῖν καὶ
τὰ περὶ Αἴγυπτον καὶ Λιβύην, οἷον τὰς ἀναβάσεις τοῦ Νείλου καὶ προσχώσεις
τοῦ πελάγους, ὧν οὐδαμοῦ μεμνῆσθαι, οὐδὲ τοῦ ἰσθμοῦ τοῦ μεταξὺ τῆς
Ἐρυθρᾶς καὶ τῆς Αἰγυπτίας θαλάττης, οὐδὲ τῶν κατὰ τὴν Ἀραβίαν καὶ
Αἰθιοπίαν καὶ τὸν ὠκεανόν, εἰ μὴ Ζήνωνι τῷ φιλοσόφῳ προσεκτέον γράφοντι·
Αἰθίοπάς θ' ἱκόμην καὶ Σιδονίους Ἄραβάς τε.
Οὐ θαυμαστὸν δ' εἶναι περὶ Ὁμήρου· καὶ γὰρ τοὺς ἔτι νεωτέρους ἐκείνου
πολλὰ ἀγνοεῖν καὶ τερατολογεῖν· Ἡσίοδον μὲν Ἡμίκυνας λέγοντα καὶ
Μεγαλοκεφάλους καὶ Πυγμαίους, Ἀλκμᾶνα δὲ Στεγανόποδας, Αἰσχύλον δὲ
Κυνοκεφάλους καὶ Στερνοφθάλμους καὶ Μονομμάτους (ἐν τῷ Προμεθεῖ
φασι), καὶ ἄλλα μυρία. Ἀπὸ δὲ τούτων ἐπὶ τοὺς συγγραφέας βαδίζει Ῥιπαῖα
ὄρη λέγοντας καὶ τὸ Ὠγύιον ὄρος καὶ τὴν τῶν Γοργόνων καὶ Ἑσπερίδων
κατοικίαν, καὶ τὴν παρὰ Θεοπόμπῳ Μεροπίδα γῆν, παρ' Ἑκαταίῳ δὲ
Κιμμερίδα πόλιν, παρ' Εὐημέρῳ δὲ τὴν Παγχαίαν γῆν, παρ' Ἀριστοτέλει δὲ
ποταμίους λίθους ἐξ ἄμμου, ἐκ δὲ τῶν ὄμβρων τήκεσθαι· ἐν δὲ τῇ Λιβύῃ
Διονύσου πόλιν εἶναι, ταύτην δ' οὐκ ἐνδέχεσθαι δὶς τὸν αὐτὸν ἐξευρεῖν.
Ἐπιτιμᾷ δὲ καὶ τοῖς περὶ Σικελίαν τὴν πλάνην λέγουσι καθ' Ὅμηρον τὴν
Ὀδυσσέως· εἰ γάρ, αὖ χρῆναι τὴν μὲν πλάνην ἐκεῖ γεγονέναι φάσκειν, τὸν δὲ
ποιητὴν ἐξωκεανικέναι μυθολογίας χάριν. Καὶ τοῖς μὲν ἄλλοις συγγνώμην
εἶναι, Καλλιμάχῳ δὲ μὴ πάνυ, μεταποιουμένῳ γε γραμματικῆς· ὃς τὴν μὲν
Γαῦδον Καλυψοῦς νῆσόν φησι, τὴν δὲ Κόρκυραν Σχερίαν. Ἄλλους δ' αἰτιᾶται
ψεύσασθαι περὶ Γερήνων καὶ τοῦ Ἀκακησίου καὶ Δήμου ἐν Ἰθάκῃ,
Πελεθρονίου δ' ἐν Πηλίῳ, Γλαυκωπίου δ' ἐν Ἀθήναις. Τούτοις δὲ μικρά τινα
προσθεὶς τοιαῦτα παύεται, τὰ πλεῖστα μετενέγκας παρὰ τοῦ Ἐρατοσθένους,
ὡς καὶ πρότερον ἐμνήσθημεν, οὐκ εὖ εἰρημένα. Τὸ μὲν γὰρ τοὺς ὕστερον
ἐμπειροτέρους γεγονέναι τῶν (τὰ) πάλαι περὶ τὰ τοιαῦτα καὶ Ἐρατοσθένει καὶ
τούτῳ δοτέον· τὸ δ' οὕτω πέρα τοῦ μετρίου προάγειν, καὶ μάλιστα ἐφ' Ὁμήρου,
δοκεῖ μοι κἂν ἐπιπλῆξαί τις δικαίως, καὶ τοὐναντίον εἰπεῖν, ὡς περὶ ὧν
ἀγνοοῦσιν αὐτοί, περὶ τούτων τῷ ποιητῇ προφέρουσι. Τὰ μὲν οὖν ἄλλα ἐν τοῖς
καθ' ἕκαστα οἰκείας μνήμης τυγχάνει, τὰ δ' ἐν τοῖς καθόλου.
| [7,3,6] A la rigueur encore on conçoit, on s'explique des doutes comme
ceux que Posidonius a émis au sujet de ce passage d'Homère relatif
aux Mysiens et aux vertueux Hippémolges ; mais ce qu'en dit
Apollodore au début du second livre de son Commentaire sur le
catalogue des vaisseaux ne saurait être toléré. Partant de cette
proposition d'Eratosthène, qu'il approuve et adopte sans réserve,
«qu'Homère et en général les anciens ont bien connu la Grèce, mais
n'ont absolument rien su des contrées lointaines, faute d'avoir eu
l'habitude des longs voyages par terre et l'expérience de la navigation
au long cours», Apollodore convient qu'Homère, quand il parle des
rochers d'Aulis, des collines d'Etéone, des colombes de Thisbé et des
belles pelouses d'Haliarte, peint les choses telles qu'elles sont, mais il
nie formellement que lui et les autres aient rien su des contrées
éloignées de la Grèce. «Ainsi, dit-il, sur une quarantaine de fleuves qui
se jettent dans le Pont, il n'y en a pas un, j'entends des plus célèbres,
tels que l'Ister, le Tanaïs, le Borysthène, l'Hypanis, le Phase, le
Thermodon et l'Halys, qui soit mentionné dans Homère. - Les Scythes
ne le sont pas davantage, mais en revanche le poète imagine ces
vertueux Hippémolges, ces Galactophages, ces Abiens ! - Il connaît
les Paphlagoniens de l'intérieur, d'après le rapport apparemment de
quelques voyageurs qui avaient approché par terre de leurs frontières,
mais ceux du littoral lui sont demeurés inconnus, ce qui se conçoit du
reste, puisque dans ce temps-là personne ne naviguait dans ces
parages, que le Pont était désigné sous le nom de Mer Axène ou
Inhospitalière, tant à cause de la rigueur supposée du climat que de la
réputation de férocité des populations de la côte, des Scythes
notamment, qui, disait-on, immolaient les étrangers, se nourrissaient
de leur chair et buvaient dans leurs crânes, et qu'en somme le nom de
Pont-Euxin date seulement de l'établissement des colonies Ioniennes
sur tout ce littoral. - Par malheur il n'est pas moins ignorant de la
géographie de l'Egypte et de la Libye, car il ne parle nulle part des
crues du Nil, ni des dépôts d'alluvion qui comblent la mer à
l'embouchure de ce fleuve, non plus que de l'isthme compris entre la
mer Erythrée et la mer d'Egypte, non plus que de l'Arabie et en général
des pays situés dans le voisinage de l'Ethiopie et de l'Océan, à moins
que Zénon le philosophe n'ait raison et qu'il faille lire le fameux vers de
l'Odyssée ainsi qu'il suit :
«J'ai visité les Ethiopiens, les Sidoniens et les Arabes» (Od. IV, 83).
Au surplus qu'on ne s'étonne point de cette ignorance d'Homère,
puisqu'on voit des poètes bien postérieurs à lui ignorer eux-mêmes
tant de choses et abuser du merveilleux au point de nous parler de
peuples Hémicynes, Mégalocéphales et Pygmées, comme Hésiode ;
de peuples Stéganopodes, comme Alcman ; de peuples
Cynocéphales, Sternophthalmes, Monommates, comme Aeschyle,
sans compter mille autres fictions du même genre». Et des fictions des
poètes passant à celles des historiens, Apollodore rappelle leur
fameuse chaîne des Monts Riphées, leur mont Oryum, et ce qu'ils
disent du séjour des Gorgones et de celui des Hespérides, et la
Méropide de Théopompe, et la Kimmeris d'Hécatée, et la Panchaia
d'Evhémère, voire ce qu'on lit dans Aristote au sujet de ces pierres
{formées} de sables de rivière et qui fondent à la pluie, et de cette ville
de Libye, de cette Dionysopolis, qu'un même voyageur ne peut pas
retrouver, ne peut pas visiter deux fois. Il nous dénonce aussi parmi les
historiens ceux qui placent dans les parages de la Sicile le théâtre de
l'Odyssée d'Homère. «Le théâtre réel des erreurs du héros, fait-il, à la
bonne heure ; c'est là ce qu'il fallait dire, et que, dans l'intérêt de ses
fictions, Homère lui a substitué l'Océan. Que d'autres s'y soient
trompés, passe encore, mais Callimaque est impardonnable, lui, un
grammairien de profession, d'avoir prétendu reconnaître l'île de
Calypso dans Gaudos, et dans Corcyre l'île de Schérie». Apollodore
signale en outre comme des mensonges notoires ce que d'autres
historiens nous ont dit de Gérènes, de l'Acacesium, et la mention qu'ils
ont faite de localités telles que Demos dans Ithaque, Pelethronium
dans le Pélion et Glaucopium à Athènes ; il ajoute encore quelques
faits du même genre, et clôt ainsi cette longue série de critiques
empruntées pour la plupart à Eratosthène, et en générai dénuées de
fondement, comme toutes celles du même auteur que nous avons déjà
eu occasion de citer. Car, si nous sommes prêt à concéder à
Eratosthène ainsi qu'à Apollodore que le plus souvent sur ces
questions les modernes sont plus instruits que ne l'étaient les anciens,
en revanche le procédé de critique, de critique à outrance, dont ils
usent, surtout envers Homère, nous paraît singulièrement attaquable,
d'autant qu'on pourrait leur dire, si l'on voulait récriminer, qu'ils ne sont
jamais si prompts à taxer Homère d'ignorance que quand eux-mêmes
ignorent les choses.
Mais les différentes critiques que nous venons d'énumérer se trouvent
relevées par nous, chacune en son lieu et place, soit dans notre
description particulière, soit dans notre description générale de la terre habitée.
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