[3,19] ὁ δὲ ἀξιῶν ἡμᾶς ὄψῳ μὴ χρῆσθαι βοΐ, μηδὲ πνεῦμα καὶ
ζωὴν διολλύντας καὶ διαφθείροντας ἡδύσματα πλησμονῆς καὶ
καλλωπίσματα προστίθεσθαι τραπέζης, τίνος ἀναγκαίου
πρὸς σωτηρίαν {ἢ καλοῦ πρὸς ἀρετὴν} ἀφαιρεῖται τὸν
βίον; οὐ μὴν ἀλλὰ καὶ τοῖς ζῴοις τὰ φυτὰ παραβάλλειν
κομιδῇ βίαιον. τὰ μὲν γὰρ αἰσθάνεσθαι πέφυκε
καὶ ἀλγεῖν καὶ φοβεῖσθαι καὶ βλάπτεσθαι, διὸ καὶ
ἀδικεῖσθαι· τοῖς δὲ οὐθέν ἐστιν αἰσθητόν, οὕτως δὲ
οὐδὲ ἀλλότριον οὐδὲ κακὸν οὐδὲ βλάβη τις οὐδὲ ἀδικία.
καὶ γὰρ οἰκειώσεως πάσης καὶ ἀλλοτριώσεως ἀρχὴ τὸ
αἰσθάνεσθαι. τὴν δὲ οἰκείωσιν ἀρχὴν τίθενται δικαιοσύνης
οἱ ἀπὸ Ζήνωνος. πῶς δὲ οὐκ ἄλογον πολλοὺς
τῶν ἀνθρώπων ἐπ´ αἰσθήσει μόνον ζῶντας ὁρῶντας,
νοῦν δὲ καὶ λόγον οὐκ ἔχοντας, πολλοὺς δὲ πάλιν
ὠμότητι καὶ θυμῷ καὶ πλεονεξίᾳ τὰ φοβερώτατα τῶν
θηρίων ὑπερβεβληκότας, παιδοφόνους καὶ πατροκτόνους, τυράννους καὶ βασιλέων ὑπουργούς, πρὸς μὲν
τούτους οἴεσθαι δίκαιόν τι εἶναι ἡμῖν, πρὸς δὲ τὸν
ἀροτῆρα βοῦν καὶ τὸν σύντροφον κύνα καὶ τὰ γάλακτι
μὲν τρέφοντα, κουρᾷ δὲ κοσμοῦντα θρέμματα μηδὲν
εἶναι, πῶς οὐ παραλογώτατόν ἐστιν;
| [3,19] XIX. Celui qui pense que nous ne devrions point
nous nourrir de la chair des boeufs, ni ôter la vie
aux animaux, pour satisfaire notre gourmandise et
pour parer nos tables, ne nous ôte rien de ce qui
est nécessaire pour la vie ou utile pour la vertu.
Ce serait outrer les choses que de comparer les
plantes aux animaux, car ceux-ci ont du
sentiment. Ils sont susceptibles de douleur, de
crainte : on peut leur faire tort, et par conséquent
commettre de l'injustice à leur égard. Quant aux
plantes, elles ne sentent point : ainsi on ne peut
leur faire ni mal, ni tort, ni injustice. On ne peut
avoir ni amitié, ni haine pour ce qui n'a point de
sentiment. Les disciples de Zénon prétendent que
la justice est fondée sur la ressemblance qu'il y a
entre les êtres. N'est-il pas absurde de se croire
obligé d'observer les lois de la justice avec une
infinité d'hommes qui n'ayant que le sentiment,
sont dépourvus d'esprit et de raison, surpassent
en cruauté, en colère et en avidité les plus cruels
animaux, n'épargnant ni la vie de leurs enfants, ni
celle de leurs pères, tyrans ou ministres de tyrans
; tandis que l'on ne se croit obligé à rien à l'égard
du boeuf qui laboure, du chien avec lequel on vit,
des animaux qui nourrissent l'homme de leur lait
et l'habillent de leur toison ? En vérité cette
contradiction est trop ridicule.
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