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[2,57] καὶ μετά γε τὸν πρῶτον πόλεμον τὸν γενόμενον
Ῥωμαίοις περὶ Σικελίας πρὸς Καρχηδονίους
ἀποστάντων τῶν Φοινίκων μισθοφόρων καὶ συναποστησάντων τοὺς Λίβυας,
Ἀμίλκας ὁ Βάρκας ἐπικαλούμενος, ἐπιστρατεύσας αὐτοῖς εἰς λιμὸν οὕτως
περιέστησεν, ὡς τὸ μὲν πρῶτον τοὺς πίπτοντας ἐν ταῖς
μάχαις ἐσθίειν ἐπιλειπόντων πάντων, δεύτερον τοὺς
αἰχμαλώτους, τρίτον τοὺς οἰκέτας, ὕστερον δὲ καὶ ἐπ´
ἀλλήλους ὁρμῆσαι καὶ κλήρῳ τοὺς συστρατιώτας ἐσθίειν.
ἀλλ´ ὅ γε Ἀμίλκας λαβὼν ὑποχειρίους διὰ τῶν ἐλεφάντων συνεπάτησεν,
ὡς οὐχ ὅσιον ἔτι τοῖς ἄλλοις
ἀνθρώποις αὐτοὺς ἐπιμίγνυσθαι, καὶ οὔτε αὐτὸς παρεδέξατο
διὰ τὸ τολμῆσαί τινας τὴν ἀνθρωποφαγίαν
οὔθ´ ὁ υἱὸς αὐτοῦ Ἀννίβας, ᾧ συνεβούλευέ τις εἰς
τὴν Ἰταλίαν στρατεύοντι ἐθίσαι ἀνθρωποφαγεῖν τὸν
στρατόν, ὡς μὴ τροφῆς ἀποροῖεν. οὐ τοίνυν ἐπεὶ
λιμοὶ καὶ πόλεμοι αἴτιοι τῆς τῶν ἄλλων ζῴων βρώσεως γεγόνασιν, ἐχρῆν ταύτην
καὶ δι´ ἡδονὴν παραδέξασθαι, καθάπερ οὐδὲ τὴν ἀνθρωποφαγίαν προσηκάμεθα·
οὐδὲ ἐπεὶ ἔθυσάν τισι δυνάμεσιν ζῷα, ἐχρῆν
καὶ ἐσθίειν αὐτά. οὐδὲ γὰρ ἀνθρώπους θύσαντες
ἐγεύσαντο τούτου γε ἕνεκα σαρκῶν ἀνθρωπίνων.
ἀλλ´ ὅτι μὲν τῷ θύειν οὐχ ἕπεται τὸ καὶ ἐσθίειν
πάντως τὰ ζῷα, διὰ τούτων ἀποδέδεικται·
| [2,57] Après la première guerre des Romains en Sicile contre les
Carthaginois, les Phéniciens qui étaient à la solde de ceux-ci, s'étant
révoltés, et voulant engager les Africains dans leur rébellion, Hamilcar
surnommé Barcas leur fit la guerre et les réduisit à une si grande famine
qu'ils mangèrent d'abord ceux qui avaient été tués en combattant et
lorsqu'ils les eurent mangés tous, ils mangèrent ensuite leurs prisonniers
et enfin leurs domestiques. Ils finirent par se manger les uns les autres,
après avoir tiré sur qui le sort tomberait. Hamilcar ayant pris ceux qui
restaient à discrétion, les fit fouler aux pieds par ses éléphants, comme
si c'eût été une impiété de laisser ces misérables en société avec les
autres hommes. Il ne voulut jamais malgré cet exemple se soumettre à
l'usage de manger les hommes; ni Hannibal son fils à qui quelqu'un donna
le conseil d'accoutumer son armée qui était en Italie à cette nourriture,
afin qu'elle ne manquât jamais de vivres. Ce sont les guerres et les
famines qui ont introduit l'usage de la viande ; il ne fallait donc pas
s'accoutumer à cette nourriture par le seul motif du plaisir, comme il ne
conviendrait pas de manger des hommes par cette raison. Et par ce qu'on
sacrifie des animaux à quelques puissances, il n'est pas pour cela permis
d'en manger. Ceux qui sacrifiaient des hommes ne croyaient pas pour cela
être en droit de s'en servir pour aliments. Il est donc démontré par ce
que nous venons de dire, que de l'usage de sacrifier les animaux, la
permission de les manger ne s'en suit pas.
| [2,58] ὅτι δὲ οὐ θεοῖς, ἀλλὰ δαίμοσι τὰς θυσίας τὰς διὰ τῶν αἱμάτων
προσῆγον οἱ τὰς ἐν τῷ παντὶ δυνάμεις καταμαθόντες,
καὶ τοῦτο πεπίστωται παρ´ αὐτῶν τῶν θεολόγων. καὶ
μὴν ὅτι τούτων οἳ μὲν κακοποιοί, οἳ δὲ ἀγαθοί, οἳ
οὐκ ἐνοχλήσουσιν ἡμῖν ἀπαρχομένοις ἐκ μόνων ὧν
ἐσθίομεν καὶ τρέφομεν ἢ τὸ σῶμα ἢ τὴν ψυχήν, καὶ
τούτου μέμνηνται. ὀλίγα δ´ ἔτι προσθέντες, ὡς καὶ αἱ
ἀδιάστροφοι ἔννοιαι τῶν πολλῶν ἐπιβάλλουσι τῇ ὀρθῇ
περὶ τῶν θεῶν ὑπολήψει, τὸ βιβλίον περιγράψομεν.
λέγουσι γοῦν καὶ τῶν ποιητῶν οἱ ἐπ´ ὀλίγον σωφρονοῦντες,
τίς ὧδε μῶρος καὶ λίαν ἀνειμένος
εὔπιστος ἀνδρῶν, ὅστις ἐλπίζει θεοὺς
ὀστῶν ἀσάρκων καὶ χολῆς πυρουμένης,
ἃ καὶ κυσὶν πεινῶσιν οὐχὶ βρώσιμα,
χαίρειν ἅπαντας καὶ γέρας λαχεῖν τόδε;
ἄλλος δὲ φησίν,
ψαιστά, λιβανωτόν, πόπανα· ταῦτ´ ὠνήσομαι.
οὐ τοῖς φίλοις θύω γάρ, ἀλλὰ τοῖς θεοῖς τὰ νῦν.
| [2,58] C'est une chose avérée chez les théologiens, que l'on offrait des
sacrifices ensanglantés, non aux dieux mais aux démons ; et ceux qui les
offraient connaissaient la nature de ces puissances. Il y a des génies
malfaisants ; il y en a de bienfaisants qui ne nous tourmentent point
lorsque nous leur donnons les prémices seulement des choses que nous
mangeons et dont nous nourrissons ou notre corps, ou notre âme: voilà ce
qui n'était pas ignoré de ces théologiens. Mais il est temps de finir ce
livre, après avoir ajouté quelque chose pour faire voir que plusieurs ont
eu de saines idées de la divinité : quelques poètes raisonnables se sont
expliqués ainsi ? Qui est l'homme assez fol, assez imbécile, ou assez
crédule, pour s'imaginer que les dieux prennent plaisir à des os sans
chair, à la bile cuite dont à peine les chiens qui ont faim veulent
manger, et qu'ils reçoivent ces mets comme un présent ? Un autre poète a
dit : je n'offrirai que des gâteaux et de l'encens, car je sacrifie aux
dieux et non à mes amis.
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