[26] Γναῖος δ´ Ὀκτάβιος ὁ ναυαρχῶν Αἰμιλίῳ προσορμισάμενος τῇ
Σαμοθρᾴκῃ τὴν μὲν ἀσυλίαν παρεῖχε τῷ Περσεῖ διὰ τοὺς θεούς, ἔκπλου
δὲ καὶ φυγῆς εἶργεν. οὐ μὴν ἀλλὰ λανθάνει πως ὁ Περσεὺς Ὀροάνδην τινὰ
Κρῆτα λέμβον ἔχοντα συμπείσας μετὰ χρημάτων ἀναλαβεῖν αὐτόν. ὁ δὲ
κρητισμῷ χρησάμενος, τὰ μὲν χρήματα νύκτωρ ἀνέλαβεν, ἐκεῖνον δὲ τῆς
ἑτέρας νυκτὸς ἥκειν κελεύσας ἐπὶ τὸν πρὸς τῷ Δημητρείῳ λιμένα μετὰ
τῶν τέκνων καὶ θεραπείας ἀναγκαίας, εὐθὺς ἀφ´ ἑσπέρας ἀπέπλευσεν.
ὁ δὲ Περσεὺς οἰκτρὰ μὲν ἔπασχε, διὰ στενῆς θυρίδος παρὰ τὸ τεῖχος ἐκμηρυόμενος
αὑτὸν καὶ παιδία καὶ γυναῖκα, πόνων καὶ πλάνης ἀπείρους,
οἰκτρότερον δὲ στεναγμὸν ἀφῆκεν, ὥς τις αὐτῷ πλανωμένῳ παρὰ τὸν
αἰγιαλὸν ἤδη πελάγιον τὸν Ὀροάνδην θέοντα κατιδὼν ἔφρασεν. ὑπέλαμπε
γὰρ ἡμέρα, καὶ πάσης ἐλπίδος ἔρημος ὑπεχώρει φυγῇ πρὸς τὸ τεῖχος, οὐ
λαθὼν μέν, ὑποφθάσας δὲ τοὺς Ῥωμαίους μετὰ τῆς γυναικός. τὰ δὲ παιδία
συλλαβὼν αὐτοῖς Ἴων ἐνεχείρισεν, ὃς πάλαι μὲν ἐρώμενος ἦν τοῦ Περσέως,
τότε δὲ προδότης γενόμενος αἰτίαν παρέσχε τὴν μάλιστα συναναγκάσασαν
τὸν ἄνθρωπον ὡς θηρίον ἁλισκομένων τῶν τέκνων εἰς χεῖρας ἐλθεῖν καὶ
παραδοῦναι τὸ σῶμα τοῖς ἐκείνων κρατοῦσιν. ἐπίστευε μὲν οὖν μάλιστα
τῷ Νασικᾷ, κἀκεῖνον ἐκάλει· μὴ παρόντος δὲ κατακλαύσας τὴν τύχην καὶ
τὴν ἀνάγκην περισκεψάμενος, ἔδωκεν αὑτὸν ὑποχείριον τῷ Γναίῳ, τότε
μάλιστα ποιήσας φανερόν, ὅτι τῆς φιλαργυρίας ἦν ἐν αὐτῷ τι κακὸν ἀγεννέστερον
ἡ φιλοψυχία, δι´ ἥν, ὃ μόνον ἡ τύχη τῶν ἐπταικότων οὐκ ἀφαιρεῖται,
τὸν ἔλεον ἀπεστέρησεν ἑαυτοῦ. δεηθεὶς γὰρ ἀχθῆναι πρὸς τὸν
Αἰμίλιον, ὁ μὲν ὡς ἀνδρὶ μεγάλῳ πεπτωκότι πτῶμα νεμεσητὸν καὶ δυστυχὲς
ἐξαναστὰς προϋπήντα μετὰ τῶν φίλων δεδακρυμένος, ὁ δ´,
αἴσχιστον θέαμα, προβαλὼν αὑτὸν ἐπὶ στόμα, καὶ γονάτων δραξάμενος,
ἀνεβάλλετο φωνὰς ἀγεννεῖς καὶ δεήσεις, ἃς οὐχ ὑπέμεινεν οὐδ´ ἤκουσεν ὁ
Αἰμίλιος, ἀλλὰ προσβλέψας αὐτὸν ἀλγοῦντι καὶ λελυπημένῳ τῷ προσώπῳ·
„τί τῆς τύχης“ εἶπεν „ὦ ταλαίπωρε τὸ μέγιστον ἀφαιρεῖς τῶν ἐγκλημάτων,
ταῦτα πράττων ἀφ´ ὧν δόξεις οὐ παρ´ ἀξίαν ἀτυχεῖν, οὐδὲ τοῦ νῦν,
ἀλλὰ τοῦ πάλαι δαίμονος ἀνάξιος γεγονέναι; τί δέ μου καταβάλλεις τὴν
νίκην καὶ τὸ κατόρθωμα ποιεῖς μικρόν, ἐπιδεικνύμενος ἑαυτὸν οὐ γενναῖον
οὐδὲ πρέποντα Ῥωμαίοις ἀνταγωνιστήν; ἀρετή τοι δυστυχοῦσι μεγάλην
ἔχει μοῖραν αἰδοῦς καὶ παρὰ πολεμίοις, δειλία δὲ Ῥωμαίοις κἂν εὐποτμῇ
πάντων ἀτιμότατον.“
| [26] Cnéus Octavius, amiral de la flotte de Paul-Émile, était venu mouiller devant
Samothrace. Il respectait l’asile de Persée, par piété envers les dieux, mais lui coupait tous les
moyens de fuir hors de l’île. Cependant le Roi put acheter un Crétois, nommé Oroandès,
possesseur d’un petit vaisseau, qui promit de le prendre à son bord. Cet homme, en bon
Crétois, prit l’argent ; mais, après avoir dit à Persée de venir la nuit au port, près du temple de
Déméter, avec ses enfants et les serviteurs indispensables, il leva l’ancre dès le soir venu.
Persée se trouvait dans une situation pitoyable. Il s’était laissé glisser par une fenêtre étroite le
long du mur avec ses enfants et sa femme, qui n’avaient pas l’expérience de la fatigue et des
voyages. Il erra ensuite sur la grève, et fit entendre un gémissement très plaintif quand un
témoin lui annonça que déjà Oroandès cinglait en haute mer. Le jour brillait maintenant, et,
privé de toute espérance, il s’enfuit avec sa femme vers le mur d’où il était descendu, sans se
cacher aux Romains, mais en s’efforçant de les devancer. Quant à ses enfants, il les avait
confiés à Ion, autrefois son mignon et désormais un traître. Cet Ion fut la cause déterminante
de la perte du malheureux, dont il livra les enfants à Rome. Alors Persée, comme une bête à
laquelle on a pris ses petits, se remit aux mains de leurs détenteurs, auxquels il livra sa
personne. Il se fiait surtout à Nasica, et c’est lui qu’il demanda. Mais, comme Nasica n’était
pas là, Persée déplora sa propre infortune, et, considérant la nécessité où il était réduit, il se
livra à Cnéus. Il fit bien voir alors qu’il était atteint d’un vice encore plus ignoble que l’amour
de l’argent, l’attachement à la vie, et il se priva, par là, du seul bien que la fortune n’ôte pas
aux malheureux, la pitié. Il avait demandé à être conduit à Paul-Émile ; et celui-ci, croyant
avoir affaire à un grand homme dont la chute malheureuse avait pour seule cause l’envie de la
Fortune, se leva pour aller à sa rencontre, les larmes aux yeux, escorté de ses amis. Mais le
Roi, honteux spectacle, se jeta la face contre terre, et, embrassant les genoux du vainqueur, il
faisait entendre des paroles viles et des prières que Paul-Émile ne supporta ni n’écouta. Il jeta
un regard douloureux et chagrin sur Persée, et lui dit : « Pourquoi, malheureux, justifier la
Fortune du plus grave reproche qu’on puisse lui faire, par une conduite qui donne à penser
que ta disgrâce n’est pas imméritée et que ce n’est pas ton destin d’aujourd’hui, mais celui
d’autrefois, dont tu étais indigne ? Pourquoi rabaisser ma victoire et amoindrir mon succès en
te révélant comme un être vil et un adversaire peu fait pour les Romains ? La vertu chez les
malheureux leur attire une grande vénération, même quand ce sont vos ennemis ; mais la
lâcheté, fût-elle couronnée de succès, est, aux yeux des Romains, le comble du déshonneur ».
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