[14] (1) Τῆς δὲ παιδείας, ἣν μέγιστον ἡγεῖτο τοῦ νομοθέτου καὶ κάλλιστον ἔργον
εἶναι, πόρρωθεν ἀρχόμενος εὐθὺς ἐπεσκόπει τὰ περὶ τοὺς γάμους καὶ τὰς γενέσεις.
(2) οὐ γάρ, ὡς Ἀριστοτέλης φησίν, ἐπιχειρήσας σωφρονίζειν τὰς γυναῖκας, ἐπαύσατο μὴ
κρατῶν τῆς πολλῆς ἀνέσεως καὶ γυναικοκρατίας διὰ τὰς πολλὰς στρατείας τῶν
ἀνδρῶν, ἐν αἷς ἠναγκάζοντο κυρίας ἀπολείπειν ἐκείνας, καὶ διὰ τοῦτο μᾶλλον τοῦ
προσήκοντος αὐτὰς ἐθεράπευον : καὶ δεσποίνας προσηγόρευον· ἀλλὰ καὶ : τούτων τὴν
ἐνδεχομένην ἐπιμέλειαν ἐποιήσατο. (3) τὰ μέν γε σώματα τῶν παρθένων δρόμοις καὶ
πάλαις καὶ βολαῖς δίσκων καὶ ἀκοντίων διεπόνησεν, ὡς ἥ τε τῶν γεννωμένων ῥίζωσις
ἰσχυρὰν ἐν ἰσχυροῖς σώμασιν ἀρχὴν λαβοῦσα βλαστάνοι βέλτιον, αὐταί τε μετὰ ῥώμης
τοὺς τόκους ὑπομένουσαι καλῶς ἅμα καὶ ῥᾳδίως ἀγωνίζοιντο πρὸς τὰς ὠδῖνας. (4) ἀφελὼν
δὲ θρύψιν καὶ σκιατραφίαν καὶ θηλύτητα πᾶσαν οὐδὲν ἧττον εἴθισε τῶν κόρων τὰς
κόρας γυμνάς τε πομπεύειν καὶ πρὸς ἱεροῖς τισιν ὀρχεῖσθαι καὶ ἄδειν τῶν νέων
παρόντων καὶ θεωμένων. (5) ἔστι δὲ ὅτε καὶ σκώμματα λέγουσαι πρὸς ἕκαστον εὐχρήστως
ἐπελαμβάνοντο τῶν ἁμαρτανομένων· καὶ πάλιν εἰς τοὺς ἀξίους αὐτῶν ἐγκώμια μετ´
ᾠδῆς πεποιημένα διεξιοῦσαι, φιλοτιμίαν πολλὴν καὶ ζῆλον ἐνεποίουν τοῖς
νεανίσκοις. (6) ὁ γὰρ ἐγκωμιασθεὶς ἐπ´ ἀνδραγαθίᾳ καὶ κλεινὸς ἐν ταῖς παρθένοις
γεγονὼς ἀπῄει μεγαλυνόμενος ὑπὸ τῶν ἐπαίνων· αἱ δὲ μετὰ παιδιᾶς καὶ σκωμμάτων
δήξεις οὐδὲν ἀμβλύτεραι τῶν μετὰ σπουδῆς νουθετημάτων ἦσαν, ἅτε δὴ πρὸς τὴν θέαν
ὁμοῦ τοῖς ἄλλοις πολίταις καὶ τῶν βασιλέων καὶ τῶν γερόντων συμπορευομένων. (7) Ἡ δὲ
γύμνωσις τῶν παρθένων οὐδὲν αἰσχρὸν εἶχεν, αἰδοῦς μὲν παρούσης, ἀκρασίας δὲ
ἀπούσης, ἀλλ´ ἐθισμὸν ἀφελῆ καὶ ζῆλον εὐεξίας ἐνειργάζετο, καὶ φρονήματος τὸ
θῆλυ παρέγευεν οὐκ ἀγεννοῦς, ὡς μηδὲν ἧττον αὐτῷ καὶ ἀρετῆς καὶ φιλοτιμίας
μετουσίαν οὖσαν. (8) ὅθεν αὐταῖς καὶ λέγειν ἐπῄει καὶ φρονεῖν οἷα καὶ περὶ Γοργοῦς
ἱστόρηται τῆς Λεωνίδου γυναικός. εἰπούσης γάρ τινος, ὡς ἔοικε, ξένης πρὸς αὐτὴν
ὡς "Μόναι τῶν ἀνδρῶν ἄρχετε ὑμεῖς αἱ Λάκαιναι," "Μόναι γάρ," ἔφη, "τίκτομεν
ἄνδρας."
| [14] (1) Quant à l’éducation, qu’il regardait comme la plus grande et la plus belle oeuvre du
législateur, il s’y prenait de loin et commençait par surveiller les conditions des mariages et
des naissances. (2) Car il n’est pas vrai que, comme le dit Aristote, après avoir entrepris
d’assagir les femmes, il y ait renoncé, ne pouvant mettre fin à leur grand relâchement et à la
domination féminine qu’entraînaient les nombreuses expéditions des hommes; les maris absents
étaient bien forcés de laisser leurs compagnes maîtresses au logis, et pour ce motif, même le
reste du temps, ils les honoraient plus que de raison et les appelaient dames. Cependant
Lycurgue porta toute l’attention possible à l’éducation des femmes. (3) En tout cas, il fortifia le
corps des jeunes filles par des courses, des luttes, le jet de disques et de javelots. Ainsi leurs
rejetons à venir, prenant racine en un terrain robuste et robustes eux-mêmes, arriveraient mieux
à maturité; quant aux mères, supportant leurs couches avec vigueur, elles opposeraient aisément
leur force aux douleurs de l’enfantement. (4) Pour leur ôter toute mollesse, toute vie sédentaire,
toute habitude efféminée, il habitua les jeunes filles, non moins que les garçons, à défiler nues,
et, pour certaines fêtes, à danser et à chanter dans cet état sous les yeux des jeunes gens. (5) Il
leur arrivait même d’adresser à chacun, dans leurs chants, d’aimables railleries, en visant ceux
qui étaient en faute. En revanche elles célébraient ceux qui le méritaient, inspirant ainsi aux
jeunes gens de l’émulation et une noble ambition. (6) Car celui dont elles avaient vanté le grand
coeur, illustre désormais chez les jeunes filles, s’en allait transporté par ces louanges; et quant
aux autres, les piqûres d’amour-propre, sous leur forme plaisante, avaient bien autant
d’efficacité que les reproches sérieux, puisqu’elles se faisaient au su et au vu des autres
citoyens, et en présence des Rois et des sénateurs. (7) Quant à la nudité des jeunes filles, elle
n’avait rien de honteux, puisque la modestie y présidait et que le dérèglement n’y était pour
rien; elle donnait, au contraire, l’habitude de la simplicité et le désir ardent d’une santé robuste.
Ainsi le sexe féminin pouvait-il goûter à une fierté assez noble, puisqu’elle n’avait d’autre
fondement que sa participation à l’héroïsme et aux généreuses compétitions. (8) Aussi toutes
les femmes pouvaient-elles avoir la pensée que l’on prête à Gorgo, la femme de Léonidas, et
répondre, comme elle, à une étrangère qui lui disait, paraît-il: "Vous autres, Lacédémoniennes,
êtes seules à commander aux hommes!" -- "C’est que seules nous enfantons des hommes!"
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