| [21] (1) Τότε δὲ τῆς ἀτυχίας τοῖς Ἕλλησι γεγενημένης, οἱ
 μὲν ἀντιπολιτευόμενοι ῥήτορες ἐπεμβαίνοντες τῷ Δημοσθένει
 κατεσκεύαζον εὐθύνας καὶ γραφὰς ἐπ´ αὐτόν· (2) ὁ
 δὲ δῆμος οὐ μόνον τούτων ἀπέλυεν, ἀλλὰ καὶ τιμῶν διετέλει
 καὶ προκαλούμενος αὖθις ὡς εὔνουν εἰς τὴν πολιτείαν,
 ὥστε καὶ τῶν ὀστῶν ἐκ Χαιρωνείας κομισθέντων
 καὶ θαπτομένων, τὸν ἐπὶ τοῖς ἀνδράσιν ἔπαινον εἰπεῖν
 ἀπέδωκεν, οὐ ταπεινῶς οὐδ´ ἀγεννῶς φέρων τὸ συμβεβηκός,
 ὡς γράφει καὶ τραγῳδεῖ Θεόπομπος,
 ἀλλὰ τῷ τιμᾶν μάλιστα καὶ κοσμεῖν τὸν σύμβουλον
 ἐπιδεικνύμενος τὸ μὴ μεταμέλεσθαι τοῖς βεβουλευμένοις.
 (3) τὸν μὲν οὖν λόγον εἶπεν ὁ Δημοσθένης, τοῖς δὲ
 ψηφίσμασιν οὐχ ἑαυτόν, ἀλλ´ ἐν μέρει τῶν φίλων ἕκαστον
 ἐπέγραφεν, ἐξοιωνιζόμενος τὸν ἴδιον δαίμονα καὶ τὴν
 τύχην, ἕως αὖθις ἀνεθάρρησε Φιλίππου τελευτήσαντος.
 (4) ἐτελεύτησε δὲ τῇ περὶ Χαιρώνειαν εὐτυχίᾳ χρόνον οὐ πολὺν
 ἐπιβιώσας· καὶ τοῦτο δοκεῖ τῷ τελευταίῳ τῶν ἐπῶν
 ὁ χρησμὸς ἀποθεσπίσαι·
 "κλαίει ὁ νικηθείς, ὁ δὲ νικήσας ἀπόλωλεν".
 | [21] (1) Le désastre que la Grèce venait d'éprouver à Chéronée donna aux ennemis 
de Démosthène la hardiesse de l'insulter, de le citer même en justice pour lui 
demander compte de sa conduite; (2) mais le peuple, non content de le renvoyer 
absous, lui déféra de nouveaux honneurs; et le rappelant à l'administration des 
affaires, comme l'orateur le plus zélé pour le bien public, il le chargea de 
faire l'éloge funèbre des Athéniens morts à Chéronée, dont les ossements 
venaient d'être rapportés à Athènes, pour y recevoir les honneurs de la 
sépulture. Ce choix prouve que le peuple n'était ni abattu ni flétri par son 
malheur, comme le prétend Théopompe, qui en parle du ton le plus tragique; les 
distinctions et les honneurs dont il comblait celui qui lui avait conseillé la 
guerre firent voir au contraire qu'il ne se repentait pas d'avoir suivi ses 
conseils. (3) Démosthène prononça donc cette oraison funèbre; mais, au lieu de 
mettre son nom aux décrets qu'il proposa depuis, il les inscrivit successivement 
du nom de ses amis, afin d'éluder sa mauvaise fortune. Il reprit courage à la 
mort de Philippe, (4) qui ne survécut pas longtemps à la bataille de Chéronée; 
et c'est vraisemblablement cette mort que prédisait le dernier vers de l'oracle 
des Sibylles: "Le triomphe sera le tombeau des vainqueurs." 
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