| [26] Εἶχε δὲ τὰ κατ´ αὐτὸν οὕτως. ὡς ἐκέλευσε τὸν υἱὸν
 ἐμβαλεῖν τοῖς Πάρθοις καί τις ἤγγειλεν αὐτῷ μακρὰν
 τροπὴν εἶναι καὶ δίωξιν ἰσχυρὰν τῶν πολεμίων, ἑώρα δὲ
 καὶ τοὺς καθ´ αὑτὸν οὐκέτι προσκειμένους ὁμοίως - ἐκεῖ
 γὰρ ἐρρύησαν οἱ πλεῖστοι - , μικρὸν ἀνεθάρρησε, καὶ συναγαγὼν
 ὑπέστειλε χωρίοις προσάντεσι τὸν στρατόν, αὐτίκα
 προσδοκῶν τὸν υἱὸν ἐπανήξειν ἀπὸ τῆς διώξεως. τῶν δὲ
 πεμφθέντων ὑπὸ τοῦ Ποπλίου πρὸς αὐτόν, ὡς ἐκινδύνευεν,
 οἱ μὲν πρῶτοι διεφθάρησαν ἐμπεσόντες εἰς τοὺς
 βαρβάρους, οἱ δ´ ὕστεροι μόγις διαφυγόντες ἀπήγγειλαν
 οἴχεσθαι τὸν Πόπλιον, εἰ μὴ ταχεῖα καὶ πολλὴ βοήθεια
 παρ´ ἐκείνου γένοιτο. τὸν δὲ Κράσσον ἅμα πολλὰ πάθη
 κατέσχε, καὶ λογισμῷ μὲν οὐδὲν ἔτι τῶν πραγμάτων ἑώρα,
 φόβῳ δὲ περὶ τοῦ σύμπαντος ἅμα καὶ πόθῳ τοῦ παιδὸς
 ἑλκόμενος βοηθεῖν ἢ μὴ βοηθεῖν, τέλος ὥρμησε προάγειν
 τὴν δύναμιν. ἐν τούτῳ δ´ οἱ πολέμιοι προσεφέροντο
 κραυγῇ καὶ παιᾶνι φοβερώτεροι, καὶ πολλὰ τῶν τυμπάνων
 αὖθις περιεμυκᾶτο τοὺς Ῥωμαίους, ἑτέρας μάχης ἀρχὴν
 προσδοκῶντας. οἱ δὲ τὴν κεφαλὴν τοῦ Ποπλίου κομίζοντες
 ὑπὲρ αἰχμῆς ἀναπεπηγυῖαν ἐγγὺς προσελάσαντες ἀνέδειξαν,
 ὕβρει πυνθανόμενοι τοκέας αὐτοῦ καὶ γένος· οὐ
 γὰρ δὴ πρέπειν γε Κράσσου πατρὸς ἀνανδροτάτου καὶ
 κακίστου γενναῖον οὕτω παῖδα καὶ λαμπρὸν ἀρετῇ γενέσθαι.
 τοῦτο τὸ θέαμα Ῥωμαίων ὑπὲρ ἅπαντα τὰ ἄλλα
 δεινὰ τὰς ψυχὰς κατέκλασε καὶ παρέλυσεν, οὐ θυμοῦ πρὸς
 ἄμυναν, ὥσπερ ἦν εἰκός, ἀλλὰ φρίκης καὶ τρόμου πᾶσιν
 ἐγγενομένου. καίτοι τόν γε Κράσσον αὐτὸν αὑτοῦ λαμπρότατον
 ἐν τῷ τότε πάθει φανῆναι λέγουσιν· ἐβόα γὰρ
 ἐπιὼν τὰς τάξεις· „ἐμὸν ὦ Ῥωμαῖοι τοῦτο τὸ πάθος ἴδιόν
 ἐστιν· ἡ δὲ μεγάλη δόξα καὶ τύχη τῆς Ῥώμης ἐν ὑμῖν
 ἕστηκε σῳζομένοις ἄθραυστος καὶ ἀήττητος. εἰ δὲ καὶ
 ἐμοῦ τις οἶκτος ἀφῃρημένου παῖδα πάντων ἄριστον, ἐπιδείξασθε
 τοῦτον ὀργῇ τῇ πρὸς τοὺς πολεμίους. ἀφέλεσθε
 τὴν χαρὰν αὐτῶν, τιμωρήσασθε τὴν ὠμότητα, μὴ καταπλαγῆτε
 τοῖς γεγενημένοις.ἐπεὶ δεῖ τι καὶ παθεῖν
τοὺς μεγάλων ἐφιεμένους. οὐδὲ Λεύκολλος Τιγράνην
 ἀναιμωτὶ καθεῖλεν, οὐδὲ Σκιπίων Ἀντίοχον, χιλίας δὲ ναῦς
 οἱ παλαιοὶ περὶ Σικελίαν ἀπώλεσαν, ἐν δ´ Ἰταλίᾳ πολλοὺς
 αὐτοκράτορας καὶ στρατηγούς, ὧν οὐδεὶς προηττηθεὶς
 ἐκώλυσεν αὐτοὺς κρατῆσαι τῶν νενικηκότων. οὐ γὰρ εὐτυχίᾳ
 τὰ Ῥωμαίων, ἀλλὰ τλημοσύνῃ καὶ ἀρετῇ πρὸς τὰ δεινὰ
 χωρούντων, εἰς τοσοῦτο προῆλθε δυνάμεως.“
 | [26] Crassus, qui après avoir donné à son fils l'ordre d'attaquer 
les Parthes, ne fut pas longtemps sans recevoir la nouvelle de leur 
déroute, et de la poursuite qu'en faisaient les Romains. Voyant que 
les ennemis qu'il avait en tête ne le pressaient plus si vivement, 
car la plupart étaient allés contre son fils, il reprit un peu de courage; et, 
ayant réuni ses troupes, il alla se placer sur une colline qu'il 
avait derrière lui, dans l'espérance que son fils ne tarderait 
pas à revenir de la poursuite des Parthes. Les premiers courriers 
que le jeune Crassus lui avait envoyés pour lui apprendre 
dans quel danger il était avaient été massacrés par les 
ennemis; les derniers, leur ayant échappé avec beaucoup de 
peine, vinrent lui annoncer que son fils était perdu s'il ne 
lui envoyait un secours aussi puissant que prompt.
Cette nouvelle jeta Crassus dans un tel trouble, 
qu'agité de passions contraires il ne savait quel parti prendre : 
longtemps partagé entre la crainte de tout perdre et le 
désir d'aller au secours de son fils, il se détermine enfin à
faire avancer son armée; elle était à peine en marche, qu'il 
voit arriver les Parthes, que leurs cris perçants et leurs 
chants de victoire rendaient encore plus terribles. Ils firent 
retentir les sons effrayants de leurs tambours aux oreilles des 
Romains, qui les regardèrent comme le signal d'un nouveau 
combat. Ceux qui portaient au bout d'une pique la tête du 
jeune Crassus, s'approchant des Romains, la leur présentèrent, 
en leur demandant, avec une raillerie insultante, quels 
étaient les parents et la famille de ce jeune homme : 
« car, ajoutèrent-ils, il n'est pas vraisemblable qu'un jeune 
guerrier d'un si grand courage, d'une valeur si brillante, ait 
pour père un homme aussi lâche, aussi méprisable que 
Crassus. » Cette vue abattit beaucoup plus le courage et les 
forces des Romains, que tous les autres maux qu'ils souffraient. 
Loin d'enflammer leur colère et de les animer du 
désir si naturel de la vengeance, elle les glaça de crainte et 
d'horreur. Cependant Crassus, dans un malheur si grand, fit 
paraître beaucoup plus de courage qu'il n'en avait encore 
montré. Il parcourut les rangs, en criant à ses soldats : 
« Romains, c'est moi seul que cette perte regarde. Tant que 
vous vivrez, toute la fortune et toute la gloire de Rome 
subsistent et sont toujours invincibles. Mais si vous êtes 
touchés du malheur d'un père qui vient de perdre un fils 
si estimable, montrez votre compassion pour moi dans 
votre colère contre les ennemis; ôtez-leur cette joie barbare, 
punissez leur cruauté, et ne vous laissez pas abattre 
par mon malheur. Il faut nécessairement en éprouver 
quand on aspire à de grandes choses. Ce n'est pas sans 
verser le sang des Romains que Lucullus a vaincu Tigrane 
et que Scipion a défait Antiochus. Nos ancêtres ont perdu 
mille vaisseaux sur les mers de Sicile, ils ont vu périr en 
Italie plusieurs de leurs généraux et de leurs capitaines, et 
leurs défaites n'ont pas empêché les Romains de subjuguer 
leurs vainqueurs. Ce n'est pas aux faveurs de la fortune, 
mais à leur patience, à leur courage dans l'adversité, qu'ils 
ont dû cette grande puissance à laquelle ils sont parvenus. »
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