[26] Ἅμα δ' ἡμέρᾳ προὔκειτο μὲν ὁ φοινικοῦς χιτὼν ὡς εἴωθε
μάχης ἐσομένης σύμβολον, αἱ δ' ἠτιμασμέναι σπεῖραι τὴν
πρώτην αὐταὶ δεηθεῖσαι τάξιν ἐλάμβανον, τὴν δ' ἄλλην
ἐξάγοντες οἱ χιλίαρχοι στρατιὰν <2> παρενέβαλλον. ἀκούσας δ'
ὁ Ἀννίβας "ὦ Ἡράκλεις" εἶπε, "τί χρήσεταί τις ἀνθρώπῳ μήτε
τὴν χείρονα τύχην μήτε τὴν βελτίονα φέρειν εἰδότι; μόνος γὰρ
οὗτος οὔτε νικῶν δίδωσιν ἀνάπαυσιν, οὔτε λαμβάνει
νικώμενος, ἀλλ' ἀεὶ μαχησόμεθα πρὸς τοῦτον ὡς ἔοικεν, ᾧ τοῦ
τολμᾶν ἀεὶ καὶ <τὸ> θαρρεῖν εὐτυχοῦντι καὶ σφαλλομένῳ τὸ <3>
αἰδεῖσθαι πρόφασίς ἐστιν." ἐκ τούτου συνῄεσαν αἱ δυνάμεις,
καὶ τῶν ἀνδρῶν ἴσα φερομένων, ἐκέλευσεν Ἀννίβας τὰ θηρία
καταστήσαντας εἰς πρώτην τάξιν ἐπάγειν <4> τοῖς ὅπλοις τῶν
Ῥωμαίων· ὠθισμοῦ δὲ μεγάλου καὶ ταραχῆς εὐθὺς ἐν τοῖς
πρώτοις γενομένης, εἷς τῶν χιλιάρχων ὄνομα Φλάβιος
ἀναρπάσας σημαίαν ὑπηντίαζε, καὶ τῷ στύρακι τὸν πρῶτον
ἐλέφαντα τύπτων ἀπέστρεφεν· ὁ δ' ἐμβαλὼν εἰς τὸν ὀπίσω,
συνετάραξε καὶ τοῦτον καὶ <5> τοὺς ἐπιφερομένους. κατιδὼν δὲ
τοῦτο Μάρκελλος ἐκέλευσε τοὺς ἱππεῖς ἐλαύνειν ἀνὰ κράτος
πρὸς τὸ θορυβούμενον καὶ ποιεῖν ἔτι μᾶλλον αὑτοῖς περιπετεῖς
τοὺς <6> πολεμίους. οὗτοί τε δὴ λαμπρῶς ἐμβαλόντες
ἀνέκοπτον ἄχρι τοῦ στρατοπέδου τοὺς Καρχηδονίους, καὶ τῶν
θηρίων τὰ κτεινόμενα καὶ πίπτοντα τὸν πλεῖστον αὐτῶν <7>
φόνον ἀπειργάζετο. λέγονται γὰρ ὑπὲρ ὀκτακισχιλίους
ἀποθανεῖν· Ῥωμαίων δὲ νεκροὶ μὲν ἐγένοντο τρισχίλιοι, <8>
τραυματίαι δ' ὀλίγου δεῖν ἅπαντες. καὶ τοῦτο παρέσχεν Ἀννίβᾳ
καθ' ἡσυχίαν ἀναστάντι νυκτὸς ἆραι πορρωτάτω τοῦ
Μαρκέλλου· διώκειν γὰρ οὐκ ἦν δυνατὸς ὑπὸ πλήθους τῶν
τετρωμένων, ἀλλὰ κατὰ σχολὴν εἰς Καμπανίαν ἀνέζευξε, καὶ
τὸ θέρος ἐν Σινοέσσῃ διῆγεν, ἀναλαμβάνων τοὺς στρατιώτας.
| [26] XXXVI. Le lendemain, le jour paraissait à peine, que la cotte d'armes d'écarlate,
signal ordinaire du combat, fut exposée devant la tente du général. Les bandes qu'il
avait déshonorées demandèrent d'être placées au front de la bataille, et l'obtinrent. Les
tribuns firent sortir les autres troupes, et les rangèrent dans leur ordre. Quand
Annibal en fut averti : « Grands dieux! s'écria-t-il, que faire à un homme qui ne sait
supporter ni la bonne ni la mauvaise fortune? Il est le seul qui, vainqueur, ne donne
aucun relâche à son ennemi; et, vaincu, n'en prend aucun pour lui-même. Il faudra
donc toujours combattre contre lui, puisque après une victoire la confiance, et après
une défaite la honte, le déterminent à de nouvelles tentatives. » Aussitôt les
deux armées en viennent aux mains. Annibal, voyant pendant quelque temps que
l'avantage est égal de part et d'autre, fait avancer les éléphants à la tête de l'armée, et
les pousse contre les Romains. Leurs premiers rangs furent d'abord troublés et mis
en désordre par ces animaux; mais un tribun, nommé Flavius, saisissant une
enseigne, va contre les éléphants; et, enfonçant dans le corps du premier la hampe
de son enseigne, il le fait tourner en arrière : l'animal se jette sur celui qui le suit, et le
culbute avec les autres qu'on avait fait avancer. Marcellus, apercevant ce désordre,
ordonne à sa cavalerie de tomber de toutes ses forces sur les ennemis déjà troublés,
et de les renverser les uns sur les autres. La cavalerie charge avec la plus grande
vigueur, enfonce les Carthaginois, les mène toujours battant jusque dans leurs
retranchements, et en fait un grand carnage, qu'augmentèrent encore les éléphants,
qui, étant tués ou blessés, en écrasèrent un grand nombre. Il périt, dit-on, de leur
côté, plus de huit mille hommes; les Romains en perdirent trois mille, et presque
tous les autres furent blessés : ce qui donna le temps à Annibal de décamper
pendant la nuit, et de s'en aller très loin de Marcellus, qui, hors d'état de le poursuivre
à cause du grand nombre de ses blessés, s'en alla à petites journées dans la
Campanie, et passa l'été à Sinuesse, pour donner du repos à ses troupes.
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