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Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Vie de Marcellus

Chapitre 20

  Chapitre 20

[20] Τῶν δὲ Ῥωμαίων τοῖς ἐκτὸς ἀνθρώποις δεινῶν μὲν εἶναι πόλεμον μεταχειρίσασθαι καὶ φοβερῶν εἰς χεῖρας ἐλθεῖν νομιζομένων, εὐγνωμοσύνης δὲ καὶ φιλανθρωπίας καὶ ὅλως πολιτικῆς ἀρετῆς ὑποδείγματα μὴ δεδωκότων, πρῶτος δοκεῖ τότε Μάρκελλος ὑποδεῖξαι τοῖς <2> Ἕλλησι δικαιοτάτους Ῥωμαίους. οὕτω γὰρ ἐχρῆτο τοῖς συμβάλλουσι, καὶ τοσαῦτα <καὶ> πόλεις καὶ ἰδιώτας εὐεργέτησεν, ὥστ' εἴ τι περὶ Ἔνναν Μεγαρεῖς Συρακοσίους ἔργον ἦν εἰργασμένον οὐκ ἐπιεικὲς αὐτοῖς, τοῦτο τῶν πεπονθότων αἰτίᾳ μᾶλλον τῶν πεποιηκότων δοκεῖν <3> γεγονέναι. μνησθήσομαι δ' ἑνὸς ἀπὸ πολλῶν. πόλις γάρ ἐστι τῆς Σικελίας Ἐγγύϊον οὐ μεγάλη, ἀρχαία δὲ πάνυ καὶ διὰ θεῶν ἐπιφάνειαν ἔνδοξος ἃς καλοῦσι Ματέρας. <4> ἵδρυμα λέγεται Κρητῶν γενέσθαι τὸ ἱερόν, καὶ λόγχας τινὰς ἐδείκνυσαν καὶ κράνη χαλκᾶ, τὰ μὲν ἔχοντα Μηριόνου, τὰ δ' Οὐλίξου, τουτέστιν Ὀδυσσέως, ἐπιγραφάς, <5> ἀνατεθεικότων ταῖς θεαῖς. ταύτην προθυμότατα καρχηδονίζουσαν Νικίας, ἀνὴρ πρῶτος τῶν πολιτῶν, ἔπειθε μεταθέσθαι πρὸς Ῥωμαίους, ἀναφανδὸν ἐν ταῖς ἐκκλησίαις παρρησιαζόμενος καὶ κακῶς φρονοῦντας ἐξελέγχων <6> τοὺς ὑπεναντίους. οἱ δὲ φοβούμενοι τὴν δύναμιν αὐτοῦ καὶ τὴν δόξαν, ἐβουλεύσαντο συναρπάσαι καὶ παραδοῦναι <7> τοῖς Φοίνιξιν. αἰσθόμενος οὖν Νικίας ἤδη καὶ παραφυλαττόμενον ἀδήλως ἑαυτόν, ἐξέφερεν ἐν φανερῷ λόγους περὶ τῶν Ματέρων ἀνεπιτηδείους, καὶ πολλὰ πρὸς τὴν νομιζομένην ἐπιφάνειαν καὶ δόξαν ὡς ἐπιστῶν καὶ καταφρονῶν ἔπραττεν, ἡδομένων τῶν ἐχθρῶν ὅτι τὴν μεγίστην αἰτίαν αὐτὸς ἐφ' ἑαυτὸν ὧν πείσεται παρεῖχε. <8> γεγονότων δὲ τῶν πρὸς τὴν σύλληψιν ἑτοίμων, ἦν μὲν ἐκκλησία τῶν πολιτῶν, δὲ Νικίας μεταξύ τι λέγων καὶ συμβουλεύων πρὸς τὸν δῆμον, ἐξαίφνης ἀφῆκεν εἰς τὴν γῆν τὸ σῶμα, καὶ μικρὸν διαλιπών, οἷον εἰκὸς ἡσυχίας σὺν ἐκπλήξει γενομένης, τὴν κεφαλὴν ἐπάρας καὶ περιενεγκὼν ὑποτρόμῳ φωνῇ καὶ βαρείᾳ, κατὰ μικρὸν συντείνων καὶ παροξύνων τὸν ἦχον, ὡς ἑώρα φρίκῃ καὶ σιωπῇ κατεχόμενον τὸ θέατρον, ἀπορρίψας τὸ ἱμάτιον καὶ περιρρηξάμενος τὸν χιτωνίσκον, ἡμίγυμνος ἀναπηδήσας ἔθεε πρὸς τὴν ἔξοδον τοῦ θεάτρου, βοῶν ὑπὸ τῶν Ματέρων <9> ἐλαύνεσθαι, <καὶ> μηδενὸς τολμῶντος ἅψασθαι μηδ' ἀπαντῆσαι διὰ δεισιδαιμονίαν, ἀλλ' ἐκτρεπομένων, ἐπὶ τὰς πύλας ἐξέδραμεν, οὔτε φωνῆς τινος οὔτε κινήσεως <10> πρεπούσης δαιμονῶντι καὶ παραφρονοῦντι φεισάμενος. δὲ γυνὴ συνειδυῖα καὶ συντεχνάζουσα τῷ ἀνδρί, λαβοῦσα τὰ παιδία πρῶτον μὲν ἱκέτις προσεκυλινδεῖτο τοῖς μεγάροις τῶν θεῶν, ἔπειτα πλανώμενον ἐκεῖνον προσποιουμένη ζητεῖν, κωλύοντος οὐδενὸς ἀσφαλῶς ἀπῆλθεν ἐκ τῆς πόλεως, καὶ διεσώθησαν μὲν οὕτως εἰς Συρακούσας <11> πρὸς Μάρκελλον· ἐπεὶ δὲ πολλὰ τοὺς Ἐγγυΐνους ὑβρίσαντας καὶ πλημμελήσαντας ἐλθὼν Μάρκελλος ἔδησε πάντας ὡς τιμωρησόμενος, δὲ Νικίας ἐδάκρυσε παρεστώς, τέλος δὲ χειρῶν καὶ γονάτων ἁπτόμενος παρῃτεῖτο τοὺς πολίτας, ἀπὸ τῶν ἐχθρῶν ἀρξάμενος, ἐπικλασθεὶς ἀφῆκε πάντας καὶ τὴν πόλιν οὐδὲν ἠδίκησε, τῷ δὲ Νικίᾳ χώραν τε πολλὴν καὶ δωρεὰς πολλὰς ἔδωκε. ταῦτα μὲν οὖν Ποσειδώνιος φιλόσοφος ἱστόρησε. [20] XXVI. Jusqu'alors les Romains avaient fait voir aux autres nations leur habileté dans le métier des armes, et leur bravoure si redoutable dans les combats; mais ils ne leur avaient pas encore donné des exemples de justice, d'humanité, et en général des vertus politiques : Marcellus paraît avoir été le premier qui montra, dans cette occasion, que les Romains avaient plus de justice que les Grecs. Il fut si modéré envers tous ceux qui eurent à traiter avec lui, et si généreux pour un grand nombre de villes et de particuliers, que les actes de rigueur qui purent avoir lieu à Enna, à Mégare ou à Syracuse, on doit plutôt les imputer à ceux qui les éprouvèrent qu'à ceux qui en furent les auteurs. Entre plusieurs exemples, j'en citerai un seul. Il y a en Sicile une ville peu considérable, nommée Engyum; elle est fort ancienne, et célèbre par l'apparition des déesses qu'on appelle les mères. Leur temple fut, dit-on, fondé par des Crétois; et l'on y montre des lances et des casques d'airain qui portent les uns le nom de Mérion, les autres celui d'Ulysse. Ces héros les avaient dit-on, consacrés aux déesses d'Engyum. Les habitants de cette ville avaient embrassé avec chaleur les intérêts des Carthaginois; et Nicias, le premier d'entre eux, travaillait de tout son pouvoir à les ramener au parti des Romains; il parlait dans les assemblées avec la plus grande liberté, et prouvait à ceux du parti contraire qu'ils ne faisaient pas le bien de leur patrie. Ceux-ci, redoutant sa puissance et sa réputation, résolurent de l'enlever, et de le livrer aux Carthaginois. Nicias ayant eu connaissance de leur projet, et voyant qu'on l'observait secrètement, eut recours à ce stratagème : XXVII. D'abord il répandit dans le public des propos injurieux sur le compte des déesses, et montra, par plusieurs actions, qu'il ne partageait pas, ou même qu'il méprisait l'opinion générale sur ces divinités; et qu'il regardait leur apparition comme une fable. Ses ennemis furent charmés qu'il leur fournît ainsi lui-même de justes motifs de le perdre. Le jour qu'ils avaient choisi pour l'enlever, il se tenait par hasard une assemblée, dans laquelle Nicias haranguait le peuple et lui donnait des avis. Tout à coup il se jette à terre; et après être resté quelque temps dans un silence qui paraissait la suite naturelle de cette espèce d'extase, il lève la tête, la tourne de côté et d'autre, et se met à parler d'une voix faible et tremblante, qu'il hausse ensuite peu à peu. Dès qu'il vit tout le théâtre saisi d'horreur et dans un profond silence, il jette sa robe, déchire son manteau, et, se levant à demi nu, il court vers une des issues du théâtre, en s'écriant qu'il est poursuivi par les déesses mères. Personne n'ose ni le toucher ni se mettre devant lui; tous les assistants, frappés d'une religieuse terreur, se détournent pour lui faire place; il gagne une des portes de la ville sans proférer une seule parole, sans faire aucun geste qui sentît un homme furieux et possédé. Sa femme, qui était dans le secret, et qui favorisait son stratagème, prend ses enfants avec elle, et va se prosterner en suppliante au pied de l'autel des déesses; ensuite, faisant semblant d'aller chercher son mari, comme s'il errait dans les champs, elle sort tranquillement de la ville sans que personne s'y oppose; et ils se sauvent tous deux à Syracuse auprès de Marcellus, qui, peu de temps après, étant allé à Engyum, fait charger de fers tous les habitants, dont il voulait, disait-il, châtier l'insolence et l'orgueil. Nicias s'approche de lui en fondant en larmes, embrasse ses genoux, lui baise les mains, et lui demande grâce pour ses concitoyens, en commençant par ses ennemis. Marcellus, attendri de ce spectacle, pardonne à tous les habitants, ne fait aucun tort à la ville, et donne à Nicias une grande étendue de terres, avec beaucoup d'autres présents. Voilà ce que raconte le philosophe Posidonius.


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Dernière mise à jour : 23/08/2007