| [19] Ὁ δ´ Αἴσωπος "ἀλλ´ ὑμεῖς," ἔφη, "τοὺς ἐμοὺς
 χλευάζετε κολοιοὺς καὶ κόρακας εἰ διαλέγονται·
 δελφῖνες δὲ τοιαῦτα νεανιεύονται;"
 Κἀγὼ πρὸς αὐτόν, "ἄλλο τι λέγωμεν," ἔφην,
 "ὦ Αἴσωπε· τούτῳ δὲ τῷ λόγῳ πιστευομένῳ καὶ
 γραφομένῳ παρ´ ἡμῖν πλέον ἢ χίλι´ ἔτη διαγέγονεν
 καὶ ἀπὸ τῶν Ἰνοῦς καὶ Ἀθάμαντος χρόνων."
 Ὁ δὲ Σόλων ὑπολαβών "ἀλλὰ ταῦτα μέν, ὦ
 Διόκλεις, ἐγγὺς θεῶν ἔστω καὶ ὑπὲρ ἡμᾶς·
 ἀνθρώπινον δὲ καὶ πρὸς ἡμᾶς τὸ τοῦ Ἡσιόδου
 πάθος· ἀκήκοας γὰρ ἴσως τὸν λόγον."
 "Οὐκ ἔγωγ´," εἶπον.
 "Ἀλλὰ μὴν ἄξιον πυθέσθαι. Μιλησίου γάρ,
 ὡς ἔοικεν, ἀνδρός, ᾧ ξενίας ἐκοινώνει ὁ Ἡσίοδος
 καὶ διαίτης ἐν Λοκροῖς, τῇ τοῦ ξένου θυγατρὶ
 κρύφα συγγενομένου καὶ φωραθέντος ὑποψίαν
 ἔσχεν ὡς γνοὺς ἀπ´ ἀρχῆς καὶ συνεπικρύψας τὸ
 ἀδίκημα, μηδενὸς ὢν αἴτιος, ὀργῆς δὲ καιρῷ καὶ
 διαβολῆς περιπεσὼν ἀδίκως. ἀπέκτειναν γὰρ αὐτὸν
 οἱ τῆς παιδίσκης ἀδελφοὶ περὶ τὸ Λοκρικὸν Νέμειον
 ἐνεδρεύσαντες, καὶ μετ´ αὐτοῦ τὸν ἀκόλουθον, ᾧ
 Τρωίλος ἦν ὄνομα. τῶν δὲ σωμάτων εἰς τὴν
 θάλατταν ὠσθέντων τὸ μὲν τοῦ Τρωίλου, εἰς τὸν
 Δάφνον ποταμὸν ἔξω φορούμενον, ἐπεσχέθη περικλύστῳ
 χοιράδι μικρὸν ὑπὲρ τὴν θάλατταν ἀνεχούσῃ·
 καὶ μέχρι νῦν Τρωίλος ἡ χοιρὰς καλεῖται·
 τοῦ δ´ Ἡσιόδου τὸν νεκρὸν εὐθὺς ἀπὸ γῆς ὑπολαβοῦσα
 δελφίνων ἀγέλη πρὸς τὸ Ῥίον κατὰ τὴν
 Μολύκρειαν ἐκόμιζε. ἐτύγχανε δὲ Λοκροῖς ἡ τῶν
 Ῥίων καθεστῶσα θυσία καὶ πανήγυρις, ἣν ἄγουσιν
 ἔτι νῦν ἐπιφανῶς περὶ τὸν τόπον ἐκεῖνον. ὡς δ´
 ὤφθη προσφερόμενον τὸ σῶμα, θαυμάσαντες ὡς
 εἰκὸς ἐπὶ τὴν ἀκτὴν κατέδραμον, καὶ γνωρίσαντες
 ἔτι πρόσφατον τὸν νεκρὸν ἅπαντα δεύτερα τοῦ
 ζητεῖν τὸν φόνον ἐποιοῦντο διὰ τὴν δόξαν τοῦ
 Ἡσιόδου. καὶ τοῦτο μὲν ταχέως ἔπραξαν, εὑρόντες
 τοὺς φονεῖς· αὐτούς τε γὰρ κατεπόντισαν ζῶντας
 καὶ τὴν οἰκίαν κατέσκαψαν. ἐτάφη δ´ ὁ Ἡσίοδος
 πρὸς τῷ Νεμείῳ· τὸν δὲ τάφον οἱ πολλοὶ τῶν ξένων
 οὐκ ἴσασιν, ἀλλ´ ἀποκέκρυπται ζητούμενος ὑπ´
 Ὀρχομενίων, ὥς φασι, βουλομένων κατὰ χρησμὸν
 ἀνελέσθαι τὰ λείψανα καὶ θάψαι παρ´ αὑτοῖς.
 εἴπερ οὖν οὕτως ἔχουσιν οἰκείως καὶ φιλανθρώπως
 πρὸς τοὺς ἀποθανόντας, ἔτι μᾶλλον εἰκός ἐστι
 τοῖς ζῶσι βοηθεῖν, καὶ μάλιστα κηληθέντας αὐλοῖς
 ἤ τισι μέλεσι. τουτὶ γὰρ ἤδη πάντες ἴσμεν, ὅτι
 μουσικῇ τὰ ζῷα ταῦτα χαίρει καὶ διώκει, καὶ
 παρανήχεται τοῖς ἐλαυνομένοις πρὸς ᾠδὴν καὶ
 αὐλὸν ἐν εὐδίᾳ πορείαις τερπόμενα. χαίρει δὲ
 καὶ νήξεσι παίδων καὶ κολύμβοις ἁμιλλᾶται. διὸ
 καὶ νόμος ἀδείας ἄγραφός ἐστιν αὐτοῖς· θηρᾷ γὰρ
 οὐδεὶς οὔδε λυμαίνεται, πλὴν ὅταν ἐν δικτύοις
 γενόμενοι κακουργῶσι περὶ τὴν ἄγραν, πληγαῖς
 κολάζονται καθάπερ παῖδες ἁμαρτάνοντες. μέμνημαι
 δὲ καὶ παρὰ Λεσβίων ἀνδρῶν ἀκούσας σωτηρίαν
 τινὰ κόρης ὑπὸ δελφῖνος ἐκ θαλάττης γενέσθαι·
 ἀλλ´ ἐγὼ μὲν οὐκ ἀκριβῶ τἄλλα, ὁ δὲ Πιττακὸς
 ἐπεὶ γιγνώσκει, δίκαιός ἐστι περὶ τούτων διελθεῖν."
 | [19] Mais Esope : «Eh bien!" dit-il, «moquez-vous donc 
de mes geais et de mes corneilles qui parlent ! Voilà des 
dauphins qui se permettent des prouesses du même genre." 
— «Mon cher Esope", lui dis je, "pourquoi parlons-nous 
de ce fait? Pareille aventure est accréditée chez nous 
et consignée dans les livres, et elle a plus de deux mille ans 
de date , car elle remonte au temps d'Ino et d'Athamas." 
— "Soit !" reprit Solon; "mais convenons, Dioclès, que de 
semblables histoires se rapprochent de celles des dieux et 
dépassent le pouvoir des mortels. Au contraire l'aventure 
d'Hésiode est tout humaine et à notre portée. Vous en 
avez peut-être entendu le récit?" — "En aucune façon", 
répondis-je. — "Eh bien ! elle mérite d'être connue. Un 
homme de Milet, s'il en faut croire ce que l'on dit, partageait 
avec Hésiode la table et l'hospitalité d'un habitant de 
Locres, et il avait séduit en secret la fille de leur hôte. Ces 
amours furent découvertes. On soupçonna Hésiode d'avoir
eu, dès l'origine, connaissance de l'intrigue et d'avoir aidé 
à la dissimuler. Il n'en était nullement coupable ; mais, 
dans un premier moment de colère, on le rendit victime 
d'injustes calomnies. Les frères de la jeune fille l'ayant attendu 
dans une embuscade près d'un bois de la Locride 
consacré à Jupiter Néméen, l'assassinèrent, ainsi que 
l'homme qui le suivait et qui s'appelait Troïlus. Les deux 
cadavres furent jetés au sein de la mer. Celui de Troïlus se 
trouva emporté dans le fleuve Daphnus, où il fut arrêté un 
peu au-dessus de l'embouchure par un roc que baignaient 
les eaux et qui en a conservé jusqu'à nos jours le nom de 
Troïlus. Mais le corps d'Hésiode, au moment même où il 
était lancé de la terre, fut reçu par une flottille de dauphins 
qui le portèrent au promontoire de Rhium, près de Molycrie. 
Il se trouva qu'il y avait pour le moment à Rhium un 
sacrifice et une fête, que les Locriens célèbrent encore 
aujourd'hui en ce même lieu avec beaucoup d'éclat. A la vue 
du corps ainsi apporté on fut saisi d'un étonnement bien 
naturel. On accourut sur le rivage, on reconnut Hésiode 
tout fraîchement assassiné; et, en raison de la célébrité du 
poète, on n'eut rien de plus pressé que de faire une enquête 
sur ce meurtre. On y procéda sur-le-champ. Les assassins 
furent découverts, jetés tout vivants dans les flots, et leur 
habitation fut rasée. On ensevelit ensuite Hésiode près du 
bois de Némée. Mais le plus grand nombre des étrangers 
ne savent pas où est son tombeau. On le dérobe aux recherches 
des Orchoméniens qui, d'après un oracle, voudraient, 
dit-on, enlever ses restes et les ensevelir dans leur 
pays. Si donc les dauphins montrent tant d'empressement et 
d'humanité pour ceux qui sont morts, il est encore plus 
naturel qu'ils viennent en aide aux vivants, surtout quand 
ceux-ci les ont attirés par les accords de la flûte ou par 
quelques chants mélodieux. Car nous savons tous à présent 
que ces animaux aiment la musique, qu'ils la recherchent, 
qu'ils nagent auprès des vaisseaux où l'on vogue au bruit 
des chants et de la flûte, et qu'ils sont heureux d'accompagner 
ces bâtiments dans leur marche par un temps calme.
Ils se plaisent aussi à voir nager les petits garçons, et ils 
plongent avec eux à l'envi. Aussi est-ce une loi, bien que 
rien n'en soit écrit, de ne pas troubler leur sécurité. Personne 
ne leur fait la chasse, personne ne les maltraite. Seulement, 
lorsque s'étant laissé prendre dans des filets ils 
embarrassent les pêcheurs, ceux-ci les châtient en les battant, 
comme l'on ferait à des enfants pris en faute. Je me 
souviens aussi d'avoir entendu dire à des gens de Lesbos, 
qu'une jeune fille de ce pays avait été sauvée de la mer par 
un dauphin. C'est une tradition avérée. Mais Pittacus la 
connaît par-dessus tous : il devrait bien nous en conter les détails'.»
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