[5,10] ΠΡΟΒΛΗΜΑ Ι
Τίνες οἱ περὶ ἅλα καὶ κύαμον· ἐν ᾧ καὶ διὰ τί τὸν ἅλα ’θεῖον‘
ὁ ποιητὴς εἶπεν
Ἐζήτει Φλῶρος, ἑστιωμένων ἡμῶν παρ´ αὐτῷ,
τίνες ἂν εἶεν ’οἱ περὶ ἅλα καὶ κύαμον‘ ἐν τῇ παροιμίᾳ
λεγόμενοι. καὶ τοῦτο μὲν ἐκ προχείρου διέλυσεν Ἀπολλοφάνης
ὁ γραμματικός· ’οἱ γὰρ οὕτω συνήθεις‘ ἔφη
’τῶν φίλων, ὥστε καὶ πρὸς ἅλα δειπνεῖν καὶ κύαμον, ὑπὸ
τῆς παροιμίας προβάλλονται.‘ τὴν δὲ τῶν ἁλῶν τιμὴν
ἀφ´ ὅτου γένοιτο διηποροῦμεν, Ὁμήρου μὲν ἄντικρυς λέγοντος
’πάσσε δ´ ἁλὸς θείοιο‘,
Πλάτωνος δὲ τῶν ἁλῶν σῶμα κατὰ νόμον
ἀνθρώπων θεοφιλέστατον εἶναι φάσκοντος· ἐπέτεινε δὲ
τὴν ἀπορίαν τὸ τοὺς Αἰγυπτίους ἱερέας ἁγνεύοντας ἀπέχεσθαι
τὸ πάμπαν ἁλῶν, ὥστε καὶ τὸν ἄρτον ἄναλον
προσφέρεσθαι· πῶς γάρ, εἰ θεοφιλὲς καὶ θεῖον, ἀφωσιώσαντο;
Φλῶρος μὲν οὖν ἐᾶν ἐκέλευε τοὺς Αἰγυπτίους, |
Ἑλληνιστὶ δ´ αὐτοὺς εἰπεῖν τι πρὸς τὸ ὑποκείμενον. ἐγὼ
δ´ ἔφην οὐδὲ τοὺς Αἰγυπτίους μάχεσθαι τοῖς Ἕλλησιν·
αἱ γὰρ ἁγνεῖαι καὶ παιδοποιίαν καὶ γέλωτα καὶ οἶνον καὶ
πολλὰ τῶν ἄλλως ἀξίων σπουδῆς ἀφαιροῦσι· τοὺς δ´
ἅλας τάχα μὲν ὡς ἐπὶ συνουσίαν ἄγοντας ὑπὸ θερμότητος,
ὡς ἔνιοι λέγουσι, φυλάττονται καθαρεύοντες· εἰκὸς δὲ
καὶ ὡς ὄψον ἥδιστον παραιτεῖσθαι· κινδυνεύουσι γὰρ οἱ
ἅλες τῶν ἄλλων ὄψων ὄψον εἶναι καὶ ἥδυσμα, διὸ καὶ
’χάριτας‘ ἔνιοι προσαγορεύουσιν αὐτούς, ὅτι τῆς τροφῆς
τὸ ἀναγκαῖον ἡδὺ ποιοῦσιν.
’Ἆρ´ οὖν‘ ὁ Φλῶρος ἔφη ’διὰ τοῦτο θεῖον εἰρῆσθαι
τὸν ἅλα φῶμεν;‘ ’ἔστι μὲν δή‘ εἶπον ’οὐδὲ τοῦτ´
ἐλάχιστον. οἱ γὰρ ἄνθρωποι τὰ κοινὰ καὶ διήκοντα ταῖς
χρείαις ἐπὶ τὸ πλεῖστον ἐκθειάζουσιν, ὡς τὸ ὕδωρ, τὸ
φῶς, τὰς ὥρας· τὴν δὲ γῆν οὐ μόνον θεῖον, ἀλλὰ καὶ θεὸν
ὑπολαμβάνουσιν· ὧν οὐδενὸς λείπεται χρείᾳ τὸ τῶν ἁλῶν,
θρίγκωμα τῆς τροφῆς γινόμενον εἰς τὸ σῶμα καὶ παρέχον
εὐαρμοστίαν αὐτῇ πρὸς τὴν ὄρεξιν. οὐ μὴν
ἀλλὰ καὶ σκόπει, μὴ κἀκεῖνο θεῖον αὐτῷ συμβέβηκεν,
ὅτι τῶν σωμάτων τὰ νεκρὰ διατηροῦν ἄσηπτα καὶ μόνιμα
πολὺν χρόνον ἀντιτάττεται τῷ θανάτῳ καὶ οὐκ ἐᾷ παντελῶς
ἐξολέσθαι καὶ ἀφανισθῆναι τὸ θνητόν· ἀλλ´ ὥσπερ
ἡ ψυχή, θειότατον οὖσα τῶν ἡμετέρων, τὰ ζῷα συνέχει
καὶ ῥεῖν οὐκ ἐᾷ τὸν ὄγκον, οὕτως ἡ τῶν ἁλῶν φύσις τὰ
νεκρὰ παραλαμβάνουσα καὶ μιμουμένη τὸ τῆς ψυχῆς
ἔργον ἀντιλαμβάνεται φερομένων ἐπὶ τὴν φθορὰν καὶ
κρατεῖ καὶ ἵστησιν, ἁρμονίαν παρέχουσα καὶ φιλίαν πρὸς
ἄλληλα τοῖς μέρεσι. διὸ καὶ τῶν Στωικῶν ἔνιοι τὴν ὗν
σάρκα νεκρὰν γεγονέναι λέγουσι, τῆς ψυχῆς, ὥσπερ ἁλῶν,
παρεσπαρμένης ὑπὲρ τοῦ διαμένειν. ὁρᾷς δ´ ὅτι καὶ τὸ
κεραύνιον πῦρ ἱερὸν ἡγούμεθα καὶ θεῖον, ὅτι τὰ σώματα
τῶν διοβλήτων ἄσηπτα πρὸς πολὺν ἀντέχοντα χρόνον
ὁρῶμεν. τί οὖν θαυμαστόν, εἰ καὶ τὸν ἅλα, τὴν αὐτὴν
ἔχοντα τῷ θείῳ δύναμιν πυρί, θεῖον ὑπέλαβον οἱ παλαιοί;‘
Σιωπήσαντος δ´ ἐμοῦ, Φιλῖνος ὑπολαβών ’τὸ δὲ
γόνιμον οὐ δοκεῖ σοι‘ ἔφη ’θεῖον εἶναι, εἴπερ ἀρχὴ {ὁ}
θεὸς πάντων;‘ ὁμολογήσαντος δ´ ἐμοῦ
’καὶ μήν‘ ἔφη ’τὸν ἅλ´ οὐκ ὀλίγον πρὸς γένεσιν συνεργεῖν οἴονται,
καθάπερ αὐτὸς ἐμνήσθης τῶν Αἰγυπτίων.
οἱ γοῦν τὰς κύνας φιλοτροφοῦντες, ὅταν ἀργότεραι πρὸς
συνουσίαν ὦσιν, ἄλλοις τε βρώμασιν ἁλμυροῖς καὶ ταριχευτοῖς
κρέασι κινοῦσι καὶ παροξύνουσιν τὸ σπερματικὸν αὐτῶν ἡσυχάζον.
τὰ δ´ ἁληγὰ πλοῖα πλῆθος ἐκφύει μυῶν ἄπλετον,
ὡς μὲν ἔνιοι λέγουσι, τῶν θηλειῶν καὶ δίχα συνουσίας
κυουσῶν, ὅταν τὸν ἅλα λείχωσιν· εἰκὸς δὲ μᾶλλον ἐμποιεῖν
τὴν ἁλμυρίδα τοῖς μορίοις ὀδαξησμοὺς καὶ συνεξορμᾶν
τὰ ζῷα πρὸς τοὺς συνδυασμούς. διὰ τοῦτο δ´
ἴσως καὶ κάλλος γυναικὸς τὸ μήτ´ ἀργὸν μήτ´ ἀπίθανον,
ἀλλὰ μεμιγμένον χάριτι καὶ κινητικὸν ἁλμυρὸν καὶ δριμὺ
καλοῦσιν. οἶμαι δὲ καὶ τὴν Ἀφροδίτην ἁλιγενῆ τοὺς ποιητὰς
προσαγορεύειν καὶ μῦθον ἐπ´ αὐτῇ πεπλασμένον
ἐξενεγκεῖν, ὡς ἀπὸ θαλάσσης ἐχούσῃ τὴν γένεσιν, εἰς τὸ
τῶν ἁλῶν γόνιμον αἰνιττομένους.
καὶ γὰρ αὐτὸν τὸν Ποσειδῶνα {ἀλλὰ} καὶ ὅλως τοὺς πελαγίους
θεοὺς πολυτέκνους καὶ πολυγόνους ἀποφαίνουσιν· αὐτῶν δὲ τῶν
ζῴων οὐδὲν ἂν χερσαῖον ἢ πτηνὸν εἰπεῖν ἔχοις οὕτω
γόνιμον, ὡς πάντα τὰ θαλάττια· πρὸς ὃ καὶ πεποίηκεν
ὁ Ἐμπεδοκλῆς
‘φῦλον ἄμουσον ἄγουσα πολυσπερέων καμασήνων.’‘
| [5,10] QUESTION X.
Quels sont ceux dont on dit qu'ils sont « gens du sel et du cumin»;
et, à ce propos, pourquoi Homère a donné au sel l'épithète de « divin ».
PERSONNAGES DU DIALOGUE :
FLORUS - APOLLOPHANES - PLUTARQUE. - PHILINUS.
1. Florus demandait, un jour qu'il nous donnait à souper,
quels peuvent être ceux dont on dit proverbialement : "Ce
sont gens du sel et du cumin." La question fut tout aussitôt
résolue par le grammairien Apollophanes. Ce proverbe,
dit-il, désigne les amis qui sont assez familiers pour souper
de notre sel et de notre cumin.
Nous ne nous expliquions pas, non plus, d'où vient que le
sel est si honoré, puisque Homère dit en propres termes :
"Il saupoudra les chairs avec un sel divin".
En outre Platon répète à plusieurs reprises, que les lois
humaines ont classé le sel parmi les substances les plus
agréables aux dieux. Un détail augmentait la difficulté :
c'est que les prêtres égyptiens, qui font voeu de chasteté,
s'abstiennent entièrement de sel, au point qu'ils mangent
même le pain sans qu'il soit salé. Comment donc, si le sel
est agréable aux dieux, s'il est divin, l'avaient-ils en abomination?
2. Florus nous engageait à laisser de côté les Égyptiens
et à traiter la question au point de vue des Grecs. Mais je
fis remarquer que les Egyptiens même n'étaient pas en cela
contraires aux Grecs. En prononçant un voeu de chasteté,
on s'interdit de procréer des enfants, de rire, de boire du
vin, et ainsi, de faire plusieurs choses qui, hors d'un pareil
voeu, méritent d'être recherchées. Mais quant au sel, c'est
peut-être parce qu'à cause de sa chaleur, il porte, à ce qu'on
dit, à se rapprocher des femmes, qu'il est évité par ceux qui
vivent dans la continence. Il est probable encore qu'ils s'en
privent comme d'une friandise très agréable. Car il est
douteux qu'on trouve un mets qui assaisonne et relève
mieux les autres. Aussi quelques-uns l'appellent-ils même
« les Grâces », parce qu'il change en un plaisir la nécessité
de prendre de la nourriture.
3. « Eh bien, dit Florus, sera-ce pour cette cause que nous
dirons que le sel a été appelé divin? » — « C'en est une, repris-je,
et qui est loin d'être sans importance. Les hommes
divinisent les choses dont l'usage est commun et s'étend le
plus largement possible : telles que l'eau, telles que la lumière,
les saisons, et aussi la terre, laquelle non seulement
ils estiment divine, mais dont encore ils font une déesse. Or
à aucune de ces choses-là le sel n'est inférieur en utilité. Il
est pour le corps le soutien des aliments; il donne à la nourriture
une heureuse convenance avec l'appétit. Indépendamment
de ces raisons, voyez si le sel n'a pas encore une
propriété toute divine, quand il conserve si longtemps les
corps sans qu'ils se putréfient. Ne résiste-t-il pas à la mort,
en empêchant la perte complète et la décomposition de la
créature mortelle? De même que l'âme, le plus divin de nos
attributs, maintient en état de vie les êtres animés et ne
laisse pas la masse du corps tomber en dissolution, de
même, par sa nature, le sel s'emparant des cadavres et imitant
l'action de l'âme, les arrête quand ils se portent
à leur destruction, la combat, la maîtrise, et maintient un
accord et une harmonie réciproque entre toutes les parties.
Voilà encore pourquoi certains Stoïciens disent que le porc
à sa naissance est de la chair morte, et que le principe vital
y est semé, comme du sel, pour la conserver. Vous voyez
aussi, que nous regardons la foudre comme un feu sacré et
divin, parce que les corps frappés par ses carreaux résistent
très longtemps sous nos yeux à la décomposition. Y a-t-il
donc rien d'étonnant que le sel, possédant une propriété
analogue à celle du feu, qui est une substance divine, ait été
regardé comme divin par l'antiquité?"
4. Ici je m'arrêtai, et Philinus prit la parole : « Ce qui a
puissance d'engendrer, dit-il, ne vous semble-t-il pas divin,
puisque Dieu est le principe de toutes choses ? » J'en convins
avec lui. —
«Eh bien, reprit-il, on estime que le sel n'est pas un médiocre
agent de fécondité, comme vous-même l'avez rappelé en faisant
mention des Égyptiens.
C'est pourquoi ceux qui aiment à entretenir des chiens, leur
donnent, entre autres nourritures de haut goût, lorsqu'ils
leur voient peu d'ardeur pour l'accouplement, des viandes
salées, afin d'exciter et de réveiller la vertu générative endormie
en eux. Les navires employés au transport du sel produisent
une multitude infinie de rats, parce que les femelles,
au dire de quelques-uns, y deviennent pleines sans le concours
du mâle quand elles ont léché du sel. Mais il est plus
vraisemblable que la salure détermine des démangeaisons
dans les parties naturelles de ces animaux, et les provoque
à s'accoupler. C'est encore pour cela peut-être, que quand
une femme a une beauté qui, loin d'être fade et insignifiante
offre un mélange de grâces provocatrices, nous
disons que c'est une beauté piquante et pleine de sel.»
Je crois aussi qu'en donnant à Vénus l'épithète de fille de la
mer, et en popularisant cette tradition mythologique qui lui
a donné naissance au sein de l'Océan, les poétes font allusion
aux propriétés génératives du sel.
Du reste, ils attribuent à Neptune lui-même, et en général à tous les
dieux marins, une grande fécondité et une lignée très nombreuse.
Enfin, parmi les animaux eux-mêmes, terrestres ou volatiles,
on ne saurait en citer, qui aient autant de fécondité
que toutes les espèces de poissons. C'est ce qui a fait dire
au poète Empédocle :
"En escadrons muets derrière elle s'avance
Des poissons la féconde et prolifique engeance".
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