[4,0] ΣΥΜΠΟΣΙΑΚΩΝ - ΒΙΒΛΙΟΝ ΤΕΤΑΡΤΟΝ.
ὦ Σόσσιε Σενεκίων, τοῦ Πολυβίου Σκηπίωνι παραινοῦντος
Ἀφρικανῷ μὴ πρότερον ἐξ ἀγορᾶς ἀπελθεῖν ἢ
φίλον τινὰ ποιήσασθαι τῶν πολιτῶν· φίλον δὲ δεῖ μὴ πικρῶς
μηδὲ σοφιστικῶς ἀκούειν ἐκεῖνον τὸν ἀμετάπτωτον
καὶ βέβαιον, ἀλλὰ κοινῶς τὸν εὔνουν· ὥσπερ ᾤετο χρῆναι
Δικαίαρχος εὔνους μὲν αὑτῷ παρασκευάζειν
ἅπαντας, φίλους δὲ ποιεῖσθαι τοὺς ἀγαθούς. |
φιλία γὰρ ἐν χρόνῳ πολλῷ καὶ δι´ ἀρετῆς ἁλώσιμον·
εὔνοιαν δὲ καὶ χρεία καὶ ὁμιλία καὶ παιδιὰ πολιτικῶν ἀνδρῶν
ἐπάγεται, καιρὸν λαβοῦσα πειθοῦς φιλανθρώπου καὶ
χάριτος συνεργόν. ἀλλ´ ὅρα τὸ τῆς παραινέσεως, εἰ μὴ
μόνον ἔχει δεξιῶς πρὸς ἀγορὰν ἀλλὰ καὶ πρὸς συμπόσιον·
ὥστε δεῖν μὴ πρότερον ἀναλύειν ἢ κτήσασθαί τινα τῶν
συγκατακειμένων καὶ παρόντων εὔνουν ἑαυτῷ καὶ φίλον.
εἰς ἀγορὰν μὲν γὰρ ἐμβάλλουσι πραγμάτων εἵνεκεν καὶ
χρειῶν ἑτέρων, εἰς δὲ συμπόσιον οἵ γε νοῦν ἔχοντες ἀφικνοῦνται
κτησόμενοι φίλους οὐχ ἧττον ἢ τοὺς ὄντας εὐφρανοῦντες.
διότι τῶν μὲν ἄλλων ζητεῖν ἐκφορὰν ἀνελεύθερον
ἂν εἴη καὶ φορτικόν, τὸ δὲ φίλων πλέον ἔχοντας
ἀπιέναι καὶ ἡδὺ καὶ σεμνόν ἐστιν. καὶ τοὐναντίον ὁ τούτου
παραμελῶν ἄχαριν αὑτῷ καὶ ἀτελῆ τὴν συνουσίαν
ποιεῖ καὶ ἄπεισι τῇ γαστρὶ σύνδειπνος οὐ τῇ ψυχῇ γεγονώς·
ὁ γὰρ σύνδειπνος οὐκ ὄψου καὶ οἴνου καὶ τραγημάτων
μόνον, ἀλλὰ καὶ λόγων κοινωνὸς ἥκει καὶ παιδιᾶς
καὶ φιλοφροσύνης εἰς εὔνοιαν τελευτώσης. αἱ μὲν γὰρ
παλαιόντων ἐπιβολαὶ καὶ ἕλξεις κονιορτοῦ δέονται, ταῖς
δὲ φιλικαῖς λαβαῖς ὁ οἶνος ἁφὴν ἐνδίδωσι μιγνύμενος
λόγῳ· λόγος γὰρ αὐτῷ τὸ φιλάνθρωπον καὶ ἠθοποιὸν ἐπὶ
τὴν ψυχὴν ἐκ τοῦ σώματος ἐποχετεύει καὶ συνδιαδίδωσιν·
εἰ δὲ μή, πλανώμενος ἐν τῷ σώματι πλησμονῆς
οὐδὲν σπουδαιότερον παρέσχεν. ὅθεν ὥσπερ ὁ μάρμαρος,
τοῦ διαπύρου σιδήρου τῷ καταψύχειν τὴν ἄγαν ὑγρότητα
καὶ ῥύσιν ἀφαιρῶν, εὔτονον ποιεῖ τὸ μαλασσόμενον αὐτοῦ
καὶ τυπούμενον, οὕτως ὁ συμποτικὸς λόγος οὐκ ἐᾷ διαφορεῖσθαι
παντάπασιν ὑπὸ τοῦ οἴνου τοὺς πίνοντας, ἀλλ´
ἐφίστησι καὶ ποιεῖ τῇ ἀνέσει τὸ ἱλαρὸν καὶ φιλάνθρωπον
ἐγκέραστον καὶ τὸ κεχαρισμένον, ἄν τις ἐμμελῶς ἅπτηται,
καθάπερ σφραγῖδι φιλίας εὐτυπώτων καὶ ἁπαλῶν διὰ
τὸν οἶνον ὄντων.
| [4,0] LIVRE QUATRIÈME.
PRÉAMBULE.
Mon cher Sossius Sénécion, Polybe recommandait à Scipion
l'Africain de ne jamais s'en aller de la place publique
avant de s'être fait quelque nouvel ami dans le nombre des
citoyens. Par « ami » l'on doit entendre non pas, dans le
sens rigoureux et subtil du mot, celui dont le dévouement
est solide, inébranlable, mais un homme animé de cette
commune bienveillance dont parle Dicaearque, quand il dit
que l'on doit s'assurer la bienveillance de tous et l'amitié
des gens de bien. Car l'amitié se conquiert par une
longue durée de temps et par la vertu, et la bienveillance
se produit à la suite des relations d'affaires, des rapprochements
de société ou de jeux, entre habitants d'une
même ville. Sa raison d'être, elle la trouve dans les circonstances
du moment, qui viennent toujours en aide aux dispositions
conciliantes, affectueuses et agréables.
Or, examinez si cette recommandation de Polybe n'est
d'un adroit usage que pour la place publique, et si elle ne
peut pas s'appliquer également aux festins : de manière
qu'il ne faille jamais quitter la table avant de s'être acquis
la bienveillance et l'amitié de ceux à côté de qui l'on a été
placé et qui se sont trouvés là. On descend sur la place
publique pour ses affaires et pour d'autres intérêts ; mais à
un festin, les hommes de sens s'y rendent pour acquérir des
amis, non moins que pour faire plaisir à ceux qu'ils ont déjà.
C'est pourquoi, chercher à en emporter quelques-unes des
autres choses serait une bassesse odieuse; mais se retirer
après s'être gagné un plus grand nombre d'amis, est
une pratique aussi douce qu'honorable. Au contraire, celui
qui néglige ce soin rend son commerce désagréable et
incomplet, et il se retire ayant été convive par le ventre,
non par le cœur. Quand on est convié, ce n'est pas seulement
les viandes, le vin, les pâtisseries, c'est encore la conversation
que l'on vient partager, ainsi qu'un délassement
et une aménité qui se terminent en bienveillance. Car de
même que les athlètes, pour se saisir et s'entraîner, ont besoin
de poussière, de même aux dispositions amicales c'est
le vin qui donne prise, mêlé à la conversation. Celle-ci, à la
faveur du vin, fait passer du corps à l'âme des sentiments
affectueux et courtois qui la pénètrent. Autrement, le vin
flotte dans le corps, et ne fait rien de plus sérieux que de
le remplir. Aussi, comme le marbre, lorsqu'il refroidit le
fer qui est en fusion, lui fait perdre son humidité et son
coulant pour lui donner de la vigueur tout en le rendant
ductile et malléable; de même dans un festin la conversation
ne permet pas que ceux qui boivent ensemble se
laissent emporter complétement par le vin. Elle devient une
barrière; elle mêle aux ébats une douce et agréable gaieté,
si on la manie spirituellement. Bref, l'amitié est comme
un cachet dont il faut sceller les âmes, pendant que le vin
les amollit et les rend propres à recevoir toute empreinte.
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