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[0] ΠΩΣ ΑΝ ΤΙΣ ΔΙΑΚΡΙΝΕΙΕ ΤΟΝ
ΚΟΛΑΚΑ ΤΟΥ ΦΙΛΟΥ.
| [0] Comment on pourra discerner le flatteur d'avec l'ami.
| [1] Τῷ σφόδρα φιλεῖν ἑαυτόν, ὦ Ἀντίοχε Φιλόπαππε,
φάσκοντι συγγνώμην μὲν ἅπαντας ὁ Πλάτων
διδόναι φησί, κακίαν δὲ σὺν πολλαῖς ἄλλαις
ἐγγίγνεσθαι μεγίστην, ὑφ´ ἧς οὐκ ἔστιν αὑτοῦ κριτὴν
δίκαιον οὐδ´ ἀδέκαστον εἶναι· "τυφλοῦται γὰρ
τὸ φιλοῦν περὶ τὸ φιλούμενον," ἂν μή τις μαθὼν
ἐθισθῇ τὰ καλὰ τιμᾶν καὶ διώκειν μᾶλλον ἢ τὰ
συγγενῆ καὶ οἰκεῖα. τοῦτο τῷ κόλακι πολλὴν
μεταξὺ τῆς φιλίας εὐρυχωρίαν δίδωσιν, ὁρμητήριον
ἐφ´ ἡμᾶς εὐφυὲς ἔχοντι τὴν φιλαυτίαν, δι´ ἣν αὐτὸς
αὑτοῦ κόλαξ ἕκαστος ὢν πρῶτος καὶ μέγιστος οὐ
χαλεπῶς προσίεται τὸν ἔξωθεν ὧν οἴεται καὶ βούλεται
μάρτυν ἅμ´ αὐτῷ καὶ βεβαιωτὴν προσγιγνόμενον.
ὁ γὰρ λοιδορούμενος φιλοκόλαξ σφόδρα
φίλαυτός ἐστι, δι´ εὔνοιαν ἑαυτῷ πάντα μὲν ὑπάρχειν
βουλόμενος πάντα δ´ οἰόμενος ὧν ἡ μὲν βούλησις
οὐκ ἄτοπος ἡ δ´ οἴησις ἐπισφαλὴς καὶ δεομένη
πολλῆς εὐλαβείας. εἰ δὲ δὴ θεῖον ἡ ἀλήθεια καὶ
"πάντων μὲν ἀγαθῶν θεοῖς πάντων δ´ ἀνθρώποις"
ἀρχὴ κατὰ Πλάτωνα, κινδυνεύει θεοῖς ἐχθρὸς ὁ
κόλαξ εἶναι, τῷ δὲ Πυθίῳ διαφερόντως. ἀντιτάττεται
γὰρ ἀεὶ πρὸς τὸ "γνῶθι σαυτόν," ἀπάτην
ἑκάστῳ πρὸς ἑαυτὸν ἐμποιῶν καὶ ἄγνοιαν ἑαυτοῦ
καὶ τῶν περὶ αὑτὸν ἀγαθῶν καὶ κακῶν, τὰ μὲν
ἐλλιπῆ καὶ ἀτελῆ τὰ δ´ ὅλως ἀνεπανόρθωτα ποιῶν.
| [1] Quand un homme, ô Antiochus Philopappus, répète
souvent qu'il s'aime fort lui-même, Platon dit que tous le lui
pardonnent ; mais pourtant, ajoute-t-il, ce vice a plus d'une
conséquence funeste, et surtout il empêche qu'on ne puisse
être pour soi un juge équitable et incorruptible. En effet
celui qui aime s'aveugle sur l'objet aimé, si par une étude
spéciale il n'a pas pris l'habitude d'honorer et d'estimer ce
qui est honnête, plutôt que ce qui lui est personnel et qui
est inné en lui. C'est par là que s'ouvre au flatteur un champ
si vaste en pleine amitié. Notre amour-propre lui donne
merveilleusement prise sur nous. Chacun étant pour soi-même
un premier adulateur et le plus grand de tous, on
n'hésite pas à faire accueil au flatteur étranger, en qui l'on
veut, en qui l'on croit, trouver un témoin et comme un
garant de plus à ses propres yeux; car celui qui aime la
flatterie et à qui on le reproche, est surtout rempli d'amour-propre;
et par suite de l'affection qu'il se porte il veut avoir
toutes les qualités, et il croit les posséder toutes. Or ce n'est
pas une ambition déplacée que de les vouloir, mais se figurer
qu'on les possède est une persuasion dangereuse et qui
a besoin de beaucoup de retenue. Mais si la vertu est chose
divine, si, comme l'avance Platon, elle est la source de tous
biens pour les dieux, de tous biens pour les hommes, le
flatteur risque fort d'être ennemi des dieux et surtout
d'Apollon Pythien, puisqu'il est toujours en contradiction
avec le "connais-toi toi-même". Il s'attache à tromper sur
leur propre compte les gens qu'il circonvient, à leur faire
ignorer ce qu'ils sont eux-mêmes, de telle sorte que les
vertus ou les mauvaises qualités qui sont en eux, restent
les unes incomplètes et défectueuses, les autres
entièrement incurables.
| [2] Εἰ μὲν οὖν, ὡς τὰ πλεῖστα τῶν ἄλλων κακῶν,
ὁ κόλαξ ἥπτετο μόνον ἢ μάλιστα τῶν ἀγεννῶν καὶ
φαύλων, οὐκ ἂν ἦν οὕτω δεινὸν οὐδὲ δυσφύλακτον·
ἐπεὶ δ´ ὥσπερ οἱ θρῖπες ἐνδύονται μάλιστα τοῖς
ἁπαλοῖς καὶ γλυκέσι ξύλοις, οὕτω τὰ φιλότιμα
τῶν ἠθῶν καὶ χρηστὰ καὶ ἐπιεικῆ τὸν κόλακα δέχεται
καὶ τρέφει προσφυόμενον, ἔτι δ´ ὥσπερ ὁ
Σιμωνίδης τὴν
"ἱπποτροφίαν," φησίν, "οὐ Ζακύνθῳ ὀπαδεῖν
ἀλλ´ ἀρούραισι πυροφόροις,"
οὕτω τὴν κολακείαν ὁρῶμεν οὐ πένησιν οὐδ´
ἀδόξοις οὐδ´ ἀδυνάτοις ἀκολουθοῦσαν, ἀλλ´ οἴκων
τε καὶ πραγμάτων μεγάλων ὀλίσθημα καὶ νόσημα
γιγνομένην, πολλάκις δὲ καὶ βασιλείας καὶ ἡγεμονίας
ἀνατρέπουσαν, οὐ μικρὸν ἔργον ἐστὶν οὐδὲ
φαύλης δεόμενον προνοίας ἡ περὶ αὐτὴν ἐπίσκεψις,
ὡς ἂν μάλιστα περίφωρος οὖσα μὴ βλάπτῃ μηδὲ
διαβάλλῃ τὴν φιλίαν. οἱ μὲν γὰρ φθεῖρες ἀπίασιν
ἀπὸ τῶν τελευτώντων καὶ ἀπολείπουσι τὰ σώματα
σβεννυμένου τοῦ αἵματος ἐξ οὗ τρέφονται, τοὺς δὲ
κόλακας οὐδ´ ὅλως ἰδεῖν ἔστι πράγμασι ξηροῖς
καὶ κατεψυγμένοις προσιόντας, ἀλλὰ ταῖς δόξαις
καὶ ταῖς δυνάμεσιν ἐπιτίθενται καὶ αὔξονται, ταχὺ
δ´ ἐν ταῖς μεταβολαῖς ὑπορρέουσιν. ἀλλὰ τὴν
τότε πεῖραν οὐ δεῖ περιμένειν ἀνωφελῆ, μᾶλλον
δὲ βλαβερὰν καὶ οὐκ ἀκίνδυνον οὖσαν. χαλεπὴ
γὰρ ἐν καιρῷ δεομένῳ φίλων ἡ τῶν μὴ φίλων
αἴσθησις, ἀντικαταλλαγὴν οὐκ ἔχουσα χρηστοῦ
καὶ βεβαίου πρὸς ἀβέβαιον καὶ κίβδηλον. ἀλλ´
ὥσπερ νόμισμα δεῖ τὸν φίλον ἔχειν πρὸ τῆς χρείας
δεδοκιμασμένον, μὴ ὑπὸ τῆς χρείας ἐλεγχόμενον.
οὐ γὰρ δεῖ βλαβέντας αἰσθέσθαι, ἀλλ´ ὅπως μὴ
βλαβῶμεν ἐμπειρίαν λαβεῖν καὶ κατανόησιν τοῦ
κόλακος· εἰ δὲ μή, ταὐτὸ πεισόμεθα τοῖς αἰσθανομένοις
τῷ προγεγεῦσθαι τῶν θανασίμων φαρμάκων,
εἰς τὴν κρίσιν ἀπολλύντες ἑαυτοὺς καὶ διαφθείροντες.
οὔτε γὰρ δὴ τούτους ἐπαινοῦμεν
οὔθ´ ὅσοι τὸν φίλον εἰς τὸ καλὸν τιθέμενοι καὶ
ὠφέλιμον οἴονται τοὺς κεχαρισμένως ὁμιλοῦντας
εὐθὺς ἔχειν ἐπ´ αὐτοφώρῳ κόλακας εἰλημμένους.
οὐδὲ γὰρ ἀηδὴς ὁ φίλος οὐδ´ ἄκρατος, οὐδὲ τῷ
πικρῷ σεμνὸν ἡ φιλία καὶ αὐστηρῷ, ἀλλ´ αὐτὸ δὴ
τοῦτο τὸ καλὸν καὶ τὸ σεμνὸν αὐτῆς ἡδὺ καὶ
ποθούμενόν ἐστι,
πὰρ δ´ αὐτῇ Χάριτές τε καὶ Ἵμερος οἰκί´ ἔθεντο,
καὶ οὐ δυστυχοῦντι μόνον
εἰς ὄμματ´ εὔνου φωτὸς ἐμβλέψαι γλυκὺ
κατ´ Εὐριπίδην, ἀλλ´ οὐδὲν ἧττον τοῖς ἀγαθοῖς
ἡδονὴν ἐπιφέρουσα καὶ χάριν ἢ τῶν κακῶν ἀφαιροῦσα
τὰς λύπας καὶ τὰς ἀπορίας παρέπεται.
καὶ καθάπερ ὁ Εὔηνος εἶπε, τῶν ἡδυσμάτων τὸ
πῦρ εἶναι κράτιστον, οὕτω τῷ βίῳ μείξας τὴν
φιλίαν ὁ θεὸς ἅπαντα φαιδρὰ καὶ γλυκέα καὶ
προσφιλῆ ταύτης παρούσης καὶ συναπολαυούσης
ἐποίησεν. ἐπεὶ πῶς ἂν ὁ κόλαξ ὑπεδύετο ταῖς
ἡδοναῖς, εἰ τὴν φιλίαν ἑώρα τὸ ἡδὺ μηδαμοῦ
προσιεμένην, οὐκ ἔστιν εἰπεῖν. ἀλλ´ ὥσπερ τὰ
ψευδόχρυσα καὶ τὰ κίβδηλα τὴν λαμπρότητα τοῦ
χρυσοῦ καὶ τὸ γάνωμα μιμεῖται μόνον, οὕτως
ἔοικεν ὁ κόλαξ τοῦ φίλου τὸ ἡδὺ καὶ κεχαρισμένον
ἐκμιμούμενος ἀεὶ παρέχειν ἱλαρὸν καὶ ἀνθηρὸν
καὶ πρὸς μηδὲν ἀντιβαίνοντα μηδ´ ὑπεναντιούμενον
ἑαυτόν. ὅθεν οὐδὲ τοὺς ἐπαινοῦντας εὐθὺς ὡς
κολακεύοντας ἁπλῶς ὑφορατέον· ἔπαινος γὰρ οὐχ
ἧττον ἐν καιρῷ ψόγου φιλίᾳ προσήκει, μᾶλλον δὲ
τὸ μὲν δύσκολον ὅλως καὶ μεμψίμοιρον ἄφιλον
καὶ ἀνομίλητον, τῆς δ´ ἀφθόνως καὶ προθύμως
τὸν ἐπὶ τοῖς καλοῖς ἀποδιδούσης ἔπαινον εὐνοίας
καὶ τὸ νουθετοῦν αὖθις καὶ παρρησιαζόμενον
ἐλαφρῶς καὶ ἀλύπως ὑπομένομεν, πιστεύοντες
καὶ ἀγαπῶντες ὡς ἀναγκαίως ψέγοντα τὸν ἡδέως
ἐπαινοῦντα.
| [2] Si donc le flatteur, comme la plupart des autres fléaux,
s'attachait seulement ou principalement aux natures ignobles
et basses, son influence ne serait pas aussi funeste, et il ne
serait pas aussi difficile de s'en garantir; mais de même
que les vers qui rongent le bois attaquent de préférence
celui qui est tendre et délicat, de même le flatteur s'abat sur
les naturels généreux, bons, humains, et c'est à eux qu'il
s'attache pour y trouver sa nourriture. Ce n'est pas tout : de
même que, selon Simonide, l'entretien d'une écurie suppose
que l'on possède non pas une simple fiole d'essences
mais de fertiles pâturages, de même nous voyons que la
flatterie ne marche pas à la suite des gens pauvres, obscurs
et qui n'ont aucune puissance. Il lui faut des familles, des
positions considérables, dont elle prépare la chute et les revers;
souvent même elle va jusqu'à renverser des royaumes
et des empires. Ce n'est pas un petit travail ou un soin de
médiocre prévoyance, que d'épier les manoeuvres de la flatterie,
que de la prendre sur le fait, d'empêcher qu'elle ne
nuise à l'amitié et ne la desserve. La vermine abandonne
les mourants et s'éloigne des corps où s'est éteint le sang
dont elle fait sa nourriture : ainsi le flatteur dédaigne les
existences que j'appellerai desséchées et refroidies : il se
fixe sur celles qui sont illustres et puissantes afin de s'y engraisser,
et si la fortune change, il s'est bientôt enfui. Mais
il ne faut pas attendre jusqu'à l'accomplissement de cette
épreuve, qui est inutile ou plutôt funeste et dangereuse.
Quand vient le moment de recourir à ses amis, il est bien
pénible de reconnaître que l'on n'en a point et que l'on ne
peut pas à l'instant même échanger des amitiés fausses et
sans stabilité contre d'utiles et sûrs dévouements. L'ami
doit être comme une pièce de monnaie, dont il faut que
la valeur soit appréciée et connue avant que vienne le moment
de l'employer et non pas quand il est nécessaire de
la mettre en circulation. Ce n'est point par le dommage
éprouvé que nous devons nous apercevoir que nous avions
affaire à un flatteur : il faut l'avoir reconnu et deviné de
manière à n'être pas sa victime; sinon, nous ressemblerons
à ceux qui ne reconnaissent les poisons mortels qu'après y
avoir goûté, et l'expérience même que nous en ferons nous
deviendra fatale et meurtrière. Pas plus que nous ne louons
les imprévoyants, nous n'approuvons ceux qui pensent que
l'amitié doit être seulement honnête et profitable, et qui se
figurent que l'aménité d'un commerce constitue sur le champ,
par elle-même, un flagrant délit d'adulation. Il n'est pas du
tout nécessaire que l'ami soit déplaisant et qu'il s'en tienne
exclusivement à l'affection; et ce serait une erreur de croire
que l'humeur chagrine et revêche fasse le mérite de l'amitié :
son honnêteté même et son mérite la rendent douce et
désirable; en elle
"Est placé le séjour du plaisir et des grâces",
et ce n'est pas pour les malheureux seulement
"Qu'un regard bienveillant est doux à rencontrer'',
selon l'expression d'Euripide. L'amitié ne s'entend pas moins
à jeter du plaisir et du charme sur la prospérité, qu'à diminuer
les peines et les embarras causés par les revers. Et de
même que, selon le mot d'Evenus, le feu est le plus efficace
des assaisonnements, de même Dieu en mêlant l'amitié aux
choses humaines a répandu de l'éclat, de la douceur, de la
tendresse partout où elle signale sa présence et ses sympathies.
Du reste, comment le flatteur s'insinuerait-il par le
moyen du plaisir, s'il voyait que l'amitié n'admette jamais
l'agréable près d'elle? Gela ne pourrait s'expliquer. Mais de
même que les vases de faux or et d'un métal sans valeur
imitent seulement l'éclat et le brillant de l'or, de même le
flatteur, prenant toujours l'air gracieux et gai de l'ami véritable,
a constamment soin de se montrer joyeux, épanoui :
il ne s'oppose à rien, il ne contredit jamais. C'est pourquoi
nous ne devons pas tout d'abord et sans réserve soupçonner
de flatterie ceux qui nous adressent des éloges : car louer à
propos ne convient pas moins en amitié qu'adresser à propos
des reproches; ou plutôt, à être constamment chagrin
et grondeur on fait voir que l'on ne ressent pas d'amitié et
que l'on est peu sociable. Mais quand la bienveillance décerne
avec libéralité et empressement les éloges dus aux
belles actions, de cette même bouche bienveillante on supporte
légèrement et sans amertume les reproches et les avertissements
pleins de franchise : on y a confiance, on les prend
en bonne part ; et l'on estime que celui-là blâme à son corps
défendant, qui a loué avec tant de satisfaction.
| [3] Χαλεπὸν οὖν φαίη τις ἄν ἐστι διακρῖναι τὸν
κόλακα καὶ τὸν φίλον, εἰ μήθ´ ἡδονῇ μήτ´ ἐπαίνῳ
διαφέρουσι· καὶ γὰρ ἐν ὑπουργίαις καὶ διακονίαις
πολλάκις ἰδεῖν ἐστι τὴν φιλίαν ὑπὸ τῆς κολακείας
παρατρεχομένην. τί δ´ οὐ μέλλει, φήσομεν, ἂν τὸν
ἀληθινὸν κόλακα καὶ μετὰ δεινότητος καὶ τέχνης
ἁπτόμενον τοῦ πράγματος διώκωμεν, ἀλλὰ μή,
καθάπερ οἱ πολλοί, τοὺς αὐτοληκύθους τούτους
λεγομένους καὶ τραπεζέας καὶ μετὰ τὸ κατὰ χειρὸς
ὕδωρ ἀκουομένους ὥς τις εἶπε κόλακας νομίζωμεν,
ὧν ἐν μιᾷ λοπάδι καὶ κύλικι μετὰ βωμολοχίας καὶ
βδελυρίας ἡ ἀνελευθερία γίγνεται κατάδηλος; οὐ
γὰρ δήπου Μελάνθιον ἔδει τὸν Ἀλεξάνδρου τοῦ
Φεραίου παράσιτον ἐξελέγχειν, ὃς τοῖς ἐρωτῶσι
πῶς Ἀλέξανδρος ἐσφάγη "διὰ τῆς πλευρᾶς"
ἔλεγεν "εἰς τὴν γαστέρα τὴν ἐμήν," οὐδὲ τοὺς
ἀμφὶ πλουσίαν τράπεζαν ἐγκυκλουμένους, οὓς
οὐ πῦρ οὐδὲ σίδαρος
οὐδὲ χαλκὸς εἴργει
μὴ φοιτᾶν ἐπὶ δεῖπνον,
οὐδὲ τὰς ἐν Κύπρῳ κολακίδας, ἐπειδὴ διέβησαν εἰς
Συρίαν, κλιμακίδας προσαγορευθείσας, ὅτι ταῖς
γυναιξὶ τῶν βασιλέων ἀναβαίνειν ἐπὶ τὰς ἁμάξας
δι´ αὑτῶν ὑποκατακλινόμεναι παρεῖχον.
| [3] D'après cela, dira quelqu'un, il est difficile de distinguer
le flatteur de l'ami, s'il n'y a entre eux de différence ni
par le plaisir ni par la louange que l'on reçoit d'eux; car
dans les complaisances et les menus services on peut voir
que souvent la flatterie prend les devants sur l'amitié.
Pourquoi ne pas convenir de cette difficulté ? répondrons-nous :
car enfin nous poursuivons ici le véritable flatteur,
celui qui exerce son métier avec talent, en homme habile,
et nous ne prétendons pas parler, comme le font beaucoup
d'autres, de ces gens appelés pique-assiettes et parasites,
dont on n'entend la voix, disait quelqu'un, qu'après l'ablution
des mains. Ce ne sont pas ces derniers que nous prenons
pour des flatteurs : l'abjection de leur caractère se
trahit au premier plat, après le premier verre, par quelque
bouffonnerie et quelque indécence. Car il n'y aurait certes
pas besoin de signaler ce qu'il y a de détestable dans cette
parole de Mélanthius, parasite d'Alexandre de Phères. On
lui demandait comment Alexandre avait été tué : «Par un
coup d'épée, répondit-il, qu'il a reçu dans le flanc et qui
était à l'adresse de mon ventre». Rien, encore, n'est plus
odieux que ces êtres rangés en cercle autour d'une table
opulente que ni le feu, ni le fer, ni l'airain, n'empêcheraient
de se rendre là où l'on dîne ; rien de plus odieux que
ces femmes nommées à Chypre les Colacides, qui après
être passées en Syrie, furent appelées Climacides, parce
qu'elles se courbaient à quatre pieds devant les femmes du
roi, et leur servaient d'échelons quand celles-ci montaient
en char.
| [4] Τίνα οὖν δεῖ φυλάττεσθαι; τὸν μὴ δοκοῦντα
μηδ´ ὁμολογοῦντα κολακεύειν, ὃν οὐκ ἔστι λαβεῖν
περὶ τοὐπτάνιον, οὐδ´ ἁλίσκεται σκιὰν καταμετρῶν
ἐπὶ δεῖπνον, οὐδ´ ἔρριπται μεθυσθεὶς ὅπως ἔτυχεν,
ἀλλὰ νήφει τὰ πολλὰ καὶ πολυπραγμονεῖ καὶ πράξεων
μετέχειν οἴεται δεῖν καὶ λόγων ἀπορρήτων
βούλεται κοινωνὸς εἶναι, καὶ ὅλως τραγικός ἐστιν
οὐ σατυρικὸς φιλίας ὑποκριτὴς οὐδὲ κωμικός. ὡς
γὰρ ὁ Πλάτων φησίν, "ἐσχάτης ἀδικίας εἶναι
δοκεῖν δίκαιον μὴ ὄντα," καὶ κολακείαν ἡγητέον
χαλεπὴν τὴν λανθάνουσαν οὐ τὴν ὁμολογοῦσαν,
οὐδὲ τὴν παίζουσαν ἀλλὰ τὴν σπουδάζουσαν·
αὕτη γὰρ ἀναπίμπλησι καὶ τὴν ἀληθινὴν φιλίαν
ἀπιστίας, συνεμπίπτουσαν αὐτῇ πολλάκις, ἂν μὴ
προσέχωμεν. ὁ μὲν οὖν Γωβρύας εἰς σκοτεινὸν
οἴκημα τῷ μάγῳ φεύγοντι συνεισπεσὼν καὶ
γενόμενος ἐν διαπάλαις ἐπιστάντα καὶ διαποροῦντα
τὸν Δαρεῖον ἐκέλευσεν ὠθεῖν καὶ δι´ ἀμφοτέρων·
ἡμεῖς δέ, εἰ μηδαμῆ μηδαμῶς ἐπαινοῦμεν τὸ
"ἐρρέτω φίλος σὺν ἐχθρῷ," διὰ πολλῶν ὁμοιοτήτων
τὸν κόλακα τῷ φίλῳ συμπεπλεγμένον ἀποσπάσαι
ζητοῦντες ὀφείλομεν εὖ μάλα φοβεῖσθαι
μή πως ἢ τῷ κακῷ τὸ χρήσιμον συνεκβάλωμεν ἢ
φειδόμενοι τοῦ οἰκείου τῷ βλάπτοντι περιπέσωμεν.
ὥσπερ γὰρ οἶμαι τῶν ἀγρίων σπερμάτων ὅσα καὶ
σχῆμα καὶ μέγεθος παραπλήσιον ἔχοντα τῷ πυρῷ
συμμέμικται χαλεπὴν ἔχει τὴν ἀποκάθαρσιν (ἢ
γὰρ οὐ διεκπίπτει τῶν στενοτέρων πόρων ἢ
συνεκπίπτει διὰ τῶν ἀραιῶν), οὕτως ἡ κολακεία
τῆς φιλίας εἰς πᾶν πάθος καὶ πᾶν κίνημα καὶ
χρείαν καὶ συνήθειαν ἑαυτὴν καταμιγνύουσα δυσχώριστός
ἐστιν.
| [4] Contre quel flatteur faut-il donc se mettre en garde?
Contre celui qui ne semble pas et n'avoue pas en être un ;
contre celui qu'on ne saurait surprendre rôdant autour de
la cuisine, ou mesurant l'ombre pour calculer l'heure du
dîner; qui ne tombe pas ivre mort à la première occasion.
Le flatteur dangereux est le plus souvent à jeun; il sait se
rendre important; il croit devoir s'associer aux affaires du
maître, il veut être initié à ses secrets; il prend tout à fait
au tragique le rôle qu'il joue, et ne songe pas à se rapprocher
du satyre, du comédien ou du bouffon. Car comme
Platon dit que l'extrême injustice c'est de paraître juste et
de ne l'être point, de même on doit penser que la flatterie
pernicieuse est celle qui se cache et ne s'avoue pas, celle
qui est non pas plaisante, mais sérieuse; car elle va jusqu'à
rendre suspecte la véritable amitié elle-même, avec qui souvent
elle se rencontre en plusieurs points si l'on n'y prend
pas garde. Gobryas s'était précipité dans une chambre
obscure en même temps que le Mage qui fuyait, et avait
engagé une lutte avec lui. Darius survint; et comme il hésitait,
Gobryas lui ordonna de charger hardiment, dût-il les
traverser l'un et l'autre. Mais nous, puisque nous n'approuvons
nullement le mot : «Périsse l'ami avec l'ennemi!»
attachons-nous à distinguer l'ami du flatteur, ce dernier se
confondant avec lui par plusieurs similitudes. Craignons à la
fois de chasser celui qui est bon en écartant le mauvais, et
de nous exposer, en ménageant qui nous aime, aux coups de
qui devra nous nuire. Car, selon moi, de même que lorsqu'avec
le froment sont mêlées des graines sauvages qui lui
ressemblent par la forme et par la grosseur, il est difficile de
l'en trier, parce qu'elles ne tombent pas séparément si les
trous du crible sont trop étroits et qu'elles passent avec le
blé si les trous sont trop larges, de même il est bien difficile,
tant la flatterie se mêle à toutes les affections, à tous les
mouvements, à tous les usages et toutes les habitudes de
l'amitié, il est, bien difficile, dis-je, de les distinguer l'une de
l'autre.
| [5] Ὅτι μέντοι γε πάντων ἥδιστόν ἐστιν ἡ φιλία
καὶ οὐδὲν ἄλλο μᾶλλον εὐφραίνει, διὰ τοῦτο καὶ ὁ
κόλαξ ἡδοναῖς ὑπάγεται καὶ περὶ ἡδονάς ἐστιν.
ὅτι δ´ ἡ χάρις καὶ ἡ χρεία τῇ φιλίᾳ παρέπεται
(καθ´ ὃ δὴ καὶ λέγεται πυρὸς καὶ ὕδατος ὁ φίλος
ἀναγκαιότερος εἶναι), διὰ τοῦτ´ ἐμβάλλων εἰς τὰς
ὑπουργίας ἑαυτὸν ὁ κόλαξ ἁμιλλᾶται σπουδαστικὸς
ἀεὶ φαίνεσθαι καὶ ἄοκνος καὶ πρόθυμος. ἐπεὶ δὲ
τὸ μάλιστα φιλίας ἀρχὴν συνέχον ὁμοιότης ἐστὶν
ἐπιτηδευμάτων καὶ ἠθῶν, καὶ ὅλως τὸ χαίρειν τε
τοῖς αὐτοῖς καὶ τὸ ταὐτὰ φεύγειν πρῶτον εἰς ταὐτὸ
συνάγει καὶ συνίστησι διὰ τῆς ὁμοιοπαθείας,
τοῦτο κατιδὼν ὁ κόλαξ αὑτὸν ὥσπερ ὕλην τινὰ
ῥυθμίζει καὶ σχηματίζει, περιαρμόσαι καὶ περιπλάσαι
ζητῶν οἷς ἂν ἐπιχειρῇ διὰ μιμήσεως,
ὑγρὸς ὢν μεταβάλλεσθαι καὶ πιθανὸς ἐπὶ τὰς
ἐξομοιώσεις, ὥστ´ εἰπεῖν
οὐ παῖς Ἀχιλλέως, ἀλλ´ ἐκεῖνος αὐτὸς εἶ.
Ὃ δὲ πάντων ἐστὶν αὐτοῦ πανουργότατον,
αἰσθανόμενος τὴν παρρησίαν καὶ λεγομένην καὶ
δοκοῦσαν ἰδίαν εἶναι φωνὴν ὥσπερ τινὸς ζῴου τῆς
φιλίας, τὸ δ´ ἀπαρρησίαστον ἄφιλον καὶ ἀγεννές,
οὐδὲ ταύτην ἀμίμητον ἀπολέλοιπεν, ἀλλ´ ὥσπερ
οἱ δεινοὶ τῶν ὀψοποιῶν τοῖς πικροῖς χυμοῖς καὶ
αὐστηροῖς ἡδύσμασι χρῶνται, τῶν γλυκέων ἀφαιροῦντες
τὸ πλήσμιον, οὕτως οἱ κόλακες οὐκ
ἀληθινὴν οὐδ´ ὠφέλιμον ἀλλ´ οἷον ἐπιλλώπτουσαν
ἐξ ὀφρύος καὶ γαργαλίζουσαν ἀτεχνῶς παρρησίαν
προσφέρουσιν. ἔστι μὲν οὖν διὰ ταῦτα δυσφώρατος
ὁ ἀνήρ, ὥσπερ τῶν θηρίων ὅσα πεφυκότα τὴν
χρόαν τρέπεσθαι συναφομοιοῦται τοῖς ὑποκειμένοις
χρώμασι καὶ χωρίοις· ἐπεὶ δ´ ἐκεῖνος ἐξαπατᾷ τε
καὶ περικαλύπτεται ταῖς ὁμοιότησιν, ἡμέτερον ἔργον
ἐστὶ ταῖς διαφοραῖς ἀνακαλύπτειν καὶ ἀπογυμνοῦν
αὐτὸν "ἀλλοτρίοις χρώμασι καὶ σχήμασιν," ᾗ
φησιν ὁ Πλάτων, "χήτει οἰκείων κοσμούμενον."
| [5] C'est parce que l'amitié est ce qu'il y a de plus agréable
au monde, parce que rien ne réjouit davantage, c'est par
cela même que le flatteur, aussi, exerce ses séductions au
moyen de l'agrément, et ne songe qu'à ménager des plaisirs;
et comme l'agrément et le profit viennent à la suite de
l'amitié, et qu'en ce sens on dit «qu'un ami est plus indispensable
que le feu et l'eau» ; par ces raisons, le flatteur
se jetant à corps perdu dans les complaisances, s'attache à
montrer toujours du zèle, de l'activité, du dévouement. Pour
que l'amitié ait un commencement durable et solide il doit
y avoir similitude de principes et de caractères ; et, en général,
c'est la conformité des goûts et des répulsions qui
rapproche et unit tout d'abord les hommes par l'effet de la
sympathie. Le flatteur le sait bien; et, comme une matière
flexible, il a soin de se façonner; il s'étudie à composer son
masque, à se contrefaire, à devenir, par l'imitation, semblable
à ceux qu'il veut tromper. Rien n'égale la facilité
avec laquelle il se métamorphose et prend toutes les physionomies,
de la manière la plus propre à donner le change.
C'est bien de lui que l'on peut dire :
C'est Achille lui-même, et non le fils d'Achille.
Mais signalons ce qui dans tout son manége est le plus
artificieux. Sachant que la franchise est dite et réputée le
langage propre de l'amitié comme un animal a le sien, et
sachant d'autre part que le manque de franchise dénote un
coeur bas et dépourvu de sentiments affectueux, il ne néglige
pas non plus de la simuler et d'en imiter les dehors.
De même que les cuisiniers habiles mêlent des sucs amers
ou des saveurs âpres aux aliments trop doux afin de les empêcher
d'être fades ; de même les flatteurs emploient une
sorte de franchise, aussi peu sincère que profitable, qui fait
mine de rouler de grands yeux, de froncer le sourcil, mais
qui chatouille seulement à la surface. Voilà donc pourquoi
le personnage est difficile à surprendre, comme certains
animaux qui ont naturellement la propriété de changer de
couleur pour prendre la teinte des corps ou des lieux sur
lesquels ils se trouvent. Mais puisqu'il trompe et qu'il se
dissimule par ces faux semblants, notre office est de le dévoiler,
de signaler les différences qui le caractérisent, de
le mettre à nu quand il s'est, comme dit Platon, paré
des couleurs et des formes d'autrui faute d'en avoir qui lui
soient personnelles.
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