[1033] ΠΕΡΙ ΣΤΩΙΚΩΝ ΕΝΑΝΤΙΩΜΑΤΩΝ.
(1033a) Πρῶτον ἀξιῶ τὴν τῶν δογμάτων ὁμολογίαν ἐν τοῖς βίοις θεωρεῖσθαι·
δεῖ γὰρ οὐχ οὕτως τὸν ῥήτορα κατ´ (1033b) Αἰσχίνην τὸ αὐτὸ φθέγγεσθαι καὶ
τὸν νόμον ὡς τὸν βίον τοῦ φιλοσόφου τῷ λόγῳ σύμφωνον εἶναι. Ὁ γὰρ λόγος
τοῦ φιλοσόφου νόμος αὐθαίρετος καὶ ἴδιός ἐστιν, εἴ γε δὴ μὴ παιδιὰν καὶ
εὑρησιλογίαν ἕνεκα δόξης ἀλλ´ ἔργον ἄξιον σπουδῆς τῆς μεγίστης, ὥσπερ
ἔστιν, ἡγοῦνται φιλοσοφίαν.
Ἐπεὶ τοίνυν πολλὰ μὲν ὡς ἐν ὀλίγοις αὐτῷ Ζήνωνι πολλὰ δὲ Κλεάνθει πλεῖστα
δὲ Χρυσίππῳ γεγραμμένα τυγχάνει περὶ πολιτείας καὶ τοῦ ἄρχεσθαι καὶ ἄρχειν
καὶ δικάζειν καὶ ῥητορεύειν, ἐν δὲ τοῖς βίοις οὐδενὸς ἔστιν εὑρεῖν οὐ
στρατηγίαν οὐ νομοθεσίαν οὐ πάροδον εἰς βουλὴν (1033c) οὐ συνηγορίαν ἐπὶ
δικαστῶν οὐ στρατείαν ὑπὲρ πατρίδος οὐ πρεσβείαν οὐκ ἐπίδοσιν, ἀλλ´ ἐπὶ
ξένης ὥσπερ τινὸς λωτοῦ γευσάμενοι σχολῆς τὸν πάντα βίον οὐ βραχὺν ἀλλὰ
παμμήκη γενόμενον διήγαγον ἐν λόγοις καὶ βιβλίοις καὶ περιπάτοις, οὐκ
ἄδηλον ὅτι τοῖς ὑφ´ ἑτέρων γραφομένοις καὶ λεγομένοις μᾶλλον ἢ τοῖς ὑφ´
αὑτῶν ὁμολογουμένως ἔζησαν, ἣν Ἐπίκουρος ἡσυχίαν ἐπαινεῖ καὶ Ἱερώνυμος,
ἐν ταύτῃ τὸ παράπαν καταβιώσαντες. Αὐτὸς γοῦν Χρύσιππος ἐν τῷ τετάρτῳ περὶ
Βίων οὐδὲν οἴεται τὸν σχολαστικὸν βίον τοῦ ἡδονικοῦ διαφέρειν· αὐτὰς
(1033d) δὲ παραθήσομαι τὰς λέξεις·
« Ὅσοι δ´ ὑπολαμβάνουσι φιλοσόφοις ἐπιβάλλειν μάλιστα τὸν σχολαστικὸν
βίον, ἀπ´ ἀρχῆς τί μοι δοκοῦσι διαμαρτάνειν, ὑπονοοῦντες διαγωγῆς τινος
ἕνεκεν δεῖν τοῦτο ποιεῖν ἢ ἄλλου τινὸς τούτῳ παραπλησίου καὶ τὸν ὅλον βίον
οὕτω πως διελκύσαι· τοῦτο δ´ ἐστίν, ἂν σαφῶς θεωρηθῇ, ἡδέως· οὐ γὰρ δεῖ
λανθάνειν τὴν ὑπόνοιαν αὐτῶν, πολλῶν μὲν σαφῶς τοῦτο λεγόντων οὐκ ὀλίγων
δ´ ἀδηλότερον. »
Τίς οὖν μᾶλλον ἐν τῷ σχολαστικῷ βίῳ τούτῳ κατεγήρασεν ἢ Χρύσιππος καὶ
Κλεάνθης καὶ Διογένης καὶ Ζήνων καὶ Ἀντίπατρος, οἵ γε καὶ τὰς αὑτῶν
κατέλιπον πατρίδας, οὐδὲν ἐγκαλοῦντες ἀλλ´ ὅπως (1033e) καθ´ ἡσυχίαν ἐν τῷ
Ὠιδείῳ καὶ ἐπὶ Ζωστῆρος σχολάζοντες καὶ φιλολογοῦντες διάγωσιν;
Ἀριστοκρέων γοῦν ὁ Χρυσίππου μαθητὴς καὶ οἰκεῖος εἰκόνα χαλκῆν ἀναστηλώσας
ἐπέγραψε τόδε τὸ ἐλεγεῖον
« Τὸν νέον Χρύσιππον Ἀριστοκρέων ἀνέθηκε,
τῶν Ἀκαδημιακῶν στραγγαλίδων κοπίδα. »
Τοῦτ´ οὖν ὁ Χρύσιππος, ὁ γέρων, ὁ φιλόσοφος, ὁ τὸν βασιλικὸν καὶ πολιτικὸν
ἐπαινῶν βίον, τὸν δὲ σχολαστικὸν οὐδὲν οἰόμενος τοῦ ἡδονικοῦ διαφέρειν.
Ὅσοι γε μὴν ἄλλοι πολιτείᾳ προσίασιν, ἔτι μᾶλλον ἐναντιοῦνται τοῖς αὑτῶν
(1033f) δόγμασι· καὶ γὰρ ἄρχουσι καὶ δικάζουσι καὶ συμβουλεύουσι καὶ
νομοθετοῦσι καὶ κολάζουσι καὶ τιμῶσιν, ὡς πόλεων μὲν οὐσῶν ἐν αἷς
πολιτεύονται, βουλευτῶν δὲ καὶ δικαστῶν ἀεὶ τῶν λαγχανόντων, στρατηγῶν δὲ
τῶν χειροτονουμένων, νόμων δὲ τῶν Κλεισθένους καὶ Λυκούργου καὶ Σόλωνος,
οὓς φαύλους καὶ ἀνοήτους γεγονέναι λέγουσιν. Ὥστε καὶ πολιτευόμενοι
μάχονται.
| [1033] DES CONTRADICTIONS DES STOÏCIENS.
(1033a) Je voudrais qu'on vît toujours un accord parfait entre les maximes
des hommes et leur conduite ; il est encore moins nécessaire que l'orateur
et la loi aient un même langage, comme (1033b) le dit Eschine, qu'il ne
l'est que la vie d'un philosophe soit conforme à ses discours. La doctrine
d'un philosophe est la loi particulière qu'il s'est volontairement
imposée, si toutefois il est vrai, comme on n'en peut douter, que la
philosophie soit, non un jeu et une subtilité d'esprit qui n'ait pour
objet qu'une vaine gloire, mais une étude importante qui mérite toute
notre application.
Zénon lui-même, Cléanthe et Chrysippe, ont écrit plusieurs ouvrages
de pure spéculation sur l'administration publique, sur le commandement et
l'obéissance, sur les fonctions de juge et d'avocat. Mais, dans la
pratique, on ne trouve pas un seul stoïcien qui ait administré une
république ou établi des lois, qui ait paru dans le Sénat (1033c) ou au
barreau, qui se soit armé pour la défense de sa patrie, qui ait été en
ambassade ou fait quelque largesse au public. Ils ont passé tout le cours
d'une vie très longue dans des pays étrangers, retenus par l'amour de la
tranquillité, comme s'ils eussent goûté du lotus, uniquement occupés
d'écrire, de disputer et de se promener. Ne résulte-t-il pas évidemment de
cette conduite qu'ils ont vécu conformément à ce que les autres ont dit ou écrit,
plutôt que d'après leurs propres principes, et qu'ils ont passé toute leur vie
dans ce repos, si fort recommandé par Épicure et par Hiéronyme.
Chrysippe lui-même, dans son quatrième livre des Vies, prétend que la
vie des gens de lettres ne diffère point de celle des voluptueux. (1033d)
Je vais rapporter ses propres paroles :
« Ceux qui croient que le genre de vie qui convient le plus aux
philosophes est celui qui les éloigne de l'administration des affaires
publiques, sont dans l'erreur. Ils veulent qu'on ne s'applique à la
philosophie que par amusement ou par quelque autre motif semblable, et
qu'on traîne ainsi toute sa vie dans l'étude, c'est-à-dire, pour parler
ouvertement, dans une douce oisiveté. Et l'on ne peut se méprendre sur
leur opinion, puisque plusieurs s'en expliquent clairement, quoique
beaucoup d'autres le fassent d'une manière plus obscure. »
Mais quels hommes ont plus vieilli dans cette vie littéraire que
Chrysippe, que Cléanthe, que Diogène, que Zénon et Antipater, qui
tous abandonnèrent leurs patries, dont ils n'avaient pas à se plaindre, et
seulement pour (1033e) aller mener ailleurs, loin des affaires, une
vie plus douce, uniquement occupés à étudier et à disputer? Aristocréon,
disciple et parent de Chrysippe, lui ayant érigé une statue de
bronze, y fit graver cette inscription :
« Ce bronze fut dressé par Aristocréon,
Pour immortaliser la mémoire et le nom
De Chrysippe, l'honneur des écoles stoïques,
Et le glaive tranchant des nœuds académiques. »
Tel fut Chrysippe, ce vieillard, ce philosophe, ce panégyriste de la vie
des rois et des hommes d'État, qui croit que la vie des gens de lettres ne
diffère point de celle des voluptueux.
Ceux d'entre ces philosophes qui se mêlent des affaires publiques sont
encore plus en contradiction (1033f) avec leurs principes. Ils exercent
des magistratures, ils jugent, ils délibèrent, ils font des lois, ils
punissent, ils récompensent, avec la persuasion qu'il n'y a de véritables
républiques que celles où ils gouvernent eux-mêmes, de sénateurs et de
juges intègres que ceux qui ont été nommés par le sort, de préteurs
légitimes que ceux qui le sont par les suffrages des citoyens, de lois
sages que celles de Clisthène (07), de Lycurgue et de Solon, tandis qu'ils
regardent ces législateurs comme des insensés et des méchants. Lors
donc que les stoïciens administrent les affaires publiques, ils sont en
contradiction avec eux-mêmes.
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