[17] Δευτέρῳ δὲ χρηστέον ἐπιλογισμῷ τῷ τῶν ἐναντίων,
ἀκούοντας ἀεὶ καὶ μεμνημένους καὶ πρόχειρ´ ἔχοντας τὰ
τῆς ἐχεμυθίας ἐγκώμια καὶ τὸ σεμνὸν καὶ τὸ ἅγιον καὶ τὸ
μυστηριῶδες τῆς σιωπῆς, καὶ ὅτι θαυμάζονται μᾶλλον καὶ
ἀγαπῶνται καὶ σοφώτεροι δοκοῦσι τῶν ἐξηνίων τούτων
καὶ ἐκφερομένων οἱ στρογγύλοι καὶ βραχυλόγοι, καὶ ὧν
πολὺς νοῦς ἐν ὀλίγῃ λέξει συνέσταλται. καὶ γὰρ Πλάτων
τοὺς τοιούτους ἐπαινεῖ, δεινοῖς ἀκοντισταῖς ἐοικέναι λέγων,
οὖλα καὶ πυκνὰ καὶ συνεστραμμένα φθεγγομένους.
καὶ ὁ Λυκοῦργος εἰς ταύτην τὴν δεινότητα
τοὺς πολίτας εὐθὺς ἐκ παίδων τῇ σιωπῇ πιέζων συνῆγε καὶ
κατεπύκνου. καθάπερ γὰρ οἱ Κελτίβηρες ἐπὶ τοῦ σιδήρου
τὸ στόμωμα ποιοῦσιν, ὅταν κατορύξαντες εἰς τὴν γῆν
τὸ πολὺ καὶ γεῶδες ἀποκαθάρωσιν, οὕτως ὁ Λακωνικὸς
λόγος οὐκ ἔχει φλοιόν, ἀλλ´ εἰς αὐτὸ τὸ δραστήριον ἀφαιρέσει
τοῦ περιττοῦ διακονώμενος στομοῦται· τὸ γὰρ ἀποφθεγματικὸν
αὐτοῖς τοῦτο καὶ μετ´ εὐστροφίας ὀξὺ πρὸς
τὰς ἀπαντήσεις ἐκ τῆς πολλῆς περιγίγνεται σιωπῆς. καὶ
δεῖ τὰ τοιαῦτα μάλιστα τοῖς ἀδολέσχοις προβάλλειν ὅσην
χάριν ἔχει καὶ δύναμιν, οἷόν ἐστι τὸ ‘Λακεδαιμόνιοι Φιλίππῳ·
Διονύσιος ἐν Κορίνθῳ’. καὶ πάλιν γράψαντος
αὐτοῖς τοῦ Φιλίππου ‘ἂν ἐμβάλω εἰς τὴν Λακωνικήν, ἀναστάτους
ὑμᾶς ποιήσω’, ἀντέγραψαν ‘αἴκα.’ Δημητρίου δὲ
τοῦ βασιλέως ἀγανακτοῦντος καὶ βοῶντος ‘ἕνα πρὸς ἐμὲ
Λακεδαιμόνιοι πρεσβευτὴν ἔπεμψαν,’ οὐ καταπλαγεὶς ὁ
πρεσβευτής ‘ἕν´’ εἶπε ‘ποτὶ ἕνα.’ θαυμάζονται δὲ καὶ τῶν
παλαιῶν οἱ βραχυλόγοι, καὶ τῷ ἱερῷ τοῦ Πυθίου Ἀπόλλωνος
οὐ τὴν Ἰλιάδα καὶ τὴν Ὀδύσσειαν οὐδὲ τοὺς Πινδάρου
παιᾶνας ἐπέγραψαν οἱ Ἀμφικτύονες, ἀλλὰ τὸ ‘γνῶθι
σαυτόν’ καὶ τὸ ‘μηδὲν ἄγαν’ καὶ τὸ ‘ἐγγύα πάρα δ´ ἄτα,’
θαυμάσαντες τῆς λέξεως τὸ εὔογκον καὶ τὸ λιτόν, ἐν βραχεῖ
σφυρήλατον νοῦν περιεχούσης. αὐτὸς δ´ ὁ θεὸς οὐ φιλοσύντομός
ἐστι καὶ βραχυλόγος ἐν τοῖς χρησμοῖς, καὶ
Λοξίας καλεῖται διὰ τὸ φεύγειν τὴν ἀδολεσχίαν μᾶλλον ἢ
τὴν ἀσάφειαν; οἱ δὲ συμβολικῶς ἄνευ φωνῆς ἃ δεῖ φράζοντες
οὐκ ἐπαινοῦνται καὶ θαυμάζονται διαφερόντως; ὡς
Ἡράκλειτος, ἀξιούντων αὐτὸν τῶν πολιτῶν γνώμην
τιν´ εἰπεῖν περὶ ὁμονοίας, ἀναβὰς ἐπὶ τὸ βῆμα καὶ
λαβὼν ψυχροῦ κύλικα καὶ τῶν ἀλφίτων ἐπιπάσας καὶ τῷ
γλήχωνι κινήσας ἐκπιὼν ἀπῆλθεν, ἐνδειξάμενος αὐτοῖς
ὅτι τὸ τοῖς τυχοῦσιν ἀρκεῖσθαι καὶ μὴ δεῖσθαι τῶν πολυτελῶν
ἐν εἰρήνῃ καὶ ὁμονοίᾳ διατηρεῖ τὰς πόλεις. Σκιλοῦρος
δὲ καταλιπὼν ὀγδοήκοντα παῖδας, ὁ Σκυθῶν
βασιλεύς, ᾔτησε δέσμην δορατίων, ὅτ´ ἀπέθνῃσκε, καὶ
λαβόντας ἐκέλευσε καταθραῦσαι καὶ κατᾶξαι συνδεδεμένην
καὶ ἀθρόαν, ὡς δ´ ἀπεῖπον, αὐτὸς ἕλκων ἓν καθ´ ἓν
ἅπαντα ῥᾳδίως διέκλασε, τὴν συμφωνίαν αὐτῶν καὶ τὴν
ὁμόνοιαν ἰσχυρὸν ἀποφαίνων καὶ δυσκαθαίρετον, ἀσθενὲς
δὲ τὴν διάλυσιν καὶ οὐ μόνιμον.
| [17] Le second moyen à employer est celui qui se tire
des contraires. Il faut écouter, se rappeler sans cesse,
avoir constamment présents à l'esprit les éloges donnés à la
discrétion. Il faut comprendre ce qu'il y a de grave, de saint
et de religieux dans le silence. L'admiration, l'amour, la réputation
de sagesse sont bien moins accordés à ces bavards dont
l'étourderie ne connaît pas de frein, qu'aux hommes dont la
parole nette et précise renferme un grand sens sous une
petite quantité de mots. Voilà ceux que loue Platon. Les
comparant à d'habiles archers, il dit que leur langage est
précis, serré et rapide comme un trait. Ce fut en comprimant
dès leur bas âge les Lacédémoniens par le silence, que
Lycurgue leur assura une si grande supériorité, parce qu'il
fit d'eux des hommes concis et énergiques. Comme les Celtibériens
donnent au fer sa finesse et sa solidité en l'enfouissant
dans la terre, où il se dépouille de ce qu'il a de grossier
et de terreux, de même la parole laconienne n'a pas
d'écorce. Dégagée de tout superflu, elle y gagne en énergie
et en portée. Ce langage sentencieux qui était propre
aux Lacédémoniens, cette tournure vive et rapide qu'ils
donnaient à leurs réponses dans l'occasion, étaient le résultat
d'une longue habitude du silence.
Ce sont là les mots qu'il faut faire apprécier surtout aux
bavards. Telle est cette parole : « Les Lacédémoniens à Philippe :
Denys à Corinthe. » Une autre fois Philippe leur
ayant écrit : « Si j'entre en Laconie, je vous anéantirai », ils
lui répondirent : « Si. » Le roi Démétrius s'écriait avec indignation :
« Quoi! les Lacédémoniens ne m'ont envoyé qu'un ambassadeur! »
L'ambassadeur répondit sans s'émouvoir : « Un pour un. »
On cite encore avec éloge les exemples de concision offerts
par les Anciens. Sur le frontispice du temple d'Apollon
Pythien ce ne fut ni l'Iliade, ni l'Odyssée, ni les hymnes
de Pindare qu'inscrivirent les Amphictyons, mais :
« Connais-toi toi-même. » —« Rien de trop. » — « A côté de
l'engagement, l'expiation. » On admirait ces paroles brèves et
rapides, qui sous une petite expression renfermaient un
sens si solide. Apollon lui-même ne se montre-t-il pas
ami de la brièveté et de la précision dans ses oracles? S'il
est appelé Loxias, c'est parce qu'il redoute le bavardage
plus que l'obscurité. Ceux qui par emblèmes et sans parler
expriment ce qu'ils ont à dire ne sont-ils pas loués et
admirés entre tous ? Ainsi Héraclite, invité par ses concitoyens
à formuler son opinion touchant la concorde
monta à la tribune. Il prit une coupe d'eau froide, y répandit
quelques pincées de farine qu'il remua avec un brin de
menthe-pouliot. Il but ensuite le mélange, puis il se retira.
C'était une manière de leur faire comprendre, que l'habitude
de se contenter de la première chose venue et de n'avoir
pas besoin de ce qui est coûteux maintient les cités dans la
paix et dans la concorde. Scilurus, roi des Scythes, laissait
quatre-vingts enfants. Comme il sentit qu'il allait mourir, il
demanda un faisceau de dards : "Prenez-les, leur dit-il, et
tâchez de rompre et de briser cet assemblage ainsi lié et
compacte." Ils durent y renoncer. Mais lui, tirant les dards
un à un, les rompit tous à lui seul avec la plus grande
facilité. Il avait voulu leur faire voir que grâce à l'union et
à la bonne entente on se rend fort et invincible, tandis que
la discorde n'a ni consistance ni durée.
|