[1] - - - Ταῦτ´ ὀρθῶς μὲν ἐκεῖνος εἶπε πρὸς τοὺς μεθ´
ἑαυτὸν στρατηγούς, οἷς πάροδον ἐπὶ τὰς ὕστερον πράξεις
ἔδωκεν ἐξελάσας τὸν βάρβαρον καὶ τὴν Ἑλλάδ´ ἐλευθερώσας·
ὀρθῶς δ´ εἰρήσεται καὶ πρὸς τοὺς ἐπὶ τοῖς λόγοις
μέγα φρονοῦντας· ἂν γὰρ ἀνέλῃς τοὺς πράττοντας, οὐχ
ἕξεις τοὺς γράφοντας. ἄνελε τὴν Περικλέους πολιτείαν
καὶ τὰ ναύμαχα πρὸς Ῥίῳ Φορμίωνος τρόπαια καὶ τὰς
περὶ Κύθηρα καὶ Μέγαρα καὶ Κόρινθον ἀνδραγαθίας
Νικίου καὶ τὴν Δημοσθένους Πύλον καὶ τοὺς Κλέωνος
τετρακοσίους αἰχμαλώτους καὶ Τολμίδαν Πελοπόννησον
περιπλέοντα καὶ Μυρωνίδην νικῶντα Βοιωτοὺς ἐν Οἰνοφύτοις,
καὶ Θουκυδίδης σοι διαγέγραπται. ἄνελε τὰ περὶ
Ἑλλήσποντον Ἀλκιβιάδου νεανιεύματα καὶ τὰ πρὸς Λέσβον
Θρασύλλου καὶ τὴν ὑπὸ Θηραμένους τῆς ὀλιγαρχίας κατάλυσιν
καὶ Θρασύβουλον καὶ Ἀρχῖνον καὶ τοὺς ἀπὸ Φυλῆς
ἑβδομήκοντα κατὰ τῆς Σπαρτιατῶν ἡγεμονίας ἀνισταμένους
καὶ Κόνωνα πάλιν ἐμβιβάζοντα τὰς Ἀθήνας εἰς
τὴν θάλατταν, καὶ Κράτιππος ἀνῄρηται. Ξενοφῶν μὲν
γὰρ αὐτὸς ἑαυτοῦ γέγονεν ἱστορία, γράψας, ἃ ἐστρατήγησε
καὶ κατώρθωσε, {καὶ} Θεμιστογένει περὶ τούτων συντετάχθαι
τῷ Συρακοσίῳ, ἵνα πιστότερος ᾖ διηγούμενος
ἑαυτὸν ὡς ἄλλον, ἑτέρῳ τὴν τῶν λόγων δόξαν χαριζόμενος·
οἱ δ´ ἄλλοι πάντες ἱστορικοί, Κλει{νό}δημοι Δίυλλοι
Φιλόχορος Φύλαρχος, ἀλλοτρίων γεγόνασιν ἔργων
ὥσπερ δραμάτων ὑποκριταί, τὰς τῶν στρατηγῶν καὶ βασιλέων
πράξεις διατιθέμενοι καὶ ταῖς ἐκείνων ὑποδυόμενοι
μνήμαις, ἵν´ ὡς αὐγῆς τινος καὶ φωτὸς μετάσχωσιν.
ἀνακλᾶται γὰρ ἀπὸ τῶν πραττόντων ἐπὶ τοὺς γράφοντας
καὶ ἀναλάμπει δόξης εἴδωλον ἀλλοτρίας, ἐμφαινομένης
διὰ τῶν λόγων τῆς πράξεως ὡς ἐν ἐσόπτρῳ.
| [1] - - - Plein de sens est le mot adressé par lui aux généraux,
ses successeurs, de qui, à l'avance, il avait préparé
les triomphes en chassant les Barbares et en affranchissant
la Grèce. Ce trait n'aura pas moins de portée, si on l'applique
aux écrivains qui se glorifient trop de leurs ouvrages. Supprimez,
pourra-t-on leur dire, les héros qui accomplissent
les grandes actions, et il n'y aura plus de gens pour les
écrire. Oui : supprimez les actes politiques de Périclès, la
victoire navale de Phormion près de Rhium, les exploits de
Nicias à Cythère, à Mégare et à Corinthe, ceux de Démosthène
à Pylos, les quatre cents prisonniers de Cléon, l'expédition
maritime de Tolmidas le long du Péloponèse, les
Béotiens battus par Myronidès à la journée d'Énophyte;
d'un trait vous effacez Thucydide. Supprimez l'entreprise
téméraire d'Alcibiade en Hellespont, celle de Thrasylle à
Lesbos, le renversement de l'oligarchie consommé par Théramène;
supprimez Thrasybule, Archippus, avec les soixante-dix
citoyens partis de Phylé qui se révoltent contre la domination
des Spartiates, ainsi que Conon faisant de nouveau
marcher Athènes sur la mer, et voilà que Cratippe n'existe
plus. Quant à Xenophon, il a été lui-même sa propre histoire :
car il a écrit ses expéditions et ses succès, qu'il nous
apprend, du reste, avoir été réunis sous forme d'annales par
le Syracusain Thémistogène. Seulement, pour inspirer plus
de confiance en racontant ses faits d'armes comme s'il y était
étranger, Xénophon semble faire honneur de son histoire à un autre.
Mais lui excepté, tous les historiens, les Clinodèmes,
les Diyles, les Philochore, les Phylarque, sont en
quelque sorte des acteurs représentant les faits des autres,
comme si c'étaient des pièces de théâtre. Ils disposent des
exploits des chefs d'armée et des souverains; ils se substituent
aux souvenirs de ceux-ci, pour partager jusqu'à un certain
point leur éclat et leur illustration. De la personne des héros,
en effet, rejaillit et se reflète sur l'historien un rayon de gloire
étrangère, en même temps que ses écrits sont comme un
miroir dans lequel on voit l'image de leurs actes.
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