[5,8,11] Εἰ δέ τις ἡμῶν ἀδυνατῶν ἑαυτὸν ὁρᾶν, ὑπ᾽ ἐκείνου τοῦ θεοῦ ἐπὰν καταληφθεὶς εἰς τὸ ἰδεῖν προφέρῃ τὸ θέαμα, ἑαυτὸν προφέρει καὶ εἰκόνα αὐτοῦ καλλωπισθεῖσαν βλέπει, ἀφεὶς δὲ τὴν εἰκόνα καίπερ καλὴν οὖσαν εἰς ἓν αὑτῷ ἐλθὼν καὶ μηκέτι σχίσας ἓν ὁμοῦ πάντα ἐστὶ μετ᾽ ἐκείνου τοῦ θεοῦ ἀψοφητὶ παρόντος, καὶ ἔστι μετ᾽ αὐτοῦ ὅσον δύναται καὶ θέλει, εἰ δ᾽ ἐπιστραφείη εἰς δύο, καθαρὸς μένων ἐφεξῆς ἐστιν αὐτῷ, ὥστε αὐτῷ παρεῖναι ἐκείνως πάλιν, εἰ πάλιν ἐπ᾽ αὐτὸν στρέφοι, ἐν δὲ τῇ ἐπιστροφῇ κέρδος τοῦτ᾽ ἔχει· ἀρχόμενος αἰσθάνεται αὑτοῦ, ἕως ἕτερός ἐστι· δραμὼν δὲ εἰς τὸ εἴσω ἔχει πᾶν, καὶ ἀφεὶς τὴν αἴσθησιν εἰς τοὐπίσω τοῦ ἕτερος εἶναι φόβῳ εἷς ἐστιν ἐκεῖ· κἂν ἐπιθυμήσῃ ὡς ἕτερον ὂν ἰδεῖν, ἔξω αὑτὸν ποιεῖ. Δεῖ δὲ καταμανθάνοντα μὲν ἔν τινι τύπῳ αὐτοῦ μένοντα μετὰ τοῦ ζητεῖν γνωματεύειν αὐτόν, εἰς οἷον δὲ εἴσεισιν, οὕτω μαθόντα κατὰ πίστιν, ὡς ἐπὶ χρῆμα μακαριστὸν εἴσεισιν, ἤδη αὐτὸν δοῦναι εἰς τὸ εἴσω καὶ γενέσθαι ἀντὶ ὁρῶντος ἤδη θέαμα ἑτέρου θεωμένου, οἵοις ἐκεῖθεν ἥκει ἐκλάμποντα τοῖς νοήμασι.
Πῶς οὖν ἔσται τις ἐν καλῷ μὴ ὁρῶν αὐτό; Ἢ ὁρῶν αὐτὸ ὡς ἕτερον οὐδέπω ἐν καλῷ, γενόμενος δὲ αὐτὸ οὕτω μάλιστα ἐν καλῷ. Εἰ οὖν ὅρασις τοῦ ἔξω, ὅρασιν μὲν οὐ δεῖ εἶναι ἢ οὕτως, ὡς ταὐτὸν τῷ ὁρατῷ· τοῦτο δὲ οἷον σύνεσις καὶ συναίσθησις αὐτοῦ εὐλαβουμένου μὴ τῷ μᾶλλον αἰσθάνεσθαι θέλειν ἑαυτοῦ ἀποστῆναι. Δεῖ δὲ κἀκεῖνο ἐνθυμεῖσθαι, ὡς τῶν μὲν κακῶν αἱ αἰσθήσεις τὰς πληγὰς ἔχουσι μείζους, ἥττους δὲ τὰς γνώσεις τῇ πληγῇ ἐκκρουομένας· νόσος γὰρ μᾶλλον ἔκπληξιν, ὑγίεια δὲ ἠρέμα συνοῦσα μᾶλλον ἂν σύνεσιν δοίη αὑτῆς· προσίζει γὰρ ἅτε οἰκεῖον καὶ ἑνοῦται· ἣ δ᾽ ἔστιν ἀλλότριον καὶ οὐκ οἰκεῖον, καὶ ταύτῃ διάδηλος τῷ σφόδρα ἕτερον ἡμῶν εἶναι δοκεῖν. Τὰ δὲ ἡμῶν καὶ ἡμεῖς ἀναίσθητοι· οὕτω δ᾽ ὄντες μάλιστα πάντων ἐσμὲν αὑτοῖς συνετοὶ τὴν ἐπιστήμην ἡμῶν καὶ ἡμᾶς ἓν πεποιηκότες. Κἀκεῖ τοίνυν, ὅτε μάλιστα ἴσμεν κατὰ νοῦν, ἀγνοεῖν δοκοῦμεν, τῆς αἰσθήσεως ἀναμένοντες τὸ πάθος, ἥ φησι μὴ ἑωρακέναι· οὐ γὰρ εἶδεν οὐδ᾽ ἂν τὰ τοιαῦτά ποτε ἴδοι. Τὸ οὖν ἀπιστοῦν ἡ αἴσθησίς ἐστιν, ὁ δὲ ἄλλος ἐστὶν ὁ ἰδών· ἤ, εἰ ἀπιστοῖ κἀκεῖνος, οὐδ᾽ ἂν αὐτὸν πιστεύσειεν εἶναι· οὐδὲ γὰρ οὐδ᾽ αὐτὸς δύναται ἔξω θεὶς ἑαυτὸν ὡς αἰσθητὸν ὄντα ὀφθαλμοῖς τοῖς τοῦ σώματος βλέπειν.
| [5,8,11] Si quelqu'un de nous, n'ayant point conscience de lui-même quand il est ravi par la divinité, contemple le spectacle qu'il possède en lui, il se contemple lui-même et voit son image embellie. S'il laisse de côté cette image, quoiqu'elle soit belle, et se concentre dans l'unité sans en rien diviser, il est a la fois un et tout avec ce Dieu qui lui accorde silencieusement sa présence, il lui est uni autant qu'il le peut et qu'il le désire. S'il revient à la dualité en restant pur, il reste aussi rapproché de Dieu que possible, et il jouit de sa présence dès qu'il se tourne vers lui.
Voici quel avantage lui procure cette conversion vers Dieu : il a d'abord le sentiment de lui-même tant qu'il reste distinct de Dieu; mais s'il pénètre dans son for intérieur, il possède toutes choses, et, renonçant à avoir conscience de lui-même pour ne pas être distinct de Dieu, il ne fait qu'un avec lui. Dès qu'il désire voir quelque chose pour ainsi dire hors de lui-même, c'est lui-même qu'il considère extérieurement. Il faut que l'âme qui étudie Dieu s'en forme une idée en cherchant à le connaître ; il faut ensuite que, sachant à quelle grande chose elle veut s'unir, et persuadée qu'elle trouvera la béatitude dans cette union, elle se plonge dans les profondeurs de la divinité jusqu'à ce que, au lieu de se contenter de contempler le monde intelligible, elle devienne elle-même un objet de contemplation et brille de la clarté des conceptions qui ont là haut leur source.
Comment donc peut-on être uni à la beauté sans la voir? Si on la voit comme une chose distincte de soi-même, on ne lui est pas encore uni. Si l'acte de la vision implique une relation avec un objet extérieur, il n'y a pas là de vision, ou du moins cette vision consiste dans l'identité de ce qui voit et de ce qui est vu. Cette vision est une espèce de conscience, de sentiment que l'on a de soi-même, en prenant garde de rompre son unité pour vouloir en avoir un sentiment trop vif. Il ne faut pas oublier d'ailleurs que les sensations des maux font des impressions plus fortes et donnent des connaissances plus faibles, parce que ces connaissances sont émoussées par la force des impressions. Ainsi, la maladie nous frappe vivement {mais ne nous laisse qu'une notion obscure} ; la santé, au contraire, grâce au calme qui la caractérise, nous donne une notion plus claire d'elle-même : car elle réside en nous tranquillement, parce qu'elle nous est propre, et elle ne fait qu'un avec nous; la maladie, au contraire, ne nous est point propre, mais étrangère; par conséquent, elle se manifeste vivement parce qu'elle est opposée à notre nature, tandis que nous n'avons alors qu'un sentiment faible de nous-mêmes et de ce qui nous appartient. L'état dans lequel nous nous saisissons le mieux, c'est celui dans lequel la connaissance que nous avons de nous-mêmes ne fait qu'un avec nous. Ainsi là-haut, au moment même où nous connaissons le mieux par l'intelligence, nous croyons ignorer, parce que nous consultons la sensation, qui nous affirme n'avoir rien vu; elle n'a rien vu, en effet, et elle ne saurait voir jamais rien de tel {que les intelligibles}. C'est donc la sensation qui doute ; mais celui qui a vu est tout autre que la sensation ; pour que celui-là doutât, il faudrait qu'il ne crût même plus à son existence : car il ne saurait se placer en quelque sorte hors de lui-même pour se considérer avec les yeux du corps.
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