[1,8,3] Εἰ δὴ ταῦτά ἐστι τὰ ὄντα καὶ τὸ ἐπέκεινα τῶν ὄντων, οὐκ ἂν ἐν τοῖς
οὖσι τὸ κακὸν ἐνείη, οὐδ´ ἐν τῷ ἐπέκεινα τῶν ὄντων· ἀγαθὰ γὰρ ταῦτα.
Λείπεται τοίνυν, εἴπερ ἔστιν, ἐν τοῖς μὴ οὖσιν εἶναι οἷον εἶδός τι τοῦ μὴ
ὄντος ὂν καὶ περί τι τῶν μεμιγμένων τῷ μὴ ὄντι ἢ ὁπωσοῦν κοινωνούντων τῷ
μὴ ὄντι. Μὴ ὂν δὲ οὔτι τὸ παντελῶς μὴ ὄν, ἀλλ´ ἕτερον μόνον τοῦ ὄντος· οὐχ
οὕτω δὲ μὴ ὂν ὡς κίνησις καὶ στάσις ἡ περὶ τὸ ὄν, ἀλλ´ ὡς εἰκὼν τοῦ ὄντος
ἢ καὶ ἔτι μᾶλλον μὴ ὄν. Τοῦτο δ´ ἐστὶ τὸ αἰσθητὸν πᾶν καὶ ὅσα περὶ τὸ
αἰσθητὸν πάθη ἢ ὕστερόν τι τούτων καὶ ὡς συμβεβηκὸς τούτοις ἢ ἀρχὴ τούτων
ἢ ἕν τι τῶν συμπληρούντων τοῦτο τοιοῦτον ὄν. Ἤδη γὰρ ἄν τις εἰς ἔννοιαν
ἥκοι αὐτοῦ οἷον ἀμετρίαν εἶναι πρὸς μέτρον καὶ ἄπειρον πρὸς πέρας καὶ
ἀνείδεον πρὸς εἰδοποιητικὸν καὶ ἀεὶ ἐνδεὲς πρὸς αὔταρκες, ἀεὶ ἀόριστον,
οὐδαμῇ ἑστώς, παμπαθές, ἀκόρητον, πενία παντελής· καὶ οὐ συμβεβηκότα ταῦτα
αὐτῷ, ἀλλ´ οἷον οὐσία αὐτοῦ ταῦτα, καὶ ὅ τι ἂν αὐτοῦ μέρος ἴδῃς, καὶ αὐτὸ
πάντα ταῦτα· τὰ δ´ ἄλλα, ὅσα ἂν αὐτοῦ μεταλάβῃ καὶ ὁμοιωθῇ, κακὰ μὲν
γίνεσθαι, οὐχ ὅπερ δὲ κακὰ εἶναι. Τίνι οὖν ὑποστάσει ταῦτα πάρεστιν οὐχ
ἕτερα ὄντα ἐκείνης, ἀλλ´ ἐκείνη; Καὶ γὰρ εἰ ἑτέρῳ συμβαίνει τὸ κακόν, δεῖ
τι πρότερον αὐτὸ εἶναι, κἂν μὴ οὐσία τις ᾖ. Ὡς γὰρ ἀγαθὸν τὸ μὲν αὐτό, τὸ
δὲ ὃ συμβέβηκεν, οὕτω καὶ κακὸν τὸ μὲν αὐτό, τὸ δὲ ἤδη κατ´ ἐκεῖνο
συμβεβηκὸς ἑτέρῳ. Τίς οὖν ἀμετρία, εἰ μὴ ἐν τῷ ἀμέτρῳ; {Τί δὲ «μέτρον μὴ
ἐν τῷ μεμετρημένῳ»;} Ἀλλ´ ὥσπερ ἐστὶ μέτρον μὴ ἐν τῷ μεμετρημένῳ, οὕτω καὶ
ἀμετρία οὐκ ἐν ἀμέτρῳ. Εἰ γὰρ ἐν ἄλλῳ, ἢ ἐν ἀμέτρῳ - ἀλλ´ οὐ δεῖ αὐτῷ
ἀμετρίας αὐτῷ ἀμέτρῳ ὄντι -ἢ ἐν μεμετρημένῳ· ἀλλ´ οὐχ οἷόν τε τὸ
μεμετρημένον ἀμετρίαν ἔχειν καθ´ ὃ μεμέτρηται. Καὶ οὖν εἶναί τι καὶ
ἄπειρον καθ´ αὑτὸ καὶ ἀνείδεον αὖ αὐτὸ καὶ τὰ ἄλλα τὰ πρόσθεν, ἃ τὴν τοῦ
κακοῦ ἐχαρακτήριζε φύσιν, καὶ εἴ τι μετ´ ἐκεῖνο τοιοῦτον, ἢ μεμιγμένον
ἔχει τοῦτο ἢ βλέπον πρὸς αὐτό ἐστι τοιοῦτον ἢ ποιητικόν ἐστι τοιούτου. Τὴν
δ´ ὑποκειμένην σχήμασι καὶ εἴδεσι καὶ μορφαῖς καὶ μέτροις καὶ πέρασι καὶ
ἀλλοτρίῳ κόσμῳ κοσμουμένην, μηδὲν παρ´ αὐτῆς ἀγαθὸν ἔχουσαν, εἴδωλον δὲ ὡς
πρὸς τὰ ὄντα, κακοῦ δὴ οὐσίαν, εἴ τις καὶ δύναται κακοῦ οὐσία εἶναι,
ταύτην ἀνευρίσκει ὁ λόγος κακὸν εἶναι πρῶτον καὶ καθ´ αὑτὸ κακόν.
| [1,8,3] Si ce sont là les êtres véritables, et si le Premier principe leur est
supérieur, le Mal ne saurait exister dans de tels êtres, et bien moins
encore dans Celui qui leur est supérieur: car toutes ces choses sont
bonnes. Reste que le Mal se trouve dans le non-être, qu'il en soit en
quelque sorte la forme, qu'il se rapporte aux choses qui s'y mêlent ou qui
ont quelque communauté avec lui. Ce non-être n'est pas le non-être absolu ;
seulement il diffère de l'être, non pas comme en diffèrent le
mouvement et le repos, qui se rapportent à l'être, mais comme l'image
ou quelque chose de plus éloigné encore de la réalité. Dans ce non-être
sont compris tous les objets sensibles, toutes leurs modifications
passives; ou bien, il est quelque chose d'inférieur encore, comme leur
accident, ou leur principe; ou l'une des choses qui concourent à le
constituer. Pour mieux déterminer le Mal, on peut se le représenter comme
le manque de mesure par rapport à la mesure, comme l'indétermination par
rapport au terme, comme le manque de forme par rapport au principe
créateur de la forme, comme le défaut par rapport à ce qui se suffit à
soi-même, comme l'illimitation et la mutabilité perpétuelle, enfin comme
la passivité, l'insatiabilité et l'indigence absolues. Ce ne sont pas
là de simples accidents du Mal, c'est pour ainsi dire son essence même :
quelque portion du Mal qu'on examine, on y découvre tout cela. Les autres
objets, lorsqu'ils participent du Mal et lui ressemblent, deviennent
mauvais sans être cependant le Mal absolu.
Toutes ces choses appartiennent à une substance : elles n'en diffèrent pas ;
elles sont identiques avec elle et la constituent. Car si le mal se
trouve comme accident dans un objet, il faut d'abord que le Mal soit
quelque chose par lui-même, tout en n'étant pas une véritable essence. De
même que, pour le bien, il y a le Bien en soi et le bien envisagé comme
attribut d'un sujet étranger, de même, pour le mal, on distingue le Mal en
soi et le mal comme accident.
Mais (dira-t-on), ou ne peut concevoir l'indétermination (g-ametria) hors de
l'indéterminé, pas plus que la détermination, la mesure (g-metron), hors du
déterminé, du mesuré. (Nous répondrons) : De même que la détermination ne
réside pas dans le déterminé (que la mesure ne réside pas dans le mesuré),
l'indétermination n'existe pas non plus dans l'indéterminé. Si elle peut
être dans une chose autre qu'elle-même, ce sera ou dans l'indéterminé :
mais par cela même qu'il est naturellement indéterminé, celui-ci n'a pas
besoin de l'indétermination pour devenir tel; ou bien dans le déterminé :
mais, par cela même qu'il est déterminé, le déterminé ne peut admettre
l'indétermination. Il doit donc exister quelque chose qui soit l'infini en
soi (g-apeiron g-kath g-auto), l'informe en soi (g-aneideon), et qui réunisse
tous les caractères que nous avons indiqués plus haut comme constituant la
nature du Mal. Quant aux choses mauvaises, elles sont telles soit
parce que le mal s'y trouve mêlé, soit parce qu'elles contemplent le mal,
soit enfin parce qu'elles l'accomplissent.
Ce qui est le sujet de la figure, de la forme, de la détermination, de la
limitation, ce qui doit à autrui ses ornements, mais qui n'a rien de bon
par soi-même, ce qui n'est par rapport aux êtres véritables qu'une vaine
image, en un mot l'essence du Mal, s'il peut y avoir une telle essence,
voilà ce que la raison nous oblige à reconnaître pour le Premier mal, le
Mal en soi.
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