[1,2,1] Ἐπειδὴ « τὰ κακὰ » ἐνταῦθα καὶ « τόνδε τὸν τόπον περιπολεῖ ἐξ ἀνάγκης »,
βούλεται δὲ ἡ ψυχὴ φυγεῖν τὰ κακά, « φευκτέον ἐντεῦθεν ». Τίς οὖν ἡ φυγή; «
θεῷ », φησιν, « ὁμοιωθῆναι ». Τοῦτο δέ, εἰ « δίκαιοι καὶ ὅσιοι μετὰ φρονήσεως
γενοίμεθα » καὶ ὅλως ἐν ἀρετῇ.
Εἰ οὖν ἀρετῇ ὁμοιούμεθα, ἆρα ἀρετὴν ἔχοντι; Καὶ δὴ καὶ τίνι θεῷ; Ἆρ´ οὖν τῷ
μᾶλλον δοκοῦντι ταῦτα ἔχειν καὶ δὴ τῇ τοῦ κόσμου ψυχῇ καὶ τῷ ἐν ταύτῃ
ἡγουμένῳ ᾧ φρόνησις θαυμαστὴ ὑπάρχει; Καὶ γὰρ εὔλογον ἐνταῦθα ὄντας
τούτῳ ὁμοιοῦσθαι. Ἢ πρῶτον μὲν ἀμφισβητήσιμον, εἰ καὶ τούτῳ ὑπάρχουσι
πᾶσαι· οἷον σώφρονι ἀνδρείῳ εἶναι, ᾧ μήτε τι δεινόν ἐστιν· οὐδὲν γὰρ ἔξωθεν·
μήτε προσιὸν ἡδὺ οὗ καὶ ἐπιθυμία ἂν γένοιτο μὴ παρόντος, ἵν´ ἔχῃ ἢ ἕλῃ. Εἰ δὲ
καὶ αὐτὸς ἐν ὀρέξει ἐστὶ τῶν νοητῶν ὧν καὶ αἱ ἡμέτεραι, δῆλον ὅτι καὶ ἡμῖν
ἐκεῖθεν ὁ κόσμος καὶ αἱ ἀρεταί.
Ἆρ´ οὖν ἐκεῖνο ταύτας ἔχει;
Ἢ οὐκ εὔλογον τάς γε πολιτικὰς λεγομένας ἀρετὰς ἔχειν, φρόνησιν μὲν περὶ τὸ
λογιζόμενον, ἀνδρίαν δὲ περὶ τὸ θυμούμενον, σωφροσύνην δὲ ἐν ὁμολογίᾳ τινὶ
καὶ συμφωνίᾳ ἐπιθυμητικοῦ πρὸς λογισμόν, δικαιοσύνην δὲ τὴν ἑκάστου τούτων
ὁμοῦ « οἰκειοπραγίαν ἀρχῆς πέρι καὶ τοῦ ἄρχεσθαι ». Ἆρ´ οὖν οὐ κατὰ τὰς
πολιτικὰς ὁμοιούμεθα, ἀλλὰ κατὰ τὰς μείζους τῷ αὐτῷ ὀνόματι χρωμένας; Ἀλλ´
εἰ κατ´ ἄλλας, κατὰ τὰς πολιτικὰς ὅλως οὔ; Ἢ ἄλογον μηδ´ ὁπωσοῦν ὁμοιοῦσθαι
κατὰ ταύτας - τούτους γοῦν καὶ θείους ἡ φήμη λέγει καὶ λεκτέον ἀμῃγέπῃ
ὡμοιῶσθαι - κατὰ δὲ τὰς μείζους τὴν ὁμοίωσιν εἶναι.
Ἀλλ´ ἑκατέρως γε συμβαίνει ἀρετὰς ἔχειν κἂν εἰ μὴ τοιαύτας. Εἰ οὖν τις
συγχωρεῖ, {κἂν εἰ μὴ τοιαύτας} ὁμοιοῦσθαι δύνασθαι, ἄλλως ἡμῶν ἐχόντων πρὸς
ἄλλας, οὐδὲν κωλύει, καὶ μὴ πρὸς ἀρετὰς ὁμοιουμένων, ἡμᾶς ταῖς αὑτῶν ἀρεταῖς
ὁμοιοῦσθαι τῷ μὴ ἀρετὴν κεκτημένῳ. Καὶ πῶς; Ὧδε· εἴ τι θερμότητος παρουσίᾳ
θερμαίνεται, ἀνάγκη καὶ ὅθεν ἡ θερμότης ἐλήλυθε θερμαίνεσθαι; Καὶ εἴ τι πυρὸς
παρουσίᾳ θερμόν ἐστιν, ἀνάγκη καὶ τὸ πῦρ αὐτὸ πυρὸς παρουσίᾳ θερμαίνεσθαι;
Ἀλλὰ πρὸς μὲν τὸ πρότερον εἴποι ἄν τις καὶ ἐν τῷ πῦρ εἶναι θερμότητα, ἀλλὰ
σύμφυτον, ὥστε τὸν λόγον ποιεῖν τῇ ἀναλογίᾳ ἑπόμενον ἐπακτὸν μὲν τῇ ψυχῇ
τὴν ἀρετὴν, ἐκείνῳ δέ, ὅθεν μιμησαμένη ἔχει, σύμφυτον· πρὸς δὲ τὸν ἐκ τοῦ
πυρὸς λόγον τὸ ἐκεῖνον ἀρετὴν εἶναι· ἀρετῆς δὲ ἀξιοῦμεν εἶναι μείζονα. Ἀλλ´ εἰ
μὲν οὗ μεταλαμβάνει ψυχὴ τὸ αὐτὸ ἦν τῷ ἀφ´ οὗ, οὕτως ἔδει λέγειν· νῦν δὲ
ἕτερον μὲν ἐκεῖνο, ἕτερον δὲ τοῦτο. Οὐδὲ γὰρ οἰκία ἡ αἰσθητὴ τὸ αὐτὸ τῇ νοητῇ,
καίτοι ὡμοίωται· καὶ τάξεως δὲ καὶ κόσμου μεταλαμβάνει ἡ οἰκία ἡ αἰσθητὴ
κἀκεῖ ἐν τῷ λόγῳ οὐκ ἔστι τάξις οὐδὲ κόσμος οὐδὲ συμμετρία. Οὕτως οὖν κόσμου
καὶ τάξεως καὶ ὁμολογίας μεταλαμβάνοντες ἐκεῖθεν καὶ τούτων ὄντων τῆς
ἀρετῆς ἐνθάδε, οὐ δεομένων δὲ τῶν ἐκεῖ ὁμολογίας οὐδὲ κόσμου οὐδὲ τάξεως,
οὐδ´ ἂν ἀρετῆς εἴη χρεία, καὶ ὁμοιούμεθα οὐδὲν ἧττον τοῖς ἐκεῖ δι´ ἀρετῆς
παρουσίαν. Πρὸς μὲν οὖν τὸ μὴ ἀναγκαῖον κἀκεῖ ἀρετὴν εἶναι, ἐπείπερ ἡμεῖς
ἀρετῇ ὁμοιούμεθα, ταυτί· δεῖ δὲ πειθὼ ἐπάγειν τῷ λόγῳ μὴ μένοντας ἐπὶ τῆς βίας.
| [1,2,1] Puisque le mal règne ici-bas et domine inévitablement en ce monde, et
puisque l'âme veut fuir le mal, il faut fuir d'ici-bas. Mais quel en est
le moyen? C'est, dit Platon, de nous rendre semblables à Dieu. Or nous y
réussirons en nous formant à la justice, à la sainteté, à la sagesse, et
en général à la vertu.
Si c'est par la vertu qu'a lieu cette assimilation, le Dieu à qui nous
voulons nous rendre semblables possède–t–il lui–même la vertu? Mais quel
est ce Dieu? Sans doute c'est celui qui semble devoir posséder la vertu au
plus haut degré, c'est l'Âme du monde, avec le principe qui gouverne en
elle et qui a une sagesse admirable {l'Intelligence suprême}. Habitant ce
monde, c'est à ce Dieu que nous devons chercher à ressembler. Et
cependant, on peut douter à la première vue que toutes les vertus puissent
convenir à ce Dieu, qu'on puisse par exemple lui attribuer la modération
dans les désirs ou le courage : le courage, puisqu'il n'a aucun danger à
craindre, étant à l'abri de toute atteinte; la modération, puisqu'il ne
peut exister aucun objet agréable dont la présence excite ses désirs, dont
l'absence excite ses regrets. Mais si Dieu aspire comme nous-mêmes aux
choses intelligibles, c'est évidemment de là que nous recevons l'ordre et les vertus.
Dieu possède-t-il donc ces vertus?
Il n'est pas convenable de lui attribuer les vertus qu'on nomme civiles
(g-politikai) : la prudence, qui se rapporte à la partie raisonnable de
notre être, le courage, qui se rapporte à la partie irascible, la
tempérance, qui consiste dans l'accord et l'harmonie de la partie
concupiscible et de la raison, la justice enfin, qui consiste dans
l'accomplissement par toutes ces facultés de la fonction propre à chacune
d'elles, soit pour commander, soit pour obéir. Mais si ce n'est pas
par les vertus civiles que nous pouvons nous rendre semblables à Dieu,
n'est-ce pas par des vertus qui sont d'un ordre supérieur et qui portent
le même nom? Dans ce cas, les vertus civiles sont-elles complètement
inutiles pour atteindre notre but? Non : on ne peut pas dire qu'en les
pratiquant on ne ressemble en aucune manière à Dieu: car la renommée
proclame divins ceux qui les possèdent. Elles nous donnent donc quelque
ressemblance avec Dieu, mais c'est par les vertus d'un ordre supérieur que
nous lui devenons complètement semblables.
Il semble que de l'une ou de l'autre façon on est conduit à attribuer à
Dieu des vertus, quoique ce ne soient pas des vertus civiles. Si l'on
accorde que, bien que Dieu ne possède pas les vertus civiles, nous pouvons
lui devenir semblables par d'autres vertus (car il peut en être autrement
pour des vertus d'un autre ordre), rien n'empêche que, sans nous assimiler
à Dieu par les vertus civiles, nous devenions, par des vertus qui
cependant sont nôtres, semblables à l'être qui ne possède pas la vertu.
Comment cela peut-il avoir lieu? Le voici : quand un corps est échauffé
par la présence de la chaleur, est-il nécessaire que le corps d'où
provient la chaleur soit échauffé lui-même par un autre? Si un corps est
chaud par l'effet de la présence du feu, faut-il que le feu soit lui-même
échauffé par la présence d'un autre feu? On dira peut-être d'abord : il y
a de la chaleur dans le feu mais une chaleur innée; d'où l'on doit
conclure par voie d'analogie que la vertu, qui n'est qu'adventice dans
l'âme, est innée dans Celui de qui l'âme la tient par imitation {dans
Dieu}. A l'argument tiré du feu, on répondra peut-être encore que Dieu
possède la vertu, mais une vertu d'une nature supérieure. Cette
réponse serait juste, si la vertu à laquelle l'âme participe était
identique au principe dont elle la tient ; mais il y a tout au contraire
opposition complète : quand nous voyons une maison, la maison sensible
n'est pas identique à la maison intelligible, quoiqu'elle lui soit
semblable. En effet la maison sensible participe à l'ordre et à la
proportion, tandis que l'on ne saurait attribuer à l'idée de cette maison
ni ordre, ni proportion, ni symétrie. De même nous tenons de Dieu l'ordre,
la proportion, l'harmonie, conditions de la vertu ici-bas, sans que
l'Intelligence suprême ait besoin de posséder elle-même ni ordre, ni
proportion, ni harmonie. Il n'est donc pas nécessaire qu'elle possède la
vertu, quoique ce soit par la vertu que nous lui devenons semblables.
Voilà ce que nous avions à dire afin de montrer qu'il n'est pas nécessaire
que l'Intelligence divine possède la vertu pour que nous lui devenions
semblables par la vertu. Mais il faut persuader cette vérité, sans se
contenter de contraindre l'esprit à l'admettre.
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