[1,1,3] III. Ἀλλὰ γὰρ ἐν σώματι θετέον ψυχήν, οὖσαν εἴτε πρὸ τούτου,
εἴτ´ ἐν τούτῳ, ἐξ οὗ καὶ αὐτῆς <ζῷον τὸ σύμπαν ἐκλήθη>. Χρωμένη μὲν οὖν σώματι οἷα
ὀργάνῳ οὐκ ἀναγκάζεται δέξασθαι τὰ διὰ τοῦ σώματος παθήματα, ὥσπερ οὐδὲ τὰ τῶν
ὀργάνων παθήματα οἱ τεχνῖται· αἴσθησιν δὲ τάχ´ ἂν ἀναγκαίως, εἴπερ δεῖ χρῆσθαι τῷ
ὀργάνῳ γινωσκούσῃ τὰ ἔξωθεν παθήματα ἐξ αἰσθήσεως· ἐπεὶ καὶ τὸ χρῆσθαι ὄμμασίν ἐστιν
ὁρᾶν. Ἀλλὰ καὶ βλάβαι περὶ τὸ ὁρᾶν, ὥστε καὶ λῦπαι καὶ τὸ ἀλγεῖν καὶ ὅλως ὅ τι περ
ἂν περὶ τὸ σῶμα πᾶν γίγνηται· ὥστε καὶ ἐπιθυμίαι ζητούσης τὴν θεραπείαν τοῦ
ὀργάνου. Ἀλλὰ πῶς ἀπὸ τοῦ σώματος εἰς αὐτὴν ἥξει τὰ πάθη; Σῶμα μὲν γὰρ σώματι
ἄλλῳ μεταδώσει τῶν ἑαυτοῦ, σῶμα δὲ ψυχῇ πῶς; Τοῦτο γάρ ἐστιν οἷον ἄλλου παθόντος
ἄλλο παθεῖν. Μέχρι γὰρ τοῦ τὸ μὲν εἶναι τὸ χρώμενον, τὸ δὲ ᾧ χρῆται, χωρίς ἐστιν
ἑκάτερον· χωρίζει γοῦν ὁ τὸ χρώμενον τὴν ψυχὴν διδούς. Ἀλλὰ πρὸ τοῦ χωρίσαι διὰ
φιλοσοφίας αὐτὸ πῶς εἶχεν; Ἢ ἐμέμικτο. Ἀλλὰ εἰ ἐμέμικτο, ἢ κρᾶσίς τις ἦν, ἢ ὡς
<διαπλακεῖσα>, ἢ ὡς εἶδος οὐ κεχωρισμένον, ἢ εἶδος ἐφαπτόμενον, ὥσπερ ὁ
κυβερνήτης, ἢ τὸ μὲν οὕτως αὐτοῦ, τὸ δὲ ἐκείνως· λέγω δὲ ἢ τὸ μὲν κεχωρισμένον,
ὅπερ τὸ χρώμενον, τὸ δὲ μεμιγμένον ὁπωσοῦν καὶ αὐτὸ ὂν ἐν τάξει τοῦ ᾧ χρῆται, ἵνα
τοῦτο ἡ φιλοσοφία καὶ αὐτὸ ἐπιστρέφῃ πρὸς τὸ χρώμενον καὶ τὸ χρώμενον ἀπάγῃ, ὅσον
μὴ πᾶσα ἀνάγκη, ἀπὸ τοῦ ᾧ χρῆται, ὡς μὴ ἀεὶ μηδὲ χρῆσθαι.
| [1,1,3] III. Supposons l'âme, comme le veut sa nature, placée dans le corps, soit au-dessus
de lui, soit en lui, et formant avec lui ce tout qu'on nomme l'animal. Dans ce cas, l'âme,
en se servant du corps comme d'un instrument, n'est pas forcée de participer à ses
passions, pas plus que les artisans ne participent à ce qu'éprouvent leurs
instruments. Quant aux sensations, il est nécessaire qu'elle les perçoive,
puisque, pour se servir de son instrument, il faut qu'elle connaisse, au moyen
de la sensation, les modifications que cet instrument peut recevoir du dehors.
C'est ainsi que l'âme se sert des yeux pour voir et qu'elle ressent en même
temps les maux qui peuvent affecter la vue. Il en est de même pour les autres
douleurs, pour toutes les souffrances, et en général pour tout ce qui peut
arriver au corps ; il en est de même enfin des appétits, qui naissent du besoin
que l'âme a de recourir au ministère du corps. Comment alors les passions
pourront-elles passer du corps dans l'âme? Le corps peut bien communiquer à un
autre corps ses propriétés ; mais comment les communiquera-t-il à l'âme? C'est
comme si on supposait qu'un individu souffre quand un individu tout différent
est affecté. En effet, tant que l'on considère l'âme comme le principe qui se
sert du corps et le corps comme l'instrument de l'âme, il y a entre eux
séparation, cette séparation qui s'opère en donnant à l'âme le pouvoir de
se servir du corps comme d'un instrument {c'est-à-dire de lui commander : ce que
fait la philosophie}. Mais avant que l'âme fit ainsi séparée du corps par
la philosophie, dans quel état se trouvait-elle? Était-elle mêlée au corps? Si
elle y était mêlée, ou elle formait avec lui une espèce de mixtion, ou elle
était répandue dans tout le corps, ou elle était une forme inséparable du corps,
ou elle était une forme gouvernant le corps comme le pilote gouverne son
navire, ou enfin elle était en partie attachée au corps, en partie séparée.
J'appelle partie séparée du corps celle qui se sert du corps comme d'un
instrument, partie attachée au corps celle qui s'abaisse au rang d'instrument.
Or la philosophie élève cette deuxième partie au rang de la première; quant à la
première partie, elle la détourne, autant que nos besoins le permettent, du
corps dont elle se sert, en sorte qu'elle ne s'en serve pas toujours.
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