Texte grec :
[6,492] (492a) ῝Ην τοίνυν ἔθεμεν τοῦ φιλοσόφου φύσιν, ἂν μὲν οἶμαι
μαθήσεως προσηκούσης τύχῃ, εἰς πᾶσαν ἀρετὴν ἀνάγκη αὐξανομένην
ἀφικνεῖσθαι, ἐὰν δὲ μὴ ἐν προσηκούσῃ σπαρεῖσά τε καὶ φυτευθεῖσα
τρέφηται, εἰς πάντα τἀναντία αὖ, ἐὰν μή τις αὐτῇ βοηθήσας θεῶν τύχῃ. ἢ
καὶ σὺ ἡγῇ, ὥσπερ οἱ πολλοί, διαφθειρομένους τινὰς εἶναι ὑπὸ σοφιστῶν
νέους, διαφθείροντας δέ τινας σοφιστὰς ἰδιωτικούς, ὅτι καὶ ἄξιον λόγου,
ἀλλ’ οὐκ αὐτοὺς τοὺς ταῦτα λέγοντας μεγίστους (492b) μὲν εἶναι σοφιστάς,
παιδεύειν δὲ τελεώτατα καὶ ἀπεργάζεσθαι οἵους βούλονται εἶναι καὶ
νέους καὶ πρεσβυτέρους καὶ ἄνδρας καὶ γυναῖκας;
Πότε δή; ἦ δ’ ὅς.
῞Οταν, εἶπον, συγκαθεζόμενοι ἁθρόοι πολλοὶ εἰς ἐκκλησίας ἢ εἰς
δικαστήρια ἢ θέατρα ἢ στρατόπεκα ἤ τινα ἄλλον κοινὸν πλήθους
σύλλογον σὺν πολλῷ θορύβῳ τὰ μὲν ψέγωσι τῶν λεγομένων ἢ
πραττομένων, τὰ δὲ ἐπαινῶσιν, ὑπερβαλλόντως ἑκάτερα, καὶ ἐκβοῶντες
καὶ κροτοῦντες, πρὸς δ’ (492c) αὐτοῖς αἵ τε πέτραι καὶ ὁ τόπος ἐν ᾧ ἂν ὦσιν
ἐπηχοῦντες διπλάσιον θόρυβον παρέχωσι τοῦ ψόγου καὶ ἐπαίνου. ἐν δὴ
τῷ τοιούτῳ τὸν νέον, τὸ λεγόμενον, τίνα οἴει καρδίαν ἴσχειν; ἢ ποίαν (ἂν)
αὐτῷ παιδείαν ἰδιωτικὴν ἀνθέξειν, ἣν οὐ κατακλυσθεῖσαν ὑπὸ τοῦ
τοιούτου ψόγου ἢ ἐπαίνου οἰχήσεσθαι φερομένην κατὰ ῥοῦν ᾗ ἂν οὗτος
φέρῃ, καὶ φήσειν τε τὰ αὐτὰ τούτοις καλὰ καὶ αἰσχρὰ εἶναι, καὶ
ἐπιτηδεύσειν ἅπερ ἂν οὗτοι, καὶ ἔσεσθαι τοιοῦτον;
(492d) Πολλή, ἦ δ’ ὅς, ὦ Σώκρατες, ἀνάγκη.
Καὶ μήν, ἦν δ’ ἐγώ, οὔπω τὴν μεγίστην ἀνάγκην εἰρήκαμεν.
Ποίαν; ἔφη.
῝Ην ἔργῳ προστιθέασι λόγῳ μὴ πείθοντες οὗτοι οἱ παιδευταί τε καὶ
σοφισταί. ἢ οὐκ οἶσθα ὅτι τὸν μὴ πειθόμενον ἀτιμίαις τε καὶ χρήμασι καὶ
θανάτοις κολάζουσι;
Καὶ μάλα, ἔφη, σφόδρα.
Τίνα οὖν ἄλλον σοφιστὴν οἴει ἢ ποίους ἰδιωτικοὺς λόγους ἐναντία
τούτοις τείνοντας κρατήσειν;
(492e) Οἶμαι μὲν οὐδένα, ἦ δ’ ὅς.
Οὐ γάρ, ἦν δ’ ἐγώ, ἀλλὰ καὶ τὸ ἐπιχειρεῖν πολλὴ ἄνοια. οὔτε γὰρ
γίγνεται οὔτε γέγονεν οὐδὲ οὖν μὴ γένηται ἀλλοῖον ἦθος πρὸς ἀρετὴν
παρὰ τὴν τούτων παιδείαν πεπαιδευμένον, ἀνθρώπειον, ὦ ἑταῖρε—θεῖον μέντοι
κατὰ τὴν παροιμίαν ἐξαιρῶμεν λόγου·
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Traduction française :
[6,492] Si donc ce naturel que nous avons attribué au philosophe (492a) reçoit l'enseignement
qui lui convient, c'est une nécessité qu'en se développant il parvienne à toutes les
vertus; mais s'il a été semé, a grandi et a puisé sa nourriture dans un sol ne lui
convenant pas, c'est une nécessité qu'il produise tous les vices, à moins qu'un
dieu ne lui porte secours. Crois-tu aussi, comme la multitude, qu'il y ait quelques
jeunes gens corrompus par les sophistes et quelques sophistes, simples particuliers,
qui les corrompent, au point que le fait soit digne de mention? Ne penses-tu pas
plutôt que ceux qui le prétendent sont eux-mêmes les plus grands des sophistes, et
qu'ils savent (492b) parfaitement instruire et façonner à leur guise jeunes et vieux,
hommes et femmes?
Quand donc? demanda-t-il.
Lorsque, assis en rangs pressés dans les assemblées, les tribunaux, les théâtres, les
camps, et partout où il y a foule, ils blâment telles paroles ou telles actions, et
approuvent telles autres, dans les deux cas à grand tumulte et de façon exagérée,
criant et applaudissant tandis que les rochers et les lieux d'alentour font écho,
et redoublent (492c) le fracas du blâme et de l'éloge. Au milieu de pareilles scènes le
jeune homme ne sentira-t-il pas, comme on dit, le coeur lui manquer? Quelle
éducation particulière tiendra là-contre, ne sera pas submergée par tant de blâmes et
d'éloges et emportée au gré de leur courant? Le jeune homme ne se prononcera-t-il
pas comme la multitude au sujet du beau et du laid? Ne s'attachera-t-il (492d) pas aux
mêmes choses qu'elle? Ne lui deviendra-t-il pas semblable?
Il y a, Socrate, grande nécessité.
Et cependant nous n'avons pas encore parlé de la plus grande épreuve qu'il doit subir.
Laquelle?
Celle que ces éducateurs et ces sophistes-là infligent en fait quand ils ne peuvent
persuader par le discours. Ne sais-tu pas qu'ils punissent celui qui ne se laisse point
convaincre en le notant d'infamie, en le condamnant à l'amende ou à la peine de mort ?
Je le sais fort bien.
(422e) Or, quel autre sophiste, quel enseignement particulier opposé à celui-là, pourraient
prévaloir?
Il n'en est point, ce me semble.
Non, sans doute, repris-je; et même tenter pareille chose serait grande folie. Il n'y a
pas, il n'y a jamais eu, il n'y aura jamais de caractère formé à la vertu contre les
leçons que donne la multitude : j'entends de caractère humain, mon cher camarade,
car, comme dit le proverbe, nous devons faire exception pour le divin.
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