Texte grec :
[457] (457a) οἱ δὲ μεταστρέψαντες χρῶνται τῇ ἰσχύϊ καὶ τῇ τέχνῃ οὐκ ὀρθῶς. οὔκουν
οἱ διδάξαντες πονηροί, οὐδὲ ἡ τέχνη οὔτε αἰτία οὔτε πονηρὰ τούτου ἕνεκά ἐστιν,
ἀλλ' οἱ μὴ χρώμενοι οἶμαι ὀρθῶς. ὁ αὐτὸς δὴ λόγος καὶ περὶ τῆς ῥητορικῆς.
δυνατὸς μὲν γὰρ πρὸς ἅπαντάς ἐστιν ὁ ῥήτωρ καὶ περὶ παντὸς λέγειν, ὥστε
πιθανώτερος εἶναι ἐν τοῖς πλήθεσιν (457b) ἔμβραχυ περὶ ὅτου ἂν βούληται· ἀλλ'
οὐδέν τι μᾶλλον τούτου ἕνεκα δεῖ οὔτε τοὺς ἰατροὺς τὴν δόξαν ἀφαιρεῖσθαι — ὅτι
δύναιτο ἂν τοῦτο ποιῆσαι — οὔτε τοὺς ἄλλους δημιουργούς, ἀλλὰ δικαίως καὶ τῇ
ῥητορικῇ χρῆσθαι, ὥσπερ καὶ τῇ ἀγωνίᾳ. ἐὰν δὲ οἶμαι ῥητορικὸς γενόμενός τις
κᾆτα ταύτῃ τῇ δυνάμει καὶ τῇ τέχνῃ ἀδικῇ, οὐ τὸν διδάξαντα δεῖ μισεῖν τε καὶ
ἐκβάλλειν ἐκ τῶν πόλεων. ἐκεῖνος μὲν γὰρ ἐπὶ (457c) δικαίου χρείᾳ παρέδωκεν, ὁ
δ' ἐναντίως χρῆται. τὸν οὖν οὐκ ὀρθῶς χρώμενον μισεῖν δίκαιον καὶ ἐκβάλλειν
καὶ ἀποκτεινύναι ἀλλ' οὐ τὸν διδάξαντα.
(Σωκράτης)
οἶμαι, ὦ Γοργία, καὶ σὲ ἔμπειρον εἶναι πολλῶν λόγων καὶ καθεωρακέναι ἐν
αὐτοῖς τὸ τοιόνδε, ὅτι οὐ ῥᾳδίως δύνανται περὶ ὧν ἂν ἐπιχειρήσωσιν διαλέγεσθαι
διορισάμενοι πρὸς ἀλλήλους καὶ μαθόντες καὶ διδάξαντες ἑαυτούς, (457d) οὕτω
διαλύεσθαι τὰς συνουσίας, ἀλλ' ἐὰν περί του ἀμφισβητήσωσιν καὶ μὴ φῇ ὁ
ἕτερος τὸν ἕτερον ὀρθῶς λέγειν ἢ μὴ σαφῶς, χαλεπαίνουσί τε καὶ κατὰ φθόνον
οἴονται τὸν ἑαυτῶν λέγειν, φιλονικοῦντας ἀλλ' οὐ ζητοῦντας τὸ προκείμενον ἐν
τῷ λόγῳ· καὶ ἔνιοί γε τελευτῶντες αἴσχιστα ἀπαλλάττονται, λοιδορηθέντες τε
καὶ εἰπόντες καὶ ἀκούσαντες περὶ σφῶν αὐτῶν τοιαῦτα οἷα καὶ τοὺς παρόντας
ἄχθεσθαι ὑπὲρ σφῶν αὐτῶν, ὅτι τοιούτων ἀνθρώπων ἠξίωσαν (457e) ἀκροαταὶ
γενέσθαι. τοῦ δὴ ἕνεκα λέγω ταῦτα; ὅτι νῦν ἐμοὶ δοκεῖς σὺ οὐ πάνυ ἀκόλουθα
λέγειν οὐδὲ σύμφωνα οἷς τὸ πρῶτον ἔλεγες περὶ τῆς ῥητορικῆς· φοβοῦμαι οὖν
διελέγχειν σε, μή με ὑπολάβῃς οὐ πρὸς τὸ πρᾶγμα φιλονικοῦντα λέγειν τοῦ
καταφανὲς γενέσθαι, ἀλλὰ πρὸς σέ.
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Traduction française :
[457] Et si les élèves, au contraire, usent mal de leur force
et de leur adresse contre l'intention de leurs maîtres,
il ne s'ensuit pas que les maîtres soient mauvais et
responsables, non plus que l'art qu'ils professent, mais
la faute retombe, à mon avis, sur les élèves qui en abusent.
Or, le même raisonnement a lien pour ta rhétorique.
Sans doute l'orateur est, à la vérité, en état de
parler contre tous et sur tout, en sorte qu'il sera plus
propre que personne à persuader en un instant la multitude
sur tel sujet qu'il voudrat. Mais ce n'est pas une
raison pour lui d'enlever aux médecins leur réputation
non plus qu'aux autres artisans, parce qu'il est en son
pouvoir de le faire. Au contraire, il doit faire de la
rhétorique, comme de tout autre genre d'escrime, un
usage conforme à la justice. Si donc un homme, devenu
habile orateur, abuse ensuite de son pouvoir et de son
art pour commettre l'injustice, ce n'est pas celui qui l'a
instruit qu'on doit prendre en aversion et bannir des
villes; car il ne lui avait donné ce talent que pour qu'il
en fit un usage légitime, et celui-ci en fait un usage
tout contraire. C'est donc celui qui abuse de l'art qu'il
est juste de haïr, d'exiler, ou même de condamner à
mort, et non celui qui a donné des leçons.
XII. - SOCRATE. Je pense, Gorgias, que tu as assisté
comme moi à un grand nombre de disputes, et que
tu y as remarqué une chose, c'est que, sur quelque
sujet que les hommes entreprennent de converser, ils
ont bien de la peine à fixer de part et d'autre leurs
idées, et à terminer l'entretien, après l'avoir fait servir
à leur instruction personnelle et à celle des autres.
mais lorsqu'il s'élève entre eux quelque controverse, et
que l'un prétend que l'autre parle avec peu de justesse
on de clarté, ils se fâchent et s'imaginent que c'est
par envie qu'on les contredit ; qu'on parle par esprit
de dispute, et non pour éclaircir la matière proposée.
Quelques-uns finissent par les injures les plus grossières,
et se séparent après avoir dit et entendu des
personnalités si odieuses, que les assistants se font un
reproche d'avoir prêté l'oreille à de pareilles discussions.
A quel propos te préviens-je là-dessus? c'est qu'il
me parait que tu ne parles point à présent d'une manière
conséquente, ni bien assortie à ce que tu as dit
plus haut sur la rhétorique. J'appréhende donc, si je
te réfute, que tu n'ailles te mettre dans l'esprit que
mon intention n'est pas de disputer sur la chose même,
afin qu'elle s'éclaircisse, mais contre toi.
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