Texte grec :
[179] (179a) ἀλλήλους· καὶ μαχόμενοί γ᾽ ἂν μετ᾽ ἀλλήλων οἱ
τοιοῦτοι νικῷεν ἂν ὀλίγοι ὄντες ὡς ἔπος εἰπεῖν πάντας ἀνθρώπους. ἐρῶν γὰρ
ἀνὴρ ὑπὸ παιδικῶν ὀφθῆναι ἢ λιπὼν τάξιν ἢ ὅπλα ἀποβαλὼν ἧττον ἂν δή που
δέξαιτο ἢ ὑπὸ πάντων τῶν ἄλλων, καὶ πρὸ τούτου τεθνάναι ἂν πολλάκις ἕλοιτο.
καὶ μὴν ἐγκαταλιπεῖν γε τὰ παιδικὰ ἢ μὴ βοηθῆσαι κινδυνεύοντι-- οὐδεὶς οὕτω
κακὸς, ὅντινα οὐκ ἂν αὐτὸς ὁ Ἔρως ἔνθεον ποιήσειε πρὸς ἀρετήν, ὥστε ὅμοιον
εἶναι τῷ ἀρίστῳ φύσει. (179b) καὶ ἀτεχνῶς, ὃ ἔφη Ὅμηρος, μένος ἐμπνεῦσαι
ἐνίοις τῶν ἡρώων τὸν θεόν, τοῦτο ὁ Ἔρως τοῖς ἐρῶσι παρέχει γιγνόμενον παρ᾽
αὑτοῦ.
VII. Καὶ μὴν ὑπεραποθνήσκειν γε μόνοι ἐθέλουσιν οἱ ἐρῶντες, οὐ μόνον ὅτι
ἄνδρες, ἀλλὰ καὶ αἱ γυναῖκες. τούτου δὲ καὶ ἡ Πελίου θυγάτηρ Ἄλκηστις ἱκανὴν
μαρτυρίαν παρέχεται ὑπὲρ τοῦδε τοῦ λόγου εἰς τοὺς Ἕλληνας, ἐθελήσασα μόνη
ὑπὲρ τοῦ αὑτῆς ἀνδρὸς ἀποθανεῖν, ὄντων αὐτῷ πατρός τε (179c) καὶ μητρός· οὓς
ἐκείνη τοσοῦτον ὑπερεβάλετο τῇ φιλίᾳ διὰ τὸν ἔρωτα, ὥστε ἀποδεῖξαι αὐτοὺς
ἀλλοτρίους ὄντας τῷ ὑεῖ καὶ ὀνόματι μόνον προσήκοντας, καὶ τοῦτ᾽ ἐργασαμένη
τὸ ἔργον οὕτω καλὸν ἔδοξεν ἐργάσασθαι οὐ μόνον ἀνθρώποις ἀλλὰ καὶ θεοῖς,
ὥστε πολλῶν πολλὰ καὶ καλὰ ἐργασαμένων εὐαριθμήτοις δή τισιν ἔδοσαν τοῦτο
γέρας οἱ θεοί, ἐξ Ἅιδου ἀνεῖναι πάλιν τὴν ψυχήν, ἀλλὰ τὴν ἐκείνης ἀνεῖσαν
ἀγασθέντες (179d) τῷ ἔργῳ· οὕτω καὶ θεοὶ τὴν περὶ τὸν ἔρωτα σπουδήν τε καὶ
ἀρετὴν μάλιστα τιμῶσιν. Ὀρφέα δὲ τὸν Οἰάγρου ἀτελῆ ἀπέπεμψαν ἐξ Ἅιδου.
φάσμα δείξαντες τῆς γυναικὸς ἐφ᾽ ἣν ἧκεν, αὐτὴν δὲ οὐ δόντες, ὅτι
μαλθακίζεσθαι ἐδόκει, ἅτε ὢν κιθαρῳδός, καὶ οὐ τολμᾶν ἕνεκα τοῦ ἔρωτος
ἀποθνήσκειν ὥσπερ Ἄλκηστις, ἀλλὰ διαμηχανᾶσθαι ζῶν εἰσιέναι εἰς Ἅιδου,
τοιγάρτοι διὰ ταῦτα δίκην αὐτῷ ἐπέθεσαν, καὶ ἐποίησαν τὸν θάνατον αὐτοῦ ὑπὸ
γυναικῶν (179e) γενέσθαι, οὐχ ὥσπερ Ἀχιλλέα τὸν τῆς Θέτιδος υἱὸν ἐτίμησαν καὶ
εἰς μακάρων νήσους ἀπέπεμψαν, ὅτι πεπυσμένος παρὰ τῆς μητρὸς ὡς
ἀποθανοῖτο ἀποκτείνας Ἕκτορα, μὴ ἀποκτείνας δὲ τοῦτον οἴκαδ᾽ ἐλθὼν γηραιὸς
τελευτήσοι, ἐτόλμησεν ἑλέσθαι βοηθήσας τῷ ἐραστῇ Πατρόκλῳ καὶ
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Traduction française :
[179] et s'ils combattaient ensemble, de tels hommes,
en dépit de leur petit nombre, pourraient
presque vaincre le monde entier. Un amant en effet
aurait moins de honte d'abandonner son rang ou de
jeter ses armes sous les regards de toute l'armée que
sous les regards de celui qu'il aime; il aimerait mieux
mourir mille fois que de subir une telle honte. Quant à
abandonner son ami, ou à ne pas le secourir dans le
danger, il n'y a point d'homme si lâche qu'Eros ne
suffise alors à enflammer de courage au point d'en faire
un vrai héros ; et vraiment, ce que dit Homère, que «le
dieu soufflait la vaillance à certains héros», Eros le
fait de lui-même à ceux qui aiment.
- Il est certain que les amants seuls savent
mourir l'un pour l'autre, et je ne parle pas seulement
des hommes, mais aussi des femmes. La fille de Pélias,
Alceste, en fournit à la Grèce un exemple probant :
seule elle consentit à mourir pour son époux, alors qu'il
avait son père et sa mère, et son amour dépassa de si
loin leur tendresse qu'elle les fit paraître étrangers à
leur fils et qu'ils semblèrent n'être ses parents que de
nom ; et sa conduite parut si belle non seulement aux
hommes, mais encore aux dieux qu'elle lui valut une
faveur bien rare. Parmi tant d'hommes, auteurs de tant
de belles actions, on compterait aisément ceux dont les
dieux ont rappelé l'âme de l'Hadès ; ils rappelèrent
pourtant celle d'Alceste par admiration pour son
héroïsme : tant les dieux mêmes estiment le dévouement
et la vertu qui viennent de l'amour!
Au contraire, ils renvoyèrent de l'Hadès Orphée, fils
d'Oeagros, sans rien lui accorder, et ils ne lui montrèrent
qu'un fantôme de la femme qu'il était venu
chercher, au lieu de lui donner la femme elle-même,
parce que, n'étant qu'un joueur de cithare, il montra
peu de courage et n'eut pas le coeur de mourir pour son
amour, comme Alceste, et chercha le moyen de pénétrer
vivant dans l'Hadès ; aussi les dieux lui firent payer
sa lâcheté et le firent mettre à mort par des femmes. Au
contraire, ils ont honoré Achille, fils de Thétis, et l'ont
envoyé dans les îles des Bienheureux parce que,
prévenu par sa mère qu'il mourrait s'il tuait Hector, et
qu'il reverrait son pays s'il ne le tuait pas, et y finirait sa vie,
chargé d'années, il préféra résolument secourir son amant, Patrocle,
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