[6,53] Εἶτ´ οἶμαι φύρων αἱρέσεις αἱρέσεσι καὶ μὴ ἐπισημειούμενος
ὅτι τάδε μὲν ἄλλης αἱρέσεώς ἐστι τάδε δὲ ἄλλης, τὰ
πρὸς Μαρκίωνα ὑφ´ ἡμῶν ἀπορούμενα προφέρει, τάχα καὶ
τούτων παρακούσας ἀπό τινων εὐτελῶς καὶ ἰδιωτικῶς
ἐγκαλούντων λόγῳ, οὐ μὴν πάνυ συνετῶς. Ἐκτιθέμενος οὖν
τὰ κατὰ Μαρκίωνος λεγόμενα καὶ μὴ ἐπισημειωσάμενος ὅτι
πρὸς αὐτὸν λέγει φησί· Τί δὲ λάθρα πέμπει καὶ διαφθείρει
τὰ τούτου δημιουργήματα; Τί δὲ εἰσβιάζεται κρύφα καὶ
παραπείθει καὶ πλανᾷ; Τί δὲ τοὺς ὑπὸ τούτου κατεγνωσμένους
ἢ κατηραμένους, ὥς φατε, ψυχαγωγεῖ καὶ δίκην
ἀνδραποδιστοῦ τινος ὑπεξάγει; Τί δὲ ἀποδιδράσκειν ἀπὸ
τοῦ κυρίου διδάσκει; Τί δὲ φεύγειν τὸν πατέρα; Τί δ´ αὐτὸς
εἰσποιεῖται, μὴ συγχωροῦντος τοῦ πατρός; Τί δ´ ἐπαγγέλλεται
τῶν ἀλλοτρίων εἶναι πατήρ; Καὶ ἐπιφέρει γε αὐτοῖς
οἱονεὶ θαυμαστικῶς τό· Σεμνός γε ὁ θεὸς τῶν παρ´ ἄλλῳ
καταδίκων ἁμαρτωλῶν καί ἀκλήρων καί, ὡς αὐτοὶ λέγουσι,
σκυβάλων ἐπιθυμῶν εἶναι πατήρ καὶ ὅν γε ἐξέπεμψεν
αὐτοὺς ὑπεξάξοντα, τοῦτον ἁλόντα ἐκδικῆσαι μὴ δυνάμενος.
Ἑξῆς δὲ τούτοις ὡσπερεὶ πρὸς ἡμᾶς τοὺς ὁμολογοῦντας
οὐκ ἀλλοτρίου τινὸς εἶναι καὶ ξένου θεοῦ τόνδε τὸν κόσμον,
τοιαῦτά φησιν· Εἰ δὲ αὐτοῦ ταῦτ´ ἔστιν ἔργα, πῶς μὲν
κακὰ ὁ θεὸς ἐποίει; Πῶς δὲ πείθειν καὶ νουθετεῖν ἀδυνατεῖ;
Πῶς δ´ ἐπ´ αὐτοῖς ἀχαρίστοις καὶ πονηροῖς γενομένοις
μεταμέλει καὶ τὴν ἑαυτοῦ τέχνην μέμφεται καὶ μισεῖ καὶ
ἀπειλεῖ καὶ φθείρει τὰ ἴδια ἔκγονα; Ἢ ποῖ ποτε ὑπεξάγει
τοῦ κόσμου τοῦδε ὃν ἐποίησεν αὐτός; Δοκεῖ δή μοι καὶ
ἐν τούτοις μὴ σαφηνίζων, τίνα ἐστὶ τὰ κακά, καίτοι γε καὶ
ἐν Ἕλλησι πολλῶν αἱρέσεων γενομένων περὶ ἀγαθῶν καὶ
κακῶν, συναρπάζειν ὡς ἀκόλουθον ἡμῖν, τοῖς φάσκουσιν
ἔργα τοῦ ἐπὶ πᾶσι θεοῦ εἶναι καὶ τόνδε τὸν κόσμον, τὸ
καθ´ ἡμᾶς κακῶν εἶναι ποιητὴν τὸν θεόν.
Ἐχέτω μὲν οὖν ὅπως ποτὲ ἔχει τὰ περὶ τῶν κακῶν,
πότερον ὁ θεὸς αὐτὰ πεποίηκεν ἢ μή, ἀλλ´ ἐκ παρακολουθήσεως
γεγένηται τῆς πρὸς τὰ προηγούμενα· θαυμάζω δὲ εἰ
μὴ ὅπερ ἡμῖν, τοῖς φάσκουσιν ἔργα εἶναι τοῦ ἐπὶ πᾶσι θεοῦ
καὶ τόνδε τὸν κόσμον, οἴεται ἀκολουθεῖν περὶ τοῦ τὸν θεὸν
τὰ κακὰ πεποιηκέναι, ἀκολουθεῖ ὅσον ἐφ´ οἷς λέγει καὶ αὐτός.
Εἴποι γὰρ ἄν τις πρὸς τὸν Κέλσον· εἰ αὐτοῦ ταῦτ´ ἔστιν
ἔργα, πῶς μὲν κακὰ ὁ θεὸς ἐποίει; Πῶς δὲ πείθειν καὶ
νουθετεῖν ἀδυνατεῖ; Κακία δὲ ἡ μεγίστη ἐν λόγοις ἐστίν,
ὅτε ἐγκαλεῖ τις τοῖς ἑτεροδόξοις περί τινων δογμάτων ὡς
οὐχ ὑγιῶν, πολλῷ πρότερον αὐτὸς ἔχων τὰ ἐγκλήματα ἐν
τοῖς ἰδίοις δόγμασιν.
| [6,53] Ensuite, mêlant et confondant, autant que j'en puis juger, hérésie avec
hérésie, sans marquer qu'il prend ceci de l'une, et cela de l'autre, il
produit ce que nous objectons à Marcion ; et comme ceux de qui il le tient
ne l'ont pas peut-être bien instruit, il veut réfuter la réfutation même;
mais il le fait d'une manière si basse et si peu digne d'un homme de
lettres, qu'il n'y saurait paraître moins de lumières. Voici donc comme il
rapporte nos arguments contre Marcion; mais sans avertir que c'est lui
qu'il attaque: Pourquoi, dit-il, envoie-t-il secrètement pour détruire les
ouvrages du Créateur? Pourquoi y fait-il des entreprises secrètes,
subornant et séduisant ceux qu'il peut? Pourquoi flatte-t-il ceux que leur
Créateur a condamnés et maudits, comme vous parlez ? Pourquoi les
enlève-t-il comme un plagiaire ? Pourquoi leur apprend-il à se dérober à
leur maître comme des esclaves fugitifs ? Pourquoi leur persuade-t-il de
fuir leur père? Pourquoi les adopte-t-il lui-même sans que le père y
consente, affectant de prendre le nom de père pour des enfants qui sont à
un autre? Sur quoi il s'écrie par forme d'admiration : Voilà, certes, un
Dieu bien digne du nom qu'il porte, dont l'ambition est que des criminels,
condamnés par un autre que lui, de misérables bannis qui, selon eux-mêmes,
ne doivent être regardés que comme des excréments, le reconnaissent pour
leur père ? Un Dieu qui n'a pas le pouvoir de prendre et de châtier son
envoyé, qui se rebelle contre lui ! Continuant après cela comme s'il
parlait à nous qui avouons que ce monde n'est pas l'ouvrage d'un autre
dieu, d'un dieu étranger : Si c'est lui, dit-il, qui ait fait toutes ces
œuvres, comment, étant Dieu, en a-t-il fait de mauvaises ? Comment est-il
incapable d'exhorter et de persuader ? Comment est-il sujet à se repentir,
ne voyant que de l'ingratitude et de la méchanceté en ceux qu'il avait
faits? Comment est-il réduit à se plaindre et à se vouloir mal de son art,
à menacer ses propres enfants et à les détruire ? ou s'il ne les détruit
pas, en quel lieu peut-il les transporter hors de ce monde qu'il a fait
lui-même? Je ne crois pas qu'il se mette en peine de nous expliquer ici
quelle est la nature du mal, bien que les Grecs mêmes, selon qu'ils ont
été partagés en diverses sectes, aient eu des opinions différentes
touchant les biens et les maux. Il se contente de supposer, comme une
suite de notre créance, de nous qui disons que ce monde est l'ouvrage du
grand Dieu ; il suppose, dis-je, que, selon nous, Dieu est l'auteur du mal
; mais que Dieu en soit l'auteur ou qu'il ne le soit pas, ce n'est
toujours que par une suite et par une dépendance du principal dessein. Je
suis fort trompé, au reste, si, comme de ce que nous dirons que, ce monde
est l'ouvrage du grand Dieu, Celse veut qu'il s'ensuive que Dieu soit
l'auteur du mal, on ne peut pas aussi tirer la même conséquence des
sentiments auxquels il souscrit; car on peut lui dire tout de même : Si,
selon vous, c'est Dieu qui a fait toutes ces œuvres, comment en a-t-il
fait de mauvaises ? Comment est-il incapable d'exhorter et de persuader ?
Il ne se peut rien de plus inexcusable dans la dispute, que de reprocher à
ses adversaires que leurs dogmes sont pernicieux, pendant que les dogmes
qu'on tient sont beaucoup plus sujets aux mêmes reproches.
|