[6,42] Ἑξῆς δὲ τούτοις ἀπὸ ἄλλης ἀρχῆς ὁ Κέλσος τοιαῦτά
φησι καθ´ ἡμῶν· Σφάλλονται δὲ ἀσεβέστατα ἄττα καὶ περὶ
τήνδε τὴν μεγίστην ἄγνοιαν, ὁμοίως ἀπὸ θείων αἰνιγμάτων
πεπλανημένην, ποιοῦντες τῷ θεῷ ἐναντίον τινά, διάβολόν
τε καὶ γλώττῃ ἑβραίᾳ Σατανᾶν ὀνομάζοντες τὸν αὐτόν.
Ἄλλως μὲν οὖν παντελῶς θνητὰ ταῦτα καὶ οὐδ´ ὅσια λέγειν,
ὅτι δὴ ὁ μέγιστος θεός, βουλόμενός τι ἀνθρώπους ὠφελῆσαι,
τὸν ἀντιπράσσοντα ἔχει καὶ ἀδυνατεῖ. Ὁ τοῦ θεοῦ παῖς
ἄρα ἡττᾶται ὑπὸ τοῦ διαβόλου, καὶ κολαζόμενος ὑπ´ αὐτοῦ
διδάσκει καὶ ἡμᾶς τῶν ὑπὸ τούτῳ κολάσεων καταφρονεῖν,
προαγορεύων ὡς ἄρα ὁ Σατανᾶς καὶ αὐτὸς ὁμοίως φανεὶς
ἐπιδείξεται μεγάλα ἔργα καὶ θαυμαστά, σφετεριζόμενος τὴν
τοῦ θεοῦ δόξαν· οἷς οὐ χρῆναι βουκοληθέντας ἀποτρέπεσθαι
πρὸς ἐκεῖνον, ἀλλὰ μόνῳ πιστεύειν ἑαυτῷ. Ταῦτα μέν γε
ἐστὶν ἄντικρυς ἀνθρώπου γόητος, ἐργολαβοῦντος καὶ
προφυλαττομένου τοὺς ἀντιδοξοῦντάς τε καὶ ἀνταγείροντας.
Εἶθ´ ἑξῆς τούτοις ἐκτίθεσθαι βουλόμενος τὰ αἰνίγματα,
ὧν οἴεται παρακηκοότας ἡμᾶς τὰ περὶ τοῦ Σατανᾶ εἰσάγειν,
φησὶ θεῖόν τινα πόλεμον αἰνίττεσθαι τοὺς παλαιούς, Ἡράκλειτον
μὲν λέγοντα ὧδε· «Εἰδέναι δὲ χρὴ τὸν πόλεμον
ἐόντα ξυνὸν καὶ δίκην ἔριν, καὶ γινόμενα πάντα κατ´ ἔριν
καὶ χρεών»· Φερεκύδην δὲ πολλῷ ἀρχαιότερον γενόμενον
Ἡρακλείτου μυθοποιΐαν, στρατείαν στρατείᾳ παραταττομένην,
καὶ τῆς μὲν ἡγεμόνα Κρόνον διδόναι τῆς ἑτέρας δὲ
Ὀφιονέα, προκλήσεις τε καὶ ἁμίλλας αὐτῶν ἱστορεῖν,
συνθήκας τε αὐτοῖς γίνεσθαι, ἵν´ ὁπότεροι αὐτῶν εἰς τὸν
Ὠγηνὸν ἐμπέσωσι, τούτους μὲν εἶναι νενικημένους, τοὺς
δ´ ἐξώσαντας καὶ νικήσαντας τούτους ἔχειν τὸν οὐρανόν.
Τούτου δὲ τοῦ βουλήματός φησιν ἔχεσθαι καὶ τὰ περὶ τοὺς
Τιτᾶνας καὶ Γίγαντας μυστήρια, θεομαχεῖν ἀπαγγελλομένους,
καὶ τὰ παρ´ Αἰγυπτίοις περὶ Τυφῶνος καὶ Ὥρου καὶ Ὀσίριδος.
Εἶτ´ ἐκθέμενος τὰ τοιαῦτα καὶ μὴ παραμυθησάμενος, τίνα
τρόπον ἐκεῖνα μὲν λόγου ἔχεται κρείττονος ταῦτα δέ ἐστιν
ἐκείνων παρακούσματα, διαλοιδορεῖται ἡμῖν λέγων μὴ εἶναι
ἐκεῖνα ὅμοια τοῖς περὶ διαβόλου δαίμονος ἤ—ὅπερ φασὶν
ἀληθέστερον—ἀνθρώπου γόητος ἀντιδοξοῦντος. Οὕτω δ´
ἀκούει καὶ Ὁμήρου, ὡς τὰ παραπλήσια τῷ Ἡρακλείτῳ καὶ
Φερεκύδῃ καὶ τοῖς τὰ περὶ Τιτᾶνας καὶ Γίγαντας μυστήρια
εἰσάγουσιν αἰνισσομένου ἐν τούτοις τοῖς τοῦ Ἡφαίστου
πρὸς τὴν Ἥραν λόγοις, φάσκοντος·
Ἤδη γάρ με καὶ ἄλλοτ´ ἀλεξέμεναι μεμαῶτα
ῥῖψε ποδὸς τεταγὼν ἀπὸ βηλοῦ θεσπεσίοιο,
καὶ τοῖς τοῦ Διὸς πρὸς τὴν Ἥραν οὕτως·
Ἦ οὐ μέμνης´ ὅτε τ´ ἐκρέμω ὑψόθεν, ἐκ δὲ ποδοῖιν
ἄκμονας ἧκα δύω, περὶ χερσὶ δὲ δεσμὸν ἴηλα
χρύσεον ἄρρηκτον; Σὺ δ´ ἐν αἰθέρι καὶ νεφέλῃσιν
ἐκρέμω· ἠλάστεον δὲ θεοὶ κατὰ μακρὸν Ὄλυμπον,
λῦσαι δ´ οὐκ ἐδύναντο παρασταδόν· ὃν δὲ λάβοιμι,
ῥίπτασκον τεταγὼν ἀπὸ βηλοῦ, ὄφρ´ ἂν ἵκοιτο
γῆν ὀλιγηπελέων·
καὶ διηγούμενός γε τὰ ὁμηρικὰ ἔπη φησὶ λόγους εἶναι τοῦ
θεοῦ πρὸς τὴν ὕλην τοὺς λόγους τοῦ Διὸς πρὸς τὴν Ἥραν,
τοὺς δὲ πρὸς τὴν ὕλην λόγους αἰνίττεσθαι ὡς ἄρα ἐξ ἀρχῆς
αὐτὴν πλημμελῶς ἔχουσαν διαλαβὼν ἀναλογίαις τισὶ συνέδησε
καὶ ἐκόσμησεν ὁ θεός, καὶ ὅτι τοὺς περὶ αὐτὴν δαίμονας,
ὅσοι ὑβρισταί, τούτους ἀπορριπτεῖ κολάζων αὐτοὺς τῇ
δεῦρο ὁδῷ. Ταῦτα δὲ τὰ Ὁμήρου ἔπη οὕτω νοήσαντα τὸν
Φερεκύδην φησὶν εἰρηκέναι τό· «Κείνης δὲ τῆς μοίρας
ἔνερθέν ἐστιν ἡ ταρταρίη μοῖρα· φυλάσσουσι δ´ αὐτὴν
θυγατέρες Βορέου Ἅρπυιαί τε καὶ Θύελλα, ἔνθα Ζεὺς
ἐκβάλλει θεῶν ὅταν τις ἐξυβρίσῃ.» Τῶν τοιούτων δέ φησιν
ἔχεσθαι νοημάτων καὶ τὸν περικαλλῆ τῆς Ἀθηνᾶς πέπλον
ἐν τῇ πομπῇ τῶν Παναθηναίων ὑπὸ πάντων θεωρούμενον.
Δηλοῦται γάρ, φησίν, ἀπ´ αὐτοῦ ὅτι ἀμήτωρ τις καὶ ἄχραντος
δαίμων ἐπικρατεῖ θρασυνομένων τῶν γηγενῶν.
Ἀποδεξάμενος δὲ τὰ Ἑλλήνων πλάσματα ἐπιλέγει
κατηγορῶν τῶν ἡμετέρων τοιαῦτα, ὅτι τὸ θεοῦ υἱὸν ὑπὸ
διαβόλου κολάζεσθαι καὶ ἡμᾶς διδάσκει, ὡς ἂν ὑπὸ τοῦ
αὐτοῦ κολαζόμενοι καρτεροῖμεν. Καὶ ταῦτά γ´ ἀπάντῃ
καταγέλαστα· ἐχρῆν γὰρ οἶμαι κολάσαι τὸν διάβολον ἀλλ´
οὐ τοῖς ὑπ´ αὐτοῦ διαβεβλημένοις ἀνθρώποις ἀπειλεῖν.
| [6,42] Voici une nouvelle accusation que Celse puise à une autre source. Ils ont
aussi, dit- il, en parlant de nous, des erreurs pleines d'impiété, où ils
sont tombés par une suite de leur extrême ignorance, qui leur a encore
fait mal prendre les énigmes dont on couvre les choses divines; et ils
veulent que Dieu ait un adversaire qu'ils nomment le diable, ou, en
hébreu, Satan, ce qui est une pensée très injurieuse à la Divinité, et qui
la réduit à la condition des êtres mortels. Le grand Dieu, voulant faire
du bien aux hommes, trouve donc un ennemi qui lui résiste et qui l'en
empêche. Le Fils de Dieu est donc vaincu par le diable, et les peines
qu'il souffre sont des enseignements qu'il nous donne de mépriser celles
que son vainqueur nous pourrait faire souffrir comme à lui ; car il nous
avertit que Satan devait aussi, à son tour, paraître au monde et y faire
de grandes et de surprenantes merveilles, s'appropriant la gloire de Dieu,
mais que, sans nous y arrêter, nous devions demeurer fermes dans le
dessein de rejeter ce nouveau venu, et ne croire jamais que lui seul qui
nous donnait cet avis. Ne sont-ce pas là évidemment les paroles d'un
imposteur, qui prend toutes les précautions qu'il peut pour prévenir ceux
qui voudraient introduire des dogmes contraires aux siens et s'établir à
son préjudice ? Voulant ensuite rapporter ces énigmes d'où il prétend que
nous avons pris mal à propos ce que nous disons de Satan, Celse ajoute :
Les anciens parlent énigmatiquement d'une certaine guerre divine.
Héraclite le fait en ces termes : S'il faut dire qu'il y ait une guerre et
une discorde générale, et que tout se fasse et se gouverne par cette
dissension. Phérécyde, beaucoup plus ancien qu'Héraclite, représente, dans
une fable mystérieuse, deux armées ennemies, dont l'une a pour chef
Saturne, et l'autre Ophionée : il raconte leurs défis et leurs combats
suivis de cette convention mutuelle, que celui des deux partis qui serait
repoussé dans l'Océan se confesserait vaincu; et que les autres qui y
auraient précipité leurs ennemis, demeureraient, comme vainqueurs, les
maîtres du ciel. L'histoire des Titans et des Géants, qui firent la guerre
aux dieux, renferme de semblables mystères, aussi bien que celles du
Typhon, de l'Horus et de l'Osiris des Égyptiens. Après avoir ainsi
rapporté ces choses, sans se donner la peine de les expliquer, pour faire
voir qu'elles ont un sens bien plus sublime, et que nous les avons mal
copiées, il recommence à nous dire des injures. Ce ne sont pas là, dit-il,
de ces contes que l'on fait du diable ou du démon, qui, selon la vérité,
est plutôt un autre imposteur qui veut établir une doctrine contraire. Il
joint encore Homère à Héraclite, à Phérécyde et à ceux qui nous parlent
des Titans et des Géants, et il prétend que ces vers de Vulcain à Junon
n'aient pas un sens moins mystérieux :
"Il me prit mal un jour d'épouser ta querelle,
Que saisi par un pied pour tout fruit de mon zèle,
J'éprouvai ce que peut Jupiter irrité,
Et du plus haut des cieux je fus précipité.
Ni ces autres de Jupiter à Junon,
il t'en doit souvenir, quand du ciel suspendue
Et par ton propre poids dans les airs étendue,
Tu me vis l'attacher deux enclumes aux pieds.
Des nœuds d'or sur tes mains étroitement liés,
A l'épreuve du temps portaient toute la masse.
Les dieux autour de loi déploraient la disgrâce ;
Mais pour le délivrer nul n'était assez fort :
Et qui pour ton secours hasardait quelque effort,
bras, ce même bras qui lance le tonnerre,
Le jetait demi-mort du haut des cieux en terre".
Ce qu'il explique de la sorte : Ces paroles de Jupiter à Junon, dit-il, ce
sont les paroles de Dieu à la matière, et cela veut dire que Dieu, au
commencement, ayant trouvé la matière toute brouillée et toute difforme,
il lui avait donné de l'ordre et de l'ornement par la justesse des liens,
dont il en avait joint les parties; et que pour punir les démons, qui
s'occupaient à y entretenir le désordre, il les avait précipités dans ces
bas lieux. Phérécyde prenait en ce sens les vers d'Homère, lorsqu'il
disait : Au-dessous de cette région est la région du Tartare, dont la
garde est commise aux Harpies et à la Tempête, filles de Borée; et c'est
là que Jupiter jette les dieux qui veulent causer du trouble. Les mêmes
choses sont encore représentées par le voile de Minerve, que l'on expose
aux yeux du public, dans la pompe des jeux panathénaïques : car les
figures qu'on y voit signifient qu'il y a une divinité sans mère et sans
alliance, qui réprime l'audace des géants nés de la terre. Après avoir
ainsi applaudi aux fictions des Grecs, il ajoute, en se moquant de nous :
Mais qu'y a-t-il de plus ridicule que de dire que le Fils de Dieu, par les
peines que le diable lui fait souffrir, nous enseigne à subir
courageusement celles que le diable nous pourrait faire souffrir à
nous-mêmes? Il y avait bien plus de justice, ce me semble, de punir ce
calomniateur, que de dénoncer des peines et des supplices aux personnes
qui seraient exposées à ses calomnies.
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